En commentaire de ma chronique du 27 mai 2021 Mémoire d’Outre-Tombe de Michel Rocard sa déclaration censurée sur le rôle de la France au Rwanda… j’ai reçu un commentaire dont l’accroche : Cher camarade, m’a inspiré celle-ci.
Au P.S., encarté on se devait de se donner du camarade et de se tutoyer. Ça m’a toujours mis mal-à l’aise, ça sonnait faux, et le peu de temps 1982-83 où j’ai cotisé, avant et après je fus un sympathisant participant à la CNA (Commission Nationale Agricole du PS), l’esprit de camaraderie dans la section du XIIIe Ouest, celle de Paul Quilès, ne m’a pas sautée aux yeux. Je l’ai d’ailleurs quitté car, dans la section, pour cette raison, j’en avais ma claque de tous ces militants qui, pour les plus jeunes, ne rêvaient que d’être élus, pour les boomers dévidaient leur acrimonie. Par-dessus le marché la section était verrouillée par le couple Quilès, j’étais tricard vu mon rocardisme. Ce que j’ai aimé lors de ce bref passage fut de coller des affiches. Anecdote : j'ai peu usité le camarade et, si j'ai tutoyé Louis Mermaz, j'ai toujours vouvoyé Michel Rocard, ce que pratiquait Mermaz avec Mitterrand.
Bref, ce brave homme m’a de plus stupéfié en déclarant : « j'ai, moi, une vénération béate, non pour Michel Rocard, mais pour Jean Poperen et ce depuis 1969. Et tu connais sûrement le mot de Poperen sur Rocard, "Rocard d'Estaing" ! »
Ben voyons, mon colon, tout l’esprit de camaraderie des fameux courants du PS, et Jean Poperen était la tête de file de l’un d’eux.
Sans ironiser le dit Poperen a laissé une trace indélébile dans notre histoire de France. L'un de ses adeptes, Jean-Marc Ayrault, alors élu de Saint-Herblain, a eu son heure grâce au capitaine pédalo, le naufrageur du PS des camarades, avant de tomber dans l'oubli.
« Homme de convictions dont le goût du débat d'idées allait souvent avec celui de la polémique: à l'égard de ses adversaires de droite, vis-à-vis de ses anciens camarades communistes, mais aussi à l'encontre de ses amis du Parti socialiste qu'il avait rejoint en 1971, au moment du congrès d'Epinay. Ne lança-t-il pas un jour le célèbre «Rocard d'Estaing» quand, en 1979, ses options le conduisirent à en découdre avec celui qu'il avait pourtant longtemps fréquenté dans des combats communs, depuis la création du PSU? »
« Né à Angers, le 9 janvier 1925, «né à gauche» comme il aimait à le dire - son père, instituteur, se revendiquait de la culture anarcho-syndicaliste - Jean Poperen participa aux combats de la Résistance et donna alors son adhésion au Parti communiste français. Agrégé d'histoire en 1947, passionné de Révolution française - il signa notamment un ouvrage sur Robespierre - il fut dirigeant des Etudiants communistes, avant de prendre, petit à petit des distances avec le PCF - notamment à partir de 1956, lors de l'intervention soviétique à Budapest: il le quitta en 1958, déclarant alors: «J'ai adhéré au PC parce que j'attendais le grand chambardement. La façon dont le PC a avalé le coup de force de De Gaulle m'a guéri à jamais»...
« Pour Jean Poperen, la gauche est un tissu unitaire qui s'étend du coeur du Parti communiste au vieux jacobinisme républicain de la SFIO en passant par la nouvelle gauche née de la guerre d'Algérie. Dans ce tissu unitaire, un fil rouge : la refondation du rôle central de la démocratie. Cette intuition l'aura conduit à une longue odyssée dans le mouvement socialiste. Mais elle se fondait d'abord sur l'Iliade d'un jeune résistant communiste fidèle à la tradition française du pluralisme et intransigeant dans sa défense du respect des autres.
C'est ce qui fait le legs si précieux de Jean Poperen aujourd'hui : on aimerait savoir ce qu'il aurait pensé d'une époque de si grande confluence ou, précisément, parce que les cartes se redistribuent, la première exigence du politique devrait résider dans l'absolue rigueur des choix et la recherche de ce langage pédagogique, celui-là même qu'avaient inventé nos instituteurs et qui est l'enveloppe nécessaire de l'idée démocratique dans notre République.
« Nous ne pouvons qu'être frappés par la rapide dissolution des identités politiques dans les démocraties de l'Occident »
Alexandre Adler le 22/10/2007
Pour ceux qui l’ont oublié, et ils doivent être nombreux, le socle électoral du PS c’était les profs de l’Education Nationale :
- André Henry, l'ancien instituteur devenu secrétaire général de l'influente Fédération de l'Education nationale, est ICI https://www.marianne.net/politique/retrouve-le-ministre-du-temps-libre-de-1981-et-voici-ce-qu-il-pense-de-hamon nommé dans le premier gouvernement Mauroy 22 mai 1981, Ministre du Temps Libre. Il ne survivra pas au tournant de la rigueur. Exit !
- Le grand SPULEN le grand service public unifié et laïc de l’éducation nationale lui ne survivra pas à la grande manif des cathos à Paris. Exit ce brave Savary. ICI
Mitterrand ne goûtait guère Jean Poperen, il ne fut que Ministre des Relations avec le Parlement de mai 1988 à avril 1992. ICI
Jean Poperen, minoritaire pour l'éternité. ICI
M. Claude Poperen : une fidélité déchirée
Le Monde
Publié le 28 janvier 1987
Des deux Poperen, le plus ouvert n'est peut-être pas celui qu'on croit. Jean et Claude ont en effet milité ensemble aux Jeunesses communistes puis au Parti, mais Jean devait être exclu en 1967 pour devenir plus tard le numéro deux du PS et incarner dans cette formation le culte unitaire et l'antisoviétisme. Claude, lui, a fait toute sa carrière au PCF, en passant de 1956 à 1967 par la CGT-Renault.
Né le 22 avril 1931 à Angers, membre des Jeunesses communistes dès l'âge de quatorze ans, militant au PC dès 1949, responsable syndical ensuite, son ascension commencera véritablement en 1967, date à laquelle il entre comme membre suppléant au comité central, à l'occasion du dix-neuvième congrès. Trois ans plus tard, il en deviendra titulaire et entrera au bureau politique, où il se verra confier le poste clé des fédérations.
C'est aussi un vieux compagnon de M. Marchais, d'autant plus fidèle qu'il se voulait lui-même un farouche défenseur du centralisme démocratique, respectueux de la hiérarchie du parti. Ses ennuis vont commencer en 1984, lors de la préparation du vingt-cinquième congrès. Chargé par la direction d'analyser le résultat des élections européennes de 1984, il présente un premier rapport sans complaisance. Dans ce texte, Claude Poperen évalue à sa juste mesure l'étendue des dégâts électoraux enregistrés par le PC et juge que ce recul n'était pas inévitable. C'est en fait une analyse critique de la direction qu'il présente (1), lui reprochant à l'occasion d'avoir davantage cherché à combattre le PS qu'à affirmer l'identité communiste. Il proposait à la direction de reconnaitre ses insuffisances, de pousser sa réflexion sur la société française et de ne pas reculer devant l'analyse du fonctionnement du parti. Enfin, il évoquait la nécessité de modifier la composition du bureau politique, et pas seulement, précisait-il, le poste de secrétaire général.
L'imprimatur lui fut refusé et il dut réécrire son rapport. Mais il n'était pas pour autant assimilé au courant rénovateur, ce qui lui valut sans doute d'être réélu lors du vingt-cinquième congrès au bureau politique. Mais le secteur dont il s'occupait lui est retiré, celui de la santé et de la sécurité sociale lui est confié. A l'occasion des élections législatives de 1986, M. Poperen s'abstint, lors du vote au bureau politique, sur le texte analysant le résultat des élections au soir de la consultation.
Homme de terrain et d'appareil, affable et d'une grande gentillesse, Claude Poperen avait courageusement accentué son désaccord avec la direction de son parti, la mort dans l'âme, au cours de l'année 1986. (1) Le texte a été publié intégralement dans le livre de Michel Naudy : PCF, le suicide (Albin Michel).
Quant aux frères Dardenne pas sûr que leur came soit du goût de Ciné Papy.
"On est du côté des frères Lumière, du côté de l'enregistrement de la vie" : les frères Dardenne reçoivent le prix Lumière 2020 ICI