Impression étrange le jour où tu arrives à la page 211 d’un livre que tu lis entre deux autres, tu tombes sur l’évocation d’un fait historique qui s’est déroulé tout prêt de là où tu es né, un lieu que où tu passais à vélo lorsque tu allais te baigner sur la plage de la Normandelière.
C’est comme si tu arpentais avec l’auteur le lieu, en l’occurrence ici une escarmouche des vendéens commandé par un hobereau du coin contre les républicains, tu te repères, tu mets tes pas dans leurs pas, tu vis avec les protagonistes, alors que dans beaucoup de roman tu as du mal à le faire n’ayant pas un GPS dans la tête.
Bref, je lis puis je maraude sur le net pour vérifier si le dénommé Foulques Valère de Coëx a bien existé ?
Aucune trace, en revanche « son château de Brétignolles-sur-Mer pourrait être celui dit de Beaumarchais, voir la vidéo, mais là encore ce n’est pas vérifié.
Au Moyen-âge, Brétignolles fait partie de la baronnie du Brandois qui s'étendait du Jaunay à l'Auzance et qui est communément appelée Pays de Brem. Vers 1450, la famille Mauclère, ancienne chevalerie, fait bâtir un manoir. Au XVIe siècle, les pièces centrales sont utilisées pour édifier un nouveau château. En 1552, la propriété est acquise par un armateur, Robert Bouhier de l'Ecluse, qui s'était enrichi au commerce de la mer. Son fils Vincent Bouhier de l'Ecluse en hérite et fait agrandir le château en faisant construire les ailes. Il y invite Henri IV, son ami, devenu roi de France. Il vint à Beaumarchais avec sa suite et y demeura plusieurs jours. Il logeait dans une chambre qui porte encore aujourd'hui le nom de la "Chambre du Roi".
Je vous offre donc ce texte tiré de Le banquet annuel de la confrérie des fossoyeurs Mathias Enard Actes Sud
« Foulques Valère de Coëx est pris, les armes à la main, le 22 nivôse de l’an 2, non loin de sa demeure, le château de Brétignolles-sur-Mer, après une brève escarmouche au lieu-dit La Chaize-Giraud, en compagnie d’une trentaine de paysans, alors qu’il cherche à rejoindre l’armée de Charrette, victorieuse à la bataille de Saint-Fulgent.
Il vient d’avoir vingt ans. Le vendéen est blessé à la cuisse, es républicains hésitent à l’achever sur place, car ils lui doivent douze morts et autant de blessés, mais le courage de Coëx et son jeune âge force le respect : l’officier bleu le regarde fixement : Coëx est pâle, près de s’évanouir, mais il se tient droit, malgré sa seule jambe valide. Il a un beau visage, aux traits harmonieux, des sourcils fins, très noirs, et un air doux qui contraste avec sa redoutable habileté aux armes. Il serait dommage d’éventrer cette jeunesse. Emmenez-moi ça à Nantes – ils finiront par le pendre, ou par le déchiqueter d’un boulet de canon dans la tripe. Emmenez-moi ça avec toute sa piétaille. Égorgez-en deux ou trois avant, saignez-les comme des porcs à même la chaussée, les autres se tiendront tranquille. Allez, en route. »
Direction : Nantes avec une halte à la Roche.
La prison du Bouffay, la tour du Bouffay la plus fameuse de Nantes.
Ensuite ce sera peut-être une gabarre du sinistre Carrier.
« On enferme cent, deux cents royalistes dans une vieille gabarre, dit le geôlier. On vous rassemble en bas, tous ligotés, tous biens ficelés. On attend la nuit… Puis on coule le bateau. Avec les premiers filets d’eau, les premiers hurlements de terreur montent de la cale. Et on vous entend vous battre, vous arracher bras et jambes pour essayer de vous détacher, vous frapper la tête contre la paroi de bois.
On observe les remous de la Loire, sa noire surface ; les bulles y crèvent, et tout est fini »
Comme dirait les gaulois confinés : « C’était mieux avant ! »