La réponse est page 94 :
« Rejeton d’une lignée détachée de ses racines, je n’ai connu de l’Italie que la cuisine de maman. En même temps que les vertus de savoirs universitaires que j’avais à tort jusque-là rejetés en bloc, Sonia m’a appris la langue de mes aïeux et c’est grâce à elle qu’un jour de furetage dans sa bibliothèque, j’abordai aux rivages du prodigieux continent Camilleri dont j’allais tirer bientôt l’essentiel de mes revenus. Entre nécessité de rencontrer mes éditeurs et désir de comploter avec les camarades de la revue Titanic que j’avais fini par fonder avec Francis, j’avais un alibi pour séjourner à Paris, tout comme j’avais une bonne raison de filer à Rome, avec la nécessité de nouer ces contacts directs qui font les bonnes collections de littérature étrangère. »
Page 181
« Après quelques instants de silence, nous avons trouvé des sujets : la littérature française contemporaine, puis très vite moi-même, ma vie, mon œuvre… viva morte e miracoli, comme disent les Italiens : sur ce sujet, j’étais intarissable. Je ne coupai pas à la sempiternelle question que tout citoyen de la Péninsule, un jour ou l’autre, m’a posée : « Mais comment faites-vous pour traduire en français Camilleri ? », et j’y répondis au mieux, en récitant presque mot pour mot un texte disponible sur Internet. »
Trois questions à Serge Quadruppani ICI
par Pierre Benetti
10 septembre 2019
Avec le monde de Vigàta, inspiré de sa Sicile natale, et le personnage phare du commissaire Montalbano, Andrea Camilleri a renouvelé le roman policier et social italien en lui donnant une langue singulière. Il est mort à Rome le 17 juillet dernier. Pour lui rendre hommage, En attendant Nadeau s’entretient avec Serge Quadruppani, qui a traduit en français une trentaine de ses livres.
18 juillet 2019
Andrea Camilleri « Le fascisme est un virus, dont on a cru se débarrasser en pendant le chef par les pieds, mais qui revient depuis des décennies, sous des formes différentes» Ciao maestro ! ICI
La plupart des romans de Camilleri, ceux où le commissaire Montalbano n’est pas présent, sont traduits par Dominique Vittoz. ICI
NOUS AVONS LU « MALDONNES »
le nouveau polar de Serge Quadruppani
paru, le 17 mai 2021
« Je vais vous envoyer mon nouveau polar, mais ce coup-ci, ce serait sympa que vous le lisiez car il y a plein de bouts de moi dedans ! »
Sms de Serge Quadruppani le 10 avril 2021
« Non mais c’est chiant ton livre, on sait pas ce qui est biographique et ce qui est inventé, t’as vraiment suriné à la fourchette un dealer surinamais dans une prison d’Amsterdam ? »
— Bah oui ça c’est vrai ».
SMS de la rédaction de lm à SQ le 11 avril 2021
Critique à lire absolument ICI
Dans les années 70 et jusqu’au milieu des années 80 du siècle dernier, la fêlure de 68 a laissé surgir sur le territoire français et bien au-delà, une minorité active dont je n’ai aucune honte ni fierté particulière à dire que j’en étais. Dans cette population, certains comportements allaient de soi. L’illégalisme en était un : du vol dans les magasins au braquage, le choix des moyens dépendant des capacités de chacun, des milliers de personnes s’efforçaient d’obéir à l’injonction que les situationnistes avaient reprise à Rimbaud : ne travailler jamais. Un principe tout aussi répandu et très peu discuté, c’était le rejet du couple – certains ajoutant « traditionnel » pour justifier une liaison durable. Ce que ce rejet impliquait parfois de mensonges à soi-même et de souffrance, toute une littérature de repentis l’a abondamment documenté, mais le degré d’intensité dans les passions et de beauté dans la rencontre qu’il a entraîné pour des milliers de femmes et d’hommes, on est peu équipé pour le deviner, à présent que les sensibilités sont quadrillées par la psychologie des magazines, le moralisme militant et la pornographie. Une chose est sûre, en tout cas : l’idée de se marier ne pouvait susciter que le rire et la dérision.
Le livre ouvert, on ne l’a plus lâché. Les personnages, l’intrigue, l’action, les descriptions culinaires tout est savoureux et haletant. Des faux papiers, des braquages ratés des braquages réussis, un butin, des coucheries et des histoires d’amour, ce serait donc ça un excellent polar. A cette nuance près que les vies qui s’y croisent et les aventures qui s’y trament ont quelque chose d’autobiographique.
Maldonnes n’est cependant pas une autobiographie. Dedans, il y a bien des « bouts » de Serge Quadruppani, plein même, mais ils se mêlent à d’autres histoires et anecdotes de l’époque et sont même parfois exagérés pour servir l’intrigue. Après son acquittement pour braquage, Georges Nicotra traine Antonin Gandolfo au fin fond de la Normandie pour y déterrer son butin. Dans des bocaux, les liasses de billets enterrées se désagrègent, pourries. Il reste néanmoins de l’or et c’est à partir de là que le récit se noue.
Le cas Nicotra publié par Maurice Nadeau c’est le cousin germain d’Un coupable idéal, Roger Knobelspiess, Maurice Nadeau, 1986
J’ai chroniqué sur lui
27 janvier 2015
L’ami « Moineau » pilier solide des beuveries elbeuviennes, rempart de bistrot…le roman des Écameaux Roger Knobelspiess, Oui, Roger, c’est un bête qu’est devenu intelligent grâce aux livres ICI
À propos de l’évolution de Libé sous July, rue Béranger, j’adore :
« Momo, l’archiviste et la mauvaise conscience de Libération, celui qui n’avait aucun ennemi à gauche mais conservait des dossiers sur les chefs du journal et leurs exploits à l’époque de la Gauche Prolétarienne. Lunettes rafistolées avec un trombone, cheveux aux vents même par temps calme, dentition lacunaire et vêture ostensiblement négligée, son allure contrastait violemment avec la branchitude en train de s’emparer du reste du personnel. » Page 122
« La première des coupures de presse était, bien sûr, de Libération. Avec son sens exquis du jeu de mots laid, le quotidien passé du col Mao au Rotary titrait : « Du plomb dans la balance » et sous-titrait : « L’ex-détenu rebelle devenu indicateur de police abattu chez lui. » Mais c’était comme toujours Le Parisien Libéré qui fournissait le plus de détails sur le fait divers. » page 123
Lire - Serge July : l'ex-gros timonier de Libé ICI