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15 mars 2012 4 15 /03 /mars /2012 00:09

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L’ANPAA a-t-elle définitivement gagné la partie dans cette affaire ?

 

La réponse est non, l’affaire n’est pas pliée.

 

En effet, la Cour de Cassation juge le droit « la cour d’appel a violé le texte susvisé » l’article L. 3323-4 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005.

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 26 février 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles.

 

Mais il faut souligner, pour les petits loups et louves consternés, que la cour d’appel de Versailles n’est pas liée par l’arrêt n° 215 du 23 février 2012 (10-17.887) de la Première chambre civile de la Cour de Cassation.

 

Si celle-ci, comme la Cour d’Appel de Paris, confirme le jugement du 19 décembre 2006 du TGI de Paris 4ième chambre 1ier section, et que son arrêt de renvoi est de nouveau attaqué par les mêmes moyens, le pourvoi sera examiné par l'Assemblée plénière de la Cour de Cassation (le Premier Président plus trois représentants de chaque chambre: le président, le doyen et un conseiller). Après cet arrêt solennel, en cas de nouvelle cassation, la nouvelle cour de renvoi devra s'incliner.

 

Pour mémoire je vous rappelle les considérants de la Cour d’Appel de Paris :

 

« Considérant que, au regard de l’exigence d’une analyse stricte des restrictions apportées, le juge n’a pas a procéder à des distinctions que la loi ne fait pas, tandis que compte tenu des dispositions légales et réglementaires comme des usages professionnels rappelés, la représentation figurative de professionnels appartenant à la filière de l’élaboration, de la distribution et de la commercialisation de vins de Bordeaux comme le caractère avenant, souriant, jeune, en tenue de ville, de personnes ou groupe de personnes, présentant différentes marques de vins en levant le bras en tenant un verre, avec une impression manifeste de plaisir ne peuvent être utilement reprochés dès lors que les autres exigences de la législation et réglementation applicables sont respectés, une telle représentation n’étant pas, par elle-même de nature à inciter à une consommation abusive et excessive d’alcool étant observé que par essence la publicité s’efforce de présenter le produit concerné sous un aspect favorable pour capter la clientèle et non pour l’en détourner.

 

Considérant que de la même manière est vaine l’argumentation, au regard des dispositions de l’article L 115-1 du code de la consommation, comme de la définition donné par l’arrangement de Lisbonne, et des termes de la recommandation du Bureau de Vérification de la Publicité on ne saurait réduire, l’expression <facteurs humains >que visent ces différents textes, aux usages locaux entourant un produit, c’est à dire des usages de production spécifiques d’une région, ce qui revient à limiter les facteurs humains aux seuls aspects de la production et à exclure l’activité de négociation, de distribution et de commercialisation, à méconnaître la transmission d’un savoir-faire personnel entre générations successives qui caractérise les professionnels de la filière du vin, y compris dans le domaine de la distribution »

 

La chronique est ICI link

 

Arrêt n° 215 du 23 février 2012 (10-17.887) - Cour de cassation - Première chambre civile

 

Cassation

 

Demandeur(s) : L’association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA)

Défendeur(s) : Le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB) ; et autre

 

Sur le premier moyen :

Vu l’article L. 3323-4 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 ;

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le 15 avril 2005, puis courant décembre 2005, le Conseil

interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB) a mis en oeuvre une campagne publicitaire d’affichage ; que soutenant que celle-ci contrevenait aux dispositions de l’article L. 3323-4 du code de la santé publique relatives à la publicité en faveur des boissons alcooliques, l’Association nationale de prévention de l’alcoolisme et addictologie (ANPAA) a assigné le CIBV en interdiction des affiches litigieuses et condamnation au paiement de dommages-intérêts ;

 

Attendu que pour rejeter cette demande, l’arrêt retient que les affiches litigieuses représentent divers professionnels appartenant à la filière de l’élaboration, de la distribution et de la commercialisation de vins de Bordeaux et met en scène des personnes ou des groupes de personnes souriant, jeunes, en tenue de ville, levant le bras en tenant un verre avec une impression manifeste de plaisir et qu’une telle représentation ne peut être utilement reprochée au CIBV dès lors qu’elle n’est pas par elle-même de nature à inciter à une consommation abusive et excessive d’alcool, étant observé que par essence la publicité s’efforce de présenter le produit concerné sous un aspect favorable pour capter la clientèle et non pour l’en détourner ;

 

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résulte de ces constatations que lesdites affiches comportaient des références visuelles étrangères aux seules indications énumérées par l’article L. 3323-4 du code de la santé publique et visaient à promouvoir une image de convivialité associée aux vins de Bordeaux de nature à inciter le consommateur à absorber les produits vantés, la cour d’appel a violé le texte susvisé;

 

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 26 février 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles

 

Président : M. Charruault

Rapporteur : Mme Richard, conseiller référendaire

Avocat général : Mme Falletti

Avocat(s) : SCP Odent et Poulet

 

Sur le fond cet arrêt est étrange car la Chambre Civile de Cassation est lapidaire : elle casse l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris car elle estime les « références visuelles étrangères aux seules indications énumérées par l’article L. 3323-4 du code de la santé publique »

« Promouvoir une image de convivialité associée aux vins de Bordeaux de nature à inciter le consommateur à absorber les produits vantés. »

 

Absorber, quel vilain mot, sous-entendu comme une éponge, le liquide prohibé. Le mot vin n’est pas cité : il ferait tache. Alors la Cour lâche les produits vantés. Si les professionnels du vin présentés sur les affiches contestées – chacun avait fourni une attestation établissant qu’il était bien viticulteur, négociant, maître de chai… – avaient tirés la gueule tout serait allé pour le mieux dans le meilleur des mondes. Très franchement lorsqu’on regarde les affiches les protagonistes sont assez figés dans une pause devant le photographe. Mais, point plus important : par ce type d’argument les hauts magistrats prennent le parti de la prohibition car leur argumentaire fort lapidaire sous-entend qu’une publicité ne doit pas inciter les consommateurs à acheter le produit. Je ne vois pas en quoi lever son verre de vin en souriant incite à une consommation abusive. Je rappelle que nous sommes en l’espèce dans le champ de la Santé Publique et non dans celui d’une morale puritaine. N’oublions jamais que les magistrats restent des hommes imprégnés eux-aussi de leurs préjugés. À nous de gagner la bataille de l’opinion publique pour inverser cette tendance lourde.  

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14 mars 2012 3 14 /03 /mars /2012 00:09

« Il faut remonter au SMS du samedi 14 mars : bashung est mort.

Le b en minuscule, dû à la sobre typographie du numérique et des cristaux liquides. »

Manset est chez des amis, « probablement aux environs de Rochefort, une ville, par sa topographie, sa linéarité, le quadrillage des rues, qui paraissait à ce moment-là le mieux correspondre à une révélation de cette sorte, intemporelle et froide. »

« Quelques fleurs dans un vase. C’était des roses, bien sûr, la chambre et son grand lit de métal »

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61 ans, à 19h42 à l'hôpital Saint-Joseph à Paris, un cancer du poumon terrassait Alain Bashung en chimio depuis septembre 2007. Je passais Bleu Pétrole en boucle. Né le 1er décembre 1947 d'un père qu'il n'a pas connu et d'une mère ouvrière, Bashung avait été envoyé à l'âge d'un an vivre chez sa grand-mère, à Wingersheim, en Alsace.

Bashung était un enfant du rock. Il avait grandi en écoutant Elvis Presley, Gene Vincent ou Buddy Holly et clôturait sa dernière tournée par une reprise de Nights in white satin des Moody Blues. Visionnez la vidéo ci-dessous c’est un adieu.


De Gaby à …

« Dans les années 80, je me suis vraiment éclaté avec mes quatre musiciens. On se prenait pour les Doors ! On faisait un accord, il sonnait tout de suite. J’ai trop longtemps regardé passer les trains, j’aurais dû les prendre plus tôt... Mais une fois dedans, j’étais bien dans mes pompes, j’avais une bonne énergie. »


Bleu pétrole…

« J’avais envie de chanter à nouveau. Pendant l’enregistrement, je pensais à la période de mai 1968. Ne gagner que du fric n’était pas une obsession, on vivait avec nos utopies. On parlait de la paix dans le monde, on y croyait. Puis nous sommes passés au monde du Cac 40. On a perdu de la naïveté, je le regrette. Je crois qu’il est important d’apporter un point de vue sur les événements, pour ne pas entretenir la confusion dans laquelle nous vivons. »


Dans « Tant de nuits », il évoque la haine : « Parce que c’est un sentiment que je ne pratique pas. La haine m’empêche d’avancer. Il m’est arrivé des choses où je me suis dit : “Là, tu devrais haïr”, mais je n’y arrive pas. En général, la vie s’est chargée de régler les comptes des personnes qui m’ont fait des saloperies. La chanson pose quelques questions. L’un décide d’oser dire à l’autre qu’il a trahi et qu’il a haï. Mais qui est responsable ? L’histoire est-elle finie ou va-t-elle reprendre ? Est-ce que l’on est devenu un peu plus adulte entre-temps ?


Alain Bashung habitait dans une riante maison, au bas de Barbès, vers Château Rouge, villa Poissonnière, une allée devenue privée entre la rue Polonceau et celle de la Goutte d’Or, où je suis allé rêver au temps où je me voyais en écrivain. « Une chaumière du passé, toute courte, toute rigolarde, et ses massifs de groseilliers, de tulipes, ses rosiers épineux, ses flutes en petites corolles.. »

Alain s’excusait de ce luxe – bien relatif d’ailleurs – de la possession,  comme une entorse à ses idées « Tu sais, j’ai acheté ça à un moment… maintenant on ne pourrait plus… »


1947, est un bien meilleur millésime que la mien 48, cette année l’une des années les plus chaudes du XXe siècle, « s’inscrivant dans un cycle d’années sèches (1945, 1946, 1947 et 1949). Le souvenir qui en reste aujourd’hui est pourtant celui d’un millésime de légende.

Rarement le ciel s’était montré plus favorable : du début avril à la fin octobre, la France ne connut que la chaleur, caniculaire à partir de juin. Rappelant celle qu’avait subie le pays deux ans plus tôt, la sécheresse fut particulièrement pénible pour la population qui dut faire face à des restrictions d’eau. Pour la vigne, elle constitua en revanche une véritable bénédiction.

Certes, dans un premier temps la situation ne parut pas extraordinaire. Une petite pluie de juin contraria la floraison, entraînant une diminution du volume de la récolte et une concentration des substances dans les baies. En été, les orages relancèrent la végétation qui commençait à souffrir cruellement de la sécheresse. Au bout du compte, le beau temps entrecoupé de quelques pluies au bon moment permit d’obtenir une maturité inégalée.

En Champagne, les vendanges commencèrent le 5 septembre. Il fallait remonter à 1893 pour avoir une date aussi précoce.

En Bourgogne, ce millésime fabuleux fut à l’origine de vins puissants. Depuis 1865, on n’avait pas récolté des raisins aussi riches en sucre.

Les bordeaux rouges comme les vins du Rhône furent de la même veine. Complets et charpentés, les premiers ont valu à l’année d’être souvent présentée comme l’un des millésimes du siècle. Beaucoup sont toujours à l’apogée et certains n’ont pas encore épuisé toutes leurs réserves.

Malheureusement, il est aujourd’hui très difficile de se procurer ce millésime. Qui ne rêve pourtant de savourer un grand sauternes de 1947 à la teinte jaune brunâtre et aux arômes de fruits confits ? Sans parler d’un Cheval Blanc du même millésime, aussi mythique aujourd’hui que les Yquem 1921, Mouton-Rothschild 1945, Latour 1961 ou Petrus 1982. »

 

Ce sont les meilleurs qui partent les premiers. Salut Alain mon frère, j’irai même un de ces 4 manger des huîtres au Wepler place de Clichy. « Le taxi emmenait là-bas, le Wepler… un peu de citron, la similigrimace de connivence et puis les larges mains comme des araignées de mer qui allaient se poser vers le méplat de quelques serviettes pliée ou dépliée… du pain et la pichenette de beurre… »

 

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11 mars 2012 7 11 /03 /mars /2012 00:09

Même si je ne suis pas très friand des cérémonies officielles de remises de trophées par les professionnels de la profession à leurs pairs méritants je reconnais que voir Catherine Ringer sacrée artiste-interprète féminine de l'année aux dernières Victoires de la musique me fait grand plaisir et a visiblement fait plaisir à l’intéressée trop souvent oubliée par l’establishment parisien. Emue, la chanteuse a confié être « vraiment très heureuse de compter encore pour vous, d'être utile » et ses premiers remerciements sont allés à Fred Chichin son compagnon décédé fin 2007 à l'âge de 53 ans d'un cancer fulgurant « qui m'a tellement aidé et appris de choses ».

 

C’est une voix singulière que celle de Catherine Ringer, un concentré d’énergie, une vraie bête de scène. Femme courage qui a décidé de poursuivre seule l'aventure musicale entamée avec les Rita Mitsouko pour surmonter la douleur de la disparition de Fred Chichin. Son premier opus en solo « Ring n'rol » sur lequel plane l’ombre bienveillante, de Fred est un bouleversant hymne à la vie et à l'amour.

 

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10 mars 2012 6 10 /03 /mars /2012 00:09

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Les Halles centrales de Paris, construites par Victor Baltard entre 1854 et 1870, superbe bâtiment à structure métallique dans lequel les murs sont remplacés par des Halles, c’est le Ventre de Paris que l’ère pompidolienne rayera de la carte à coups de pelleteuses pour y laisser un trou béant jamais vraiment cicatrisé. Zola dans son roman Le Ventre de Paris en fait un monstre, comme le seront plus tard le grand magasin dans Au Bonheur des Dames, l’alambic dans l'Assommoir ou la locomotive dans la Bête humaine.


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Le ventre de Paris, les Halles, où la nourriture afflue, converge, s'entasse, pour nourrir le bourgeois et le populo est l’image de l’Empire de Badinguet, Napoléon le petit, où la bourgeoisie dirigeante lancée dans sa chasse aux millions, goûte la volupté cuisante des agioteurs, s’étourdit dans la danse formidable des francs or, s’empiffre, contente d’elle, la bedaine pleine et heureuse se ballonnant au soleil et roulant jusqu'au charnier de Sedan.

La description est réaliste, crue, loin de nos précautions langagières, Zola n’a pas peur des mots, il les maîtrise, leur donne tout leur sens. Avec lui, « les roquefort, eux aussi, sous des cloches de cristal, prenaient des mines princières, des faces marbrées et grasses, veinées de bleu et de jaune, comme attaqués d’une maladie honteuse des gens riches qui ont trop mangés de truffes… »  51PAuBbed6L__SS500_.jpg

« Autour d’elles, les fromages puaient. […] Là, à côté des pains de beurre à la livre, dans des feuilles de poirée, s’élargissait un cantal géant, comme fendu à coups de hache ; puis venait un chester, couleur d’or, un gruyère, pareil à une roue tombée de quelque char barbare,  des hollande, ronds come des têtes coupées, barbouillées de sang séché, avec cette dureté de crane vide qui le fait nommer têtes-de-mort. Un parmesan, au milieu de cette lourdeur de pâte cuite, ajoutait sa pointe d’odeur aromatique. Trois brie, sur des planches rondes, avaient des mélancolies de lunes éteintes ; deux, très secs, étaient dans leur plein ; le troisième, dans son deuxième quartier, coulait, se vidait d’une crème blanche, étalée en lac, ravageant les minces planchettes, à l’aide desquelles on avait vainement essayé de le contenir. Des port-salut, semblables à des disques antiques, montraient en exergue le nom imprimé des fabricants. Un romantour, vêtu de son papier d’argent, donnait le rêve d’une barre de nougat, d’un fromage sucré, égaré parmi les fermentations âcres. Les roquefort, eux aussi, sous des cloches de cristal, prenaient des mines princières, des faces marbrées et grasses, veinées de bleu et de jaune, comme attaqués d’une maladie honteuse des gens riches qui ont trop mangés de truffes ; tandis que, dans un plat, à côté, des fromages de chèvre, gros comme un poing d’enfant, durs et grisâtres, rappelaient les cailloux que les bouc, menant leur troupeau, font rouler aux coudes des sentiers pierreux. Alors, commençaient les puanteurs : les mont-d’or, jaune clair, puant une odeur douceâtre ; les troyes, très épais, meurtris sur les bords, d’âpreté déjà plus forte, ajoutant une fétidité à la cave humide ; les camembert, d’un fumet de gibier trop faisandé ; les neufchâtel, les limbourg, les marolles, les pont-l’évêque, carrés, mettant chacun leur note aigüe et particulière dans cette phrase rude jusqu’à la nausée ; les livarot, teintés de rouge, terribles à la gorge comme une vapeur de soufre ; puis enfin, par-dessus tous les autres, les olivet, enveloppés de feuilles de noyer, ainsi que ces charognes que les paysans couvrent de branches, au bord d’un champ, fumantes au soleil. La chaude après-midi avait amolli les fromages ; les moisissures des croûtes fondaient, de vernissaient avec des tons riches de cuivre rouge et de vert-de-gris, semblables à des blessures mal fermées ; sous les feuilles de chêne, un souffle soulevait la peau des olivet, qui battait comme une poitrine, d’une haleine lente et grosse d’homme endormi ; un flot de vie avait troué un livarot, accouchant par cette entaille d’un peuple de vers. Et, derrière les balances, dans sa boîte mince, un géromé anisé répandait une infection telle, que des mouches étaient tombées autour de la boîte, sur le marbre rouge veiné de gris. »


  

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6 mars 2012 2 06 /03 /mars /2012 16:00

422622_3512234292698_1477124101_3226595_1655893505_n-1-.jpgEn notre beau pays, l’inflation à deux chiffres terrassée par le Jacques Delors l’archange de l’indice des prix, présentait l’avantage pour monsieur et madame tout le monde de rembourser en monnaie de singe ses emprunts. Nos voisins allemands qui ont connu, sous la République de Weimar, l’inflation à 3 chiffres : soit la valise de marks pour payer sa miche de pain, la vivent comme la vérole tombant sur le bas-clergé. Comme vous pouvez le constater l’inflation, ange ou démon, reste au bout du compte, lorsqu’on tire trop sur la ficelle, une fuite en avant qui débouche sur des potions amères.

 

C’est un peu ce qui guette le monde, dit des Grands Vins, ceux de Bordeaux bien sûr, qui fait ses délices d’être devenu un produit de placement, un produit financier. Ça chauffe ! Les traders jouent du fluteau. Appâtés par l’odeur du blé les déçus des produits dérivés se ruent sur le GCC. Grand bien leur fasse moi ça ne m’empêche pas de dormir. Mais pour que la pression monte dans la chaudière il faut pousser les feux, alimenter en combustible la machine Denis Papin du vin. Reste aussi que le marché des grands vins, comme celui des commodités ou des matières premières, est le terrain de jeu des nouveaux grands qui n’ont plus rien d’émergeants. Nuit de Chine, nui câline, l’usine du monde fabrique aussi des milliardaires…

 

Comme dans le monde des affaires pour réussir il faut toujours être au bon endroit au bon moment : tel est le cas d’un excellent commerçant qui a su imposer son jugement, j’ai nommé Robert Parker. Il fait la pluie et le beau temps avec ses notes sur 100. Les esthètes se gaussent, raillent. Les propriétaires vivent dans l’angoisse tels des pères attendant leur dernier-né dans les couloirs d’une maternité. L’ami Pousson oscille entre Voici et le Financial Times, évoque des vignerons sans âme, de médiocres boursicoteurs et quelques acnéiques du vin, qui attendent « depuis quelques jours, tels les oracles de la Pythie… » les notes d’Uncle Bob sur les Bordeaux 2009. La référence restait bien sûr le dernier millésime du siècle en date : 2005 où le Bob avait accordé deux 100/100. Moi qui ne suis qu’un simple observateur des cuisines et dépendances du monde du vin, et des grands vins plus encore, je l’ai défendu lors de la première affaire Jay Miller. link ce qui ne m’a pas empêché de soutenir Vincent Pousson dans le Jumillagate pour dénoncer les agissements du même Jay Miller et de son compère Sancho Campo.

 

J’écrivais en juin 2009 « Rober Parker fait du biseness. Il a bâti un système de référence et non de valeurs au sens moral du terme. Ses lecteurs lui accordent un certain crédit. Le suivent. À lui de le préserver. S’il l’écorne, l’amoindrit, c’est son problème. Qu’il subisse les effets de l’arroseur arrosé du fait de ses positions « intransigeantes » est dans l’ordre des choses mais en rajouter, faire des trémolos sur l’éthique relève du jésuitisme ou du pharisianisme. Ceux qui lavent plus blanc que blanc comme ceux qui jettent la première pierre m’ont toujours paru suspects et ils me font peur car, comme tout un chacun, je pourrais être la cible de leur entreprise de purification ou de leur lapidation. À plusieurs reprises dans mes chroniques j’ai plaidé en défense pour des personnes jetées à la vindicte publique. Le grand Robert Parker n’a nul besoin d’un petit avocat comme moi pour contre-attaquer et je n’ai nulle envie de le défendre. Plus généralement, pour ce qui concerne ceux qui exercent la même profession que Robert Parker, l’adoption d’un code de déontologie donnant un cadre clair et connu à leur métier est le moins qu’ils puissent faire pour lever la suspicion. En tant que bloggeur, afin de garder ma liberté de plume, je me suis fixé une règle simple : être fidèle à moi-même en assumant mes contradictions. Mes seuls juges c’est vous. Mais je n’ai aucun mérite puisque je ne vis pas de ma plume. »

 

Je ne retire rien à cet écrit. Tout ça pour dire que je ne poursuis pas Robert Parker d’une quelconque vindicte mais que ses 19 100/100 Beausejour Duffau Lagarrosse, Bellevue Mondotte, Clinet, Clos Fourtet, Cos D’Estournel, Ducru-Beaucaillou, L’Evangile, Haut Brion, Latour, Léoville Poyferré, La Mission Haut Brion, Mondotte, Montrose, Pavie, Petrus, Le Pin, Pontet Canet, Smith-Haut-Lafitte rouge et  Pape Clément blanc, relève de l’hyperinflation : « trop de bonnes notes tue les notes… » Vous pouvez lire ce qu’écrit Tyler Colman sur son blog Dr Vino link (merci au dénicheur Vincent Pousson)

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« Quand les bornes sont dépassées il n’y a plus de limites… »

Alors comme ce qui est excessif est dérisoire comme l’écrivait Beaumarchais ou Talleyrand, moi, tel Gaston Chaissac, j’en deviens désultoire et j’ai décidé d’ajouter au 100 de Parker : 20 pour que le total fût de 120.

 

Pourquoi 120 ?

 

Parce sans vin !

 

Je m’explique : mon ajout de 20 portera sur tout ce qui n’est pas le vin dans le jugement sur le vin :

 

-         Le chic de la robe de la propriétaire, le niveau de sa mise en plis, Hermès or not Hermès ;

-         Si besoin est, la cote de l’architecte ayant dressé les plans du chai ;

-         La cuisson du roastbeef lors du déjeuner ;

-         La qualité de la conversation du propriétaire ou des propriétaires ;

-         La fragrance du parfum de la fille du ou des propriétaires ;

-         L’absence ou la présence de cravate chez le fils du ou des propriétaires ;

-         Les mocassins à picots du proprio et les repettos de la fille du proprio ;

-         Si besoin est, la cylindrée et l’origine géographique du 4x4 ou de la berline  des propriétaires;

-         La pertinence des cancans, l’amour ou la détestation des voisins et la capacité à me fournir un vrai vélo pour faire une plongée dans le vignoble ;

-         L’adhésion ou non à l’Amicale du Bien Vivre dites des Bons Vivants ;

-         Le handicap au golf du propriétaire ;

-         L’état de l’hippodrome de Libourne ;

-         Le nombre de fois où il a été question des chinois dans la conversation ;

-         Leur fréquentation ou non de l’Envers du décor ;

-         Les parts de chasse  ;

-         Face de bouc or not face de bouc ?

-         La cote de leur attachée de presse et de son sac ;

-         Tweet ou pas Tweet ?

-         Ont-ils ou non osé donner leur point de vue sur le parrain du vignoble ?

-         La liste n’est bien sûr pas exhaustive, vous pouvez m’aider à la compléter...

 

Pour rester dans le désultoire, trouver un autre Robert à 100 lieues de Parker, je vous offre une vidéo de Robert Gagnon, chanteur autodidacte québecois, dans la cachette de l'Homme : de très belles images, des paroles un peu niaises mais chanter enfin prendre soin de la terre ... c'est se dire qu'après tout le vin n'est qu'une vieille et belle boisson qui survivra à toutes les agressions des marchands du temple...

 

 

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6 mars 2012 2 06 /03 /mars /2012 00:09

La cuisine, le lieu carrelé, peinture alimentaire, éclairage dru, avec ses ustensiles : le fouet, le chinois, l’écumoire, le faitout, les casseroles, les poêles…, son fourneau ou sa plaque pyrolyse ou ses feux de gaz, son four, ses livres de recettes, son garde-manger ou son frigo, sa cave à vin, ses bruits, ses vapeurs, ses odeurs, a été et reste encore le domaine des femmes, des mères surtout. Faire la cuisine au quotidien pour la famille avec son lot de courses n’est pas une sinécure, c’est du travail masqué qui n’entre pas dans le calcul du PIB. Pour autant la situation reste-t-elle figée, les mentalités ne seraient-elles pas en train d’évoluer ?

 

Oui, sans aucun doute, même si je reste frappé par la pesanteur de mes collègues masculins. J’en parle à mon aise car, depuis toujours, j’occupe la cuisine, c’est mon territoire et, lorsque je suis allé chez notre Luc Charlier j’ai pu apprécier ses talents de cuisinier, bien supérieur aux miens.

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Ceci écrit, n’exerçant pas la profession de sociologue, ne sondant ni les têtes, ni les cœurs, je ne vais pas ce matin vous entraîner sur un terrain que je ne connais pas bien. Mon approche est beaucoup plus empirique, totalement subjective, centrée sur le blog d’une nouvelle venue en notre blogosphère : Samia Iommi Amunategui avec Cuisine&Sentiments. Samia et moi sommes amis sur Face de Bouc et sa nouvelle enseigne m’a de suite alléchée : les sentiments quoi de plus, j’hésite sur le qualificatif mystérieux, excitants, troublants, comme ingrédients.

 

Le sentiment dans son acception première c’est le fait de sentir, d’éprouver, c’est une sensation. Cuisine et sens vont bien ensemble d’autant plus que le sentiment, les sentiments sont souvent enfants de la passion, de l’émotion. Voltaire dans son Dictionnaire Philosophique écrit « Tous les autres sentiments entrent ensuite dans celui de l’amour, comme des métaux qui s’amalgament avec l’or : l’amitié, l’estime, viennent au secours ; les talents du corps et de l’esprit sont encore de nouvelles chaînes. »

 

Pure alchimie que l’alliance de cuisine et sentiments, où ce que fait la main est en prise directe avec le cœur, ses pulsions, ses envies, ses douceurs, ses excès, ses emportements, ses rêves… Quoi de plus troublant que ces mains dans la farine qui pétrissent… quoi de plus étrange que de monter des œufs en neige ou de lier un beurre blanc… Le vocabulaire de la cuisinière : abaisser la pâte, écumer une confiture, émincer, monder, effiler, réserver, singer… relève d’une dramaturgie où le tour de mains, le ressenti intime, capte, magnifie les ingrédients les plus humbles en leur incorporant juste ce qu’il faut de sentiments éprouvés. Aucun besoin de balance, le dosage est fonction du cœur. Les plats, les mets, le gâteau, le soufflé, la tomate farcie, l’œuf sur le plat… sortent alors de la routine cuisinière, purement alimentaire pour entrer dans la cour des sentiments.

 

Samia fait donc partie de ces jeunes femmes d'aujourd'hui qui entrent  dans leur cuisine de leur plein gré, sans ployer sous le joug des tâches ménagères – bien sûr, il leur faut chaque jour nourrir leur petite famille mais souvent leurs compagnons mettent la main à la pâte -  pour répondre à une impérieuse nécessité : celle du plaisir, en donner et en recevoir… Que voulez-vous je trouve cette motivation bien plus enthousiasmante que celle de bien des consœurs de Samia, bloggueuses dites de cuisine, qui nous égrènent des recettes à la queue-leu-leu comme des écheveaux de saucisses qu’on suspend dans le cellier sans trop savoir qu’en faire.

 

Alors comme vous commencez à me connaître : quand j’aime je conte ! En deux coups de claviers, en m’inspirant du questionnement d’Ingrid Astier dans Cuisine Inspirée, j’ai expédié à Samia une batterie de questions – normal non – et j’ai reçu des réponses que je vous invite à découvrir car Samia n’est pas adepte du précuit, du réchauffé mais d’une langue vive, pleine de fraîcheur spontanée, où ses mots attisent la gourmandise, aiguisent les sens et prouvent bien que sous sa main Cuisine&Sentiments relève de l’alchimie du cœur qui a ses raisons que la raison ne connaît point…

 

L’harmonie d’un plat ?

 

Samia : Qui dit harmonieux, dit équilibre… Celui que je cherche entre moi et mes prolongements, la casserole, le fouet, cette saleté de plaque électrique. Une fois ces ustensiles à ma botte, l’harmonie est dans la cuisson. On peut s’évertuer à marier les meilleurs ingrédients (produits frais, produits de saison, viandes de premier choix…) si les carottes sont trop cuites et la viande sans fondant… c’est fichu.

L’harmonie dépend de la flamme !

 

Une saveur ?

 

Samia : Le poivre ou plutôt les poivres… les longs, les ronds, les pilonnés, les broyés… Ce qui est fascinant avec le poivre c’est que selon son origine et la manière dont on le consomme, il exhalera des centaines de saveurs.

En ce moment je pactise avec le Diable, pardon, le Poivre de Tasmanie.

 

L’infaillible puissance de séduction ?

 

Samia : Éclats de foie gras poêlés ? Saint-Jacques en écrin de truffe ? Eh non, la Carbonnade Flamande.

Pour la préparer on découpe, on déglace, on arrose et enfin on laisse mijoter 4 heures… Elle se fait attendre la demoiselle flamande !

Elle associe l’alcool au bœuf fondant. L’ivresse à la chair !

Un plat puissant qui a le goût sucré du mystère grâce à un ingrédient inattendu.

(Révélation sur Cuisine et sentiments link )   Myriam-0952.JPG

Un plat qui a de l’humour ?

 

Samia : Un plat raté présenté avec le sourire et cache-misère de circonstance.

 

Un mets érotique ?

 

Samia : On nous parle souvent d’ingrédients aphrodisiaques, si l’on torpille un plat de gingembre, de chocolat, d’huitre… il ou elle est censé tomber sous le charme. Pour moi, l’érotisme en cuisine passe par le verbe, l’art de donner envie de croquer la pomme sans même avoir vu la pomme ! 

A partir de là, on s’en donne à cœur joie : Tiphaine Campet de link  et auteure de Leçon de séduction, 50 recettes gastroromantiques, nous propose pour le plaisir, des « Jeunes foies en Fleur », un « Maquis de Sade », des « Souris d’agneau entremêlassées ». Quant à moi, j’offre une crème fouettée maltraitée, un tartare à faire rougir, des bijoux indiscrets…

 

Mon imaginaire et la gastronomie ?

 

Samia : La cuisine, parfois ça vous possède comme un démon : on a une idée, et il faut s'y mettre, au fourneau, ça devient une obsession... Le diable ne serait-il pas derrière tout ça ? On en revient au péché de gourmandise...

 

Un mets ironique est-il possible ?

 

Samia : Un plat fait de mes jolies mains, bichonné pendant 2 bonnes heures, emprisonnée dans ma cuisine d’1m2. Enfin, je le sers, et on me dit : hum, c’est bon… C’est Picard ?

 

La dernière bouchée ?

 

Samia : Elle est la promesse que nous nous retrouverons bientôt (le plat et moi).

Un plat c’est toujours une affaire à suivre...

Affaire à suivre sur Cuisine&Sentiments : link avec Samia

Myriam-0972.JPG

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4 mars 2012 7 04 /03 /mars /2012 00:09

Certains vont me taxer de VDP (ce qui ne signifie pas Vin de Pays mais Vieux démagogue Populiste) qui sort de la naphtaline des vieilleries d’une France engloutie, perdue dans le brouillard d’un temps où nos grands-pères sont allés se mélanger à la terre de l’Argonne, de la Somme, ou comme cette butte rouge qui fait référence à la « butte Bapaume », un lieu-dit inhabité dans la Marne, et à un sanglant épisode sur le front de Champagne, pendant la Première Guerre Mondiale.

 

Que voulez-vous pendant toute ma jeunesse j’ai entendu égrener des « morts pour la France » face au monument aux morts de la Mothe-Achard alors que tous ces braves gars, paysans et ouvriers majoritaires, ont donné leurs jeunes vies ou sont revenus estropiés, gazés, pour un conflit que les élites dirigeantes ont pris soin d’envelopper dans un patriotisme qui masquait les causes profondes de cette horrible guerre. Je déteste les va-t’en-guerre, les insoucieux du sang, de la sueur et du courage innocent des autres. Merci de ne pas vous approprier la France, son drapeau, assumez votre passé, occupez-vous du présent et cessez d’accommoder l’avenir avec des fonds de sauce rances.

 

Ils me saoulent mais plus profondément si j’aime ce chant c’est surtout pour le beau contraste entre la valse lente de sa musique et les paroles. La butte rouge me prend aux tripes, m’émeut, me renvoie à là d’où je viens et, n’en déplaise à certains, je ne l’oublie pas. Je ne les oublie pas ces pauv’gars…

 

 

 

Sur c'te butte là, y avait pas d'gigolette,

 

Pas de marlous, ni de beaux muscadins.

Ah, c'était loin du moulin d'la galette,

Et de Paname, qu'est le roi des pat ‘lins.

 

C'qu'elle en a bu, du beau sang, cette terre,

Sang d'ouvrier et sang de paysan,

Car les bandits, qui sont cause des guerres,

N'en meurent jamais, on n'tue qu'les innocents.

 

La Butte Rouge, c'est son nom, l'baptême s'fit un matin

Où tous ceux qui grimpèrent, roulèrent dans le ravin

Aujourd'hui y a des vignes, il y pousse du raisin

Qui boira d'ce vin-là, boira l'sang des copains

 

Sur c'te butte là, on n'y f'sait pas la noce,

Comme à Montmartre, où l'champagne coule à flots.

Mais les pauv'gars qu'avaient laissé des gosses,

I f'saient entendre de pénibles sanglots.

 

C'qu'elle en a bu, des larmes, cette terre,

Larmes d'ouvrier et larmes de paysan,

Car les bandits, qui sont cause des guerres,

Ne pleurent jamais, car ce sont des tyrans.

 

La Butte Rouge, c'est son nom, l'baptême s'fit un matin

Où tous ceux qui grimpèrent, roulèrent dans le ravin

Aujourd'hui y a des vignes, il y pousse du raisin

Qui boit de ce vin-là, boira les larmes des copains

 

Sur c'te butte là, on y r'fait des vendanges,

On y entend des cris et des chansons.

Filles et gars, doucement, y échangent,

Des mots d'amour, qui donnent le frisson.

 

Peuvent-ils songer dans leurs folles étreintes,

Qu'à cet endroit où s'échangent leurs baisers,

J'ai entendu, la nuit, monter des plaintes,

Et j'y ai vu des gars au crâne brisé.

 

La Butte Rouge, c'est son nom, l'baptême s'fit un matin

Où tous ceux qui grimpèrent, roulèrent dans le ravin

Aujourd'hui y a des vignes, il y pousse du raisin

Mais moi j'y vois des croix, portant l'nom de copains

 

 

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1 mars 2012 4 01 /03 /mars /2012 00:09

En ce temps de grande votation les processions, tout au long de la semaine, vont se succéder autour des vaches, cochons, couvées qui n’en pourront mais vu que ce n’est pas à eux qu’iront les attentions du gars ou de la fille en quête de suffrages. Mes fonctions de Secrétaire Autoproclamé de l’Amicale du Bien Vivre dite  des Bons Vivants exigent que je me tienne en retrait de ce rabattage mais je ne puis me dérober lorsque la sollicitation est venue d’un étranger, haut placé, en attente d’exercer le métier auquel il est destiné par sa naissance.

 

Trêve de protocole, nous y sommes allés à l’heure du laitier, sans tambours ni trompettes, comme de simples pékins, en Barbour huilés tout de même, casquettes de tweed et pantalon du même acabit, grolles de Savile Road. Nous avions l’air de gentleman-farmer venus tâter le cul de beaux  Southdown ou de big Large White ou de grands Hereford pour enrichir nos immenses troupeaux se prélassant en nos domaines héréditaires. Bref, foin des journalistes, nous étions là pour la juste cause des produits de terroir et plus particulièrement des fromages qui puent.

 

Afin de ne pas nous faire repérer nous conversions en français. Tout s’est admirablement passé, mon hôte, dont la complexion naturelle allie le pâle et le hâle rougeoyant du côté de ses larges pavillons, suite aux nombreux canons dégustés tenait un beau teint bordeaux. Pour autant, loin de se départir de son flegme, lorsque nous retrouvâmes, les membres du bureau de l’ABV,  dans un petit salon, il nous gratifia d’un petit speech qu’il m’a autorisé à publier sur mon « espace de liberté »

 

«  Mesdames, messieurs,

 

La seule notion de « normes minimales d'hygiène » a de quoi glacer le cœur de tout Français normalement constitué ! Je la trouve, quant à moi, terrifiante, comme tous ceux de mes compatriotes qui pensent que la vie ne vaut plus d'être vécue si l'on n'a plus le loisir de savourer les défis à l'hygiène que sont certains produits, créé avec amour par l'humanité - la France surtout - à partir de la planète de Dieu !

Dans une société irréprochable sur le plan bactériologique, qu'adviendra-t-il du Brie de Meaux, du crottin de Chavignol, ou du bleu d'Auvergne ? Dans un futur aseptisé, expérimental, génétiquement organisé, quelle place y aura-t-il pour l'archaïque fourme d'Ambert, le gruyère de Comté mal formé ou l'odorant Pont-l'Evêque ? L'obsession de l'homologation, de la catégorisation, de l'homogénéisation et de la pasteurisation viendra-t-elle émasculer les robustes roqueforts, reblochon vacherin et même le sempiternel camembert ? Cela paraît peut-être stupide à dire, mais une part importante de la civilisation européenne réside dans le génie et le savoir-faire que se transmettent d'âge en âge les auteurs de ces illustres concoctions... »

 

Tonnerre d’applaudissements.

 

Le protocole ne me permettant point de répondre à notre hôte je me suis contenté  d’évoquer autour d’une flute de champagne offerte par l’ami Olivier Borneuf de Brittle « Charles de Marguetel de Saint-Denis, seigneur de St-Evremond, un des écrivains les plus excentriques du Grand Siècle dont l'oeuvre paradoxale, désinvolte, semble bâtie à coups d'improvisations, comme si elle venait injurier les textes méthodiques de Boileau ou de Racine. Saint-Evremond a vécu deux existences : une première en France dans l'état-major de Condé, une seconde en Angleterre à partir de 1661, après avoir dû s'exiler. On n'a que peu de renseignements sur la vie anglaise de Saint-Evremond ; on sait seulement qu'il a été à Londres courtier en champagne et qu'il y a écrit la plupart de ses opuscules, toujours avec beaucoup de goût et de discernement, jusqu'à être un des premiers à révéler dans le détail, en 1677, les multiples facettes du génie comique de Molière. Et comme l'a remarqué Raymond Dumay, il a eu avant tout le monde l'idée lumineuse d'inventer la « généalogie éblouissant » du champagne, à travers ces propos vraisemblablement rédigés en 1683 : « Léon X, Charles-Quint, François Ier, Henri VIII avaient tous leur propre maison dans Ay pour y faire curieusement leurs provisions. Parmi les plus grandes affaires du monde qu'eurent ces grands princes à démêler, avoir du vin d'Ay, ne fut pas un des moindres de leurs soins. »

 

Le champagne était lancé.

 

Et si bien qu'en quelques décennies il allait s'installer partout et avoir la réputation d'être un vin de luxe. Ce qui veut dire aussi celle d'un vin cher, par rapport à tous ses rivaux et concurrents, et ne serait-ce que les bourgognes (...) »

 

Même si vous pensez que je décoconne mon hôte, pas encore couronné, et moi-même sommes ensuite allés jusqu’à la Gare du Nord à bicyclette sans escorte (David Cobbold voulait nous ouvrir la voie avec son anglaise mais nous avons décliné)  et sur le  quai de l’Eurostar, loin des bruissements de la campagne, nous avons échangés une poignée de mains cordiale et même si la victoire du Pays de Galles plaisait à son cœur mon hôte pris soin de me remercier de l’avoir accueilli dans un club aussi fermé que l’ABV et m’a tendu un pot de confitures confectionné par ses soins.

 

Bien évidemment je ne puis révéler l’identité de mon hôte sinon je vais faire tirer les oreilles par Alain Juppé le patron du Quai d’Orsay, car nous ne les avions point prévenus, mais je puis vous certifier que les propos de son speech sont stricte vérité. Ils ont bien été prononcés tels quels.

 

Le Nyetimber’s Classic Cuvée 2003 ci-dessous, fait à partir de Chardonnay, Pinot Noir et Pinot Meunier est élaboré dans le Sussex. Il a été couronné champion du monde des vins mousseux au concours organisé par le magazine Italien dédié au vin Euposia. Un grand dégustateur s’est risqué à délivrer ce commentaire « Il a des arômes de mandarines, de vanille et citrons, ainsi qu’un goût de sablé et d’abricot, la note biscuitée joue un rôle de soutien » et notre hôte s’est contenté de répondre : « Bollinger La Grande Année ! »

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26 février 2012 7 26 /02 /février /2012 00:09

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Je vous le concède la chanson de Fernandel : Félicie aussi n’est ni un modèle de finesse, ni de bon goût, les féministes puiseront dans ses paroles de quoi alimenter leurs argumentaires, mais que voulez-vous je ne puis me départir à son égard d’une réelle indulgence car  elle fleure bon ce qu’était le music-hall des années d’avant-guerre où le populo, le fameux peuple dont certains se gargarisent sans jamais vraiment le fréquenter, venait se distraire, s’amuser. Plaisir simple, comme la guinguette, la java et l’anisette… on mettait ses habits du dimanche… on se pomponnait… on dansait… on se fréquentait… on oubliait les dures et longues journées de travail. Loin de moi de regretter ou de peindre en rose ce temps mais plutôt  un simple rappel à celles et ceux qui, prétextant la difficulté du temps, passent par pertes&profits la diminution du temps de travail, les congés-payés et la sécurité sociale. La société a changé, le tertiaire des bureaucrates a pris le pas sur les cols bleus et les paysans, mais il n’empêche qu’il ne faut pas oublier ce temps où les gens de peu n’étaient, après tout ce que sont les ouvrières et les ouvriers des pays émergeants : de la main d’œuvre corvéable à merci venant du fin fond des campagnes et bien contente de toucher un  salaire.  De nos jours que vaut la valeur travail d’un produit lorsqu’elle ne représente qu’une infime partie de son prix ?  Pas grand-chose aux yeux de ceux qui se goinfrent de la différence. Travail forcé, horaires démentiels, travail des enfants, est-ce là notre nouvel horizon, celui que nous allons proposer à nos enfants ?

   
Je reviens à Fernandel avec une chanson plus consensuelle : Le Tango Corse.

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25 février 2012 6 25 /02 /février /2012 16:00

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De mon temps, que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître le Salon de l’Agriculture était inauguré par la Ministre de l’Agriculture vu que le locataire du château prisait assez peu les flaveurs de la bouse de vache, des fromages qui puent et la bousculade. C’était l’homme des arbres de Latché qui préférait les arbres aux culs des limousines. Donc, le samedi matin nous étions mobilisés pour servir de garde rapprochée du Ministre de l’Agriculture qui allait arpenter les allées du salon selon une programmation scientifiquement étudiée par le cabinet. En attendant le Ministre nous battions la semelle dehors en compagnie du président du Salon, le sénateur de l’Oise Michel Souplet entouré du gotha des présidents des organisations agricoles. Tout cela était plutôt bon enfant même si les socialistes n’ont jamais vraiment fait un tabac du côté des agriculteurs et de leurs dirigeants officiels mais bon ce n’est pas parce qu’on n’aime pas qu’on ne demande pas une petite faveur par ci par là.  201008254c74878902c6c-0

De mon temps le salon de L’Agriculture appartenait au Ministère de l’Agriculture via une structure dénommé CENECA mais année après année les comptes étaient plombés par le coût exorbitant de l’organisation de la grande ferme. Nous avons du le vendre à un organisateur privé moyennant une rallonge d’équilibre pour la fameuse ferme qui attire tant les petits parigots. Bref, le Ministre de l’Agriculture était doublement chez lui porte de Versailles. Pour en revenir à notre fonction d’accompagnateur elle consistait bien sûr à faire cercle autour de notre cher Ministre afin qu’il puisse se mouvoir le plus aisément possible, à calmer les ardeurs des forces de l’ordre qui ont toujours tendance à confondre le dit ordre avec le circulez y’a rien à voir alors que le dit Ministre est justement là pour se faire voir, à canaliser la meute des journalistes, photographes, caméramans, qui bien évidemment veut coller au basques de l’inaugurant, à repérer la bonne dame ou le bon pépère qui veut serrer la main du Ministre ou lui donner son sentiment sur la politique et lui frayer un passage jusqu’à lui ; distiller des infos ou des tuyaux à ceux des journalistes capables de les comprendre ; à réceptionner avec les OP du Ministre les multiples cadeaux distribués au Ministre par les exposants… Tâches tout à fait à la portée de grands esprits comme nous mais peu gratifiantes car nous ne pouvions  ni nous empiffrer ni siffler un verre vu que nous étions toujours derrière forme moderne de la voiture-balai.

 

Légendes des photos : N°1 février 1985 les quotas laitiers viennent d'être instaurés : Mitterrand à son arrivée à Fontaine-lès-Vervins, avec le nouveau député-maire de Vervins, Jean-Pierre Balligand (à gauche) et Henri Nallet.

N°2 On aperçoit au quatrième plan dans son célèbre imper blanc le Ministre de l'agriculture de l'époque un certain Michel Rocard qui manifestement n'est pas la vedette du show présidentiel.

 

Donc j’ai suivi 3 Ministres : Rocard, Nallet et Mermaz… Le premier était la bête noire du grand lorrain dont tout le monde a oublié le nom mais il était le chouchou des sondages ce qui rendait sa promenade plaisante car le bon peuple des visiteurs ne rêvait que de serrer la main à celui qu’ils aimaient bien. De plus Rocard est un type qui dans ce genre d’occasion, en vieil habitué des congrès pourris du PSU, savait soutenir n’importe quelle conversation avec qui l’alpaguait pour refaire le monde. Il fallait lui tirer la manche. Le second, Henri comme l’appelaient les dirigeants agricoles, il faisait partie de la maison ayant été salarié de la FNSEA. L’archétype du Ministre technicien, attentif, ne confondant pas une Bazadaise avec une Charollaise ni ne s’inquiétant de la lactation d’un mouton  de Lacaune. Parcours précis, sans faute, reconnaissant le président du herd-book, le vice-président des producteurs de noix de Grenoble ou la secrétaire-générale des oies du Périgord. Donc pas de problèmes sauf parfois avec nos petits amis de la Confédération Paysanne toujours en mal de reconnaissance. Le dernier, dont plus personne se souvient du nom même son grand conseiller spécial gardien de la doctrine Jean-Pierre Philippe (le coq chanta 3 fois), il expédiait l’inauguration avec la rouerie d’un notable de la IVe république, souriant, désarmant, posant des questions d’élève de CM2, s’en tirant avec les oreilles et la queue même après la tornade de la première réforme de la PAC.

 

Salon de l'agriculture : 5 conseils aux candidats sur TF1 News

 

« Les principaux candidats à la présidentielle vont arpenter les allées du salon de l'agriculture. Bain de foule, dégustations : une occasion unique de gagner la sympathie de l'électorat. Deux fins connaisseurs du lieu leur donnent quelques conseils pour réussir cet exercice :

Jouer la carte de la proximité...Mais maîtriser ses nerfs…Manger les produits du terroir et caresser les bêtes… Et parfois, se faire tout petit…...Surtout quand on est écolo…

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