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5 décembre 2008 5 05 /12 /décembre /2008 00:02

 

Dans la cour de récréation de l’école Sainte-Marie à la Mothe-Achard, lorsque nous jouions au jeu du drapeau, les grands, certains jours, décrétaient le « chacun pour sa peau » ce qui signifiait que nul ne pourrait se planquer dans le cocon du collectif, c’était le un contre un ou pire le tous contre un lorsque soudain l’esprit de meute prévalait. Les plus faibles, les moins astucieux, les j’en foutre, étaient éliminés les premiers. Ensuite venait un temps de flottement, d’observation, où ceux qui s’estimaient les plus aptes à gagner s’observaient, se jaugeaient, certains lançaient des fausses pistes, des contrats se passaient d’un simple regard : tu sacrifies ta peau en échange d’une poignée de marbres (billes d’argile vernissée), petit à petit la meute fondait comme neige au soleil. Lorsqu’elle atteignait le chiffre 5, en basket on dit un 3 contre 2, avec mon copain Dominique le fils du boulanger, qui jouait arrière au foot, un teigneux, lorsque nous avions décidé de les laisser se bouffer entre eux et que nous étions encore dans le lot, nous activions notre plan d’une grande simplicité. Nous filions au petit trot chacun dans l’un des 2 coins. Les 3 restants hésitaient sur la conduite à tenir : le 1 contre 1 mais alors le troisième économisait ses forces ou le 2 contre 1 pour l’un et le 1 contre 1 pour l’autre. À tout coup ils choisissaient la seconde solution car comme c’était chacun pour sa peau à leurs yeux aucune coalition ne s’avérait possible. Je ne dis pas que Dominique et moi nous gagnions à tout coup, ce serait mentir, mais comme j’étais un assez bon basketteur, dans le dernier un contre un, alors que Dominique se sacrifiait, je mettais souvent, avec mon jeu de jambes, mon adversaire plus lourd et moins mobile dans le vent. Ce qui m’a toujours stupéfait c’est que, notre stratégie étant connue, jamais ces abrutis n’ont pensé à élaborer entre eux un pacte pour nous contrer. À deux unis on peut gagner contre trois qui pensent qu’ils vont gagner tout seul.

 

Le collectif a mauvaise presse. L’action collective est moquée. Le chacun pour sa peau prévaut. Et pourtant, depuis ses origines notre système d’appellation d’origine est une forme d’organisation collective, un bien commun géré en commun. Certains vont me trouver fort paradoxal puisque très souvent je mets en avant des vignerons qui s’écartent du sentier commun. J’en conviens. Aujourd’hui, ayant suffisamment donné pour le collectif, c’est à certains d’entre eux que je m’adresse. L’original, certes, est souvent solitaire mais, hormis le besoin que certains éprouvent de se retrouver à quelques-uns, très vite l’action collective se résume à un esprit de tribu. La tribu a ses codes. La tribu est assez fermée ou du moins pas très ouverte. La tribu se positionne souvent en opposition à d’autres tribus jugées soit trop molles, soit pas assez fermes sur les principes, ce qui vous me direz revient au même mais qui dans ces mouvances peut avoir force d’excommunication. Je force volontairement le trait bien sûr mais lorsqu’on souhaite faire progresser ses idées j’ai la faiblesse de croire qu’il faut savoir s’entendre sur l’essentiel pour tenter de convaincre le plus grand nombre. Se draper dans sa vérité est bien plus commode, plus confortable que de se colleter à l’action collective. C’est aussi plus payant, à titre individuel, dans nos sociétés où la communication prime : les médias adorent les postures individuelles. Le collectif c’est ringard, sauf quand ça fait pleurer les foules ou quand ça permet aux individus de se dédouaner par le don à une œuvre caritative qui s’occupe de tout.  Lisez-moi bien, ce n’est de ma part que le constat d’un simple observateur. Ni producteur, ni vendeur, je ne suis qu’un consommateur de vin parmi d’autres dans la grande ville. Je ne jette donc d’anathème sur qui que ce soit. Toute cette diversité, cette inventivité, ce retour aux sources me plaît mais force est de constater que tant d’énergie, d’intelligence sont gaspillées sur les autels de petites chapelles qui font le miel de l’élite, où de la prétendue telle, mais laisse la base dans sa mouise. Ce chacun pour sa peau, cet entre-soi douillet, m’attriste seulement, ça me navre et je l’écris.

 Que voulez-vous je suis de ceux qui préfèrent le contrat négocié à la loi imposée. La règle générale lorsqu’elle se pique de s’intéresser au détail est carcan alors que le contrat met en forme les avancées des parties, qui bien sûr ne sont jamais en stricte position d’égalité, ajoute ou retranche une pierre à l’édifice commun, tâtonne, s’adapte, c’est la méthode que souhaitait René Renou avec la réécriture des décrets. Certains m’objecteront que c’est se soumettre au diktat d’une majorité pas toujours éclairée. La réponse est souvent oui si la minorité, dite agissante, se situe au-dehors ou si elle refuse toute forme de compromis. Le vilain mot est lâché compromis traduit en langage tribal par compromission. J’adore ! Comme si la vie que l’on vit n’était pas une longue suite de compromis. L’intransigeance c’est la guerre, froide ou ouverte. Le divorce érigé en mode de résolution des conflits. Le mieux est souvent l’ennemi du bien. Alors tout en restant ferme sur ses principes, ceux qu’on s’applique librement à soi-même, je ne vois pas pourquoi il serait « inadmissible » d’admettre que la règle commune soit fondée sur un compromis entre les parties en présence. Dans la sphère publique, tant décriée, ça s’appelle se mettre en position de pouvoir gouverner la collectivité et, comme le disait mon maître, lui aussi vilipendé par les purs et durs, Pierre Mendès-France : gouverner c’est choisir.

 

Allez les amis de mes amis, un petit effort pour faire entendre ensemble votre petite musique en dehors de cénacles choisis…

 

* Au XVIIIe siècle, teinture de tournesol qu’on ajoutait aux vins peu colorés. Le goût de drapeau était fréquent dans les vins de cabaret.

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4 décembre 2008 4 04 /12 /décembre /2008 00:00

 

C’est un peu l’histoire de l’arroseur arrosé. Il y a quelques mois, autour d’un verre de vin, vous m’avez demandé de vous mettre sur le gril des « trois questions à », comme vous le faites avec les invités de votre blog. J’ai accepté avec enthousiasme, puis j’ai reculé, car finalement, la tâche n’est pas si facile. Quand je vous ai rencontré, j’étais journaliste, correspondante des quotidiens Libération et La Tribune en Languedoc-Roussillon, vous étiez commis de l’Etat, assigné aux tâches de pompier du vignoble. J’ai brossé votre portrait – ce qui m’a permis de mieux vous connaître et de nous découvrir des valeurs partagées – quand vous avez rédigé un rapport sur les exportations de vin français, mieux connu sous le nom de rapport Berthomeau. Ce rapport vous a valu les honneurs des medias –c’est la formule consacrée-, des amitiés et des inimitiés solides dans le petit monde du vin et, au bout du compte, une mise au placard.

Néanmoins, depuis ce placard, sans doute parce que grandi dans la culture du travail qui fait se lever le matin avec quelque chose de productif à faire de la sainte journée, vous faites entendre votre voix à travers un blog. Depuis le 23 mai 2005, le rendez-vous est quotidien, fidèle, libre, tonitruant, exploratif (je trouve cet épithète non répertorié plus adapté à ce que vous faites qu’explorateur), touffu, alternant coups de gueule contre ceux que du temps où j’étais journaliste et vous commis de l’Etat appeliez les « grands mamamouchis » (je traduis : les institutionnels) et coups de cœurs, pour des vins, des hommes et des femmes. Comme on le dit familièrement, vous ne mâchez pas vos mots et on sent que vous y prenez un réel plaisir, c’est-à-dire égoïste à son origine et souvent partagé à l’arrivée.

Jacques Berthomeau et Antoine Aréna by Catherine Bernard au Paul Bert

Question n°1 : Comment expliquez-vous que votre employeur, Vinifhlor, c’est-à-dire l’Etat, vous tolère à vitupérer comme vous le faites ? Je pense en particulier à toutes ces gentillesses adressées à l’Inao, du genre, je vous cite : « M, comme médiocratie », « Objet juridique non identifié : o comme inao ».

 

Réponse de JB: Mon employeur n’a rien à tolérer, le blog est un espace privé. Philippe Bilger, avocat-général près de la Cour d’appel de Paris, donc fonctionnaire et magistrat du siège, donc soumis à ce qu’on appelle le devoir de réserve, tient un blog www.philippebilger.com et je trouve que sa plume est bien plus acérée, plus vacharde que la mienne. Pour en revenir à moi, qui ne suis même pas soumis à ce fameux devoir n’étant pas fonctionnaire, j’applique l’adage « qui aime bien, châtie bien… » Pour revenir à votre exemple de l’INAO, des AOC en général, j’ai beaucoup mouillé le maillot pour les défendre au temps où j’étais le bras droit du Ministre – comme on disait dans le Languedoc – alors j’estime légitime de mettre le doigt là où ça fait mal, de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Ce verbe clair, parfois un peu virulent, me vaut certes de solides inimitiés, mais Yves Bénard, le président du Comité Vins et Eaux-de-vie de l’INAO a été l’un des premiers à répondre à mes 3 questions, comme récemment Olivier Nasles, vice-président du CAC, que j’avais un peu rudoyé à propos de la typicité et, preuve que mon espace de liberté est un endroit fréquentable, Michel Barnier, le Ministre de l’Agriculture, s’est soumis lui aussi à l’exercice. Vous savez Catherine, je m’en prends rarement aux personnes, j’ironise parfois, j’ai des têtes de turc comme le « bougon des cépages », mais je préfère m’attaquer aux citadelles. C’est plus excitant !

 

Question n°2 : Vous lisant, j’ai le sentiment que vous avez paradoxalement rencontré le vin, le goût de le boire, de l’apprécier dans sa diversité, d’écouter ce qu’il dit dans le verre, depuis que vous n’êtes plus justement dans l’exercice obligé de la fonction et que cette rencontre a humanisé votre analyse. Est-ce que je me trompe ?

 

Réponse  de JB : Vous avez tout à fait raison Catherine cependant, ceux qui me connaissent depuis longtemps savent que j’ai toujours eu le goût de la conversation, de l’écoute, mais c’était ma sphère privée que je préservais des ingérences de ceux qui gravitent ou sévissent dans la sphère du politique. Lorsqu’on occupe des fonctions d’autorité politique le blindage, la distance, une certaine forme d’arrogance aussi, permettent de survivre, d’avaler des couleuvres, de prendre des décisions qui ne vous font pas forcément plaisir. Vous savez il faut bien comprendre que dans ce type de fonctions on ne choisit pas ses partenaires, ses interlocuteurs, alors on se compose un personnage pour s’éviter de se laisser-aller à livrer le fond de sa pensée. Ce qui m’a le plus humanisé ce sont, bien sûr, mes missions de « pompier » sur le terrain. Là, j’ai vraiment appris l’humilité. J’ai aussi pris conscience des pesanteurs administratives, de l’indigence de certains élus, de l’inertie et du conservatisme de ceux qui se disent représenter la base. Moi qui n’aime rien tant que de convaincre je me suis ramassé de belles gamelles qui font du bien à l’égo. Mais vous vous doutez bien, que ce qui m’a encore plus libéré de mon vernis un peu glacé c’est le traitement que l’on m’a fait subir à la suite de mon rapport et de l’expérience du Groupe Stratégique. Je pourrais rédiger un annuaire des faux-culs et des hypocrites mais je ne le ferai pas car dans cette affaire j’ai gagné de vrais amis, fidèles et c’est l’essentiel. Après ce type de thérapie « à la française » tout me semble possible et, de plus, comme les faits m’ont plutôt donné raison, je ne vis pas cela comme une revanche mais l’accession à la sérénité. Plus je vais et plus je sais dire aux gens que j’aime que je les aime. Quant aux autres, je les ignore.

 

Question n°3 : Je sais l’exercice réducteur, donc un peu bête, mais comme le questionnaire de Proust, il en ressort toujours quelque chose, au moins en creux. Donc je vous propose de vous y livrer. Si votre employeur vous donnait carte blanche, comment, où et quel pompier seriez-vous aujourd’hui ?

 

Réponse de JB : Je vais être très prétentieux Catherine : je lui demanderais sans aucune hésitation et avec mon incommensurable orgueil de me confier, pendant un CDD de 3 ans, le pilotage économique de la part du vignoble capable de relever le défi que nous avions explicité avec mes collègues de Cap 2010. Le plan de vol étant connu alors nul besoin de se perdre dans des discussions pour les bassins et les bassines, les interprofessions d’ici ou de là, uniques ou multiples, les chefs et les seconds couteaux, l’important serait d’aider à créer les conditions pour que nos rares entreprises de taille nationale et celles des entreprises régionales de mise en marché qui tiennent notre vignoble, le redynamise pour élaborer une source vin adaptée, lui fasse gagner de l’argent pour qu’il puisse le réinvestir dans de vraies politiques commerciales et des réseaux de distribution. Á l’heure où la régulation revient sur le devant de la scène, la Vigne France, celle des vins sans IG et d’une partie des vins IGP, a besoin qu’on la pilote. Il ne s’agit pas d’ingérence, de création d’un zinzin national budgétivore mais de faire ce que seule une autorité extérieure peut faire : arbitrer entre les penchants féodaux de certains, décider avec les entreprises d’une stratégie et la mettre en oeuvre. Je suis disponible. La méthode existe. Le terrain est déjà déblayé. Bien des hommes qui sont aux manettes d’entreprises sont demandeurs de ce pilotage. Reste à choisir de changer d’époque, de bien vouloir dépasser les clivages et les oppositions anciennes, à décider de passer du verbe à l’action. Honnêtement, Catherine, je peux tenir, sans prendre beaucoup de risques, le pari que je vais continuer à me contenter de faire progresser ma petite entreprise Vin&Cie et je ne m’en porterai pas plus mal.

Si ça vous intéresse vous pouvez soit cliquer sur ce lien   Pesticides ? Même pas peur !, soit vous rendre sur la rubrique PAGES (en haut à droite du blog) et cliquer sur le N°34 : Pesticides ? Même pas peur ! 20 pages de lecture en provenance de la Mission d'animation des Agrobiosciences cofinancée par la Région Midi-Pyrénées et le Ministère de l'Agriculture.

 

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3 décembre 2008 3 03 /12 /décembre /2008 00:01

Mademoiselledont je tairais le nom,

Longtemps je me suis levé de bonne heure pour aller me pencher au chevet de patients – étrange appellation que celle-ci mais pourtant si parlante : personne qui subit – fragiles, mal en point, perclus de maux, sous perfusion, souvent victimes d’une forme d’acharnement économique, inadaptés aux duretés du temps, proches de la sortie, des laissés pour compte de ce que l’on qualifiait de crise alors qu’il s’agissait d’une profonde mutation. Puis, mes commanditaires, soucieux d’un avenir qui ne semblait pas aussi souriant que certains augures le laissaient entendre, m’ont demandé d’ausculter le Patient France du vin. Pendant une année j’ai observé les symptômes pour les analyser, poser un diagnostic et, comme le disent les praticiens, je me suis efforcé de proposer un protocole efficace pour le traitement, seul d’abord, puis avec des confrères.  Sans « revendiquer » l’appellation non contrôlée de « spécialiste » permettez-moi tout de même de mettre mon grain de sel dans une histoire dont raffolent les normalisateurs papivores dont vous êtes  un beau spécimen.

Le Beaujolais n’a jamais fait appel à mes « services » et pourtant comme le disait très crument Jean-Pierre Labruyère en septembre 2007 à la RVF : « la situation est catastrophique. Nous avons la menace d’une crise sociale grave. Près de 45 % du millésime est vendu chaque année sous forme de  Beaujolais Nouveau, en un mois. Il n’y a pas d’équivalent dans le monde. Malheureusement, le Beaujolais est porté par un discours marketing et n’a plus d’image de qualité. Pire, il occulte désormais le marché des crus. Il y a vingt ans, le prix des Moulin-à-Vent était le même que celui des Châteauneuf-du-Pape ou des Mercurey. Aujourd’hui, c’est moins de la moitié. L’interprofession porte une lourde responsabilité dans ce bilan désastreux : elle n’a pas su limiter ses rendements ni contrôler la qualité de ses vins. » Rappelons-nous comme l’écrivait à l’époque Vitisphère : « des prix en chute de 12 à 25%, et des stocks de vin invendu, frappés de plein fouet par la crise. Pour en sortir, l’Union interprofessionnelle des vins du Beaujolais (UIVB) avait présenté un plan d’urgence, avec en aval la distillation de 110 000 hectolitres pour assainir les stocks, et en amont un renforcement des conditions d’agrément, reconnaissant implicitement que 7% à 10% des 1,2 millions d’hectolitres produits ne méritaient pas l’appellation ». Alors, permettez-moi de vous poser une question simple, mademoiselle… dont je tairais le nom, « qui donc avait agréé ces 7 à 10% de vins indignes de l’appellation ? » Merci de me faire parvenir la réponse par retour du courrier.

Aujourd’hui ce qui m’amène à fourrer mon nez, dont je regrette qu’il ne soit pas aussi prestigieux que celui de mon ami Jacques Dupont Merveilleux du Vignoble, dans un dossier où, mademoiselle…dont je tairais le nom « On servit, pour l'embarrasser, En un vase à long col et d'étroite embouchure. Le bec de la Cigogne y pouvait bien passer ; Mais le museau du sire était d'autre mesure. »*, c’est que, sans doute, pour faire oublier les errements du passé, voici qu’en compagnie des mêmes dégustateurs, type passoire à gros trous non modifiée, vous avez fait plié un original, appelons-le par commodité Mister Blond, vous l'avez obligé à passer sous les fourches caudines de votre prétendue « typicité », pour lui montrer que le nouveau Q de la vieille dame qui vous emploie s’assied sur le jugement des seuls qui vaillent en définitive : les clients de Mister Blond, dont horreur et abomination certains sont d’ « affreux » étasuniens, qui plébiscitent son vin dont la seule destination, d’après-vous, à la suite de votre décision souveraine, sera la même chaudière où les 7 à 10% agréés par vos soins auraient du être jeté sans autre forme de procès. Moi qui ne suis, selon certains beaux esprits de vos amis, qu’un stipendié des « vins industriels », c’est avec un plaisir non dissimulé, un esprit de dégagement hors norme, que je prends le parti de la cause de tous les Mister Blond.  Je ne vais pas m’appesantir sur le fond de l’affaire car, je l’espère, vous en maîtrisez parfaitement les tenants et les aboutissants. Cependant, je vous recommande, miss de dont je tais le nom…, la lecture de la chronique « A Beaujolais Maker’s Pain »  du 24 mai 2008 publiée sur le blog d’Eric Asimov du New York Times « The Pour ».
http://thepour.blogs.nytimes.com/2008/05/20/a-beaujolais-makers-pain/
ainsi vous pourrez constater que vous participez, avec un brio inégalé, à donner de notre patrie l’image d’un vieux pays perclus de bureaucrates obtus. Ça me déplaît profondément car je fais parti de ceux qui pensent que tout système à besoins de règles de régulation et, bien sûr, d’une autorité indépendante pour les faire respecter. Mais que diable avant d’aller chercher des poux dans la tête de Mister Blond faites-moi la grâce de consacrer tous vos efforts à virer les vins de ceux qui rallongent la sauce.

L’acharnement dont vous avez fait preuve, signe d’une certaine forme de désarroi, car je suis sûr de votre intégrité, est d’autant plus étrange qu’il se situe dans le cadre d’un système décrié, condamné, réformé et qui n’a plus court. Croyez-vous vraiment, personne ne vous demande de battre votre coulpe ou d’aller à Canossa, que l’agrément des 300 hl de Beaujolais de Mister Blond ajouterait au « discrédit » jeté par certains sur cette belle appellation que j’ai toujours défendue ?

 

La réponse est clairement non !


Bien au contraire, vous auriez donné un signe, non de bonne volonté ou de laxisme, mais d’intelligence aux amoureux du Beaujolais.

 

Que les vins de Mister Blond soient différents, atypiques, fruit de l’esprit d’un vigneron curieux et inventif, ne constitue pas une tare, un boulet supplémentaire pour le Beaujolais, mais un plus pour capitaliser de la notoriété.  

 

 Dans ma vie antérieure, lorsque je tenais les manettes, que j’exerçais sur vos prédécesseurs la tutelle, que n’ai-je entendu plaider pour que nous tolérions les « agréments sociaux ». Dans le cas présent ce que je plaide, moi, c’est un « agrément économique et commercial ». Le juge de paix, que vous le vouliez ou non, ce n’est pas vous et votre quarteron d’agréeurs anonymes, mais ceux ou  celles qui, après avoir apprécié les vins de Mister Blond,  en redemandent. La toute puissance de la médiocratie nous plombe. De grâce, accordez à ceux qui précèdent le gros du peloton les exceptions qui confirmeront la sacro-sainte règle pour laquelle vous avez dédiée votre vie administrative. Ne prenez pas la vivacité de mon propos pour de l’ironie facile mais comme l’expression de mon exaspération face à une situation qui perdure depuis des années.


  Mon ire à votre endroit peut sembler bien inutile dans la mesure où ce que j'évoque est une affaire classée. Demain sera un autre jour m’objecterez-vous puisque le système d’agrément change. Fort bien, j’en prends acte. Cependant je doute que la liberté et les pratiques de certains vignerons atypiques puissent entrer dans votre moule étroit. Les interrogations et les craintes de Claire Naudin-Ferrand, en attestent. Allez-vous continuer de pourrir la vie de gens qui font bien leur métier, vendent bien leur vin, ne demandent rien à personne, au nom de l’application étroite de textes purement normalisateurs ? Je le crains. Si tel était le cas, la seule voie de sortie de beaucoup serait de quitter votre carcan, de refonder le système sur les principes qui ont été ceux des origines de l'AOC. Je rêve me direz-vous. Bien moins que vous ne le pensez... 


 Voilà, mademoiselle... dont je tairais le nom, j’en ai fini de mon ouvrage et vous prie d’agréer les salutations d’un simple praticien en semelles de crêpe, arpenteur des fins fonds de la France des vignes et du vin, qui appelle de ses vœux qu’en son beau pays l’essentiel prime enfin sur l’accessoire et que, comme au temps des pionniers de l’AOC, les vignerons gardent la main sur la règle qu’ils se sont librement donnée et qu’ils respectent leur patrimoine commun qu’est l’appellation. Bien à vous...

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2 décembre 2008 2 02 /12 /décembre /2008 00:02

 Le vin est un drôle de zèbre. Dans le même mois de novembre à Paris, notre belle capitale un peu encombrée et bruyante, il peut se payer le luxe de se la jouer chic au Carrousel du Louvre, avec le Grand Tasting de Bettane&Desseauve by Floch, et de faire dans le popu à la Porte de Versailles, avec le Salon des Vignerons Indépendants. Ça ratisse large ! Des vieux, des couples, des jeunes, filles et garçons, des bobos, des banlieusards avec caddies, des étrangers qui parlent anglais ou japonais, des acteurs de ciné comme Arditi, des cavistes, mon voisin et ma voisine, des députés et des sénateurs, j’en passe et des meilleurs. Imaginez la gueule que tirent les docteurs de la loi Ledermann face à ces arpenteurs d’allées, verre à la main, qui abomination de la désolation : dégustent du vin. Ça les énerve d’y voir tant de femmes, tant de jeunes gens épanouis et heureux. Va falloir qu’ils réactivent leur boîte à interdit pour que l’ordre et la paix règnent dans notre beau pays. Moi, même si je suis un buveur assis, ça me réjouit de voir tous ces « garçons et ses filles qui ne sont pas de mon âge » venir s’initier, déguster, discuter, prendre du plaisir, en rangs serrés en des lieux aussi divers et opposés.

 

N’attendez pas de moi que je joue de cette diversité et de ces oppositions, ce n’est pas ma tasse de thé. Je laisse cet exercice à ceux qui font profession de maîtres de chapelles. Mon job à moi, si tant est que c’en fusse un, c’est d’être un « humeur » de tendances, pas le genre « avion renifleur », mais plutôt dans le style nez flaireur de l’air du temps. Pour ce faire, la meilleure position, c’est à la fois les pieds sur terre, mais pas le nez dans le guidon, et la tête dans les étoiles sans pour autant se prendre pour une star. Ma première impression face à ces deux évènements c’est que le premier en âge, le salon des vignerons indépendants qui a 30 ans – j’ai inauguré, au temps où j’étais chez Rocard, ce qui était l’un des tout premier Salon des Caves Particulières, quai d’Austerlitz – devient une sorte de must tendance « j’ai mon vigneron près de chez moi… » alors que le tout jeune Grand Tasting lui, sans s’encanailler vraiment, sait se donner des allures décontractées et sympathiques qui tranchent avec le côté un peu coincé de certaines manifestations très Grands Crus ma chère. D’ailleurs, pour preuve que les deux manifestations sentent le « marché », ratissent là où il faut, certains domaines font stands aux deux manifestations. Bref, je me suis donc livré en ces deux « cathédrales » du vin à mon plaisir favori : rencontrer des amis, ceux qui font les vignerons et ceux qui font dans la dégustation.

 

Bavasser debout, un verre à la main moi je veux bien, c’est la loi du genre mais lorsqu’arrive l’heure de becqueter, surtout au Grand Tasting, car au Salon des Indépendants on est plus dans la tradition casse-croutière de la Porte de Versailles, là je suis horrifié. Passe encore pour les sandwiches de Paul et les plateaux sympas « beurre et fromages Bordier » sur pain Poujauran mais ce n’est même pas un pique-nique sympathique où l’on peut prolonger la conversation, boire un bon coup sans s’en jeter sur le plastron, c’est pour moi la désolation, tout le contraire de la convivialité. De grâce, pour l’an prochain, rien que pour ceux qui en ont envie, sans pour autant faire un espace VIP, donnez-nous un pré-carré où l’on pourrait pique-niquer à l’heure du déjeuner. Merci. Bien sûr, comme je n’ai pas le profil type ni de l’esthète du Grand Tasting, ni de l’adepte du salon des vignerons indépendants, je ne vais pas m’amuser à distribuer des bons ou des mauvais points. Ce qui m’intéresse, en tant qu’observateur depuis mon petit espace de liberté, c’est que, chacune dans leur domaine, ces deux manifestations sont au contact direct des consommateurs. Elles peuvent donc servir à mieux prendre en compte leurs préoccupations, leurs désirs. De ce fait, même si elles s’adressent à un public spécifique, qui se déplace pour, elles peuvent jouer un rôle important à la fois dans l’entretien du « stock » des consommateurs de vin et dans le recrutement de « nouveaux consommateurs ».

 

En effet le monde du vin est confronté à un double problème : celui de la transmission et celui de sa perception dans la société. Comment élargir le cercle sans pour autant subir les foudres des hygiénistes ? L’exemple du sujet du journal de France 2 de samedi 29 novembre sur le vin s’embourgeoise et se féminise (http://jt.france2.fr/20h/ cliquez sur samedi 29 puis si vous ne souhaitez pas vous taper tout le journal déplacer le curseur situé sous l'écran pour repérer la séquence qui se situe entre 15:37 et 19:15)  est très parlant. En effet, le reportage se termine sur cette constatation « plus rare, plus convivial qu’il y a 50 ans le vin s’est embourgeoisé mais pour 51% des français il est le deuxième produit à risque pour la santé derrière la charcuterie… » et Laurent Delahouse d’enchaîner « on apprendrait donc à déguster et non plus à se saouler… » en lançant l’interview du Dr Batel médecin alcoologue à l’hôpital Beaujon de Clichy. Tout est dit, le piège se referme, tout y passe : les lieux communs comme dans la bouche de la journaliste l’embourgeoisement, la nouvelle convivialité du vin… la bêtise de l’enchaînement du présentateur… et bien sûr la rhétorique tordue et habile de l’alcoologue : la célèbre loi de Ledermann appliquée au recrutement par le lobby du vin des jeunes et des femmes… Alors, comment faire pour qu’autour d’une approche décomplexée du vin nous puissions faire entendre notre voix sans pour autant être stigmatisé par les grands médias ? La question est posée et, bien plus que des discours, les gens du vin se doivent de réfléchir aux réponses les plus pertinentes à donner. Le long travail de sape des hygiénistes porte ses fruits avec le fameux 51% évoqué (chiffre Credoc), à nous d’entreprendre avec patience la remontée de la pente. Moi dans mon petit espace de liberté je m’y essaie tous les jours et je me tiens à disposition.

 

NB. Je suis abonné au Monde électronique et le jeudi 27 j’ai reçu une proposition : Publiez votre chronique sur le Monde.fr. Alors j’ai décidé de faire une expérience : copier-coller ma chronique de samedi « La surpâture, la goinfrerie et les plaisirs simples de la vie : chronique d’un jouisseur »  http://www.berthomeau.com/article-25231744.html pour voir quel sort la « modération » du Monde.fr lui ferait.

 

Refus. Normal j’y parlais du vin. Le sanitairement correct règne en maître…

 

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1 décembre 2008 1 01 /12 /décembre /2008 00:03

Le retard pris ne se rattrape jamais, ceux qui ont lu mes 2 chroniques précédentes sur "Mes Riches heures en Bourgogne" sur Alain Hasard et Claire Naudin  http://www.berthomeau.com/article-24744971.html  http://www.berthomeau.com/article-24770743.html le savent, nous étions en retard et, comme je déteste attendre je n’aime pas me faire attendre. L’exactitude est, dit-on, la politesse des rois, mais c’est surtout le respect du temps des autres. J’avais rendez-vous avec Pierre-Henry Gagey qui dirige la maison Louis Jadot, sise à Beaune. En poussant la petite porte, ornée d’une simple plaque : Louis Jadot, qui donne sur la cour pavée du siège social, je repensais à l’appellation tombée en désuétude de certaines maisons de commerce : maison de confiance, et je me disais que cela allait comme un gant à cette maison fondée par Louis Henry Denis Jadot en 1859. Négociant-éleveur. « Dans son dictionnaire du monde rural »: les mots du passé Marcel Larchiver à : éleveur écrit « celui qui élève les bestiaux, les chevaux/ Celui qui s’occupe d’amener les vins à leur parfaite maturité » vous noterez que pour le vin tout le soin – même si mon grand-père prenait un soin extrême de ses bœufs pomponnés comme des mannequins avant un défilé – une forme d’attention que je qualifierais de maternelle. Mais, si vous me permettez ce parallèle osé, les maisons de Bourgogne élèvent à la fois leurs propres enfants et ceux qu’ils ont adopté. Le morcellement de la propriété donne à l’assemblage toute son utilité et aussi sa noblesse.

 

La Bourgogne, dans ma vie antérieure, n’a jamais été une terre de mission alors c’est pour moi une terra incognita. J’apprends, j’écoute, c’est très agréable d’apprendre et d’écouter. Converser aussi, et Pierre-Henri Gagey fait parti de ces hommes avec qui il est très agréable de converser. L’homme est ouvert, avec lui on parle de tout, pas que du vin, et c’est agréable. Courtois, fin connaisseur des choses et des hommes du vin, attentif aux tendances des grands marchés tout en maintenant le cap de la tradition d’une maison offrant toute la palette des appellations de la grande Bourgogne, des grands crus aux appellations régionales. Les Gagey, d’abord le père de Pierre-Henry qui dirigeait la maison Louis Jadot depuis 1962 jusqu’au moment où il passera le relais, en 1962, à son fils, ont forgé l’état d’esprit de cette maison de confiance qui se veut et se vit comme l’expression d’une Bourgogne tournée vers le futur et fière de ses origines. En traduction moins lyrique c’est : une excellence jamais démentie, une seule marque, une seule étiquette, une volonté de croissance raisonnée et profitable. Pierre-Henry Gagey insiste sur cette équipe qu’il a formé, c’est sa patte car, comme il le dit, son objectif, lorsqu’il a succédé à son père était de « poursuivre et d’essayer d’améliorer le modèle qui avait été mis en place par trois générations. Ce modèle fonctionnait parfaitement. » Dans mon langage pas toujours policé c’est « tout pour l’entreprise » ce cercle vertueux de l’argent gagné réinvesti dans la maison. Et, pour ceux de nos amis qui voient dans nos grands voisins étasuniens que des grands méchants loups, la maison Louis Jadot reste une maison familiale tout en appartenant à une famille américaine : les Kopf. Plus précisément trois sœurs américaines amoureuses de la Bourgogne. En ces temps de désordres nés d’une forme dématérialisation, d’un excès de virtuel, d’une distance trop grande avec le sens de l’activité humaine, il est réconfortant de trouver des hommes et des femmes pour qui le temps, la confiance, la continuité sont fondateurs de création de vraie richesse www.louisjadot.com/  

 

L’heure de la dégustation approchait et toujours ce retard qui me plombait. Cécile Monthout me conduisait jusqu’au saint des Saints où nous retrouvions Jacques Lardière. Pas le temps c’est un péché mortel que même un acte de contrition et une absolution ne peuvent effacer. Il me fallait repartir vers ma ville capitale. Je reviendrai, bien sûr, avec du temps cette fois-ci. Cependant ça me turlupinait avant de commencer d’écrire cette chronique et puis, comme souvent chez moi le hasard a bien fait les choses, en l’occurrence un livre de Jean-Claude Ray au titre provocateur « Vignerons Rebelles » aux éditions Ellébore que je feuillette en marge d’une dégustation des vins de Savoie tout près de la Place des Victoires, chez « les Fines Gueules ». Je feuillette et je tombe sur, je vous le donne en mille, sur Jacques Lardière. J’achète et je vous livre, comme on dit dans la presse avec pignon sur rue, les bonnes feuilles.

 

« Comment décrire Jacques Lardière ? Face à lui, on a un peu la sensation d’être devant un sage dont on ne comprend pas toutes les paroles mais dont on a la certitude qu’il détient une vérité essentielle : celle de la transformation du raisin en un liquide chargé de mystère que l’on nomme vin.

Jacques Lardière est le maître de chai de la prestigieuse maison de négoce Jadot à Beaune, qui distribue les plus grands crus de la Bourgogne et du Beaujolais. Jacques n’est donc pas vigneron, il n’a que (!) la responsabilité de la vinification des raisins qui lui parviennent de toute la Bourgogne. Le résultat fait de Jacques Lardière le maître absolu de cette discipline.

Vendéen d’origine, il a été happé par le terroir bourguignon, possédé par lui, il est désormais à son service exclusif, il en a fait un absolu. Car ce terroir est unique en son genre. Pour Jacques Lardière, c’est la combinaison d’une géologie et de jets énergétiques provenant du sous-sol, jets dont la fréquence, qu’il nomme « orthofréquence », crée des conditions locales spécifiques donnant naissances à des appellations. Insistons bien sur le vocabulaire : il n’y a pas, en Bourgogne, des terroirs, mais un terroir, véritable matrice, qui rend possible la déminéralisation de la roche en faveur de la vigne et de son fruit. Surgissent alors, sur ce territoire singulier, des expressions, grâce à deux cépages privilégiés, le pinot noir pour les vins rouges et le chardonnay pour les vins blancs. »

 

La suite est à lire dans le livre bien sûr. Pour l'anecdote la RVF place Jacques Lardière à la 66 ième place de son Top 100.

Bon, que voulez-vous, je suis fait comme ça : un je n’aime pas être en retard, deux je déteste donner le sentiment d’être pressé et trois, surtout, je suis très mécontent contre moi-même lorsque je passe à côté des choses essentielles…

Dans le Top 100 du Wine Spectator’s 2007 $22 Louis Jadot Moulin-à-Vent Château des Jacques 2005 .

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30 novembre 2008 7 30 /11 /novembre /2008 00:04

Les écrevisses sauce Nantua mettaient Ange Poli en difficulté, sa cravate réceptionnait en pluie fine les éclaboussures provoquées par un décorticage maladroit. Contrucci, comme les radicaux de la grande époque, ceint de sa serviette de table dont il avait glissé un coin sous son col de chemise, continuait de s’empresser auprès de Chloé comme un sexagénaire en voie d’andropause cherchant désespérément à raviver sa libido. Le Pouilly-Vinzelles manquait de tenue. Franchey d’Espéruche digérait mal la claque d’Angéline mais, en bonne culotte de peau disciplinée, pour qui le chef à toujours raison, fusse-t-il une femme, s’efforçait de ne rien en laisser paraître en cherchant à nouer une conversation suivie avec moi. En dépit de mon aversion naturelle pour ce type de personnage je l’encourageais en acquiesçant poliment à ses propos à l’emporte-pièce. Pour lui, la République, restait toujours la gueuse, alors, sans préméditation, en faisant semblant de prendre Angéline à témoin, je lâchais : « les colonnes infernales de Louis-Marie Turreau, dans la Vendée militaire, ont perpétré un véritable génocide… » Bien sûr, je me gardais bien d'ajouter, car le d’Espéruche devait vomir le communisme plus encore que la gueuse, que le premier à l’avoir écrit, dans « Du système de dépopulation, ou la vie et les crimes de Carrier », c’était Gracchus Baboeuf, père du communisme. Face à la soudaineté et à la brutalité du choc de mes propos à contre-courant, l’ex-lieutenant colonel du 2ième régiment de spahis marocains avalait de travers et virait au cramoisis. Je lui tendais un verre d’eau. Petit à petit, avec dignité et raideur, il retrouvait sa mine blême et la force de me dire d’une voix sourde et éraillée « Vous me surprenez jeune homme, vraiment je suis très heureux de constater qu’il existe encore de vrais nationaux… »

 

À l’instant du choix de notre pitance de luxe, Contrucci, tout en nous laissant consulter la carte, nous avait déclaré avec sa mine de prélat ascétique masquant à peine ses penchants lubriques « si vous voulez bien m’accorder cette confiance je vous propose de suivre mes suggestions… » L’approbation qu’il sollicitait n’était que de pure forme car il était évident que ce cher homme cultivait l’autoritarisme patelin. D’ailleurs, avant même que nous ne répondions, il ajoutait « ici c’est comme à la maison, j’aime que mes convives apprécient ce que j’aime… » avant d’ajouter onctueux « mais si notre belle italienne souhaite choisir elle-même je me rangerai à ses désirs… » Chloé, jamais prise de court, claquait un « mon cher Paul, nos pays – elle se référait à la Corse et à la république de Gênes bien sûr – ont des liens si anciens que ma confiance va bien au-delà de la pure courtoisie, c’est un point d’honneur… » Contrucci gobait avec délice le miellat hypocrite de ma rouée complice. Le badinage semblait être la méthode choisie par monsieur Paul pour nous faire mariner. Ça me convenait bien car, contrairement ce que pensait Contrucci, je n’étais pas demandeur. La vieille fouine du le comprendre car, alors que nous attaquions le lapin à l’Istrettu, arrosé – si j’ose m’exprimer ainsi pour un tel nectar - d’un Château Latour 1947, abandonnant ses assauts, il m’entreprenait sans prendre de gants « mettre Leblond dans notre orbite est vital pour nos affaires. Vous sentez-vous de taille à le mettre au pas ? »

 

Chloé se repoudrait le nez. Un ange passait. Je n’allais pas rendre les armes à monsieur Paul sans lui faire sentir que je détenais, moi aussi, des atouts majeurs dans ma donne « monsieur Contrucci…

-         Paul je vous prie…

-         Paul, sans vouloir vous offenser, un Latour 47 sur un lapin, fusse-t-il à l’Istrettu, n’est pas de bonne politique. Trop méprisant, trop hautain, pour ce petit roturier, sans une once de graisse, fleurant bon le maquis. Voyez-vous, un Côte Rôtie, bien vigneron, sang du terroir, aurait été un bien meilleur compagnon.

Mes deux voisins, je le sentais, n’en croyaient pas leurs oreilles, ce devait être la première fois qu’ils entendaient quelqu’un, un blanc-bec de surcroît, tenir tête à leur inflexible patron. Angélina, elle, appréciait. Contrucci, lui, sans être interloqué, me fixait avec un certain étonnement. « Voyez-vous, mon cher Paul, si vous souhaitez vraiment que nous entamions une longue et belle collaboration sous les meilleurs auspices, il vous faudra me laisser parfois le choix des armes. Si vous estimez que je ne suis pas de taille je n’en ferai pas une maladie, bien au contraire, tout en respectant vos méthodes, j’ai les miennes et je n’entends pas en changer. Je n’ai jamais porté la serviette de qui que ce soit. Paul, vous êtes un pro que je respecte mais sachez que nous ne pouvons travailler que dans la même cour, d’égal à égal. Pour Thomas Leblond, c’est du menu fretin, nous vous apporterons sa tête et sa signature sur un plateau… »

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29 novembre 2008 6 29 /11 /novembre /2008 00:01

Selon le psychiatre Boris Cyrulnik, spécialiste du comportement animal, la crise financière que nous vivons « trouverait son origine dans la surpâture, une hyperprédation qui a décimé de nombreux mammifères. « En 1916, écrit-il dans le Point, cinq cerfs Sika sont implantés sur l’Ile Saint James près de Vancouver. L’île se révèle un paradis car la nourriture est abondante et l’on n’y croise aucun prédateur. Si bien que, quarante ans plus tard, les cerfs sont au nombre de 500. Jusqu’au jour où brutalement, ils se mettent à mourir au point de presque disparaître. Sans même qu’ils aient été victimes d’une maladie ou d’une catastrophe écologique. C’est un endocrinologue français qui va percer le mystère en découvrant que les cerfs meurent par hémorragie surrénale, provoquée par un excès de stress. En fait, les cerfs se sont tellement bien adaptés qu’ils sont devenus trop nombreux. Le nombre de rencontres fortuites a grimpé en flèche et généré chaque fois du stress, les animaux n’ayant plus le temps d’effectuer les rites de salutation ou les brames indispensables à une coexistence pacifique. »

« Un phénomène analogue est l’origine de l’actuelle crise financière […] La recherche du toujours plus a entraîné la surpâture. L’extraordinaire vitalité de l’économie américaine s’est retournée contre elle en provoquant une fuite en avant financière : on emprunte -on construit -on s’endette ; on monte des entreprise - on se casse la figure - on recommence…A force de mettre du charbon dans la chaudière, on la fait exploser. »

La goinfrerie donc, alors que la séquence médiatique qui a immédiatement précédé l’éclatement de la bulle financière semblait découvrir, avec l’envolée du prix des matières premières d’origine agricole, la réalité de la crise alimentaire : les émeutes de la faim titrait-on. La récession aidant cette grande question est rangée dans les oubliettes de nos préoccupations de bien nourris.

La période qui s’ouvre, celle des fêtes de fin d’année, où la ligne de partage entre la convivialité des petits cadeaux dans les petits souliers et des réveillons entre parents ou amis et la pure goinfrerie d’une consommation purement ostentatoire n’est pas très facile à tracer.

Comme notre beau produit, aussi inutile que nécessaire, participe grandement aux festivités, nous ne pouvons faire l’économie d’une petite réflexion sur ce sujet difficile.

N’étant pas un ascète, ni un cul pincé, et encore moins un père la morale, mais plutôt un jouisseur, je crois pouvoir me permettre de donner, non pas une réponse, mais une manière d’être qui tente de concilier le vrai plaisir et la responsabilité.

Adepte pour les plaisirs de bouche des plaisirs simples : une pomme de terre nouvelle à l’eau avec une noix de beurre salé, un œuf mayo, une tartine de bon pain avec des sardines à l’huile, un plat de coquillettes au beurre, une tomate de saison avec un fil d’huile d’olive, de l’Ossau Irraty avec de la confiture de cerises noires, une Reine de Reinette cuite au four, du riz au lait de vache jersiaise, la liste n’a pas de limites… je revendique le droit, en certaines occasions, qui ne sont pas forcément des fêtes obligatoires, de gravir les échelons pour apprécier des produits d’exception, des produits à l’image de ceux qui les font, des produits où la main de l’homme, présente et précautionneuse, laisse encore sa trace. Je revendique aussi, dans ce monde gris, le droit à la fête. Alors, vous comprendrez, qu’entre les plaisirs simples et ceux que l’on qualifie de plus raffinés, un compagnon s’impose toujours, le vin. Lui aussi, comme la nourriture, n’a nul besoin, pour acquérir ses lettres de noblesse, d’être issu de la cuisse de Jupiter.

Vivre avec nos contradictions, les assumer, à la différence du monde animal pour qui la surpâture est souvent fatale, nous pouvons nous adapter, tirer parti de nos excès et comme l’écrit Boris Cyrulnik « je crois que la grande différence est que l’homme s’adapte au monde qu’il invente jusqu’à la surpâture, alors que l’animal s’adapte au monde qu’il subit et invente beaucoup moins. C’est pour cette raison que nous allons encore une fois nous en sortir. »

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28 novembre 2008 5 28 /11 /novembre /2008 00:06

Chers collègues,

 

J’ose vous apostropher ainsi car même si je ne suis, ou plus exactement n’était pour vous, qu’un clanpin avec de la paille dans ses sabots, représentant les péquenots, plutôt porté sur le piccolo qui fait rentrer beaucoup de picaillons dans votre panier percé. François le florentin de Jarnac qu’aimait tant les arts vous a bouté hors du Louvre, malgré les efforts désespérés d’Édouard le byzantin du XVIe, pour vous installer dans un grand machin bâti par un néostalinien, sur l’ancien territoire du pinard : Bercy.


La suffisance fait parti de vos gènes et, les meilleurs d’entre vous sont allés exercer leurs talents en nos belles banques, Daniel Bouton par exemple. Face à nos arguments de représentants d’une économie si réelle, si besogneuse, si bouseuse, vous opposiez la toute puissance de votre credo de la libération des entraves à la concurrence. Ne jamais inquiéter les dieux du marché. Avec les gnomes de l’Union, tels les cabris du Grand Charles, pour nous renvoyer dans nos dix-huit mètres, nous clouer le bec, vous psalmodiez à l’envi : « l’Europe, l’Europe, l’Europe… » Au nom de la non faisabilité communautaire vous avez étouffé dans l’œuf des initiatives qui seraient, en cette période où votre caquet est un peu cloué, d’une grande utilité pour nos entreprises.


Je m’explique. Que lis-je dans le très libéral Figaro : « Il est né le «Fonds stratégique d'investissement français». Doté de 20 milliards d'euros, détenu majoritairement par la Caisse des dépôts, avec l'appoint de l'État, sa vocation sera double : conforter des entreprises saines malmenées par la crise et «sécuriser le capital d'entreprises stratégiques». L'effondrement de la Bourse est en effet propice aux prédateurs. »


Que proposait en juin 1993 les très libéraux rédacteurs de Booz Allen Hamilton dans leurs recommandations pour assurer le développement de la filière vin : « la création d’un fonds d’investissements baptisé FIDEVI »

 

En 2001, page 69, dans mon rapport j’en remettais une louche.

 

Plus récemment j’ai soutenu, sans aucun succès, une initiative de Fonds d’Investissement Interprofessionnel du Vin.

 

Bref, en 15 ans, avec la complicité de certains dirigeants professionnels, chers collègues visionnaires, vous avez réussi à bloquer une initiative qui nous aurait permis d’accumuler une pelote bien utile en ces temps difficiles.

 

Voilà de la belle ouvrage à porter à votre crédit et je ne résiste pas au plaisir de citer la brillante analyse, datant de mars de 2007, de l’économiste en chef de Natixis, Patrick Artus, l’un des vôtres, « les marchés financiers croient n’importe quoi : la liquidité va se raréfier, l’économie chinoise va fortement ralentir, il peut y avoir une récession aux USA, la profitabilité va se retourner à la baisse, la crise du crédit immobilier « subprime »(et les crédits à taux variables) aux USA va déclencher une crise bancaire te financière.

Or toutes ces affirmations sont fausses. La crédulité et l’absence de sang-froid des marchés financiers sont donc remarquables (…) Toutes ces frayeurs sont sans objet. »

 

Comme dirait l'ignoble Bigard au féminin « vraiment vous êtes bons ! »

 

Je vous demande aussi de méditer la lettre qu’adressait à ses investisseurs, en septembre dernier, Andrew Lahde, 37 ans, dirigeant d’un petit fonds californien qui spéculait sur un effondrement des subprimes.

 

« Aujourd’hui je n’écris pas pour jubiler. Eu égard aux souffrances endurées en ce moment par presque tous, ce serait totalement déplacé de ma part. Je n’écris pas non plus pour faire encore quelques prédictions, puisque la plupart de mes prévisions se sont réalisées ou sont en cours de l’être. En fait, je vous écris pour vous dire adieu […]

 

Récemment, en première page de la section C du Wall Street Journal, un gestionnaire de hedge fund qui était lui aussi en train de fermer boutique était cité : »Ce que j’ai appris avec les hedges funds, c’est que je les déteste », disait-il. Je souscris totalement à cette déclaration…Si je me suis lancé dans ce buiseness, c’était uniquement pour l’argent […] Le fait que j’ai pu trouver des idiots à qui leurs parents avaient payés les meilleures écoles et un MBA à Harvard pour être de l’autre côté de mes transactions n’a fait que facilité ma tâche. Je bénis le système qui a propulsé ces gens aux plus hauts postes d’entreprises comme AIG, Lehman ou Bear Stearn et à tous les niveaux du gouvernement […] Aujourd’hui, j’ai décidé de ne plus gérer de l’argent, que ce soit celui d’individus ou d’institutions. La gestion de ma propre fortune me suffit. […] Je cède ma place à ceux qui tentant d’amasser des sommes à neuf, dix ou même onze chiffres. Pendant ce temps ils mèneront des vies minables. Avec leurs réunions qui s’enchaînent les unes derrières les autres, leur agenda rempli pour les trois mois à venir, ils attendront avec impatience leurs deux semaines de vacances en janvier pendant lesquelles ils resteront collés à leur Black Berry. Pourquoi faire ? De toute façon, dans cinquante ans personne ne se souviendra d’eux. »

 

Dur, dur, chers collègues de se faire mettre ainsi le nez dans sa mouise. Bon Prince, je vous dis : « passons tout cela par Pertes&Profits et attelons-nous à bâtir dans le cadre du Fonds souverain, un Fonds Vin pour le développement de nos entreprises du vin, petites, moyennes ou grandes… Je ne vais pas vous faire un dessin tout est écrit : le Crédit Agricole, Unigrains, Sofiprotéol, la Caisse des Dépôts pour constituer le pied de cuve puis, à la grâce des grands chefs du vignoble et du négoce, pour ériger un vrai Fonds Interprofessionnel…du vin » Profitons de l’élan donné, sortons de nos petits pré-carrés insignifiants, donnons-nous les moyens de tenir notre vignoble en confortant ceux qui vont défricher les marchés. Le vin est un produit stratégique.


Je suis têtu. Je n’aime pas perdre lorsque la réalité me donne raison. J’attends votre appel pour que nous remettions sur le métier l’ouvrage. Vous connaissez ma raison sociale, vous avez mes coordonnées, reste plus qu’à passer à l’acte. Je reste à votre disposition. Merci par avance de ce que vous allez faire.

 

Bien à vous.

 

L’ex-pompier de service

 

Jacques Berthomeau

 

PS. vous pouvez aussi faire des commentaires

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27 novembre 2008 4 27 /11 /novembre /2008 00:03

Lorsque je suis arrivé en 1978 à l’Office des Vins de Table, ONIVIT, au 232 rue de Rivoli, rue prestigieuse s’il en était en ce temps-là car elle abritait dans les soupentes du palais Louvre le tout puissant Ministère des Finances. Nous, nous n’étions que les préposés à l’extinction d’un produit en voie de disparition : le vin de table, pompiers impuissants et vilipendés. Dans le tour de table du Conseil de Direction, un homme à l’accent rocailleux de l’Aude, se distinguait en contre-point de l’incontournable Antoine Verdale, président de la CN des Coopératives Vinicoles, audois lui aussi, de Trèbes, il s’agissait d’Yves Barsalou, de Bizanet. L’homme pesait déjà lourd à la tête de la puissante Fédération du Crédit Agricole et en étant l’inspirateur du Val d’Orbieu naissant. Comme j’étais un jeune loup plein d’ambitions - J les 2 audois, chacun à leur manière, me cultivèrent comme une plante en pot. C’est donc Yves Barsalou qui le premier me parla de Marc Dubernet et de l’œnologie et ce nom s’identifiera, d’une certaine manière, pour moi, à la transformation du Midi rouge campant sur son passé en un Langued’oc croyant en son avenir. Je suis sûr que l’ami Pascal Frissant, audois d’adoption, contestera, avec sa plume lyrique, son verbe fleuri, ce souvenir sans doute politiquement incorrect mais absolument pas irrespectueux de l’histoire de ce pays. La parole est donc à Marc&Matthieu Dubernet.


Question N°1
 : Supposons que je sois un jeune bachelier passionné par le vin. Je cherche ma voie Sur le site du CIDJ je lis « L’œnologue, grâce à ses connaissances scientifiques et techniques, accompagne et supervise l’élaboration des vins et des produits dérivés du raisin. Sa principale activité concerne la vinification. Il conseille les viticulteurs dans le choix des cépages et la plantation des vignes. Il surveille les fermentations en cave, le traitement des vins et leur conditionnement. Il effectue des analyses et procède à des recherches technologiques visant à l’amélioration des cépages. L’œnologue peut également être chargé de la distillation ou fabrication des alcools à partir des marcs de raisins. Enfin, connaisseur et expert en dégustation, il participe à la commercialisation des vins en France et à l’étranger. En raison de la concurrence rencontrée désormais par la production française de vin sur le marché mondial, l’œnologue remplit une fonction stratégique pour le maintien ou l’amélioration de la qualité des produits de la viticulture française. »

Présenteriez-vous ainsi votre métier à une jeune pousse Marc et Matthieu Dubernet ?

Réponse de M&M Dubernet : La première chose à dire, c’est que le diplôme d’œnologue reste aujourd’hui un sésame reconnu pour les cadres qui veulent travailler dans la filière vin en France en particulier.

La définition que vous donnez, que nous partageons volontiers, montre avant toute chose la grande diversité des métiers exercés par les œnologues. Ces métiers font appel à des compétences très différentes. On peut alors se demander quel rapport y a-t-il entre l’œnologue analyste de laboratoire, manipulant des techniques analytiques de souvent sophistiquées, et l’œnologue parlant 4 langues, agent commercial d’une grande marque de Champagne ?

La réponse est simple mais bien large: le vin ! , et dans une certaine mesure l’exercice de la dégustation.

En fait le titre d’œnologue est devenu un socle commun générique, auquel pourront se greffer de nombreuses spécialisations, qui sont nécessaires au jeune diplômé qui désire postuler aux postes les plus intéressants.

La conséquence de cette situation est l’indispensable évolution et l’enrichissement du cursus même de la formation des œnologues, qui doit désormais inclure des spécialisations très fortes dans les domaines de la vigne, de la chimie analytique, de l’assurance qualité, du marketing, du droit, ou de l’ingénierie etc.…La réforme engagée récemment qui pousse la formation de 2 à 3 ans (niveau master) va dans ce sens.

Dans une entreprise de laboratoire conseil comme les laboratoires Dubernet, nous sommes fortement concernés par ce besoin fort de spécialisation. Les compétences de notre entreprise sont ainsi multiples :

-         Œnologue conseil : expert en technique de vinification, de travail et assemblages des vins, il a une connaissance précise des marchés, il est une force de proposition accompagne les vignerons et les négociants, dans l’élaboration et le travail de leurs vins.

-         Analyste : les techniques d’analyse œnologiques ont fortement évolué ces 30 dernières années et utilisent des technologies hautement sophistiquées et performantes. D’importantes connaissances en chimie analytiques, et un savoir-faire très pointu sont devenus indispensables pour répondre aux sollicitations d’un marché du vin toujours plus exigeant en termes de sécurité alimentaire.

-         Recherche et développement : nous sommes en permanence attelés à des projets de recherche appliquée pour améliorer sans cesse l’outil de laboratoire, et apporter un service analytique toujours plus complet, rapide, économique et précis.

-         Qualiticien : les laboratoires d’œnologie sont aujourd’hui pratiquement tous accrédité ISO 17025 (équivalent ISO 9000 pour les laboratoires dans le monde entier). Cette accréditation est une marque essentielle de garantie sur la qualité et le professionnalisme des laboratoires d’œnologie, reconnue dans le monde entier.

 

Question N°2 : « Monsieur Seignelet, qui avait assis Bertrand face à lui, donnait à mi voix des leçons d’œnologie, récitait des châteaux, des climats, des millésimes, émettait des jugements, prononçait du vocabulaire : puis il voulut enseigner à son fils aîné le rite grave de la dégustation. » Tony Duvert « L’île Atlantique » éditions de Minuit 2005. Dans le fameux manga « Les Gouttes de Dieu » «  Le héros est présenté comme œnologue alors que manifestement c’est plutôt un œnophile doué et cultivé.

Quel est votre sentiment sur ce glissement sémantique Marc et Matthieu Dubernet ?

Réponse de M&M Dubernet : Savoir parler du vin est un art qui ajoute une dimension culturelle et profondément humaine aux métiers du vin. Il n’est pas réservé aux œnologues qui cependant doivent le faire leur. En revanche, son seul exercice n’autorise pas celui qui le met en œuvre de revendiquer le titre d’œnologue.

Question N°3 : Moi qui ne suis qu’un pur amateur aussi bien pour le vin, que pour la musique ou la peinture je place ma confiance non dans les critiques mais plutôt dans ma perception au travers de l’œuvre du génie du compositeur ou du peintre. Pour le vin l’affaire est plus complexe entre l’origine, le terroir, le vigneron, le vinificateur, le concepteur du vin, l’exécution est à plusieurs mains. La mise en avant de l’œnologue, une certaine starification, correspondant par ailleurs avec l’esprit du temps, à une forme de marketing du vin, ne risque-t-elle pas de nous priver d’une forme de référence objective, celle de l’homme de l’art, nous aidant à mieux comprendre l’esprit d’un vin ?

Réponse de M&M Dubernet : Cette dimension culturelle et humaine du vin ne peut pas s’accorder durablement avec une forme de pensée unique qui nous serait imposée par telle ou telle forme de globalisation. En prenant du recul, on voit bien que le système de starification n’est finalement qu’un phénomène mis en exergue par la loupe des médias. S’il a permis à quelques domaines de spéculer à la hausse le prix de leurs vins, c’est une bonne chose ! Mais ne nous arrêtons pas qu’à cela…

Les grands vins sont le fruit de la rencontre de cépages, de terroir, d’un millésime, d’un travail de longue haleine du vignoble, et d’une œnologie qui arrive en fin de compte pour aider à révéler les potentialités déjà présentes dans le raisin mûr. Pour nous, il est donc exagéré de dire l’œnologue conseil est « l’homme d’un vin » : il est un élément d’une chaîne de savoirs faire dont chaque maillon est indispensable. L’homme du vin, c’est le vigneron qui a su trouver les justes équilibres, et s’entourer des bons conseils, depuis l’implantation de son vignoble jusqu’à la mise en bouteilles. L’œnologue conseil, en coulisse, accompagne le vigneron dans l’élaboration de son vin, en lui apportant son savoir technique et scientifique.

Une fois le vin fait, le juge suprême reste le consommateur. Si certains peuvent penser que tout est sur l’étiquette, à terme c’est bien le vin dans la bouteille qui compte. Là encore, pas de pensée unique qui tienne. Le bon vin, c’est celui qui donne du plaisir à boire et à partager, au bon moment, et avec les bonnes personnes…

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27 novembre 2008 4 27 /11 /novembre /2008 00:00

"La vente d'alcool sera interdite dans les stations services à tout moment, et non plus seulement entre 22 heures et 6 heures du matin. "

La question posée par cette mesure envisagée par le gouvernement est simple : est-ce que le lieu d’achat influe sur la consommation excessive ?

Le commun des mortels se rend dans une station-service pour faire de l’essence ou du gazole, vérifier la pression de ses pneus, acheter de l'huile ou du liquide pour son lave-glace. Il est rare que madame dit à monsieur ou l'inverse : " chéri va chez Esso acheter du Bonnezeaux..."  Alors, dans quelles circonstances, lors du paiement du carburant, l’automobiliste peut-il être « tenté » d’acquérir une ou plusieurs bouteilles d’alcool ? Pour sa consommation personnelle à domicile car il rentre chez lui, ou pour ne pas arriver les mains vides chez des amis, ou si c’est sur une aire d’autoroute pour profiter d’une offre régionale… Bien sûr, ça n'exclu pas les biberonneurs en solitaire mais le fait d’être au volant ne confère aucune dangerosité à l’acte d’achat car, si c’était le cas, il faudrait interdire aux Grandes Surfaces soit de vendre du carburant, soit de vendre de l’alcool car les consommateurs y viennent avec leur petite auto. La consommation in situ, dans la voiture, en solitaire ou en bande, n’est pas liée au lieu d’achat : l’alcool consommé peut-être acheté n’importe où. Sauf à entrer dans un système de prohibition, ou d’instaurer un permis de consommation, raréfier les lieux d’offre d’alcool n’aura aucun effet sur la consommation excessive : un addict, étant donné la nature irrépressible de son besoin trouve toujours le produit pour l’assouvir. L’exemple des pays à monopole démontre que ce système n’a que peu d’effet sur le développement de la consommation, bien au contraire. À trop jouer sur des associations de pensée simplistes : achat d’alcool par un automobiliste/chauffard à taux d’alcoolémie élevé on détourne l’opinion publique des véritables causes de la consommation excessive.

Dans le même ordre idée j’ai du mal à comprendre que l’interdiction des « opens bars », que j’approuve, se fasse sous une forme qui interdirait « toute proposition gratuite du produit » ce qui équivaut à interdire toute forme de dégustation. Que les « open-bars » soient un « classique des soirées étudiantes qui favorisent le binge-drinking », c’est une évidence. Cependant les données de l'enquête Escapad qui a révélé qu' « au cours des 30 derniers jours, près de la moitié des jeunes de 17 ans disent avoir bu au moins cinq verres d'alcool en une seule occasion », ce qui est la définition du binge drinking", ne signifient pas que ce soit le monopole des soirées étudiantes. Cette d’alcoolisation violente touche tous les jeunes en des lieux les plus divers : caves d’immeubles, la rue, les fêtes privées…etc. à la campagne, dans les bourgades comme les villes. En revanche, le fait de proposer de déguster gratuitement, dans une manifestation commerciale ou au domaine, un produit alcoolisé, en l’occurrence dans la majorité des cas : du vin, outre qu’en général on recrache le produit, ne peut en aucun cas s’assimiler à une incitation à l'alcoolisation excessive ; à l'extrême de ce raisonnement : servir du vin à des amis lors d'un repas à la maison ou offrir une bouteille lorsqu'on est invité pourrait s'assimiler à une pernicieuse incitation à s'alcooliser.

Bref, quand en finira-t-on de laisser à penser à l’opinion publique qu’une lutte efficace contre l’alcoolisme peut se réduire à des mesures de ce type ? L’obsession de la communication : une mesure annoncée occupe l’espace médiatique pendant une période donnée puis est chassée par une autre ou par un évènement et tout le monde l’oublie jusqu’à l’irruption d’un nouveau leurre. Pour exemple, le logo femmes enceintes sur les étiquettes : à quoi sert-il, qu’elle est son efficacité ? Comme le montre si bien le récit du Dr Olivier Ameisen, http://www.berthomeau.com/article-24275011.html

 http://www.berthomeau.com/article-24403391.html ce n’est pas l’accès au produit, ce n’est pas le flacon qui provoque la consommation excessive. C’est l’angoisse, le stress, le mal être, la solitude, les accidents de la vie, l’exclusion qui poussent certains de nous à chercher, à se réfugier, à tomber dans le piège d’un ailleurs qui serait meilleur. Nous ne sommes plus au temps d’un alcoolisme des classes « dangereuses », mais face à une société éclatée, peu solidaire, confrontée aux contradictions de la consommation excessive de tout et, comme le temps que nous vivons, la première crise de la mondialisation, est anxiolytique, substituer à la responsabilité individuelle une responsabilité collective basée sur l’interdit produit plus d’effets pervers que de résultats probants.

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