Dans un commentaire sur ma chronique " je suis un être simple " Dominique écrit " il est plus facile de critiquer que de faire... " et j'en conviens. Ceci étant écrit je me permets de lui faire remarquer que depuis plus de cinq ans les responsables du secteur ont été exemplaire dans le domaine décisionnel. Pour ma part je suis condamné à l'écriture - au moins contrairement aux paroles qui volent les écrits restent - et privé de travaux pratiques. Qui puis-je ? Pas grand chose et, comme il y a un temps pour tout, je prépare l'avenir. Dans ma petite vie j'ai beaucoup agi, fait des choix, participé à la décision, décidé aussi, alors je me sens légitime lorsque j'émets, non pas des critiques, mais des doutes sur des projets du type journée nationale des vins de France. " Parler vrai et agir juste..." ç'a vous dit peut-être quelquechose ?
En effet, il y a ceux qui disent et ne font pas, ceux qui font le contraire de ce qu'ils disent, ya ceux qui font sans dire, ya ceux qui ne disent rien et qui ne font rien, bref ce qui compte c'est que l'action se place dans une perspective et le dire c'est la mise en perspective de l'action. Alors c'est bien gentil d'écrire que l'on va faire quelquechose comme la Semaine du Goût : on navigue à vue et surtout, ce qui est plus grave, on poursuit plusieurs buts contradictoires à la fois : séduire les "jeunes urbains désinvestis", sortir le vin de son ghetto mortifère où l'environnement médiatico-politique prohibitionniste le place, redonner confiance et fierté à la filière (c'est dans le brief d'agence) ce qui est la preuve qu'on n'a choisi aucun cap. Trop de com tue la com : ne mélangeons pas tout.
La référence à la Semaine du Goût me va car, étant donné mes cheveux blancs, je l'ai vu naître au temps de Jack le flamboyant et je sais qui la sponsorise : le sucre. Des gens sérieux, efficaces : ils ont fait échec à Coca Cola pendant des années pour l'aspartam, des gens qui alignent des moyens conséquents et qui sont discrets : ce n'est pas la semaine du sucre mais ils soutiennent la consommation de leur produit. Le trop de sucre pour les nutritionnistes est un fléau mais les gens du sucre ne pleurnichent pas parce qu'on ne les aime pas, ils taillent leur route sans bruit. Nous on arrive avec nos gros sabots plein de paille, notre affliction et nos lubies.
Peut-être certains d'entre vous se souviennent-ils de la " Grande Moisson " : un champ de blé sur les Champs Elysées dans les années 90. Un succès phénoménal : un million de personnes ce dimanche ce sont déplacés. J'étais membre du conseil d'administration de l'association organisatrice de la manifestation conçue par le CNJA. La performance de faire pousser du blé sur des claies, de transporter ces claies en une nuit, de les mettre en place était extraordinaire. Pari réussi par les JA, opération financière désatreuse (le président du CNJA de l'époque y a perdu son fauteuil) car en dépit de notre opposition, celle du Ministère de l'Agriculture et de la Ville de Paris pour une fois d'accord, ces jeunes gens ont fait appel à des communicants organisateurs d'évènements : la planche à billets pour du vent ça ils connaissent (on a même eu droit à une musique originale payée mais dont nous n'avons pas vu et entendu la première note). Conséquence : fusil à un coup, puis plus rien...
En dépit de ce que je viens d'écrire je souhaite que l'opération journée nationale enclenche une réelle mobilisation des gens du vin pour fêter le vin dans la ville sur le modèle de Bordeaux fête le vin : va pour Paris fête les vins de France, Londres fête les vins de France, Tokyo fête les vins de France. Entre nous Dominique l'exportation on ne fait pas qu'y songer car primo Londres est la banlieue de Paris et si nous n'allons pas vers la demande elle ne viendra pas à nous. Enfin, je ne pense pas que ce sont des kits pédagogiques dans les galeries marchandes qui vont nous aider à draguer les jeunes urbains désinvestis. Quand j'étais jeune j'évitais de draguer les filles avec mes pinces à vélo...