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3 juillet 2006 1 03 /07 /juillet /2006 10:30

Les magnolias du parc de Cantemerle embaument, je suis en Médoc ce vendredi, invité, ici tout respire une opulence contenue, nette, même le chef de culture à sa plaque, le corps de bâtiment sous le soleil m'impressionne, visite et dégustation du millésime puis nous nous rendons à l'orangerie où Vincent Fabre, le président du Syndicat Médoc et Haut-Médoc, l'homme par qui je suis en ce lieu, va nous exposer le travail entrepris pour mettre en place un système d'agrément qui met le consommateur final au centre des préoccupations de ceux qui font le vin.

Sa modestie dusse-t-elle en souffrir, Vincent Fabre, que je ne connaissais pas avant cette visite, est de ces hommes de conviction qui font bouger les lignes, un de ces rares présidents qui ne brossent pas leurs mandants dans le sens du poils, il aime expliquer, convaincre et agir. Moi ça me plaît et je l'écris. Il parle de la grande mutation de notre viticulture, ce formidable défi, d'un marché en expansion et d'une part de notre production inadaptée aux attentes des consommateurs, que nous devrons relever. Pour ce faire, commencer par le commencement, revenir à la source, à la rigueur d'une production qui respecte son client. Voilà une voix qui devrait être écoutée dans les hautes sphères. Elle rafraîchit et, surtout, elle pousse à revenir à ce qui est pour moi l'essentiel : l'esprit de responsabilité.

Nous sommes allé ensuite au château Lanessan, chez mon contradicteur favori, au temps où il siégeait au Comité National de l'INAO : Hubert Bouteiller. Nous faisons un tour de la propriété dans une belle carriole tirée par deux beaux Mérens. Notre conversation à bâtons rompus nous mène sur des chemins qui m'enchantent. Sans trahir la confidentialité de cet exercice je puis vous dire que, loin des jeux de rôles propres aux enceintes publiques, les hommes retrouvent lucidité et des blocages qui semblaient irrémédiables se fluidifient. Le temps est venu de sortir des estrades. La grande mutation de notre viticulture vaut bien une messe comme le disait Henri IV.

Et puis ce fut la Fête de la Fleur au Jardin Public de Bordeaux, de la belle ouvrage où j'aurais aimé voir instiller un supplément d'âme, le goût de la fête, mais je ne suis qu'un mécréant qui aime le rock, les bulles et le bout de la nuit. A cette réception j'ai serré des mains, conversé avec les uns et les autres, le préfet de région entre autre et je pensais à toutes ces pancartes, hostiles au contournement de Bordeaux, croisées tout au long de cette belle journée. Nos petits génies de la DDE ayant balancé dans la nature un projet avec 6 variantes, un plat de spaghettis dit-on, sans concertation, avec toute la hauteur que confère la supériorité de ceux qui pensent. Désenclavement nécessaire face à la coalition des non. Quel beau chantier pour un médiateur. J'aime dénouer les sacs de noeuds !

Merci encore à Vincent Fabre et à tous ceux avec qui j'ai enrichi ma pelotte au cours de cette belle journée médocaine où le vin était bon et les hommes chaleureux.   

   

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30 juin 2006 5 30 /06 /juin /2006 08:00

Les inégalités qui résultent de l'apparence sont considérables et souvent ignorées. " Un universitaire londonien  a conduit une étude sur un panel de 11000 britanniques âgés de 33 ans. Il s'est alors aperçu que les individus plus beaux ne gagnaient pas beaucoup plus que la moyenne nationale. En revanche, les moins séduisants percevaient un salaire inférieur de 15% pour les hommes et de 11% pour le femmes. Il y avait donc bien une discrimination liée à l'apparence. Approximativement, si un anglais touche en moyenne une salaire de 20 000 livres, ceux dont le physique est plus ingrat que la moyenne perdent environ 3000 livres par an. En outre, les hommes de plus grande taille (plus grands que la moyenne) gagnent 5% de plus que les autres et les personnes de petite taille(plus petite que la moyenne) sont pénalisées de 5%. Les femmes obèses perdent également 5% de salaire. Dans certaines activités, les effets de l'apparence étaient encore plus forts : un beau vendeur gagnait 13% de plus et un vendeur de grande taille 25% de plus (...) La beauté est une sorte de diplôme ou, du moins, de passeport et de capital humain que le marché du travail reconnaît financièrement. " Le poids des apparences Jean-François Amadieu Odile Jacob

 

Sur ce thème je vous recommande de lire le premier roman Michel Houellebecq Extension du domaine de la lutte chez Maurice Nadeau je crois et bien sûr en livre de Poche.

 

L'apparence, la forme, la ligne, le ventre plat, la minceur, je vous sens excédé par ces futilités de filles, de gonzesses diraient les plus mecs, et pourtant que ça vous plaise ou non une large tranche de vos consommateurs urbains, les plus friqués, ceux que vous voulez séduire, capter, faire casquer pour une belle ou une petite bouteille sont majoritairement de ceux là, sans distinction de sexe. Alors vos discours contre le loi Evin ils s'en tamponnent comme de leur premier string ou de leur paire de tongs. Vos démangeaisons provoquées par les culs pincés des ligues ils s'en fichent grave. Ils aiment les bulles du Champagne, le pink glacé, le Chardonnay entre copines, les glaçons dans le wine au bord de la piscine, la bouteille du vigneron qui soigne ses ceps comme eux bichonnent leur Scottish-Terrier, les grands vins parce que ça fait bien dans le paysage socio-professionnel, j'arrête car je sens que le Comité des Esthètes va passer un contrat sur ma pauvre tête qui est mon seul capital.

 

Je vous souhaite un beau week-end. Moi je suis vendredi en Médoc et samedi à Bordeaux fête le vin. Je vous raconterai mes aventures...

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29 juin 2006 4 29 /06 /juin /2006 09:04

" Vérité au deça des Pyrénées, erreur au-delà... " les Pensées Ibid V p 294 Blaise Pascal

La création d'un vin de pays d'Espagne est un projet très avancé qui devrait, selon des sources autorisées, aboutir à la mi-juin.

L'objectif est de mettre sur la même étiquette le nom de l'Espagne, le millésime et le cépage, pour concurrencer les vins du Nouveau Monde et contribuer à conquérir de nouvelles parts de marché à l'export. 2 à 3 millions d'hectolitres selon les promoteurs du projet.

Démonination du vin (il s'agit d'un "vino de la tierra") : Vinedos de Espana,

Zone de production : toutes les communes où il y a des vignoble dans 13 communautés autonomes : l'Andalousie, Aragon, Castille-La-Manche, Castille-et-Léon, Catalogne, Estramadure, Galice, la Rioja, Madrid, Murcia, Navarre, Pays Basque et communauté de Valence.

Cépages : les 65 variétés autorisées dans la zône de production,

Titre alcoolmétrique volumique naturel minimum : 10° pour les blancs et rosés, 11°pour les rouges,

Pas de limite de rendement ( le rendement moyen en Espagne est de 40Hl/ha

Modalités d'agrément : les vins seront certifiés par des organismes certificateurs accrédités en application de la norme EN 45011 et autorisés par le ministère de l'agriculture. Ces organismes contrôleront les prises d'échantillon et la réalisation des analyses chimiques et organoleptiques. Ils devront également enregistrer les étiquettes, effectuer des contôles périodiques sur la matière première, l'élaboration, l'embouteillage et l'étiquetage pour garantir la traçabilité du vin.

Bon, je sais bien que nos pioupous viennent de d'envoyer les fiers espagnols en vacances mais dans le cas présent mes très chers lecteurs nos collègues espagnols prennent le train et nous, adeptes des discours en défense, des projets enterrés, des grands feudataires enfermés dans leurs certitudes, nous le regardons passer. Ne nous étonnons pas que les grands opérateurs, ceux en capacité de vendre des millions de bouteilles, opèrent en dehors de notre vignoble. Pernod-Ricard est n°1 en Espagne pourquoi viendrait-il s'embourber dans notre marigot où seuls les petits caïmans barbottent et se chamaillent...

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28 juin 2006 3 28 /06 /juin /2006 09:11

Depuis quelques chroniques où je me laisse aller à écrire sur tout et rien je sens, au travers des commentaires in et off, des coups de fil de ceux qui connaissent mon numéro de portable, monter la pression. La pression, expression favorite des sportifs à la veille des grands rendez-vous. Nous aussi, gens du vin, sommes face à de lourdes échéances : la réforme de l'OCM tout particulièrement. Alors vais-je du haut de mon blog donner urbi et orbi mon avis sur tout : l'arrachage, la libéralisation et autres joyeusetées... De même, à la demande générale irais-je faire le calamantran et commenter les nominations à Vinflhor, le départ du président du CIVB, l'élection du nouveau président vin de Viniflhor... La réponse est NON.

Per que ? Parce que je suis un expert en jachère cynégétique. La jachère, sortie des limbes au temps où nous avons entrepris et accepté la première réforme de la PAC, est comme chacun sait une pratique culturale où la terre est laissée au repos, est improductive. Cependant, comme les experts ont le goût du raffinement, ils inventent des exceptions pour faire plaisir à bon compte aux négociateurs. Ainsi la jachère cynégétique où l'on pouvait, en Sologne par exemple, faire du maïs livré en direct aux sangliers. A ce stade je suppose que vous me trouvez totalement déconnant. Pourtant permettez-moi de vous décrypter ma parabole. Après mon écrit perso, dit rapport B, et l'animation d'un groupe stratégique composé exclusivement de professionnels, la livraison de notre jus de tête, le service après-vente de notre produit, je suis en jachère. Une jachère particulière, où ma production n'est pas livrée sur le marché. Elle est cynégétique car j'ai servi de cible favorite aux tenants de l'immobilisme.

Ceci étant écrit je suis un garçon disponible à la fois pour son club "Sans Interdit" qui vient d'ouvrir pour ses membres fondateurs un forum interne de discussion sur tous les grands sujets - un peu de patience nous prendrons la parole à bon escient - et aussi pour tous ceux qui m'inviteront à venir débattre avec eux, chez eux. A vous de vous mouiller chers lecteurs. Je vous rappelle mon e-mail jberthomeau@hotmail.com et mon numéro de portable 06 80 17 78 25. La balle est dans votre camp. J'attends vos sollicitations. Elles seront nombreuses j'en suis sûr.

A propos de balle, puisque j'ai ironisé sur Raie mon je me dois de commenter la victoire d'hier au soir. J'aime la victoire. Dans le cas présent, l'arrogance était espagnole et la fierté dans le camp français. Je n'ai pas vu le match. Je suis rentré chez moi à vélo aux alentours de 23 H 30, Paris était joyeux, des jeûnots de toutes les couleurs agitaient le drapeau tricolore à pied, en scoot ou en ptite auto. Même les chauffeurs de taxi étaient polis. Ya même un automobiliste du 95 qui m'a laissé la priorité. Un parfum de fête, comme quoi faut jamais désespérer, faut pas s'enflammer non plus, l'important, même avec Raie mon la science, c'est de retrouver nos valeurs. Alors nous, les gens du vin, qu'attendons-nous pour mouiller le maillot?

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27 juin 2006 2 27 /06 /juin /2006 10:00

Depuis que je me suis lancé comme un chien fou - pas un jeune chien vu mon âge, certains auraient plutôt tendance à me qualifier de cheval de retour - dans cette entreprise d'un nouveau type : écrire une chronique chaque jour sur l'internet je ne me suis jamais trouvé confronté au syndrome de la page blanche. Parfois en arrivant devant mon écran je ne sais pas trop ce que je vais traiter, je me lance et, avec plus ou moins de bonheur, je ponds. Mon plus gros problème, je l'avoue, c'est que parfois ma plume me démange, j'ai envie de déborder de ma petite coupe de vin, de laisser aller mon tempérament sur des sujets qui agitent notre beau pays. La raison l'emporte toujours et je me contente de rêver à une tribune libre dans un grand journal du soir...

 

Cette maîtrise de soi, cette capacité à se maintenir dans les limites prescrites, je les ai obtenues en pratiquant deux métiers aux contraintes très strictes : nègre et haut-parleur. Je m'explique. Le nègre est celui qui prête sa plume à un autre sans revendiquer de droits d'auteur : j'ai beaucoup écrit de discours, de tribunes, de bouts de livres, de préfaces, de réponses à des interviews, d'éléments pour prise de parole dans des enceintes diverses : assemblée nationale, sénat, conseil des Ministres de l'UE etcétéri ecétéra... C'est simple, du genre figures imposées en patinage artistique, plus on écrit plus on maîtrise la technique. On n'éprouve aucune frustration d'auteur. On s'amuse parfois en entendant l'impétrant prononcer avec conviction vos phrases de besogneux de la plume. Ma préférence allait aux interviews, j'adorais placer des formules chocs : ainsi j'ai fait dire à un de mes Ministres dans le Midi Libre " je ne serai pas le syndic de faillite de la viticulture du Languedoc... " Titre choc, bonnes reprises et plaisir extrême de l'homme de l'ombre.

 

Le second métier : haut-parleur, c'est-à-dire prononceur de discours pour le compte de son Ministre, est un exercice plus périlleux car, soit on s'en tient à la lecture d'un discours écrit et on fait dans le genre soporifique et chiant, soit on brode sur le texte ou pire, on improvise, au risque de se laisser emporter par la chaleur de l'ambiance et de déraper.  Le secteur agricole, eut égard à l'inflation d'organisations de tout poils, de la diversité des produits, propose au Ministre une foultitude de congrès. Pour ceux du top 10 le Ministre donne de sa personne, souvent pour se faire houspiller, brocarder ou même insulter, mais c'est ainsi, sous l'oeil des grands chefs, qui font d'ordinaire des ronds de jambe dans l'antichambre, la base, ou tout du moins sa représentation, se défoule. Pour les autres pinces-fesses le cabinet s'y colle. Donc j'ai beaucoup discouru. Deux anecdotes pour conclure ce propos sans queue ni tête : mon premier discours et mon discours devant la CGB...

 

Mon premier discours eut pour cadre le Congrès des Planteurs de Tabac à Poitiers. J'arrive en train, un adjoint du DDA, dans une 4L pourrie, me véhicule, il se confond en excuses pour le peu de standing du carrosse, je le rassure en lui disant que c'est normal pour un représentant des SC (1), il rigole. Bref je me retrouve face à 2000 personnes, un écho horrible et un discours écrit, très bien écrit, avec des phrases interminables, des sujets auxquels je ne bite rien. Je dégouline. Je m'accroche et je jure de ne plus jamais me soumettre à une telle épreuve. Les planteurs et leurs épouses sont contents. Par la suite j'ai toujours brodé ou improvisé.

 

Le sommet de cette prise de risque fut mon show au Palais des Congrès de la Porte Maillot devant le Congrès de la Confédération générale des Betteraviers. Le plus beau lobby du monde agricole, là encore 1500 pékins assez remontés contre les va-nu-pieds du pouvoir. Le président improvise. Discours au bazooka. Le mien, écrit par les spécialistes, est un chef d'oeuvre de technicité. La salle fait un triomphe au président. Je monte à la tribune. C'est chaud. Je les sens goguenards. Je me tourne vers le président, je lui tend le discours écrit en lui disant de bien vouloir le publier dans le Betteravier Français car il est riche et j'attaque les mains sur le pupitre une réponse improvisée point par point au président, je rends les coups, je pointe les contradictions, je ne lache rien, j'ironise même, la salle commence à se détendre, le silence est religieux et en final elle m'applaudit. Le Betteravier Français se fendra d'un bel éditorial pour saluer la pugnacité du représentant du Ministre et depuis ce jour je suis toujours invité au Congrès de la CGB.  

 

(1) abréviation très usitée de la coalition au pouvoir après 1981

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26 juin 2006 1 26 /06 /juin /2006 10:02

Samedi en fin de journée j'ai pris le TGV, direction Nantes, changement : je monte dans un TER flambant neuf, climatisé, direction la Mothe-Achard, mon pays, là où je suis né. Petit détail, la SNCF adore compliquer la vie de ses clients, ce beau TER financé par le Conseil Régional ne s'arrête pas à la Mothe-Achard car nous sommes un samedi. Les autres jours oui, pourtant lorsque j'ai repris ce même TER dimanche en fin de journée, à la gare de la Mothe-Achard, j'ai pu constater que celle-ci était fermée et que le défaut de chef de gare ne justifiait pas le non arrêt du samedi à 22H15. Passons, ma nostalgie de l'autorail rouge avec le chef de train beuglant : les Clouzeaux, Ste Flaive des Loups, La Mothe-Achard... c'est l'âge.

La Mothe-Achard, gros bourg commerçant autrefois, est devenu un vaste dortoir pavillonnaire depuis l'implantation de l'entreprise PRB spécialiste des enduits de bâtiments. Ses grosses tours blanches dominent la zône industrielle de la gare. Mais dans le bourg, il n'y a plus de boucher et c'est la commune qui a du racheter la poissonnerie pour y réinstaller un jeune. L'hyper U en périphérie draine les consommateurs en bagnoles. Comme me le fait justement remarquer ma vieille maman : et ceux qui n'en ont pas comment font-ils? Bref, ce bout de Vendée, déjà bien estropié par le remenbrement, ressemble étrangement à un morceau de banlieue en Région Parisienne. Mon frère me dit que l'agriculteur qui a repris son exploitation élève ses animaux aux granulés et a mis les terres en jachère subventionnée. En revanche, le château qui abritait mon Ecole d'agriculture vient d'être transformé en hôtel de luxe, par le groupe Accor me dit-on, et a retrouvé le nom des anciens propriétaires : les de Brantes, la veuve du dernier des de Brantes avait légué ses biens à la Congrégation du Bienheureux Grignon de Montfort pour tenter de réparer la vie dissolue de son défunt époux. Moi, j'y ai soigné ma première grippe - l'infirmerie était au premier étage du château - et c'est à cette occasion que l'abbé Blanchet m'a parlé pour la première fois de l'ENA.

Bref mes amis, tout change pour que rien ne change, et en écoutant s'égrener le temps dans la maison de maman je contemplais les photos de ses petits enfants, de nous ses enfants, mon père avec le frère Fazilleau assis sur l'aiguille de la batteuse et je repensais à cette anecdocte au temps où les estivants traversaient la Mothe-Achard pour aller soit vers les Sables d'Olonne soit vers Saint Gilles s/Vie : c'était en plein cagnard d'août, je baguenaudais dans le bourg, en culottes courtes, une grosse voiture s'arrête pour me demander un renseignement. Le chauffeur me toisant me dit soudain : " toi tu n'es pas d'ici... " Stupéfait, je lui répondais que si mais, lorsqu'il repartait, son affirmation me tourmenta : qu'avais-je donc dans mon apparence physique qui puisse l'avoir amené à cette étrange affirmation ? Comme je suis un obstiné, après examen devant le miroir, je conclus que ce devait être mes cheveux jais bouclés et ma peau mate (le mot bronzé n'était pas encore dans mon vocabulaire) qui avaient à ses yeux fait de moi un étranger.

Alors, bien des années plus tard j'ai griffonné un petit texte que je vous livre " Moi l'enfant d'ici, ce pays marin situé à l'extrémité du Poitou, un peu à l'écart du seuil à travers lequel, au cours des âges, passèrent les grandes invasions, les pélérinages d'Espagne, et s'affrontèrent toujours dans les rivalités de la guerre ou l'émulation de la paix, le Nord et le Midi, je suis brun de peau et j'ai les cheveux frisés : chaque invasion laisse sa marque... " C'est sans doute pour cela que j'ai toujours tenté d'être un trait d'union.

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23 juin 2006 5 23 /06 /juin /2006 09:41

J'ai ouï-dire que pour lutter contre la toute puissance des marques dans les cours d'école le biographe d'Henri IV préconisait la blouse obligatoire : le retour du sarrau ! Après tout, pourquoi pas,  s'il n'y a pas d'autres sujets d'importance à mettre en débat nous pouvons nous remobiliser comme lors du référendum : un face à face très chaud entre les ouiouistes et les nonistes du sarrau. Depuis 5ans dans le monde du vin nous avons joué à ce petit jeu de rien du tout qui débouche sur rien du tout : marques contre AOC, tradition contre modernité, copeaux or not copeaux, complexité contre simplicité, Languedoc contre Bordeaux... Résultat : la purge, les "méchants eurocrates " qui ont une calculette à la place du coeur tirent les conséquences de notre incapacité à vendre le vin produit : proposition d'arrachage massif  du vignoble. Pour les non-initiés, il s'agit d'un arrachage volontaire, iront ceux qui voudront ou qui ne pourront pas faire autrement.

 

photosarrau.JPG

 

Pour en revenir, au sarrau, hier au soir je dînais aux Pipos face à l'Ecole Polytechnique : pour je ne sais quelle raison les Polytechniciens étaient de sortie, en uniforme, alors vive l'uniforme ! En fait, ça ne nous changerait pas beaucoup de ce que nous cotoyons tous les jours. " Dans notre société hypermoderne et "performeuse", la pure spontanéité est devenue rarissime. Tout le monde est plus ou moins factice, joue un rôle avec une gravité sans faille. Du PDG qui enfile chaque jour son costume sombre de tueur en col blanc au bad boy des cités qui arbore ostensiblement sa tenue ultra-codifiée de gangstarap, tout le monde fait l'acteur, endosse une panoplie permettant de s'identifier socialement. Il n'y a pas si longtemps, les métiers avaient un uniforme, dans la rue on pouvait voir passer le charpentier, le maçon, ou le bougnat, cette fierté d'appartenir à une corporation les dispensait d'avoir à jouer un rôle, il leur suffisait d'être, tout simplement. Depuis, les frontières se sont brouillées, et chacun choisit son propre habit de scène au magasin des accessoires, c'est-à-dire chez Armani ou chez Décathlon, ce qui aboutit, non à la diversité, mais au contraire, à une forme de standardisation fondée sur quelques archétypes convenus et débouchant sur l'anonymat pur et simple..." Olivier Bardolle Des ravages du manque de sincérité dans les relations humaines L'Esprit des Péninsules

 

Beau sujet de Baccalauréat pour nos futurs viticulteurs ou mieux petit devoir sur table, du genre dictée de Pivot, pour tout ce que la France compte de grands esprits, plumitifs variés, critiques autoproclamés, qui pensent le vin pour le plus grand profit des petites bêtes étranges que sont les consommateurs, étant entendu que le consommateur de vin, pétri par notre culture nationale du vin, imprégné d'histoire, indifférent à toutes les tendances, surtout si c'est une nana de Birmingham ou un chauffeur routier de l'Ohio, attend avec la même ferveur qu'il attend son feuilleton télé d'être éduqué, formaté, guidé dans le monde merveilleux du vin par tout ce beau monde. Comme le dit Bardolle, à propos des intellectuels parisiens de la "rive gauche", notre vocation consiste à éclairer le monde "en toute simplicité" Qu'on le regrette ou non " les hommes ont la passion des idées simples, le complexe, l'ambigu, le raffiné les inquiètent, la mentalité générale procède d'une psychologie de basse-cour. Tout doit être conforme, convenu, prévisible."

 

Et vous chers lecteurs qu'en pensez-vous ? Bon week-end ! 

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22 juin 2006 4 22 /06 /juin /2006 09:30

C'est BOVE avec un e muet pazin é, je ne mélange pas les torchons avec les serviettes, Emmanuel Bobovnikoff est né le mercredi 20 avril 1898 entre onze heures et demie et midi à la maternité du bd du Port Royal. Il pesait 6 livres et demi. Sa mère Henriette Michels est luxembourgeoise, son père Emmanuel est né à Kiev dans le ghetto juif.  Emmanuel Bove " le plus grand des auteurs français méconnus." Avec l'été, je reprends mon slogan de l'an dernier : " si vous ne souhaitez pas bronzer idiot lisez le blog Berthomeau... "

Mes chroniques prendront donc parfois un parfum littéraire, comme celle de ce matin. Si j'ai découvert Bove c'est grâce à un éditeur bordelais : Le Castor Astral qui a publié une excellente biographie : Emmanuel Bove la vie comme une ombre de Raymond Cousse et Jean-Luc Bitton et réédité certains de ses romans. Si je vous mets en appétit commencez donc par le premier roman de Bove, Mes Amis publié chez Flammarion. Les deux premières phrases sont un extrait sec du style bovien " Quand je m'éveille, ma bouche est ouverte. Mes dents sont grasses : les brosser le soir serait mieux, mais je n'en ai jamais le courage. "

Les amateurs de Bove se recrutent dans un éventail assez large pour preuve cette lettre adressée au surréaliste Philippe Soupault " Cher Monsieur, J'espère que vous ne m'en voudrez pas de l'indiscrétion qui consiste à vous écrire sans vous connaître et qui esr d'autant plus coupable qu'il s'agit de renseignements à vous demander. J'ai été intéressé récemment par la lecture de l'oeuvre d'Emmanuel Bove, qui a aujourd'hui complètement disparu, non seulement de la devanture mais de l'arrière-fond des librairies. J'imagine que vous avez eu l'occasion de le rencontrer, puisque l'essentiel de son oeuvre se situe à une époque où vous animiez les mouvements littéraires contemporains. Ce serait pour moi un grand privilège si vous pouviez me donner quelques renseignements à son endroit. Qui était-il ? Quelle était sa manière d'être ? Quelles traces a-t-il laissées ? J'ai appris que madame Bove vivait encore à l'heure actuelle. Avez-vous eu l'occasion de savoir où on peut la joindre ?  Vous serez surpris de cette curiosité qui n'entre pas dans l'exercice normal de mes fonctions, mais s'il est interdit au ministre des Finances d'avoir un coeur, du moins selon la réputation, il ne lui est pas interdit de s'intéresser à la littérature.  Valéry Giscard d'Estaing en 1972

Le plus beau texte de Bove, pour moi, est la nouvelle Bécon-les-Bruyères dont je possède l'édition originale. Je vous en offre un petit extrait, pour le plaisir " Bécon-les-bruyères existe à peine. La gare qui porte pourtant son nom printanier prévient le voyageur, dès le quai, qu'en sortant à droite il se trouvera côté-Asnières, à gauche côté Courbevoie. Il est donc nécessaire, avant de parler de cette ville, de tirer à soi tout ce qui lui appartient, ainsi que les personnes qui rassemblent les objets qui leur appartiennent avant de les compter. L'enchevêtrement des communes de banlieue empêche d'avoir cette manie. Aucun accident de terrain, aucune de ces rivières qui suivent le bord des départements ne les séparent. Il y a tant de maisons que l'on pense être dans un vallon alors que l'on se trouve sur une colline... "

A votre disposition chers lecteurs pour d'autres précisions ou références sur Emmanuel Bove...

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21 juin 2006 3 21 /06 /juin /2006 09:26

Encore emmitoufflé dans la ouatte du sommeil, ce matin j'entendais le journaliste de France Inter dire que notre Raie Mon national, l'ex-tatanneur des gazons, préparait sa défense " si nos pioupious cramponnés rentraient prématurément d'Allemagne ce serait la faute de l'arbitrage... " Bé voyons, comme dab, nous sommes des victimes, on nous refuse des pénalties indiscutables, des buts qu'un enfant de 5 ans aurait accordé, et ployant sous le fardeau de l'injustice nous ruminerons notre rancoeur si le Togo n'a pas le bon goût de nous offrir un carton. Que nous fussions un peu poussif, peu réaliste, verbeux et un chouiai arrogant sous la houlette d'un entraîneur qui ressemble plus à un adjudant de quartier de la coloniale qu'à un meneur d'hommes pèse très peu dans la très belle balance dont nous nous servons à tout propos pour tenter de justifier l'injustifiable. Le c'est pas de ma faute est notre credo national.

Vous me voyez venir avec mes gros sabots de vendéen crotté : on nage dans le même potage dans notre beau secteur... Yès ! J'en prends pour exemple " la quinzaine folle du CIVB " En lisant le papier de Compadre dans Sud-Ouest j'hallucine. Je ne porte en cela aucun jugement sur le résultat de l'élection. Non je constate simplement depuis des mois et des semaines que le débat de fond n'est jamais abordé. On fait comme si de rien n'était. On rame dans le strict conjoncturel. On se refuse à poser sur la table les questions qui fâchent. On perd du temps et, en l'occurence, le temps est une donnée qui est capitale pour nous permettre de reprendre l'initiative. En octobre 2003, dans Aquitaine Eco supplément de Sud-Ouest je me permettais de dire " ce qui est nouveau pour nous français, c'est que nous allons subir la première crise des vins dits de qualité qui ne trouveront plus preneurs car ils ne correspondront plus aux demandes du marché..."

Si ça vous dit je peux vous faire passer la suite de cette interview. Mon propos n'est pas ce matin de dire " j'avais raison avant tout le monde mais de demander instamment à ceux qui ont des mandats de responsabilité de bien vouloir assumer ces responsabilités tant au plan de leur région, qu'au plan national et communautaire. L'heure n'est plus aux estrades, ni aux discours mais aux travaux pratiques avec les opérateurs. Faute de vouloir et de rechercher des compromis solides, de choisir, nous laisserons la place aux autres compétiteurs, priverons notre pays d'une belle part de richesse et d'emploi, nous pourrons alors exporter les plus beaux fleurons nationaux de la justification, ceux qui clameront au monde qui s'en fichera pas mal que nous sommes les victimes des grands prédateurs mondiaux de la vigne et du vin. Comme j'aimais à le dire à un ami anglais du temps où au rugby nous nous plaignions de l'arbitrage : " la seule façon de faire avec vous c'est de vous battre "Gagner n'est pas un gros mot et perdre, en sport, nullement une catastrophe. En revanche, pour ce qui est de l'économie on ne vend pas des mots d'excuses mais du vin. 

 

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20 juin 2006 2 20 /06 /juin /2006 09:19

Mon premier contact charnel avec la mort je l'ai connu le jour où Pierre Bironneau, un de mes camarades de classe, mourrut, comme ça, sans préavis. Je devais avoir 6 ou 7 ans. Avec la mémé Marie nous montâmes à pied jusqu'à la métairie, au lieu dit Villeneuve, pour lui rendre visite. C'était le soir, dans la grande chambre mal éclairée, dans le grand lit à rouleaux, les mains jointes sur un chapelet, son petit visage livide aux yeux clos, le petit Bironneau muré dans son silence éternel me glaça d'effroi. Le jour de sa mise en terre, étant enfant de choeur, pendant le Dies Irae je fus pris d'un chagrin inestinguible, je pleurai toutes les larmes de mon corps, j'avais peur qu'on me vola ma vie, je trouvai ça trop injuste.

Cette injustice je la ressentis à son apogée lorsque mon père, en pleine moisson, se coucha doucement sur le chaume et, avec son éternel sourire, trouva le repos qui n'avait pas été le lot de sa vie laborieuse. La mort me privait de lui au moment où, à l'aube de ma vie d'homme, j'avais tant besoin de lui. Ce lien rompu trop tôt en imprima un autre, invisible, qui me servit d'armature, structura mon parcours professionnel, fit de moi ce que je pensais qu'il souhaitait que je fusses. Sur mon bureau de la rue de Varenne, sa photo me rappelait à l'ordre : rappelle-toi d'où tu viens mon fils...

René Renou est mort. En cette circonstance, moi qui les aime tant,  je n'aime pas les mots : ils sont trop petits ou trop boursouflés, je leur préfère le silence du recueillement. Alors ce matin je m'incline devant ton courage face à la maladie René, je salue en connaisseur ton anti-conformisme : nous nous sommes tant côtoyés à la tribune, je m'associe à la douleur et à la peine des tiens, je me permets de t'offrir la chanson du bougon enterré dans le cimetière marin de Sète " les copains d'abord " et le premier vers d'une tragédie de Sophocle "C'est une vérité depuis longtemps reconnue des hommes, que nul ne peut savoir, pour aucun mortel, avant l'instant de sa mort, si la vie lui fut douce ou cruelle" Adieu René, avec ceux qui t'aimaient bien nous lèverons nos verres car la vie continue et nous essayerons de faire fructifier ton héritage...

 

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