Les railleurs SVP camembert ! Il existe un fromage des Riceys, petit frère du plus connu Chaource et, sur ce terre fromagère située en Champagne méridionale, y’en a d’autres : l’Ervy, le fromage de Barberey ou de Troyes, le Soumaintrain et le Saint-Florentin. Chacun porte le nom des villes-marchés où ils se vendaient.
Ils ont tous un facteur commun : le caillé lactique à égouttage lent fabriqué à base de lait entier.
Comme tous nos beaux fromages de terroir le Chaource à une longue histoire (voir plus loin) mais comme l’écrit Pierre Fargues de l’Institut de l’élevage sous le titre La barque de Delphes :
« Le propriétaire d’une barque est amené, petit à petit, à changer toutes les planches de sa barque. Tant et si bien qu’à la fin, la question se pose de savoir si c’est toujours sa barque. Oui, répond le propriétaire : toutes les planches ont bien été changées, mais le lien entre les planches est resté les mêmes.
Cette histoire illustre bien ce que nous rencontrons souvent en AOC. Lors des réunions avec les producteurs attelés à la révision des conditions de production en Chaource, le premier constat est que tout a changé ! Mais quand en fin de réunion, ce même groupe déguste le fromage, il reconnaît que la « typicité » (ce qui le rend unique) est restée et ce qui a changé, c’est la qualité. Ce ne serait pas les éléments techniques qui feraient la typicité, mais le lien entre ces éléments. »
2 gros mots à mes oreilles : typicité et qualité mais le lien entre la race des vaches, leur alimentation, le lait et la technique fromagère sont bien au cœur de nos AOC.
En effet, à partir des années 50, « les progrès techniques » transforme le système en profondeur : de mixtes (Brunes des Alpes, Tachetées de l’Est, Normandes, Pies Noires) les troupeaux se tournèrent exclusivement vers la Prim’Holstein.
Les tourteaux entrèrent progressivement dans la composition des rations des vaches laitières. L’ensilage d’herbe et de maïs se substituent aux betteraves fourragères dans les années 65-70, pour compléter le fourrage.
Parallèlement, le process de fabrication se codifie : les fromagers cherchent alors à produire un Chaource d’une qualité régulière. Les efforts portent une meilleure gestion des conditions de transformation par la pratique de l’ensemencement lactique. La généralisation des tanks à lait à la ferme permet une homogénéisation des conditions de collecte.
Mais comme le note le Syndicat de Défense « La seconde évolution majeure fut le travail thermique du lait. La pasteurisation ou la thermisation, même si elles ne sont pas systématisées, permirent de répondre aux attentes du marché tant sur le plan sanitaire qu’au niveau d’une régularité gustative des produits. Désormais, les consommateurs achetaient leurs fromages au supermarché. La production et la commercialisation du fromage avaient changé d’échelle »
Conséquence : « Les petites laiteries qui ne pouvaient suivre ces évolutions techniques ou faute de relève, cessèrent leur activité. L’instauration des quotas laitiers en 1984 fut un élément supplémentaire de modification, un certain nombre d’opérateurs se retirèrent. Aujourd’hui, la tradition fromagère de Chaource se perpétue avec 5 opérateurs, 2 artisans et 1 fermier (voir plus loin) qui élaborent chaque année 1800 tonnes de Chaource. »
Aujourd'hui, 90 producteurs de lait sont impliqués dans l'AOC chaource.
« En matière de transformation, trois fromageries industrielles structurent le paysage : les deux de la société Lincet (Saligny, près de Sens, et Vaudes) et celle des fromagers d'Armançon à Auxon. Parmi les opérateurs, il faut compter également sur une fromagerie artisanale (Callewært à Chaource) et trois activités fermières : le Gaec des Tourelles, au Mesnil-Saint-Georges, sur la commune d'Ervy-le-Châtel ; l'EARL de la Jersiaise à Beugnon ; et le Gaec Leclerc à Soumaintrain. »
En conclusion le Syndicat de Défense écrit :
« Cependant, l’évolution des compléments en tant qu’éléments de base des rations et la régression conjointe de l’utilisation de l’herbe au cours des 30ndernières années, s’inscrivent comme autant d’éléments de rupture dans la cadre de l’appellation. Le cahier des charges, s’il ne sera pas basé sur une alimentation exclusivement en herbe, devra néanmoins lui accorder une bonne place. »
Don’t acte !
Le Chaource est un fromage à pâte molle et croûte fleurie à prédominance lactique, le Chaource est exclusivement fabriqué avec du lait de vache entier dont la composition n’est pas modifiée (il ne subit ni d’ajout ni de soustraction de matières grasses ou de protéines).
Sa pâte, légèrement salée, a une teneur en matière sèche d’au moins 40 % et contient au moins 50 % de matière grasse dans l’extrait sec.
Sa croûte doit être recouverte de façon dominante de moisissure blanche de Penicillium Candidum. La présence d’une surface marbrée ou tourmentée due à la présence de Geotrichum est admise.
Il se présente sous forme de cylindre plat. Il est fabriqué en deux formats :
- Un grand format dont le poids est compris entre 450 et 700 grammes à partir de la durée minimum d’affinage et caractérisé par le diamètre intérieur du moule, compris entre 110 et 115 millimètresUn petit format dont le poids est compris entre 250 et 380 grammes à partir de la durée minimum d’affinage et caractérisé par le diamètre intérieur du moule, compris entre 85 et 90 millimètres.
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L'appellation d'origine contrôlée (AOC) a été délivrée au fromage de chaource en 1970. En 1996, le petit fromage rond à pâte molle et à croûte fleurie bénéficie de l'appellation d'origine européenne (AOP).
Histoire du fromage Chaource.
« Le fromage Chaource était déjà connu au XIVème siècle. Charles Bel, de passage à Chaource, se le fit présenter et Marguerite de Bourgogne, épouse de Louis X le Hutin, l’exigeait à sa table. Au XIXème siècle, les fermières du Chaourçois fabriquaient déjà un fromage appelé « fromage de Chaource ». Il devait être fabriqué avec du lait gras. Il existait des marchands de fromages qui collectaient ce produit dans les fermes et le revendaient sur des marchés régionaux. Le Chaource était l’objet d’un important commerce et avait acquis sa renommée sur les principales places françaises : Paris, Lyon, Dijon, Toulouse, Reims, Metz, Douai, Clermont-Ferrand, Annecy et Lons-le -Saunier.Ce fromage doit son nom à la petite ville de Chaource, située dans l’Aube à 30 kilomètres au sud de Troyes. Mais on retrouve les premières traces du Chaource ou équivalent, dès le XII ème siècle, alors que des fermiers du village régalaient par leurs présents, l’Évêque de Langres, d’importantes quantités de fromages. Charles le Bel, de passage à Chaource, se le fit présenter, et Marguerite de Bourgogne l’exigeait à sa table. Au début du XIXème siècle, un commerçant nommé M. DEOTTE lançait le Chaource et l’acheminait à Paris, en voiture à cheval. L’herbe riche et parfumée des prairies argileuses donne une saveur délicate au lait des 3 races de vaches dominantes dans la région : la Brune des Alpes, la frisonne et la tachetée de l’Est. »
Les Tourelles : dix ans de chaource fermier au lait cru
« À Ervy-le-Châtel, au hameau du Mesnil-Saint-Georges, l'air du bocage d'Armance s'inspire à la fois de la Bourgogne et de la Champagne. On n'est pas très loin de Soumaintrain. On est aussi tout proche de Chaource. Ici, l'herbe est verte et grasse et l'eau n'est jamais très loin. À la ferme des Tourelles, les vaches laitières exploitent ce filon. Attachées aux lieux depuis des générations, les prim'hosltein du Gaec des Tourelles sont même à la source de fromages fermiers au lait cru, devenus des fleurons de la gastronomie locale. » Libération Champagne 5 janvier 2009