Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
25 mars 2022 5 25 /03 /mars /2022 06:00

DE NOS FRÈRES BLESSÉS de Hélier Cisterne : critique du film

L’autre soir j’étais accoudé au bar de la Passerina et le papa de Justine me brancha politique : moi le rocardien pensais quoi de notre président candidat ?

 

- Il n’est en rien l’héritier du courant de pensée porté par Rocard…

 

Et puis, au jeu des questions-réponses, l’une d’elle : « aimiez-vous Mitterrand ? » m’a incité à vous parler du film d’Hélier CisterneDe nos frères blessés” qui raconte l'histoire de Fernand Iveton, militant communiste, guillotiné après pour avoir posé une bombe dans un local désaffecté de son usine. Cette dernière n’a tué ni blessé personne. Pourtant la vie de Fernand Iveton, et de sa femme, bascule. Il est devenu un “traitre” et risque la peine capitale.

 

https://i.la-croix.com/1400x933/smart/2022/03/22/1201206304/freres-blesses-dHelier-Cisterne_0.jpg

 

Il faut en faire un exemple

 

« Le nom de Fernand Iveton s’est perdu dans les eaux glacées de la guerre d’Algérie », explique l’historien Benjamin Stora, dans la préface des notes de productions du film De nos frères blessés. Cet employé à Gaz d’Algérie, né à Alger en 1926, et militant communiste n’avait pas le profil d’un héros. « Il n’avait pas la tête de l’emploi, il n’avait pas l’allure du suspect à surveiller, il était engagé, entier et combattif, mais c’était un homme ordinaire », déclare aussi Hélier Cisterne.

 

Cette bombe, qui n’avait pas vocation à blesser qui que ce soit, n’explosera jamais. Fernand Iveton est repéré par l’un de ses contremaitres, arrêté et torturé. Il est ensuite déféré devant un tribunal militaire, mis en place à l’époque en Algérie, dans le contexte tendu de la guerre. Jugé de manière arbitraire, il est condamné à la peine capitale.

 

« Mais nous sommes en pleine ‘bataille d’Alger’, où les bombes provoquent la mort de plusieurs Européens. Pour les autorités de l’époque, il faut en faire un exemple », écrit Benjamin Stora.

 

Fernand Iveton n’est pourtant coupable d’aucun crime. Il demande la grâce au président Coty, mais son recours est refusé après les avis défavorables de Guy Mollet, et du Garde des Sceaux: François Mitterrand.

 

Pendant que François Mitterrand occupe les fonctions de Garde des Sceaux, « on compte 45 guillotinés », expliquait en 2010 François Malye au Point. « Il refusera 32 demandes de grâce, en acceptera huit. Cinq avis ne sont pas connus. Retenons que dans 80 % des cas connus, François Mitterrand a refusé la grâce ».

 

Est-ce pour réparer ces exécutions en Algérie que le président de la République fera voter, en 1981, l’abolition de la peine de mort, comme l’affirme l’avocat Roland Dumas?

 

« Peut-être », déclare Hélier Cisterne.

 

Bien qu’intimement lié aux décisions de François Mitterrand, De nos frères blessés n’est pas un film qui l’incrimine directement. La référence est subtile: on ne devine Mitterrand que grâce à ses mains, qu’il avait l’habitude de frotter l’une sur l’autre. Ce n’est qu’à la fin du film, que le réalisateur explique l’implication du président de la République dans certains des crimes commis en Algérie par la raison d’État.

 

 

Entre un Michel Rocard qui met sa carrière de haut-fonctionnaire en jeu avec son rapport sans concession sur les camps de regroupement en Algérie ICI et un François Mitterrand vieux routier de la IVe qui laisse le couperet de la guillotine faire son œuvre, pour l’exemple d’un brave garçon qui n’a tué personne. ICI

 

La peine mortelle de Mitterrand

Vincent Lacoste joue le rôle de Fernand

Derrière “De nos frères blessés”, la face sombre de Mitterrand pendant la guerre d’Algérie ICI 

 

Dans son film, Hélier Cisterne raconte l'histoire de Fernand Iveton, militant pour la guerre d'Algérie, dont le destin est intimement lié à celui de François Mitterrand.

 

 

Par Athena Rivas

 

 

 

Fernand Iveton est conduit à la guillotine, dans la prison de Barberousse à

De nos frères blessés : un héros si discret - ZONE CRITIQUE

L’Histoire :

 

Dans les années 50, une rencontre anodine dans un café se transforme en une relation passionnée pour Hélène et Fernand. Originaire d'Algérie, ce dernier parvient à convaincre sa dulcinée de le suivre pour commencer une nouvelle vie à Alger, dans un pays alors au bord de la guerre civile. Bouleversé par les exactions dont il est témoin, Fernand choisit de prendre fait et cause pour la libération du pays des mains et de rejoindre les rangs des partisans de l'indépendance. Malgré les pressions et les menaces des autorités françaises suspicieuses à son égard, Hélène ne cède pas et choisit d'embrasser la lutte aux côtés de son époux...

Cinéma. Vincent Lacoste, le cœur « de nos frères blessés »

Très Bien

De nos frères blessés ICI

De nos frères blessés de Hélier Cisterne  (Drame) : la critique Télérama

Drame (1h32) - 2022 - France - Belgique - Algérie

Réalisé par Hélier Cisterne

avec Vincent Lacoste, Vicky Krieps, Jules Langlade, Marc Brunet

Critique par Jacques Morice

Publié le 22/03/2022

 

Fernand Iveton, un nom, que l’Histoire avait effacé. Un héros ordinaire doublé d’un bouc-émissaire sacrifié. Son histoire s’inscrit dans le contexte de la guerre d’Algérie. En 1954, ouvrier tourneur dans une usine à Alger, ce jeune communiste ne supporte plus le sort réservé aux « indigènes » musulmans. Aux côtés de son meilleur ami, Henri, et de plusieurs autres camarades, il milite pour que les Arabes aient davantage de droits. La guerre n’est pas encore visible, le combat pour une Algérie libre tâtonne, source de divisions. Après avoir commencé à se rapprocher du FLN, Yveton décide un jour de poser une bombe dans son usine. L’attentat ne vise personne, il est consciencieusement planifié comme du sabotage, l’objectif étant de plonger la ville dans le noir. Mais la bombe est désamorcée et Iveton, arrêté.

 

La suite est à peine croyable : torture, procès qui vire à la mascarade dans un tribunal militaire, absence de soutien de la part de la métropole. Hélier Cisterne, le réalisateur remarqué de Vandal (2013), prend soin, pourtant, de juguler le pathos en apportant une forme d’innocence et de fraîcheur. Le film, construit en puzzle, avec une chronologie éclatée, est politique, mais c’est aussi une histoire d’amour, simple et forte, entre Fernand et Hélène, jeune mère polonaise, fière et entreprenante, qui a fui le régime stalinien. Le sujet du communisme, qui les oppose forcément au début, donne lieu à une scène de querelle à la fois véhémente et savoureuse. On y sent déjà leur attirance qui sera plus forte que l’idéologie.

 

Vincent Lacoste et Vicky Krieps forment un couple parfait. Dans leur rencontre au bal, dans les scènes de baignade ou de dîner avec les amis se dégage un parfum d’insouciance, qui rappelle parfois le cinéma populaire d’avant-guerre. Cette insouciance ne disparaît jamais tout à fait, même quand les événements prennent une tournure plus dangereuse. S’il est parfaitement conscient des risques encourus, Iveton manifeste, dans son idéalisme, une part d’ingénuité qui le voue sans doute à l’échec. Il n’empêche : sa bravoure et celle de son épouse, qui ne passe pas à l’action mais sait tout et a accepté, non sans tension, de rester auprès de son homme, réveillent le souvenir de ces couples humbles et unis engagés dans la Résistance.

 

Avec sa sobriété, sa pudeur, De nos frères blessés est poignant, tant l’injustice racontée est criante. Et en plus de faire connaître cette affaire, le flm révèle le rôle de François Mitterrand, garde des Sceaux de l’époque, qui signa l’arrêt de mort de Fernand Iveton. Lequel ne fut pas le seul dans ce cas : quarante-quatre autres condamnés furent guillotinés en un an, alors qu’il occupait ses fonctions, de 1956 à 1957.

 

Partager cet article
Repost0
24 mars 2022 4 24 /03 /mars /2022 06:00

Eva Jospin - Artists - Suzanne Tarasieve

On me pose souvent la question : comment choisis-tu tes ses sujets de chroniques ?

 

Le plus souvent elles me tombent dessus, le genre tomber amoureux.

 

La présente part d’une visite d’une amie, au musée de la chasse et de la nature où expose Eva Jospin. ICI

 

Tient, tient, tient, une Jospin…

 

L’ancien Premier ministre socialiste, Lionel Jospin, a quitté le devant de la scène et la vie politique en 2002, après être arrivé troisième à l’élection présidentielle. Quant à ses enfants, Hugo et Eva, nés de sa première union avec Élisabeth Dannenmuller - ils ont divorcé en 1993 -, ils ont encore de belles carrières devant eux. Tous deux ont en effet embrassé des professions artistiques, dans des domaines très différents : la composition musicale pour l’aîné, les arts plastiques pour sa sœur cadette.

 

Désormais âgée de 45 ans (ndlr en 2021), Eva Jospin s’est fait un nom dans le milieu de l’art : cette plasticienne, dont le thème de prédilection est la forêt, a beaucoup travaillé pour être reconnue pour ses œuvres. Diplômée des Beaux-Arts de Paris en 2002, elle se rêve d’abord scénographe. Mais très vite, elle se tourne vers la production par ses propres mains, et surtout elle se plonge corps et âme dans une matière dont elle use mais n’abuse jamais : le carton. Dans les colonnes du Monde, en 2017, elle confiait ainsi : « À mes débuts, je ne soupçonnais pas une telle richesse du matériau. »

 

 

Les 60 jours de Jospin - broché - Stéphane Ruet, Lionel Jospin, Jean  Glavany - Achat Livre | fnac

Du côté Jospin je l’ai côtoyé lors des séances du Comité Interministériel sur la Corse, il  était Ministre de l’Education Nationale du gouvernement Rocard, j’étais le seul non Ministre à la table et Rocard, qui me connaissait pour avoir été son CT au Ministère de l’Agriculture, me donnait la parole car les questions  agricoles sur l’île étaient chaudes bouillantes. Entre un Charasse se revendiquant d’une grand-mère Corse, un Joxe impérieux, le Jospin était raide comme un radis, n’appréciant guère Rocard, il imposait sa vision politique de la question Corse.

 

2022 : François Hollande se rêvait en « Capitaine France » mais reste sur  son pédalo | Atlantico.fr

 

Du côté Hollande, je l’ai côtoyé via Stéphane Le Foll, son directeur de cabinet à Solférino, deux notations à son sujet : l’état de son bureau, il disparaissait derrière ses dossiers, le sentiment lorsque je lui parlaitsqu’il en avait rien à  cirer. J'ai voté pour lui en espérant qu'il s'élèverait au niveau de sa fonction, il l'a fait lors des attentats mais il a enterré le PS sous son incapacité à sortir de ses compromis. 

Dans la forêt factice d'Eva Jospin, « le crime du musée de la chasse est  presque parfait »- – Parallèles Potentiels & Urbanités

La 1ère Madame Jospin :
"Lionel et moi"
ICI 
 

 

EXCLUSIF "Enarque le jour, trotskiste la nuit, il jouait au chat et à la souris avec lui-même". Voilà comment Elisabeth Dannenmuller, première épouse de l'ancien Premier ministre Lionel Jospin, raconte son ex-mari.

Publié le 13 novembre 2002

https://static.lexpress.fr/medias_1383/w_600,h_600,c_fill,g_north/v1406706960/ps-bio-mitterrand-bio-jospin_708106.jpg

Jospin +Hollande = 20 ans 1er secrétaire du PS (24 janvier 1981 - 14 mai 1988 - 14 octobre 1995 - 2 juin 1997 /27 novembre 1997 - 26 novembre 2008)

 

François Mitterrand et François Hollande sont devenus présidents de la République française par la suite.

 

Pierre Mauroy, Laurent Fabius, Michel Rocard et Lionel Jospin ont été Premier ministre. Seul ce dernier l'est devenu après avoir dirigé le Parti socialiste.

 

Lionel Jospin a été premier secrétaire à deux reprises durant 8 ans, 11 mois et 9 jours au total.

 

Martine Aubry est la seule femme à avoir dirigé le Parti socialiste.

 

François Hollande est le premier secrétaire à avoir eu le plus long mandat à la tête du parti (10 ans, 11 mois et 30 jours). A contrario, Michel Rocard est resté le moins longtemps en fonction (1 an, 2 mois et 16 jours).

 

Livrenpoche : Acheter d'occasion le livre Lionel - Claude Askolovitch -  livre d'occasion

L'ex-femme de M. Jospin dit avoir « subi » sa « double vie » entre le trotskisme et le PS

Par ISABELLE MANDRAUD

Publié le 08 novembre 2002

 

UN DROIT d'inventaire par l'intime. Après la publication, le 27 septembre, du journal de campagne - fraichement accueilli par les socialistes - de Sylviane Agacinski, seconde épouse de Lionel Jospin, voici la confession de sa première femme, Elisabeth Dannenmuller, qui livre, dans Le Nouvel Observateur du 7 novembre, sa « part de vérité ». L'une expliquait la défaite du candidat socialiste à l'élection présidentielle par « la division et la démobilisation de la gauche » et pensait « presque jusqu'au premier tour qu'il allait gagner » ( Le Monde du 26 septembre). L'autre a « le sentiment d'avoir trop bien compris la catastrophe politique » du 21 avril... Agée de 60 ans, Mme Dannenmuller, qui se dit « gommée » de l'existence de « Lionel » depuis leur séparation, en 1989, sort d'un « silence de treize ans » pour décrire un « candidat impérial », resté tel qu'elle l'a connu, « bardé de sa propre vertu », tenu par « l'orgueil » et porteur de « failles profondes ». « Il a perdu, mais ce sont les autres qui n'ont pas voulu comprendre sa valeur... Cet orgueil est une marque de famille », assure Mme Dannenmuller, dont les relations tendues avec les Jospin, évoquées dans les biographies de l'ancien premier ministre, n'ont rien de secret.

 

Connu, l'engagement de M. Jospin à l'Organisation communiste internationaliste (OCI), l'était également - l'intéressé ayant fini par l'avouer à l'Assemblée nationale, le 5 juin 2001 -, tout comme l'appréciation que portait sa première épouse sur ses amis politiques trotskistes d'alors, les « trop tristes », décrits par le journaliste du Nouvel Observateur Claude Askolovitch dans son livre, Lionel (Grasset, 2001), qui recueille cette nouvelle confession.

 

Car Mme Dannenmuller va désormais plus loin dans son évocation de l'entrisme de M. Jospin au PS et de ses mensonges, y compris dans son propre ménage. Pendant « quinze ans », dit-elle, jusqu'en 1986, date de la première cohabitation, Lionel Jospin « mena une double vie » . « En 1971, raconte-t-elle, Lionel devint «taupe» au Parti socialiste. Il ne me prévint pas. (...) Je n'allais apprendre son entrée au PS qu'en 1973, alors qu'il se préparait à devenir secrétaire national. Il me le dit d'un coup. C'était sa manière d'imposer sa vie aux autres. «Désormais je suis au Parti socialiste». J'étais saisie. «Et l'OCI ?» Il fut tranchant. «On n'en parle pas» ». « J'allais devoir subir (...) Lionel avait recommencé à faire semblant », poursuit son ex-femme, qui justifie déjà leur première séparation, à la fin des années 1960, par un engagement politique qui l'insupportait. « Il se gâchait en se dissociant », dit-elle. « CLANDESTIN EXCEPTIONNEL »

 

Jusqu'au bout, M. Jospin serait donc resté, à l'en croire, cadenassé dans ce parcours-mensonge, prisonnier d'une formation de « clandestins exceptionnels ». Sa défaite à l'élection présidentielle de 2002 serait ainsi le produit de l'histoire d'un homme « incapable d'exprimer des choses simples tant lui-même ne l'était pas », incapable de « savoir lier ses talents » ni même d'opérer « une séparation des actes et des sentiments, des convictions et des pratiques, des émotions et de l'action ».

 

Silencieux depuis son retrait de la vie politique, au soir du 21 avril, l'ancien premier ministre, que l'on dit aujourd'hui poursuivi par les paparazzi, laisse, une fois encore, parler les autres à sa place. Ironie du sort, le témoignage de sa première épouse coïncide avec sa première intervention publique depuis sa défaite. Vendredi 8 novembre, M. Jospin devait participer, aux Etats-Unis, à une conférence sur le thème de « l'Amérique dans le monde », à l'université de Charlottesville, en Virginie. Mais il n'est pas prévu qu'il réponde aux questions des étudiants et des journalistes, a indiqué une responsable de cette université, interrogée par l'Agence France-Presse.

 

Au PS, certains se disent aujourd'hui « blasés » de cette parole jospinienne « par procuration ». « C'est un témoignage intéressant mais inélégant », estime un proche du premier secrétaire, François Hollande, ajoutant : « On en fait beaucoup sur le profil psychologique. »

 

ISABELLE MANDRAUD

Selon l'ex « capitaine de pédalo » il faut introniser Macron et Mélenchon  dans la confrérie du melon, je suis pour. - Le blog de JACQUES BERTHOMEAU

Comment François Hollande s’est préparé, en secret, à être candidat à l’élection présidentielle 2022 ICI 

 

C’est un épisode caché de cette guerre des candidatures à gauche qui a eu lieu en début d’année. L’ancien président de la République a envisagé de se présenter à l’Elysée. Un tour de chauffe qui pourrait lui servir pour la suite.

Philae a une vie de chien très confortable. Elle vaque à sa guise dans un vaste appartement de la rue de Rivoli transformé en cabinet de travail au mobilier choisi, doté d’une vue inestimable sur le jardin des Tuileries, au cœur du Paris historique. Sa journée de labrador consiste à se prélasser aux pieds d’ambassadeurs en goguette, d’experts et d’industriels de tout poil, de jeunes hauts fonctionnaires bourrés d’avenir, tous venus rendre des visites solennelles à son maître, l’ancien président de la République, François Hollande. Mais, pour tout dire, depuis qu’elle a quitté l’Elysée, en 2017, Philae s’embête un peu.

 

Heureusement, fin novembre 2021, le « Baron noir » sonne à la porte, et tout devient soudain beaucoup plus palpitant. Le « Baron noir », c’est Julien Dray, l’ancien député socialiste, le fondateur de SOS Racisme en 1984, l’un des acteurs de la réélection de François Mitterrand en 1988, le précepteur politique d’Emmanuel Macron, alors jeune conseiller élyséen, bien des années plus tard. Une vie d’expert en « coups » politiques, à la lisière des pouvoirs, qui a inspiré la série politique à succès avec Kad Merad. Hollande et Dray se connaissent par cœur depuis quarante ans. Ils se sont fâchés, rabibochés, ils ont réussi ensemble un nombre incalculable de manœuvres d’appareil.

 

En cette fin d’année 2021, donc, l’ancien chef de l’Etat est content. Julien Dray le boudait depuis des mois, pour un différend dont ils ont tous les deux oublié l’objet, évidemment. Le plus important, c’est qu’ils n’ont besoin que d’un regard pour savoir si une tentative politique peut présenter un certain intérêt. « Alors ? Comment tu vois les choses ?, demande François Hollande.

– Pourquoi pas…, répond Julien Dray.

– Bien. Mais, à ton avis, quelles sont les conditions ?

– Il faut donner un sens politique à ta candidature qui ne doit pas être celle de 2017. »

 

S’enclenche alors une aventure politique aussi courte – deux mois – qu’intense, le coup passa si près. L’idée organisée d’une contre-programmation extravagante, une opération souterraine durant laquelle François Hollande fut tout proche de se présenter à l’élection présidentielle de 2022. Pour l’instant, nous en sommes au début de l’histoire, Philae est emballée. Sans doute est-elle une spectatrice de Jean Yanne, qui a dit un jour : « Il faut commencer à se méfier le jour où l’on a plus de souvenirs que de projets. »

 

« Difficile, gonflé, insensé »

 

Tout début décembre 2021, François Hollande reçoit dans son nouveau chez-lui, une petite maison du 14e arrondissement parisien. Une grande table de cuisine, trois bricoles à grignoter, une conversation à bâtons rompus. Dray est là avec deux vieux amis : un publicitaire iconoclaste et Christian Michel, expert en stratégie et communication politique, qui œuvrait aux côtés de Jacques Séguéla et Gérard Colé lors de la campagne de François Mitterrand en 1981.

 

« En coulisses, on avait une trentaine d’experts enthousiastes. Ils n’attendaient qu’une chose : qu’il appuie sur le bouton », selon le haut fonctionnaire Maxime Boutron

 

Comme cette petite bande n’est pas née de la dernière pluie politique, elle sait que la candidature d’Anne Hidalgo est déjà un fiasco et prédit qu’elle aura du mal à la poursuivre. L’hypothèse d’une candidature de substitution s’impose. François Hollande y croit. Il y croira toujours. Il n’a pas été en mesure de se représenter en 2017, il s’en mord les doigts chaque jour. Il y croit d’autant plus qu’il achève la tournée promotionnelle de son dernier livre, Affronter (Stock, 2021). Il a parcouru la France, il en revient ravi. Depuis cinq ans, il se tient prêt, au cas où. Le passage à l’acte, c’est une autre histoire. « C’est difficile, gonflé, insensé, avec une prise de risque maximale. Donc, c’est idéal », raconte, aujourd’hui, Christian Michel.

 

Une soirée à chercher l’espace. Des macronistes de gauche peuvent être récupérés, et aussi les écologistes qui veulent gagner, et ceux pour qui Jean-Luc Mélenchon n’est plus un vote utile. La lucidité affleure : compliqué de viser le second tour ? Mais pourquoi ne pas créer un choc pour ne pas voir mourir le Parti socialiste (PS) ? « On ne pouvait pas y aller en disant : “J’ai tout fait bien”, poursuit Christian Michel. Il fallait vider l’abcès de son quinquennat qui ne fait pas l’unanimité… Ce n’est pas n’importe qui… Il a le talent pour plier le truc en deux émissions de télé bien préparées. » On se quitte avec des plans plein les têtes.

 

Rue de Rivoli, dans le bureau de François Hollande, s’ébroue une seconde équipe. Qui ne connaît pas encore l’existence de la première. Hollande aime compartimenter. Une poignée de jeunes énarques, d’anciens membres des cabinets ministériels du précédent quinquennat. Des têtes plus conventionnelles que celles de Dray et compagnie. Qui oscillent entre fan-club hollandais – certains surnomment l’ex-président « Captain America », le super-héros qui peut sauver la France – et principe de réalité autodécrété : qui d’autre que lui comme candidat crédible ? Qui, depuis qu’Anne Hidalgo veut doubler le salaire des profs, promesse pas très sérieuse, selon eux ? Qui, depuis que Bernard Cazeneuve se terre ?

 

Equation complexe

 

Cette seconde équipe fournit des notes d’analyse pour enrichir un socle programmatique très social-démocrate, agrège des propositions testées auprès d’une société d’études statistiques, Happydemics. Comme ces 50 000 euros octroyés à chaque Français ou Française qui fête ses 18 ans. « On mettait en place tout ce qui peut lui permettre d’être prêt au cas où… », précise Maxime Boutron. A 38 ans, ce haut fonctionnaire, ancien du cabinet de Michel Sapin à Bercy, parle beaucoup, vite et clair : « En vingt-quatre heures, on pouvait lancer une campagne. En coulisses, on avait une trentaine d’experts enthousiastes, fiers du bilan de François Hollande en 2017 et qui voulaient le poursuivre : la redistribution, l’émancipation, mais aussi des déficits maîtrisés, un chômage en baisse… Ils n’attendaient qu’une chose : qu’il appuie sur le bouton. »

 

 

Mercredi 8 décembre. Le moment est brûlant. François Hollande prend un thé à Lille avec Martine Aubry, qui passe des coups de fil. Elle n’en revient pas. « Mais que va-t-elle dire ? Va-t-elle se retirer ? » Anne Hidalgo vient de descendre, à Poitiers, d’un train qui devait l’emmener à La Rochelle. Elle se déroute pour s’inviter sur le plateau du « 20 heures » de TF1 et appeler à une primaire de la gauche. Devant la maire de Lille, François Hollande se pince les lèvres pour ne pas sourire. Anne Hidalgo est descendue du train comme si elle descendait de la campagne.

 

Foncer, puisque tout semble s’éclaircir. Le 21 décembre, l’ex-président opère la jonction des deux équipes. Enfin. Une douzaine de personnes qui se découvrent, rue de Rivoli. Les jeunes énarques sont hypnotisés par le bagou et les dix idées à la minute du « Baron noir » Dray. On accélère. Deux réunions par semaine. « On réfléchit aux propositions à mettre en avant, qui pourraient impacter la campagne. On travaille l’incarnation d’un ex-président qui prendra de la hauteur, loin des politicailleries », se souvient Karim Ziabat, 28 ans, élu à Cergy (Val-d’Oise), ancien stagiaire à l’Elysée. On réfléchit à l’annonce, à ses modalités. On guette l’actualité pour rendre François Hollande incontournable. Laisser s’épanouir l’évidence d’une candidature de recours, mais sans qu’il en soit l’initiateur. L’équation est complexe.

 

Exprimer une envie latente et raisonnable

 

En arrière-plan, le déroulé du film est prometteur. Anne Hidalgo met du temps à renoncer, mais des renseignements provenant du PS font penser que son débranchage ne serait plus qu’une question de jours. Elle est passée sous les 5 % d’intentions de vote. En privé, François Hollande est formel : « Les sondages qui tombent tous les jours… Ça va tourner au supplice. » La candidature inexplicable de Christiane Taubira rajoute à la confusion. Elles vont finir par se détruire l’une l’autre. Il faut laisser prospérer la catastrophe.

 

Il y a des réunions entre Noël et le jour de l’An. Mais François Hollande « n’a jamais exprimé de souhait définitif », précise Tarek Ouagguini, patron d’Happydemics et consultant à titre personnel dans cette histoire. L’ancien chef de l’Etat ne le dit jamais, mais personne ne s’en inquiète, c’est sa nature. Il n’aime rien davantage que de laisser faire. Il se satisfait que les autres y pensent encore plus fort que lui. « Ce n’est pas une lubie ou une obsession d’y aller à tout prix, insiste Maxime Boutron. S’il devait y aller, c’était pour de bonnes raisons, pour rassembler et réhabiliter la gauche, mais les sentiments de loyauté et de responsabilité l’emportent sur les aventures narcissiques. »

 

« Ce fut une aventure envoûtante, un exercice grandeur nature qui servira pour le coup d’après. Pour faire un congrès d’Épinay du XXIe siècle », indique Karim Ziabat, élu à Cergy (Val-d’Oise), ancien stagiaire à l’Élysée

 

François Hollande émet d’ailleurs une interdiction inviolable : il ne tolérera aucune manœuvre susceptible d’accélérer le retrait d’Anne Hidalgo. Il ne veut pas donner l’impression de s’emballer ou d’être déloyal. Il veut plutôt exprimer une envie latente et raisonnable. Mais « sa volonté de faire et de proposer est toujours évidente, si bien qu’il n’est pas nécessaire de tester continuellement son for intérieur », tranche Maxime Boutron.

 

Tellement évidente que, interrogé par des lycéens dans un reportage diffusé sur France 3, dimanche 23 janvier, il laisse planer un doute majuscule : « Pour l’instant, je ne suis pas candidat. » Cette intervention n’a pas été préparée, son équipe est d’autant plus aux anges. « François Hollande a beaucoup d’humour », commente Anne Hidalgo, le lendemain.

 

Le 31 janvier, il donne une conférence dans le grand amphithéâtre de Sciences Po Paris. Une occasion en or, réglée au millimètre. Ce ne sera pas une déclaration en bonne et due forme, mais l’expression d’une phrase forte, significative, qui doit générer un teasing décisif sur les réseaux sociaux et embraser l’affaire. Rue de Rivoli, c’est la fébrilité fiévreuse de Cap Canaveral.

 

« Il s’est enfermé lui-même »

 

Désillusion. François Hollande s’est dérobé. L’attente d’événements favorables est encore supérieure à sa volonté d’agir. Sauf que personne n’avait prévu d’être confronté à la championne du monde des coriaces. Anne Hidalgo martèle qu’elle ira jusqu’au bout.

 

François Hollande est déconcerté. Rationnel, il ne comprend pas l’acharnement de celle qui paraît l’être beaucoup moins. Il y a des frottements dans son équipe. Julien Dray trépigne, tiraillé par sa formation trotskiste et mouvementiste : « Si tu ne bouges pas, il ne se passera rien. C’est l’annonce de ta candidature qui scellera la fin d’Hidalgo. » Plus Dray le brusque, plus Hollande a tendance à s’éloigner de quelques pas : « Je ne veux pas aller contre Hidalgo, ni contre mon parti. »

 

Autour de la table, son sourire est toujours aussi débonnaire, mais ses interventions de plus en plus labyrinthiques. Il pose beaucoup de questions, pour montrer qu’il s’en pose encore plusTant qu’Anne Hidalgo restera en piste…

 

Le 1er février, sur la place de la Bastille, Julien Dray rencontre Pierre Jouvet et Luc Broussy, membres de la direction du PS. Il leur propose qu’une délégation du parti rende visite à François Hollande pour solder le cas Hidalgo. Ils regardent le « Baron noir » avec de grands yeux. Ils ne se doutent pas qu’une petite armée hollandaise est en marche.

 

Le 10 février, Anne Hidalgo s’apprête à s’envoler pour les Antilles. Elle sourit quand on lui parle de l’ancien président. Elle est sur le point de récolter ses 500 parrainages, elle sait que c’est terminé : « François Hollande n’a jamais été un sujet. » Mardi 15 février, un dernier déjeuner, rue de Rivoli. François Hollande conclut : « Bon… C’est assez clair, maintenant. » Tout le monde est là. Sauf Julien Dray, vinaigre : « En prenant un temps invraisemblable à se décider, il s’est enfermé lui-même. » L’ancien chef de l’Etat a l’air soulagé, pas franchement rongé par la frustration. Car il n’est pas vraiment question que cette aventure ait une fin. « Le Parti socialiste, c’est mon histoire. Je ne me suis pas engagé toute ma vie pour regarder des morceaux éparpillés. » Tous ont promis de se revoir. « Ce fut une aventure envoûtante, un exercice grandeur nature qui servira pour le coup d’après, explique Karim Ziabat. Pour faire un congrès d’Epinay du XXIe siècle. »

 

Désormais, le Paris politique bruisse de sa future candidature aux élections législatives en juin, cela met en colère l’ancien locataire de l’Elysée. Parce que c’est vrai ? Depuis le début de la guerre en Ukraine, François Hollande intervient tous azimuts dans les médias. Il devrait participer à un prochain meeting d’Anne Hidalgo. Selon nos informations, Philae est en pleine forme. Son maître aussi : « Philae est à côté de moi. Je vous la passe ? »

 

Laurent Telo

 

 

Partager cet article
Repost0
22 mars 2022 2 22 /03 /mars /2022 06:00

Le grand emprunt : véritable peau de chagrin ? - Raphaël DIDIER explique  l'économie

Je n’ai pas pu m’en empêcher, le nouveau chevalier blanc du vin levant l’étendard de la révolte contre le F noir de Nutri-score est doté d’un patronyme à rallonge, j’adore les patronymes à rallonge avec un faible pour Roux&Combaluzier, qui nous fait prendre de la hauteur, Pinay-Rabaroust donc, Franck de son prénom, jusqu’ici plutôt spécialisé dans le ragout sur son site Atabula, est doté d’un tarin qui hume le buzz, opportuniste, il se porte à la rescousse  des professionnels du vin qui s’inquiètent de l’apposition du F noir de Nutri-score sur leurs belles étiquettes.

 

La folie de l'emprunt Pinay | Alternatives Economiques

 

Pinay, Antoine de son prénom, maire de Saint-Chamond, évoque immanquablement, la rente Pinay, émise à deux reprises, en 1952 et en 1958, à l'initiative d’Antoine Pinay, lorsque les caisses de l'État se trouvaient vides, la rente 3 1/2 % avait dû être dotée d'avantages exorbitants du droit commun, tant était grande la méfiance des souscripteurs régulièrement spoliés par une inflation galopante.

 

Le résultat fut très brillant, compte tenu de la situation à l'époque : 430 milliards de francs légers collectés en 1952, dont 195 seulement en numéraire, il est vrai, et 320 milliards en 1958, dont 290 d'argent frais, auxquels il faut ajouter respectivement 35 et 140 tonnes d'or apportées à la Banque de France. L'amortissement était prévu jusqu'en 2012, et l'indexation sur le napoléon, passé de 36 F, en 1958, à 120 F actuellement, portait la valeur de remboursement et de reprise des 100 F originels à 250 F au 1er juin dernier, et à environ 330 F au 1er décembre prochain.

 

Le mécanisme de l'évasion fiscale

 

L'achat de rente Pinay, emprunt d'État, a donc, une fois n'est pas coutume, été profitable pour l'épargnant, et assez peu coûteux en définitive pour le Trésor, puisque la faiblesse du taux d'intérêt servi compensait en grande partie l'augmentation du prix de remboursement. L'agent de change Émile Meeschaert, dans un article publié dans la Vie française, chiffrait à 8,69 % le taux réel de l'emprunt, soit un niveau assez raisonnable. Ce qui était beaucoup plus lourd, en revanche, c'était le coût de l'évasion fiscale qu'offrait, en toute légalité, cet emprunt.

 

Le retour aux valeurs refuges – L'actu en patates

 

Depuis plus de dix-neuf ans, dès qu'un futur défunt fortuné donnait quelques signes de faiblesse, lui-même - ou bien souvent ses héritiers - faisait vendre tout ou partie de ses biens, dont le produit était transformé illico en titres de l'emprunt Pinay, revendus sitôt le décès acquis et la succession déclarée (en franchise de droits pour la partie constituée par l'emprunt). Cette pratique était si fréquente, notamment pour les valeurs mobilières, et en y ajoutant les donations anticipées, que, selon certains contrôleurs de l'enregistrement, la rente Pinay représentait le tiers ou la moitié de l'héritage déclaré dans les successions importantes. Par cette faille gigantesque du code fiscal, véritable " plaie ouverte au flanc de la direction générale des impôts ", plus du tiers des grandes fortunes transmises échappaient au fisc. La perte était difficilement chiffrable : les services de la Rue de Rivoli l'estiment à 400 millions de francs, mais le même M. Émile Meeschaert l'évalue à près de 900 millions de francs en 1972, chiffre que le Rue de Rivoli juge un peu fort.

 

Revenons à notre Pinay à tiret, je trouve que son poulet a des accents d’un autre chevalier blanc, le sieur Denis Saverot, de la vieille RVF, comme le dit une petite fille de 7 ans « ils en font des tonnes »

 

Avant que l’on m’accuse de collusion avec l’ennemi, le gang des blouses blanches, prohibitionnistes masqués, je rappelle que j’estime depuis toujours, ceux qui me suivent depuis l’origine de ce blog le savent, les messages de santé publique, en bandeau déroulant à la télé, sur les étiquettes, sur les paquets de tabac (je ne fume pas) les logos sur les étiquettes, sont sans effet sur les consommateurs, ils ne sont que l’expression de la bonne conscience de nos prescripteurs de Santé Publique.

 

Cependant, dans cette affaire du F noir de Nutri-score les professionnels du vin, avec leur combat d’arrière-garde contre la mention des composants du vin, comme c’était le cas de tous les autres produits alimentaires, leur communication sur le thème le vin est bon pour la santé, ont provoqué l’ire des blouses blanches qui, bien évidemment, ne ratent aucune occasion de monter au créneau pour imposer leurs normes.

 

Je suis un buveur festif de vin, je côtoie dans les bars à vin, les dégustations, les cavistes, de nombreux alcooliques qui ne se vivent pas comme tel, le vin c’est de l’alcool et l’addiction est pour certains un fait avéré qu’il serait stupide de nier. Tant que l’outrance dans les deux camps dominera, ce ne sont ni les dénis, ni les logos qui feront reculer l’alcoolisme qui est une maladie, un fléau qui brise des vies, des familles.

 

Du côté nutritionnel, le vin c’est beaucoup de calories, lorsque je pratique mes jeûnes, pour retrouver mon poids de forme, je ne bois que de l’eau.

Revenons à la prose du PINAY de la bouche : Nutri-score sur le vin : le F noir de la honte ICI 

 

par Franck Pinay-Rabaroust | Fév 7, 2022 | À BOIREÀ LA UNELE BILLET D'HUMEUR DE FPROPINION

 

Ce F noir change radicalement l’approche du système : elle ne hiérarchise plus, elle stigmatise. Elle pointe du doigt un coupable qui n’a même plus l’opportunité de plaider sa cause puisque son existence et sa nature sont nocives pour la société.

 

Faut-il alors lever une armée d’hoplites munis de sécateurs pour éradiquer la vigne ou, simplement, bannir à tout jamais ce F noir de la honte ? La réponse semble tellement évidente qu’elle pourrait échapper, par simple mégarde ou ivresse de la forfaiture, à la Sainte pensée nutriscorienne.

 

Comment peut-on tomber aussi bas dans la bêtise règlementaire, dans cette volonté de tout hiérarchiser, compartimenter, noter ? Ainsi de la volonté des concepteurs du Nutri-Score d’apposer un grand F noir sur toutes les bouteilles qui contiennent de l’alcool, même en faible quantité, dans tous les pays européens.

 

Un F pour dire quoi ?

 

Pour dire au consommateur abêti que le vin et consorts contiennent de l’alcool. Mais ne le sait-on pas « naturellement » que le vin en contient, n’est-ce pas déjà indiqué sur la bouteille ? Bien sûr que si, mais il faut toujours faire plus pour une frange de la population qui exècre la liberté individuelle et le bon sens collectif. Pour elle, il n’y a d’ordre que par la règlementation, par la mise au ban du citoyen, par l’instauration d’une société moutonnière uniforme, sans pensée ni aspérité. Puisque selon ces extrémistes le désordre vient du libre arbitre, il faut l’anéantir en offrant un schéma de pensée univoque issue d’une règlementation omniprésente. L’heure n’est plus au contrat social à la Rousseau, mais au Leviathan de Hobbes. L’ordre, c’est la vie, l’obligation son quotidien.

 

Le tout ICI 

 

 

Des professionnels inquiets de voir bientôt un Nutri-score «F» affiché sur les bouteilles de vin

Le système de Nutri-Score, mis au point en 2017 avait pour but d'améliorer la qualité des normes nutritionnelles. Ce système d’étiquetage des aliments de santé Nutri-Score AE établis par des scientifiques reviendrait à classer les bouteilles de vin «F».

Par Tatiana Jean-Dorize

 

Publié le 15/03/2022

 

 

Des étiquettes toquées d’un large F noir sur les flacons de vin ? Cette nouvelle a fait frissonner l’ensemble de la filière viticole. Alors que la filière se remettait avec soulagement de la décision prise par le parlement européen le 16 février dernier, ce dernier adoptant ainsi le rapport d'initiative de la commission de lutte contre le cancer (BECA) en retirant l'idée de risque sanitaire dès le premier verre, voilà que le vin français risque désormais d’être étiqueté comme nutritionnellement «malsain».

 

Une nouvelle vague de colère dans l’industrie viticole

 

Alors que le système de Nutri-Score est échelonné de A à E, le vin – et toutes boissons alcoolisées – serait fiché «F», et ce, en plus d’afficher sa teneur en sucre et en calorie. Lorsqu’il s’agit d’afficher des informations nutritionnelles et des ingrédients en général, le vin et la plupart des autres alcools qui n’ont qu’un seul ingrédient principal (raisins ou céréales) mais qui peuvent contenir des substances supplémentaires comme les sulfites, ont été spécialement dispensés de porter toutes les informations sur la bouteille. «Nous n'aurons pas besoin d'une étiquette supplémentaire sur la bouteille, mais plutôt d'un code QR ou d'un lien Internet» explique Christophe Château, responsable de la communication au Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB). La nouvelle n’avait pourtant pas manqué de faire réagir le ministre italien de l’Agriculture, ce dernier écrivait dans une lettre ouverte à ce sujet au président Macron. «Je voudrais savoir ce que Macron pense de la dernière proposition avancée par les concepteurs du Nutri-Score, qui suggèrent maintenant d'apposer un F noir sur toutes les boissons qui contiennent une quantité même minime d'alcool. Le président français est d'accord ?» 

 

 «Boire pour le plaisir et avec modération»

 

À partir de la fin de l’année prochaine, l’obligation de porter des informations nutritionnelles standard sur les aliments sera étendue dans l’UE aux boissons alcoolisées.


Le Nutri-Score a débuté en France en 2017 et n'est pas obligatoire, mais fortement conseillé. Une teneur élevée en fruits et légumes, en fibres, en protéines et en huiles saines signifie généralement des scores A et B. À l'inverse, un excès de sucre, d’acides gras saturés ou de sodium signifie généralement un D ou un E. Christophe Château, responsable de la communication au Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux, a déclaré : «Nous n’aurons pas besoin d’avoir une étiquette supplémentaire sur la bouteille, mais plutôt un code QR ou un lien Internet». Il a ajouté : «C’est un rappel que le vin contient beaucoup de calories – environ 80 pour un verre de vin rouge. Nous sommes convaincus que la plupart des gens verront les informations telles qu’elles sont. Nous conseillons toujours aux gens de boire pour le plaisir et avec modération». L’organisme Demeter, qui certifie les vins biodynamiques, a commenté : «Nous continuerons à faire certifier des vins en tant que vins Demeter avec les principes biodynamiques les plus élevés possibles. Si Nutri-Score dit que c’est un F, c’est leur problème, pas le nôtre». Reste à savoir si les consommateurs suivront la tendance. 

 

Partager cet article
Repost0
21 mars 2022 1 21 /03 /mars /2022 06:00

Inscription en seconde au Lycée Louis le Grand et Henri IV

PNG - 293.7 ko

Figure 3 – Proportion d’élèves issus de catégories socio-professionnelles très favorisées par lycée public général et technologique (élèves entrés en seconde à la rentrée 2021)
 
Lecture : À la rentrée 2021, 80 % des élèves qui sont entrés en seconde générale et technologique au lycée Louis-le-Grand étaient issus de catégories socio-professionnelles (PCS) très favorisées (chefs d’entreprises, professions libérales, cadres et professions intellectuelles). Cette proportion s’élevait à 87 % parmi les élèves précédemment scolarisés dans l’académie de Paris.

Champ : Élèves inscrits en seconde générale et technologique dans les lycées publics de l’académie de Paris à la rentrée 2021 et qui étaient scolarisés en troisième l’année précédente.
Notes : Pour déterminer l’origine sociale d’un élève, on utilise la PCS la plus élevée de ses responsables légaux.
Source : Base Élèves de l’académie de Paris. Calculs des auteurs.

PNG - 203.8 ko

Le titre : «J’ai compris que j’étais pauvre en arrivant au lycée Henri-IV» de cet article du Monde m’a fait bondir.

 

H4 ou Henri IV est avec LLG Louis le Grand est, dit-on, le temple de la méritocratie républicaine.

 

Pauline Charousset & Julien Grenet du Collège de France répondent :

 

« Rentreront-ils dans le rang ? La modification annoncée de la procédure de recrutement des deux prestigieux lycées de la capitale est accusée par ses opposants de « briser l’excellence » et de faire le jeu du privé. L’analyse des données de l’académie de Paris va à l’encontre de ces arguments. »

 

ICI 

PNG - 407.2 ko

Tableau 1 – Un « nivellement par le bas » ? Profil des élèves qui auraient été admis à Henri-IV et Louis-le-Grand en 2016 selon différentes modalités de sélection
 
Lecture : En 2016, 1537 élèves ont déposé un dossier de candidature pour entrer en seconde au lycée Henri-IV. Les 271 candidats ont obtenu une note moyenne de 16,0 au baccalauréat général (colonne 2). Les 271 candidats qui auraient été admis s’ils avaient été sélectionnés uniquement sur la base de leur note moyenne au contrôle continu de troisième ont obtenu une note moyenne de 16,3 dans les lycées où ils ont poursuivi leur scolarité (colonne 5). Les élèves qui auraient été admis s’ils avaient été sélectionnés selon la nouvelle procédure prévue pour la rentrée 2022 ont quant à eux obtenu une moyenne de 15,8 (colonne 8).

Champ : Élèves ayant déposé un dossier d’admission en seconde aux lycées Henri-IV et Louis-le-Grand à la rentrée 2016.

Source : Données Affelnet-Lycée 2016 et données des sessions 2018 à 2020 du baccalauréat. Calculs des auteurs.
« J’ai compris que j’étais pauvre en arrivant au lycée Henri-IV » ICI 

 

« Premières fois » : récits de moments charnières autour du passage à l’âge adulte. Cette semaine, Tony évoque sa scolarité au lycée Henri-IV et le choc social qu’il y a vécu en intégrant cet établissement parisien en seconde.

Par 

Publié le 14 mars 2022

EXTRAIT

 

Capital culturel

 

Au départ, j’étais très mal à l’aise. J’étais dépassé par le niveau d’anglais des élèves. Tous avaient beaucoup voyagé et évoluaient dans des environnements cosmopolites ; de mon côté, je n’avais jamais pris l’avion. Leurs parents étaient plus âgés que ma mère, qui m’a eu à l’âge de 22 ans. Cette différence de génération se reflétait dans les goûts de mes camarades, très marqués : ils écoutaient les Beatles, parlaient des films de la Nouvelle Vague. La bourgeoisie ex-soixante-huitarde avait transmis ce capital culturel à ses enfants. A l’époque, je me disais qu’on ne vivait pas dans le même pays.

 

J’entends aussi des discours qui me mettent en colère, comme cette proposition d’un camarade, en cours d’économie, de baisser le smic, alors qu’il vit dans un hôtel particulier. Tous étaient pourtant très bienveillants et admiratifs de mon parcours. Je me servais de mon histoire pour me démarquer.

 

Tous les week-ends, je prends le train pour retrouver ma famille et travailler au tabac-presse de mon village, en Isère. Je sens douloureusement un fossé se creuser entre mon milieu et mon nouvel environnement. Je me déconnecte complètement des préoccupations des jeunes de mon âge.

 

Après le premier trimestre de la classe de 1re, je craque. Je dis à ma mère que je commence à étouffer. Il se trouve que la situation devenait financièrement difficile : je décide de rentrer définitivement en Isère. J’avais pourtant été positionné pour représenter Henri-IV aux concours généraux de français et d’histoire.

Histoire du lycée – Lycée Louis Le Grand

A Paris, « l’intégration forcée des lycées Henri-IV et Louis-le-Grand dans Affelnet serait une erreur » ICI 

TRIBUNE

 

Collectif

Dix jours après l’annonce de l’entrée des deux prestigieux établissements scolaires dans la procédure d’affectation informatisée, des parents d’élèves et des élèves, anciens et actuels, prennent la parole pour défendre ce qu’apporte, selon eux, la sélection sur dossier.

Publié le 01 février 2022 

 

Tribune. Les élèves, anciens élèves, parents d’élèves et professeurs des lycées Henri-IV et Louis-le-Grand ont récemment appris avec surprise la volonté du rectorat de supprimer la sélection des élèves parisiens sur dossier pour entrer dans ces établissements.

 

Henri-IV et Louis-le-Grand seraient des temples de « l’entre-soi » et de la bourgeoisie, des « mauvais élèves » de la mixité sociale et scolaire. En tant qu’anciens élèves et parents d’élèves de ces lycées, nous exprimons ici notre stupéfaction. La réalité de notre expérience est très loin de ces clichés.

 

Pourquoi est-ce un mauvais procès ? Le rectorat met en avant un pourcentage de 9 % de boursiers à Henri-IV et Louis-le-Grand pour l’année 2021, chiffre qui serait inférieur à la moyenne nationale. Or ce chiffre ne reflète nullement la réalité historique des entrées de boursiers dans ces lycées depuis 2015. A Louis-le-Grand, par exemple, 20 % des entrants au lycée en 2015 étaient boursiers, et le taux moyen de boursiers y oscille entre 10 % et 14 %, ou plus, selon les années, et, en classes préparatoires, ce chiffre dépasse régulièrement les 20 %. Par ailleurs, les internats sont réservés en priorité aux boursiers (en classes préparatoires) pour encourager leur venue.

 

 

En 2020, les 260 élèves admis à Louis-le-Grand en seconde provenaient de 175 établissements. A Henri-IV, ce sont quelque 170 établissements dont sont issus les 280 élèves de seconde. Quel autre lycée en France peut se vanter d’une telle diversité ? En analysant leur indice de position sociale (IPS) [un indicateur créé par l’éducation nationale] sur la base d’un calcul rétrospectif, la moitié des collèges d’origine aurait un score de 600 ou 1 200 [scores d’un collège intermédiaire et/ou défavorisé, intégrés depuis 2021 à l’algorithme Affelnet, et jouant comme un « bonus » pour les collégiens qui y ont fait leur scolarité]. Par ailleurs, Henri-IV et Louis-le-Grand sont parties prenantes, depuis plusieurs années, d’un programme de « cordées de la réussite », qui permet à d’excellents élèves issus de collèges très défavorisés d’intégrer ces lycées.

 

Accompagnement individuel

 

Les lycées Henri-IV et Louis-le-Grand mettent un point d’honneur à accompagner leurs élèves issus de milieux modestes grâce à leurs fondations respectives : d’ores et déjà 750 élèves ont été aidés financièrement par le fonds de dotation d’Henri-IV, et 700 élèves l’ont été par la Fondation de Louis-le-Grand. Au-delà de cette aide financière, les élèves qui en ont besoin bénéficient d’un accompagnement individuel qui leur permet de s’épanouir, de bénéficier de la même vie culturelle et des mêmes opportunités que leurs camarades plus favorisés : solutions d’hébergement, sorties culturelles, séjours linguistiques, programmes de soutien et de tutorat.

 

Si le souhait est de recruter plus de boursiers ou de profils plus divers, l’étude individuelle et humaine des dossiers de candidature permet tout à fait de réaliser ces objectifs. Il suffit pour cela de puiser davantage dans le vivier d’excellents dossiers d’élèves éligibles – on estime, par exemple, à Louis-le-Grand, qu’il y a environ 350 « admissibles » ayant le niveau souhaité sur 260 places en seconde –, sans pour autant dévaloriser la qualité du recrutement. Pourquoi donc, dans ce cas, insister pour confier à l’algorithme Affelnet cette démarche, alors même que la sélection sur dossier, très sensible et personnalisée, intègre toutes les dimensions du profil de l’élève : notes, appréciations de ses professeurs, motivation et bien entendu son statut de boursier ?

 

L’intégration forcée des lycées Henri-IV et Louis-le-Grand dans le système Affelnet serait une erreur. En ce qui concerne les notes, tout d’abord : Affelnet fonctionne sur un agrégat beaucoup moins riche en informations qu’un bulletin scolaire. Affelnet ne distingue que faiblement la part de telle ou telle matière dans le résultat moyenné et empêche d’identifier les cas atypiques, ainsi que les élèves excellents en sciences ou en lettres par exemple (les coefficients de chaque matière étant plus ou moins les mêmes). Aussi, ce que le rectorat appelle « lissage » (il s’agit en réalité d’un nivellement) permet de rehausser ou d’abaisser les notes en fonction de tranches de points : un 15 et un 20 se valent dans ce système. Par conséquent, Affelnet ne fait pas de différence entre un excellent dossier et un autre simplement bon ! Ce qui révèle, en creux, l’un des objectifs de la réforme Affelnet : la disparition des « lycées de niveau ».

 

Disparition des filières d’excellence

 

Autre problème, le score IPS. L’indice de position sociale utilisé par Affelnet est un outil statistique illustrant en un « score » la diversité des positions sociales et métiers des parents d’élèves d’un collège donné, tels que renseignés par les parents à chaque rentrée de sixième sur des formulaires demandant d’indiquer la « profession des parents ». Si, sur cette base déclarative, le collège est jugé privilégié, Affelnet lui affecte un score IPS de zéro. Cela pénalise d’un malus de points tous les collégiens de cet établissement, qui ne sortiront donc pas, à niveau scolaire égal, parmi les premiers dossiers retenus sur la base du score total. A contrario, si l’IPS d’un collège est élevé, tout élève qui en est issu bénéficie d’un bonus de 600 à 1 200 points supplémentaires.

 

D’après les études communiquées par les parents d’élèves du collège Victor-Hugo à Paris, sur la base des scores et affectations des élèves de l’année 2020-2021, le score IPS permet d’ajouter jusqu’à près de 8 points à la moyenne de l’élève ! L’effet pervers est évident : quid de l’enfant de famille modeste habitant dans les « beaux quartiers », qui aura un « IPS 0 » ? Quid du fils de cadre supérieur d’un quartier jugé moins favorisé, qui aura, lui, un « IPS 1 200 » ? Un enfant scolarisé dans un collège à IPS avec bonus « IPS 1200 » avec 12/20 de moyenne se retrouverait peut-être ainsi en haut de la pile pour entrer dans un lycée d’excellence, alors qu’un excellent élève fréquentant un collège à « IPS 0 » en serait possiblement exclu. On voit bien l’incohérence d’un tel mécanisme avec l’objectif d’une sélection par le pur mérite. Quand bien même des aménagements à Affelnet seraient proposés pour Louis-le-Grand et Henri-IV, ils n’atténueraient qu’à la marge les effets structurels d‘un logiciel qui vise une autre finalité, difficilement conciliable avec la dynamique d’excellence républicaine.

 

En conséquence, avec les paliers de notes qui empêchent les excellents élèves de se démarquer, et l’indice IPS sans lien avec la qualité propre de l’élève, il n’y aura plus aucune motivation pour les élèves travailleurs et sérieux, les profils d’exception, à candidater dans ces établissements, tant leurs chances d’y entrer seront désormais encore plus réduites et surtout très fortement aléatoires.

 

Une telle absence de clarté et un si fort sentiment d’iniquité ne peuvent que faire le jeu des établissements privés, aux dépens des élèves de familles n’ayant pas les moyens financiers ou les relations pour y accéder. Pour ceux qui resteront dans le public, ces filières d’excellence auront bel et bien disparu. En les mettant en péril, tout en ne servant qu’à la marge l’ouverture sociale, la réforme proposée entraînera demain une véritable ségrégation de niveaux et de classes sociales entre un secteur public dépouillé et un secteur privé en plein essor.

 

Tribune écrite par un collectif d’élèves, de professeurs, d’anciens élèves et parents d’élèves des lycées Louis-le-Grand et Henri-IV, et co-signée par des représentants d’associations de parents d’élèves, des élus, des anciens élèves et des professeurs de ces établissements, dont : Anne Biraben, membre des Conseils d’Administration du college et lycée Henri-IV, ancienne élève du lycée Henri-IV ; Alexandre Barrat, membre du Conseil d’administration du lycée Louis-le-Grand, ancien élève du lycée Louis-le-Grand ; Antoine Bonneval, FCPE Louis-le-Grand, président depuis 2021, élu au Conseil d’administration ; Céline Jeanjean, FCPE Louis-le-Grand, vice-présidente depuis 2016, élue au Conseil d’administration ; Bruno Bensaid, FCPE Louis-le-Grand, membre du bureau, élu au Conseil d’administration et ancien du Lycée Henri-IV ; Béatrice Millot, FCPE Louis-le-Grand, secrétaire du bureau local, élue au Conseil d’administration et ancienne élève du lycée Henri-IV ; Nicolas Balaresque, professeur d’Histoire-Géographie en ECG au lycée Henri-IV ; Marie-Noëlle Faure, professeure honoraire de chaire supérieure, Lycée Henri-IV ; Martine Leloup, professeure honoraire de Lettres, lycée Henri-IV ; Carine de Saint-Rémy, professeur d’histoire au lycée Henri-IV ; Aliocha Piéchaud, élève de l’École normale supérieure, ancien élève du lycée Henri-IV (2016-2021) ; Aline Boutchenik, juriste publiciste, ancienne élève du lycée Henri-IV (2010-2013) et du CPES-PSL (2014-2017) ; Karim Bouyad, ancien élève du lycée Henri-IV (1998-2004), entrepreneur ; l’Association des anciens élèves de Louis-le-Grand (AAELLG) avec Bernard Chapot, president ; Habib Shoukry, vice-président ; Sophia Fassassi, membre du Conseil d’administration et professeure de Lettres ; Ophélie-Tiphaine Arcilla Borraz, membre du Conseil d’administration et enseignante ; Bérengère Chmielewski, membre du Conseil d’administration etc.

 

Collectif

 

Partager cet article
Repost0
18 mars 2022 5 18 /03 /mars /2022 06:00

Guerre en Ukraine: plus de 25 000 armes distribuées à des civils à Kiev |  Le Devoir

La guerre, avec son lot d’innocents sacrifiés, de réfugiés, seuls ceux qui la subissent dans leur chair ont pour moi le droit à la parole loin des gloseurs des plateaux télés, politiques, journalistes, qui manient l’Histoire, la géopolitique avec la hauteur d’un premier violon. Je laisse de côté les experts des réseaux sociaux, qui eux, bégaient les arguments de leur camp.

 

Entretien.

Andreï Kourkov : “Pour nous les Ukrainiens, la liberté est plus importante que la stabilité” ICI

Publié le 14/03/2022 - 06:09

 

 

Contraint de fuir Kiev avec sa famille, le célèbre écrivain ukrainien Andreï Kourkov a accordé un entretien au quotidien italien La Repubblica depuis le lieu où il s’est réfugié, près de la frontière avec la Biélorussie. Il raconte son quotidien depuis le début de la guerre, la détermination de ses compatriotes et sa révolte devant l’offensive de Vladimir Poutine qui, “sous prétexte de protéger la langue russe, tue des milliers de russophones”.

 

D’un côté, un pays qui a appris à aimer la démocratie. De l’autre, un Poutine crépusculaire, à qui il ne reste qu’un seul rêve : fonder un nouvel empire soviétique. Et pour atteindre cet objectif fou, il est prêt à tout, même à engloutir un pays entier.

 

C’est ainsi qu’Andreï Kourkov, 61 ans, l’un des écrivains ukrainiens contemporains les plus connus, décrit une Ukraine assiégée, consciente de ses racines et de son histoire complexe (Kourkov est issu d’une famille russophone, et il a écrit une bonne partie de ses œuvres en russe), mais prête à tout sacrifier pour sa liberté.

 

ANDREÏ KOURKOV : Ma famille et moi, nous allons bien. Au troisième jour de guerre, nous avons quitté Kiev pour un village situé à 90 kilomètres, où nous avons une maison de campagne. Mais des amis sont venus nous mettre en garde, pendant que nous préparions le thé : ce n’était pas prudent de rester là. Nous avons mis 22 heures pour parcourir 400 kilomètres en voiture, et maintenant nous nous trouvons dans un lieu plus sûr, même si les Russes possèdent une base militaire en territoire biélorusse, à 30 kilomètres d’ici.

 

  • Vous avez évoqué dans vos livres la menace que représentait Poutine. Vous attendiez-vous à ce que cela aille aussi loin ?

 

Je savais qu’il ne nous laisserait pas en paix, mais je ne pensais pas qu’il irait jusqu’à déclencher une guerre. Maintenant qu’il est âgé [le président russe a 69 ans], il craint de ne pas avoir le temps de recréer l’Union soviétique et l’empire russe. Ce qui n’est pas possible sans l’Ukraine. Aujourd’hui, il n’a plus besoin de [davantage] d’argent, ni de rien d’autre. Il veut rester dans les manuels d’histoire comme l’homme qui aura fait revivre la superpuissance dont tout le monde doit avoir peur.

 

  • Les Ukrainiens font preuve d’un courage et d’une solidarité, qui, vu d’Occident, paraissent extraordinaires. Que pouvez-vous nous dire de l’esprit dans lequel ils affrontent l’invasion ?

 

Je suis étonné par le courage des soldats ukrainiens. Je connais beaucoup de vétérans de la guerre du Donbass [la région de l’est de l’Ukraine où se sont affrontés à partir de 2014 l’armée ukrainienne et des séparatistes prorusses], qui sont prêts à mourir pour l’Ukraine ; la plupart d’entre eux se sont enrôlés dans l’armée dès le premier jour de la guerre. Et puis il y a les civils qui se sont engagés dans les milices pour défendre le territoire, ainsi que les volontaires qui aident les réfugiés, préparent des cocktails Molotov, creusent des tranchées et installent des barricades. Les Ukrainiens sont déterminés à lutter jusqu’au bout.

 

  • Dans Journal de Maïdan (Liana Levi, 2014), vous racontez les événements de 2013 [lors du déclenchement de manifestations proeuropéennes sur la place de Kiev qui vont donner son nom au mouvement Euromaïdan] et vous écrivez que “l’homme qui vit en un ‘point chaud’ du monde, ou simplement au voisinage d’un volcan en activité, juge différemment le temps”. Qu’est-ce que cela implique de vivre dans une situation d’instabilité permanente ?

 

Nous sommes habitués à l’instabilité : pour nous, la liberté est plus importante que la stabilité. Pour les Russes, au contraire, la stabilité est plus importante que la liberté. Depuis 2014, nous sommes beaucoup d’Ukrainiens à croire que nous vivrons toujours comme les Israéliens, dans un danger permanent. Mais cela ne veut pas dire qu’il faille changer son mode de vie. Aujourd’hui, beaucoup d’Ukrainiens sont préoccupés par leurs travaux agricoles : nous devrons bientôt semer des céréales, et puis planter des patates. C’est très difficile à faire quand on essuie des tirs. Mais dans le Donbass, les gens ont cultivé leurs potagers même sous les bombardements.

 

  • Cela rappelle le personnage de votre dernier roman [Les Abeilles grises, paru début février aux éditions Liana Levi] : un apiculteur qui, dans le tumulte de l’histoire, est bien décidé à sauver ses abeilles.

 

Sergueïtch, le protagoniste des Abeilles grises, est un habitant typique de l’est de l’Ukraine, de la “zone grise” coincée entre les séparatistes et les loyalistes. Il n’est pas très instruit, mais il est honnête et travailleur. Il ne s’intéresse pas à la politique, et encore moins à l’histoire. Il a vécu comme vivent des centaines de milliers d’autres Ukrainiens. En pensant seulement à lui-même et à ses abeilles. Cela ne veut pas dire qu’il est méchant, il est seulement normal. C’est quelqu’un qui n’a pas appris à ausculter son pays comme un médecin ausculte son patient, ou comme un étudiant écoute un professeur.

 

  • De nombreux Ukrainiens, en revanche, s’intéressent à la politique. Que s’est-il passé depuis 2013 ?

 

L’Ukraine s’est rapprochée de l’Europe, même si l’Europe ne lui a pas beaucoup prêté attention. Les Ukrainiens veulent des réformes, ils veulent entrer dans l’Union européenne. C’est pourquoi ils s’élèvent contre la corruption en Ukraine et contre les responsables politiques russophiles. “Revenir” vers la Russie, ce serait revenir à la servitude soviétique. Aucun d’entre nous, sauf un petit nombre d’adorateurs de Poutine, ne souhaite quoi que ce soit de ce genre. Nos valeurs sont aujourd’hui la liberté et l’indépendance : la liberté et le droit de chacun à avoir propre opinion sur tout, y compris sur l’action du président et du gouvernement. L’Ukraine dispose de beaucoup de compétences techniques, elle a l’un des niveaux les plus élevés de services publics numériques du monde ou encore l’entreprise publique Antonov qui a produit le plus grand avion-cargo du monde, le Mriya, que les troupes russes ont détruit [il n’existait qu’un exemplaire de cet Antonov-225, construit en 1988 et surnommé “le rêve” en ukrainien]. Nous pouvons tout relancer. Mais il faut avant tout que la Russie mette fin à son agression.

 

  • Les citoyens européens vivent ce qui se passe en Ukraine avec une grande empathie. Cela ne vous étonne pas ?

 

L’Europe est très émotive, et en même temps méfiante. Elle a commencé à nous aider seulement quand elle s’est rendu compte que Poutine avait déclenché une guerre, une guerre du XXe siècle — avec des canons, des blindés, en bombardant les villes. Je suis content que les Européens se soient réveillés, nous avons besoin de leur soutien.

 

  • Une dernière question. Vous êtes l’un des auteurs ukrainiens les plus importants, mais vous écrivez en russe. Comment vivez-vous cette double identité ?

 

Je suis issu d’une famille russe, je suis né près de Leningrad [aujourd’hui, Saint-Pétersbourg]. Je suis parti pour Kiev avec mes parents à l’âge de deux ans. En 1991, quand l’URSS a disparu et qu’une Ukraine indépendante est apparue, j’étais heureux. Au cours des trente dernières années, je suis devenu un Ukrainien engagé politiquement. Oui, j’écris en russe, comme beaucoup d’autres écrivains et poètes ukrainiens, mais j’ai appris l’ukrainien et j’ai écrit deux essais dans cette langue, je parle l’ukrainien. Et tout ce que je vois, c’est que sous prétexte de protéger la langue russe, Poutine tue des milliers de russophones, des gens d’origine russe, comme moi.

Lara Crinò

 

L'Ostalgie 3/5 : Les affiches staliniennes - Balises - Le magazine de la Bpi

En pensant imiter Staline, Poutine a commis une grave erreur

Gérard Grunberg et Telos — Édité par Hélène Pagesy — 13 mars 2022

La défaite russe en Ukraine, probable à plus ou moins long terme, provoquera à coup sûr la seconde mort de l'Union soviétique.

 

 

 

 

Vladimir Poutine, converti au nationalisme russe, a renié depuis longtemps une Union soviétique coupable à ses yeux d'avoir mené, en premier lieu avec Lénine, une politique des nationalités qui a conduit à la situation actuelle de l'autonomie de l'Ukraine. Certains observateurs estiment qu'il entend reconstituer l'Empire des Romanov. Si tel est son but, c'est néanmoins en héritier du totalitarisme stalinien qu'il compte l'atteindre.

 

La vision du monde de Poutine, ancien lieutenant-colonel du KGB, s'est construite à l'intérieur du monde soviétique et il a très mal vécu la fin de l'URSS, dont il affirmait en 2005, six ans après son arrivée au pouvoir, que c'était «la plus grande catastrophe géopolitique du XXe siècle». Cette même année est fondé en avril un mouvement de jeunesses poutinistes dont le nom, «Nachi» («les nôtres», écrit Наши en russe) donne le ton de ce qui va suivre.

 

 

Car après une période de flottement dans son premier mandat, la Révolution orange de 2004 en Ukraine semble lui avoir fait redouter qu'une autre révolution démocratique se produise et fasse exploser la Russie comme hier l'Union soviétique. Il semble se convaincre alors que, pour bloquer cette évolution, il lui faut établir une dictature personnelle, estimant que la chute de l'URSS a été due d'abord à la faiblesse du pouvoir, avant comme après cette chute. Il s'agit, pour lui, après la politique de décentralisation lancée par Boris Eltsine, de recentraliser fortement le pouvoir.

 

C'est dans ces années-là qu'apparaissent dans la phraséologie officielle des formules comme «verticale du pouvoir», «dictature de la loi», «démocratie souveraine», «capitalisme administré». Le pouvoir central se renforce alors face aux oligarques et aux gouverneurs des régions; l'opposition s'affaiblit. Après l'alternance en trompe l'œil de 2008, le retour de Poutine à la présidence en 2012 est marqué par des contestations qui occasionnent un nouveau tour de vis. Il ne va plus cesser de renforcer son pouvoir jusqu'à devenir un véritable autocrate.

 

 

Réécriture révisionniste de l'histoire

 

Dès le milieu des années 2000 il entreprend parallèlement une réhabilitation de Staline, modèle à ses yeux du véritable dirigeant; une entreprise clairement révisionniste. En 2008, de nouveaux manuels scolaires, commandés par l'administration présidentielle, réhabilitent l'ancien maître du Kremlin. Ils abordent notamment la question des purges, affirmant qu'il y avait beaucoup coupables parmi les personnes poursuivies et que ces purges avaient permis de gagner la guerre en se débarrassant de la cinquième colonne.

 

La réécriture révisionniste de l'histoire trouve son aboutissement quand en décembre 2020, il fait dissoudre l'ONG Mémorial, fondée en 1989 dans le but d'archiver les exactions de la période stalinienne et, plus largement, les violations des Droits de l'Homme jusqu'à aujourd'hui. Dans un esprit qui évoque furieusement les procès des années 1930, le procureur qui traite l'affaire estime que le simple fait d'évoquer les purges est une justification du nazisme.

 

 

La fausse alternance de 2008 s'était déroulée dans le respect de la lettre des institutions, et sans toucher à la constitution. Mais le 10 mars 2020, la Douma vote un amendement du projet de révision constitutionnelle qui permettra à Vladimir Poutine de briguer deux nouveaux mandats consécutifs après 2024, ouvrant ainsi la voie à la possibilité du maintien au pouvoir du président russe jusqu'en 2036. Le 22 décembre, il fait adopter une loi donnant l'immunité judiciaire à vie aux anciens présidents ainsi qu'à leurs proches. Ce nouveau texte dispose qu'un ex-président russe «ne peut être poursuivi pénalement ou administrativement»; il ne peut pas, par ailleurs, être arrêté par la police, subir un interrogatoire ou être perquisitionné.

 

Royaume de la propagande

 

Poutine, dès lors seul maître à bord, se met à traiter ses collaborateurs comme Staline traitait les siens, leur assassinat en moins il est vrai. Il suffisait pour s'en convaincre d'observer son patron du renseignement extérieur, au cours d'un conseil de sécurité convoqué en février sur la question ukrainienne, trembler et bégayer debout devant lui, pressé de donner clairement son avis sur la déclaration d'indépendance des deux républiques autoproclamées de l'est du pays.

 

Staline était considéré par certains spécialistes comme un pervers narcissique. Poutine, lui, pourrait être atteint d'un délire paranoïaque, isolé dans sa tour d'ivoire, peu curieux des avis de ses collaborateurs mais exigeant d'eux une obéissance et une loyauté absolues. Cette folie se communique à l'espace public. Comme sous Staline puis ses successeurs, la Russie poutinienne est le royaume de la propagande la plus grossière et de la pure désinformation, ce qu'Antoine Cigila notait dans son ouvrage publié en 1938, Dix ans au pays du mensonge déconcertant.

 

 

Cet art du mensonge est une seconde nature de ces régimes totalitaires où le pouvoir considère que toute personne qui s'écarte du discours officiel est à la fois un ennemi à abattre et un personnage sans valeur qu'il faut traiter par l'injure et le mépris. Rappelons le temps où Alexandre Fadeïev, au Congrès mondial des intellectuels pour la paix, en 1948, avait qualifié Jean-Paul Sartre, absent de la cérémonie, de «chacal muni d'un stylo» et de «hyène dactylographe».

 

Aujourd'hui les «ennemis de l'intérieur» ne sont pas beaucoup mieux traités qu'hier, même si les procès de Moscou ne sont pas réapparus: assassinats de journalistes, empoisonnement d'opposants tel qu'Alexeï Navalny condamné à une lourde peine de prison, rafles par milliers de manifestants contre la guerre. «L'opération spéciale» en Ukraine s'accompagne à l'intérieur du recours à des mesures totalitaires pour contrôler la population russe.

 

Ainsi, les parents d'élèves ont reçu des avertissements des écoles leur enjoignant de surveiller l'utilisation par leurs enfants des réseaux sociaux. Dans les écoles, les élèves assistent à des sessions spéciales destinées à leur inculquer la ligne officielle. La censure d'internet se fait de plus en plus complète. Il s'agit de déconnecter la population russe du monde extérieur. On assiste ainsi à une résurgence du cauchemar stalinien. Le mot totalitarisme ne doit pas être prononcé à la légère, mais il s'impose ici pour décrire l'évolution de la société russe.

 

L'ennemi extérieur

 

L'ennemi extérieur doit être traité comme l'ennemi intérieur. Ici encore le vocabulaire rappelle le temps de Staline. Ainsi le gouvernement ukrainien n'est pour Poutine qu'une bande de nazis et de drogués qu'il faut liquider. Quant à la population ukrainienne, il faut l'écraser sous les bombes et obtenir une reddition sans conditions. Il n'existe pour ces deux hommes ni droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, ni prix de la vie humaine. Les destructions et meurtres de masse sont les seules réponses adéquates aux demandes de liberté.

 

Il faut relire l'ouvrage de Robert Conquest, Sanglantes moissons, qui a décrit le martyre du peuple ukrainien à l'époque de la politique de la collectivisation forcée des terres par Staline au cours de l'hiver 1932-1933, qui entraîna une famine généralisée et cinq millions de morts. Les répressions, les persécutions et les purges y furent menées plus largement encore qu'ailleurs. Il faut dire que Staline, comme plus tard Poutine, détestait toute forme de pensée nationale s'écartant du modèle «grand-russe».

 

C'est cette politique d'une extrême brutalité qui fut menée par Poutine en Tchétchénie, avec la destruction de Grozny, puis en Syrie, et qui semble prendre la même direction aujourd'hui en Ukraine. L'entrée des chars russes dans les grandes villes renvoie à leur entrée hier à Budapest, en 1956, et à Prague, en 1968: la loi de la force et la politique de la terreur.

 

 

Comme pour Staline, l'ennemi est pour Poutine l'Occident et ses régimes démocratiques dont il faut se protéger de la possible et dangereuse expansion. D'où l'abaissement d'un nouveau «rideau de fer» qui isole les habitants de l'empire russe. L'OTAN est le bras armé de cet ennemi, jugé seul responsable des réponses «purement défensives» adoptées par le pays. Après quelques années d'hésitation, Poutine est ainsi revenu à la vision stalinienne de la guerre froide.

 

Dans ce monde deux camps s'opposent irréductiblement sur la planète. Les États-Unis et la Russie en sont les deux puissances dominantes. Face à l'ennemi occidental, Poutine tente de renouer avec la «mobilisation patriotique» du temps stalinien. Faute de fournir au peuple russe la modernisation économique promise, cette mobilisation, qui s'était avérée particulièrement efficace au temps de la «grande guerre patriotique» (il est vrai activée par les commissaires politiques), connaît une adaptation au temps présent. Car, si l'Ouest est considéré comme étant en guerre contre la Russie, celle-ci ne fait en revanche que «se défendre», son invasion de l'Ukraine n'étant qu'une «opération spéciale» et non une guerre, une sorte d'opération de maintien de l'ordre. Comme Staline, Poutine se présente comme le seul capable de protéger le peuple russe contre les agressions extérieures.

 

Stalinisme et hitlérisme

 

Un élément capital distingue cependant la Russie poutinienne de la Russie stalinienne. Staline, plus rusé et prudent que Poutine, n'avait mené de guerre offensive en 1939 que contre la petite Finlande, guerre qu'il avait fini par remporter malgré de sévères et nombreux revers (c'est pendant la guerre d'hiver que les Finlandais inventèrent le cocktail Molotov utilisé par les Ukrainiens aujourd'hui contre les chars), et contre la Pologne, guerre qu'il ne risquait pas de perdre puisque Hitler attaquait ce pays de son côté. En revanche, c'est une guerre défensive contre l'Allemagne nazie qu'il avait victorieusement menée. Poutine, moins prudent et plus mégalomaniaque, a nettement sous-estimé le rapport de forces en Ukraine.

 

C'est en réalité à l'offensive d'Hitler contre la Russie que l'on serait alors tenté de comparer le blitzkrieg raté de Poutine. Il faut d'ailleurs se rappeler que la dernière fois que Kyiv et d'autres villes ukrainiennes ont subi une telle brutalité militaire, ce fut aux premières heures du 22 juin 1941. Il s'agissait alors du lancement par Hitler de l'opération Barbarossa contre l'Union soviétique. Deux jours avant l'invasion de l'Ukraine par Poutine, est paru sur RIA Novosti un éditorial annonçant prématurément la conquête du pays, où l'auteur qualifiait «l'opération spéciale» de «solution de la question ukrainienne»

 

 

Si Staline n'a pas perdu de guerre, en revanche, ses successeurs en ont perdu une, en Afghanistan. Une défaite qui a joué un rôle notable dans l'écroulement de l'Union soviétique. Une défaite de Poutine en Ukraine, probable à plus ou moins long terme, provoquera à coup sûr, mais après quelle catastrophe humanitaire et quelles destructions, la fin de Poutine et de la Russie poutinienne, la seconde mort de l'Union soviétique en quelque sorte.

Partager cet article
Repost0
16 mars 2022 3 16 /03 /mars /2022 06:00

Auguste Piccard - Tournesol Auguste Piccard - CC BY-SA 3.0 de

Le Figaro s’alarme : Alerte sur l'huile de tournesol, nouvel or jaune agricole ICI 

 

En raison du poids de l'Ukraine, dont les ports sont bloqués, dans le commerce mondial de cet oléagineux, le risque de rupture d'approvisionnement dans quelques mois est réel.

 

«Si l'Ukraine n'arrive pas à planter, il y aura une crise majeure sur l'huile de tournesol», prédit ainsi Jean-Philippe Puig, directeur général du groupe avril, leader français des huiles végétales. Dans le cas de ce scénario noir, il serait quasiment impossible de trouver des provenances alternatives suffisantes pour compenser.

 

Désolé, mais pendant quelques années je fus PDG de la SIDO (société interprofessionnelle des oléagineux, protéagineux, plantes textiles) et, à ce titre, membre de droit au Conseil d’Administration du fonds  financier Sofiprotéol l’ancêtre du groupe avril mentionné ci-dessus.

 

Le tournesol j’en connais un rayon, avec Fruit d’Or la multinationale Unilever en a fait l’huile raffinée qui a succédé à Lesieur arachide, et ce avec la complicité de Jean-Claude Sabin, petit paysan du Tarn, ancien de la JAC, président de la FOP (fédération des oléoprotéagineux) méprisé par les arrogants céréaliers.

 

Fruit d'Or - 1 l

 

Fruit d'Or prêt à voler de ses propres ailes

 

Je vous raconte plus bas la saga du tournesol, du colza industriel pour produire des bio-carburants, et le petit empire agro-alimentaire qu’est avril.

 

En France, où une bouteille d'huile végétale vendue en grandes surfaces sur trois (37%) est issue du tournesol, pas d'inquiétude à ce stade chez les consommateurs. En revanche, chez les industriels gourmands de cet ingrédient, comme le spécialiste français du pain industriel et de pâtes à tarte Cérélia, l'heure est à la crainte d'un «risque de rupture d'approvisionnement avéré», selon son président Guillaume Réveilhac. Chez les syndicats des fabricants de biscuits, gâteaux ou pains industriels, on souligne déjà des problèmes de disponibilité sur cet ingrédient qui leur est indispensable. L'heure est donc aux solutions de fortune, comme la substitution du produit manquant par de l'huile de colza.

 

Avec ses champs de tournesol à perte de vue, l'Ukraine est le premier producteur mondial de cet oléagineux. Il est aussi le premier exportateur mondial de cette huile utilisée dans les cuisines, restaurants ou usines agroalimentaires du monde entier. Chaque année, les terres très fertiles du pays envahi par la Russie fournissent ainsi la moitié des exportations mondiales d'huile de tournesol et 70% de celles de tourteaux utilisés en alimentation animale, selon les chambres d'agriculture

 

Dans ce contexte, le blocage des ports ukrainiens et plus globalement de la mer Noire fait peser une menace forte sur les approvisionnements mondiaux de cet oléagineux et de son huile. Si l'Ukraine arrive peu ou prou actuellement à acheminer par train 10% de ses exportations habituelles de céréales et de protéines, cela reste insuffisant pour assouvir la demande mondiale. Ce qu'a confirmé cette semaine Lesieur (groupe Avril), le leader du rayon, qui n'aura pas de souci pour ses produits à sa marque, mais reste dans la plus grande incertitude sur sa capacité à trouver de la matière première pour les volumes qu'il fabrique à marque de distributeur.

Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Centre-Val de Loire, Pays de la Loire, Bourgogne-Franche-Comté

 

Tribune agriculture

La saga de Jean-Claude Sabin

 

Des fondateurs regroupés après-guerre par Roger Petit, tels Jean Bustarret, André Cauderon, Claude Héros, Bernard Le Quéllec, Raymond Noury, etc. autour du CNTA/OLEAGRI porteurs d’une vision commune quant à la nécessité de souveraineté alimentaire nationale : celle de produire dans l’Hexagone en se dotant d’outils industriels (huileries, raffineries) suffisamment d’huiles végétales pour la France tout en ayant le souci d’offrir au travers de partenariats public-privé (USGOS/AMSOL, PROMOSL, CODISOL, CETIOM) la meilleure génétique et des semences de qualité aux agriculteurs, ainsi que des conseils avisés de culture et un revenu décent.

 

Des héritiers regroupés autour de Jean-Claude Sabin et Philippe Tillous-Bordes, Jean-Paul Jamet, Emile Choné, Yves Delaine, Georges Vermeersch, etc. soutenus par la coopération agricole, plus gestionnaires et dotés d’appuis politiques puissants, capables de faire rebondir la filière en 1976-78 et de créer Sofiprotéol en 1983 après la défaillance du CNTA, puis la filière Diester®, biodiesel à base d’huile de colza et de tournesol en 1992 et le lancement du premier marché à terme européen de graines de colza en 1994, puis encore de démultiplier leurs actions jusqu’en 2013 pour transmettre dans de bonnes conditions la poursuite du développement de la masse critique – cette notion est essentielle pour la pérennité à long terme de la filière dans une économie désormais largement mondialisée – à l’international de cette filière à une troisième génération de dirigeants qui créa en 2015 le Groupe Avril, Terres Univia et Terres Innovia.

 

Dans les années 1970, la France manque de protéines : elle dépend à 70 % de l'extérieur pour ses approvisionnements. Ses vaches se nourrissent de tourteaux de soja du Midwest. L'embargo américain sur le soja, en 1973, a révélé l'ampleur de la menace et affolé les campagnes. On parle « plan Protéines. En 1977, VGE dans son grand discours de Vassy appelle à l'« agro-puissance ». Grâce à deux hommes, Jean-Claude Sabin, un paysan du Tarn, patron à l'époque de la Fédération des producteurs d'oléagineux et protéagineux, et Philippe Tillous-Borde, un ingénieur agronome venu de chez Louis Dreyfus, vous pouvez aujourd'hui regarder défiler de votre TGV une France où le jaune du tournesol et du colza vient égayer le vert.

 

Avec l'appui des pouvoirs publics, et cette merveille sémantique à la française qu'est la « contribution volontaire obligatoire » versée par les agriculteurs à leur organisation professionnelle, ils créent Sofiprotéol. Pour encourager la culture de nouvelles graines, dont on extrait en les broyant à la fois des huiles et des fibres, il faut leur assurer des débouchés. Cela se fera en bâtissant une industrie de la transformation qui conduira les mayonnaises Lesieur sur les tables, et le Diester dans les réservoirs des diéselistes. Au début, Sofiprotéol procédera essentiellement par prise de participations, mais l'établissement financier va au fil des ans renforcer son rôle d'opérateur industriel. La récolte a porté ses fruits. Les quinze premières années sont surtout consacrées au développement des usines de trituration, où s'effectue le broyage, mais l'huile de colza n'est pas encore reconnue pour ses qualités nutritionnelles. Qu'en faire ? A Bruxelles, face aux montagnes de beurre, aux lacs de lait, aux tonnes de céréales du début des années 1990, on commence à parler jachères. La grande idée de Sabin et de Tillous-Borde fut d'inventer un nouveau carburant, le Diester, et surtout de convaincre la commission d'utiliser les surfaces en jachère pour des cultures non alimentaires.

80% d'acide oléique, 12% d'acide linoléique, 4% d'acide palmitique, 3% d'acide stéarique

16 JANVIER 2021 PAR ALAINBONJEAN

 

Les oléagineux à graines en France depuis 1750 ! ICI 

 

La pandémie actuelle étant propice à la consultation de nos archives, je viens de relire un article du biologiste et botaniste Auguste Chevalier (1873-1956) paru en 1941, intitulé « La culture des plantes oléagineuses en France. Prospérités de cette culture de 1750 à 1870. La régression depuis 1880. Essais et amélioration à entreprendre1 » que j’avais découvert au début des années 1980 et conservé.

 

Au vu de ce que j’ai pu connaître durant ma vie professionnelle, trois périodes de production d’oléagineux à graines ont traversé les années 1750 à 2020 dans notre pays :

 

  • une première phase d’expansion effectivement de 1750 à 1870,
  • une phase de recul drastique de 1880 à 1945,
  • une seconde phase d’extension de 1950 à 2020.

 

 

Usine - Groupe Avril

ACTIVITES

Avril est l’acteur industriel et financier de la filière des huiles et protéines végétales.

ICI 

Culture tournesol

TOURNESOL ICI 

 

La composition du tournesol (Helianthus annuus) a grandement évolué depuis son apparition en Amérique du Nord. Aujourd’hui, sa richesse en oméga 6 et en oméga 9 comme ses propriétés antioxydantes en font une plante très appréciée, tant par l’homme que par les animaux d’élevage pour leur alimentation.

Première apparition de Tournesol dans Le Trésor de Rackham le Rouge

Prénom

 

Pour le prénom de Tournesol, Hergé s'est inspiré d'une personne réelle. Ce merveilleux Tryphon, si délicieusement anachronique, fut en effet emprunté par l'auteur à un menuisier de sa connaissance qui habitait non loin de chez lui. À lui seul ce prénom, couplé avec ce patronyme qui explique l'intérêt du professeur pour l'astronomie, résume l'ensemble du personnage.

 

 

Famille

 

On ne sait quasiment rien de la famille de Tryphon Tournesol. La seule indication qu'il livre à ce sujet s'énonce en forme négative : il n'a jamais eu de sœur !

Tournesol n'a pas de soeur - Tintin et les Picaros

« Le professeur Tournesol, ce serait un point commun avec Hercule Poirot, est né avec un âge certain et indéfini. On pourrait lui donner une cinquantaine, un peu vieillie ou une petite soixantaine. Il la gardera. Il la gardera alerte, voire sportive. Mais enfin, c'est un homme qui a déjà une longue carrière derrière lui. Il est presque chauve. Il porte des lunettes d'un autre temps, un petit chapeau, un manteau pour frileux, car on l'imagine très frileux. Il se sépare rarement d'un parapluie. Quand il sort, les parapluies joueront un grand rôle dans ses aventures. Bref, il est déjà anachronique au moment où Hergé le crée. Et pourtant, c'est un pionnier. C'est un homme d'avenir, puisque c'est lui qui mènera Tintin et Haddock jusque sur la Lune. Il y a quelque chose de tout à fait ambivalent, tout à fait extraordinaire, une trace de ces films burlesques qu'Hergé a vus dans son enfance et en même temps, un regard sur des savants réels qu'il a pu observer Haroun Tazieff qu'il avait côtoyé, et surtout Auguste Picard, l'explorateur de la stratosphère, qui était un temps son voisin et qui semble avoir inspiré physiquement le personnage. Sauf qu'il a fallu le raccourcir un peu. Car, disait Hergé, si j'avais représenté Picard dans sa taille, il aurait dépassé des cases. »

Partager cet article
Repost0
14 mars 2022 1 14 /03 /mars /2022 06:00

Alain Krivine, lors d'une conférence de presse, le 8 avril 1974.Alain Krivine, lors d'une conférence de presse, le 8 avril 1974. © AFP / STF

Je sais, je sais, comme le chantait Gabin, cette chronique, qui semble sans queue ni tête, va dérouter certains de mes lecteurs, et pourtant elle n’est pas aussi foutraque qu’il n’y paraît, elle est pleine de liens, ceux de mes souvenirs.

 

Baby-boomer encore véloce, soixante-huitard non révisé, buveur de vin nu qui n’existaient pas au temps du PSU, j’ai croisé sur ma longue route, des gens fort différents.

 

La difficile restructuration financière de Pierre & Vacances

Le président et fondateur de Pierre et Vacances-Centre Parcs, Gérard Brémond, à Paris le 21 novembre 2018. 

 

Prenons Gérard Brémond, fondateur de Pierre & Vacances-Center Parcs, je l’ai rencontré dans un scénario type Citizen Kane (pour faire plaisir à ciné Papy), le prédateur étant en 1982, Robert Hersant, l’empereur de la presse qui avait concentré jusqu’à 40% des titres de la presse française dans les années 1980. Mon patron, Louis Mermaz, alors président du CG de l’Isère et de l’AN, voyait d’un mauvais œil les manœuvres du Robert pour mettre la main sur Le Progrès de Lyon et le Dauphiné Libéré. Il me confia la mission de provoquer un tour de table afin de contrer le papivore. C’est dans ces conditions que je rencontrai Gérard Brémond, de même que Jean-Claude Gallienne, le papa de Guillaume Gallienne, l’acteur bien connu. À cette occasion je constatai qu’il était plus facile d’aligner des millions de francs que d’en trouver quelques centaines pour faire ses fins de mois. Bref, le tour de table fut bouclé mais un veto vint de l’Elysée, Tonton nous fit savoir qu’Hersant était intouchable.

 

La concentration des médias au temps de Robert Hersant

 

Dix ans après sa mort en 1996, l’ombre de Robert Hersant plane encore sur son défunt empire de presse. De son vivant, le magnat était passé à travers toutes les gouttes, tant les autres pouvoirs, politique ou judiciaire, semblaient redouter le sien. À titre posthume, un vieux dessous de table de 90 millions de francs remonte tardivement à la surface, à l’occasion de l’interminable agonie du quotidien France-Soir. Ses ayants droit vont peut-être devoir assumer cet héritage encombrant, ressurgi d’un paradis fiscal.

 

Robert Hersant aura rythmé cinquante années de la vie politico-médiatique française et construit un empire de papier (Le Figaro, France-Soir, Auto Moto, Paris Turf, La Voix du Nord, Le Dauphiné libéré, Le Progrès, Presse Océan, etc.), dont il ne reste aujourd’hui plus rien. Seule la Ve République pouvait mettre en selle ce type de personnage… Il est né en 1920 en Loire-Atlantique, fils d’un capitaine au long cours. Étudiant en Normandie, il est secrétaire des Jeunesses socialistes locales et fréquente alors deux futurs destins politiques : Jean Lecanuet, qui sera candidat centriste à l’élection présidentielle de 1965, et Alexandre Hébert, qui incarnera plus tard l’anarcho-syndicalisme avant de devenir membre du Parti des travailleurs (trotskyste-lambertiste). Mais Robert Hersant a d’autres vues : bien plus que la politique, il embrasse le monde de la presse. Au plus mauvais moment : sous l’occupation allemande.

 

Chef en 1940 du mouvement collaborationniste Jeune Front, il fonde deux ans plus tard le journal pétainiste

 

Que reste-t-il du Groupe Hersant ? ICI  

 

Revenons à Gérard Brémond sa capacité à séduire les décideurs, avec ce qu’il faut de rouerie et de prestidigitation économique. Ses armes ? « Empathie, humour, détermination » Il était jazzman, guitariste de bonne famille. Son quintette écume les caves parisiennes. Le succès le fuit, la passion lui reste ; il chroniquera l’avènement de John Coltrane pour Jazz Hot puis, fortune faite, rachètera la radio de jazz TSF et le Duc des Lombards, célèbre club parisien. Il s’amuse aujourd’hui de ses « horaires de jazzman » – difficile de le joindre le matin ou de l’empêcher de travailler le soir. Robert Faure, son factotum à Avoriaz, y voit la source de son art de la synthèse, de l’improvisation et du rythme des affaires.

 

L’expérience Avoriaz est à la fois rude et joyeuse. Une formidable vitrine, trop peu rentable, jusqu’à ce que le Festival du film fantastique, à partir de 1973, en fasse une station branchée où M. Brémond convie les cabinets ministériels comme les stars, et tisse ainsi son réseau. Il importe un modèle commercial original, la « nouvelle propriété » : des particuliers financent la construction d’une résidence en achetant de petits appartements, que Pierre & Vacances s’occupe de louer.

 

Nous avons sympathisés.

 

(Voir article plus bas : La triste sortie de Gérard Brémond)

Passons au café charbon : « Votre Taulier, lors d’une dégustation des vins du Plan de Dieu, au resto Touller Outillage, rue Pierre Timbaud, haut-lieu des bobos d’Oberkampf (le café charbon où je croisais le dinosaure de l’ancienne Ligue Communiste Révolutionnaire, Alain Krivine, le papa politique de Besancenot de la NPA) est tombé nez-à-nez avec Gilles Ferran et Calendal. ICI 

 

Alain Krivine et Olivier Besancenot, en 2005.© MARTIN BUREAU/AFP

 

Charbon, séduisante brasserie (a)typique, emblématique de l’Est Parisien ICI 

by Frédérique de Granvilliers

 

Alain Krivine est mort, mais pas le rêve présidentiel de l’extrême gauche française ICI 

 

Le décès d’Alain Krivine, figure historique de l’extrême gauche française, est intervenu samedi alors que cette mouvance politique sera bien présente dans les urnes le 10 avril, pour le premier tour de la présidentielle

Richard Werly

 

Publié dimanche 13 mars 2022

 

La révolution, en France, continue de passer par la conquête de l’Elysée. Au moins sur le plan symbolique. Décédé samedi à l’âge de 80 ans, le leader trotskiste Alain Krivine, co-créateur de la Jeunesse communiste révolutionnaire en 1966, incarnait toutes les aspirations contradictoires de l’extrême gauche française. Laquelle fut, dans les années 1970, l’un des principaux viviers de recrutements de la nouvelle génération de dirigeants du Parti socialiste, avec des personnalités telles que Lionel Jospin, Jean-Luc Mélenchon, Jean-Christophe Cambadelis ou Pierre Moscovici, tous issus de la mouvance trotskiste dont ils s’extirpèrent après leurs études pour gravir les marches de la politique et du pouvoir, parfois jusqu’au sommet.

 

 

Krivine, ou le miroir d’une réalité française qui, vue de l’étranger même proche, continue de fasciner: celle de l’attirance d’une partie de l’électorat et de l’élite intellectuelle pour des thèses révolutionnaires qu’incarnent aujourd’hui dans la campagne présidentielle deux candidats déjà sur les rangs en 2017: Nathalie Arthaud, enseignante et porte-parole de Lutte Ouvrière. Et Philippe Poutou, ouvrier dans l’industrie automobile et figure de proue du Nouveau parti anticapitaliste. Il y a cinq ans, les deux avaient obtenu respectivement 0,64% et 1,09% des suffrages. Soit, sur la base d’un corps électoral de 48 millions, environ 800 000 voix. Alain Krivine s’était lui, par deux fois, porté candidat à l’Elysée. Il avait recueilli 1,1% des voix en 1969 (lors de l’élection de Georges Pompidou) et 0,4% en 1974 (lors de l’élection de Valery Giscard d'Estaing).

 

Evoquer le souvenir d’Alain Krivine revient à réveiller, y compris en Suisse Romande, un monde politique d’un autre âge alors que la guerre en Ukraine renvoie à la guerre froide et aux fantômes de l’ex-URSS: un âge internationaliste, façonné par les luttes idéologiques et les combats parfois physiques entre trotskistes et communistes «staliniens», dominé par les querelles intestines entre mouvements d’extrémum (divisée en France entre la Ligue Communiste révolutionnaire, devenue aujourd’hui le Nouveau Parti anticapitaliste, et Lutte Ouvrière) et soutenu, peu ou prou, par une frange non négligeable de la population. Krivine – dont le fils Frédéric est un réalisateur de télévision de premier plan, co-auteur de la série «Un village français» qui raconte le pays sous occupation allemande en sept saisons – était un enfant des années soixante, de la lutte antiaméricaine contre la guerre au Vietnam, des événements de mai 1968.

Alain Krivine et Arlette Laguiller participent à une manifestation contre l'intervention militaire au Tchad, en 1983.© GEORGES BENDRIHEM/AFP

«Militant jusqu'au bout»

 

Il était un «68ard qui n’a jamais renié ses convictions anticapitalistes et révolutionnaires et est resté militant jusqu’au bout», a souligné Nathalie Arthaud – successeure à Lutte Ouvrière d’Arlette Laguillier, l’ex-rivale politique de Krivine bien plus populaire jusqu’à obtenir 5,30% des suffrages à la présidentielle de 1995, et 5,72% en 2002 – qui lui reprochait pourtant d’avoir rompu avec le communisme et de ne plus prononcer ce mot. «Il était une figure du combat vital de l’opposition de gauche à ce stalinisme dont Poutine est l’ultime avatar», a pour sa part commenté le fondateur de Médiapart Edwy Plenel, qui démarra sa carrière journalistique à Rouge, le journal de la Ligue Communiste révolutionnaire.

 

De ce monde politique là, nourri à la soif d’égalité et au rejet du système capitaliste, trois types de personnalités politiques sont sorties en France. Les premiers sont les ex-trotskistes qui s’employèrent ensuite à gommer leur passé, comme l’ancien premier ministre socialiste Lionel Jospin. Les seconds sont les militants restés passionnés par la lutte et résolus à dénoncer tous les pouvoirs, comme Olivier Besancenot, Philippe Poutou ou Nathalie Arthaud, dont le seul moment d’exposition au premier plan est la présidentielle, même si celle-ci est un combat inégal (ils seront ainsi absents, l’un comme l’autre, de la première grande émission TV sur la guerre en Ukraine avec huit des douze candidats lundi sur TF1) . Et un troisième a réussi, seul, à concilier à la fois sa fidélité et une posture rassembleuse: Jean-Luc Mélenchon, le candidat de la France insoumise, parvenu à 19,6% des voix au premier tour de la présidentielle de 2017. Mélenchon qui, de nouveau candidat en 2022 (crédité pour l’heure de 11 à 15% des voix) a salué le décès d’Alain Krivine en ces termes: «Émotion et chagrin. Une pensée affligée à sa famille et salut fraternel à tout le mouvement trotskiste».

 

Pourquoi une telle persistance du trotskisme et de ses avatars en France? Pourquoi deux candidats à nouveau sur la ligne de départ du sprint élyséen? La seconde question trouve sans doute sa réponse dans une «frustration» de la gauche française. «Beaucoup d’élus de gauche donnent leurs parrainages à l’extrême gauche pour se faire en quelque sorte pardonner commentait devant nous récemment le politologue Pascal Perrineau. Les mouvances trotskistes, c’est la nostalgie de la révolution, c’est l’idée que la lutte finira bien par l’emporter, ou en tout cas qu’elle ne meurt pas». Et pourquoi deux candidats? «Krivine, alias «le président» incarnait aussi l’esprit féroce de chapelles de cette gauche groupusculaire, avec son lot de règlements de comptes, de zones d’ombres, d’autocritiques et de contradictions, juge un de ses anciens amis, un temps élu écologiste. Cette gauche ultra-radicale se vit en combat permanent. Elle ne peut se résoudre à l’union ou au compromis puisqu’elle affirme détenir la vérité sur la société». Dans son livre de mémoires publié en 2006, Alain Krivine avait osé un titre provocateur « Ça te passera avec l’âge..» (Flammarion). Pour mieux s’employer à dire, au fil des pages, que le goût de la révolution, chez lui, ne s’était jamais éteint.

 

Photo archives Progrès /Renaud LAMBOLEZ

Domaine Ganevat : le nouveau propriétaire russe va devoir vendre ICI 

 

La famille Pumpyansky figure sur la liste noire de l’Union européenne visant à sanctionner la Russie pour l’invasion de l’Ukraine. Six mois après avoir fait l’acquisition du célèbre domaine situé à Rotalier, elle est contrainte de s’en défaire. Un énorme coup dur pour Jean-François Ganevat qui restait étroitement associé à l’exploitation.

Par Arnaud BASTION

Image

1983, roulée – intemporel

Éprouvé par la crise sanitaire et écrasé par la dette, Pierre & Vacances-Center Parcs a un besoin urgent de nouveaux investisseurs pour renforcer son assise financière. Rothschild & Co, qui conseille le groupe de résidences de tourisme fondé par Gérard Brémond, avait demandé aux prétendants de remettre leurs propositions fermes lundi 8 novembre : trois offres étaient attendues, mais, déception, deux seulement devraient porter sur la totalité du groupe.

 

L’une émane d’un consortium regroupant l’investisseur immobilier français Atream, associé aux fonds londoniens Alcentra et Fidera, l’autre est présentée par le fonds de capital-investissement américain Sixth Street. Dernier postulant, l’attelage entre le fonds américain Certares (déjà actionnaire de Voyageurs du monde et Marietton) et le new-yorkais Davidson Kempner paraissait jusque-là tenir la corde. Mais, selon nos informations, le tandem aurait in extremis renoncé à déposer une offre globale, réduisant son intérêt à Center Parcs. Ce qui serait un coup dur pour les organisateurs de ce « processus d’adossement ».

 

Après des mois de panne sèche, pour cause de confinement et de restrictions sanitaires, l’activité redémarre à peine pour Pierre & Vacances. Le groupe s’est félicité, le 19 octobre, d’avoir dégagé, entre juillet et septembre, « une croissance du chiffre d’affaires des activités touristiques de 17,3 % par rapport au même trimestre de l’exercice précédent, et de 2,2 % par rapport à l’été 2019 ». Les réservations sont également en hausse par rapport aux deux exercices précédents. Mais cette reprise de l’activité ne suffit pas, à elle seule, à remettre sur pied l’opérateur de tourisme et promoteur immobilier qui accumule les pertes depuis dix ans : son endettement a grossi pendant la crise, pour atteindre 1,1 milliard d’euros.

 

L’Etat suit de près le dossier

 

Une restructuration financière apparaît dès lors indispensable afin de réduire le poids de cette dette. De deux manières. D’abord en remboursant la dette d’urgence émise au premier semestre grâce aux capitaux apportés par les investisseurs, soit environ 300 millions d’euros. Ensuite en convertissant une partie des crédits en actions. A quel niveau ? C’est ce que chacun des prétendants devra détailler dans son offre. A noter qu’Alcentra et Fidera sont des porteurs de dette de Pierre & Vacances tandis qu’Atream a investi près de 600 millions d’euros dans des résidences du groupe de tourisme.

 

Le projet industriel et la capacité à développer le groupe tricolore seront également des critères importants pour Franck Gervais, le directeur général de Pierre & Vacances. Cependant, les investisseurs devront au premier chef convaincre Gérard Brémond, le président du groupe. L’octogénaire détient 49,4 % du capital de Pierre & Vacances et plus de la moitié des droits de vote à travers une holding, elle-même endettée. Selon plusieurs sources, les repreneurs sont incités à investir directement dans la holding de M. Brémond, afin de renflouer l’homme d’affaires.

 

Un montage qui pourrait fâcher les petits porteurs. En outre, l’entrepreneur n’est pas le seul à décider. Pour s’assurer d’avoir leur mot à dire, les « partenaires financiers » de Pierre & Vacances ont obtenu, en mai, en échange d’un prêt de 300 millions d’euros, que les titres de Center Parcs – le principal actif du groupe – soient placés en garantie dans une fiducie. De quoi donner à ces créanciers un puissant levier dans la discussion.

 

Les investisseurs devront au premier chef convaincre Gérard Brémond, le président du groupe qui 49,4 % du capital de Pierre & Vacances et plus de la moitié des droits de vote à travers une holding

 

Or, ils ont peu été associés aux négociations avec les repreneurs jusqu’à présent. D’aucuns n’excluent pas que les banques décident in fine de prendre le contrôle de l’opérateur de tourisme, si leurs intérêts n’étaient pas respectés. Tout le monde a en tête comment BNP Paribas et Natixis notamment ont pris la barre du groupe Bourbon en 2019 après un bras de fer avec Jacques de Chateauvieux, le fondateur du spécialiste des services maritimes.

 

L’Etat, enfin, suit de près le destin du dernier géant national du tourisme. Et pas seulement car il a garanti deux prêts pour un montant total de 274,5 millions d’euros. Le dossier est politique à plus d’un titre. Les six Center Parcs en France sont des investissements dans des territoires à l’écart des circuits touristiques, auxquels les collectivités locales sont associées logistiquement et économiquement. La Caisse des dépôts et consignations est un propriétaire important d’appartements et de cottages.

 

Surtout, quelque 20 000 foyers français ont succombé aux tentations de la déduction fiscale liée aux résidences de tourisme, et sont aujourd’hui propriétaires particuliers de cottages ou d’appartements. Un tiers d’entre eux a refusé la dernière proposition de conciliation du groupe, qui leur réclame un abandon de sept mois et demi de loyer.

 

Clément Guillou et Isabelle Chaperon

Partager cet article
Repost0
10 mars 2022 4 10 /03 /mars /2022 06:00

Sainte-Victoire et Cézanne

BIGAILLE, subst. fém.

 

B.− Menu fretin, Menue monnaie

.

ÉTYMOL. ET HIST. –

 

1. Av. 1738 « nom générique des insectes ailés dans les colonies » (Le Père Labat dans Trév. Suppl. 1752 : Il semblait que tous les atomes de l'air se fussent convertis en moustiques, en maringouins et en une autre espèce de bigaille qu'on appelle des vareurs); d'où 1936 arg. « mousse du bord, vermine » (Esn.);

 

2. 1926 (Lar. mén. : Bigaille. Nom donné au fretin d'espèces diverses vendu sur les marchés aux poissons);

 

3. 1935 « menue monnaie » (A. Simonin, J. Bazin, Voilà taxi! p. 211 : Sous, billon, menue monnaie : Bigaille).

 

Argot : blé, braise, clinquaille, fafiot, ferraille, galette, mitraille, piastre, picaillons, quincaille, rotin, sous, vaisselle de poche…

 

Hiérarchie de papier, pyramide administrée, strate valorisante n’apporte guère plus de blé dans l’escarcelle des AOP…

 

« Ce n’est pas une montée en cru, c’est donner la possibilité à adjoindre une mention valorisante à une DGC qui ont prouvé leur notoriété et l’implication des producteurs et la part de volume produit »

 

« Cette nouvelle strate valorisante va permettre d’« apporter une reconnaissance aux DGC qui ont acquis une forte notoriété et une réussite économique, mais qui n’ont pas forcément vocation à devenir des appellations à part entière »

 

Cette mention de cru pour Les DGC « correspond à un besoin de reconnaissance par les consommateurs. Depuis de nombreuses années, on s’aperçoit qu’il manque un aspect valorisant quand on parle de DGC. Le consommateur ne perçoit pas de notion pyramidale » souligne Éric Pastorino, le président de la Fédération Régionale des vins AOC du Sud-Est

 

« Il y a échelon supplémentaire dans l’organisation pyramidale des AOC. En Provence, la DGC Sainte-Victoire pourrait y prétendre comme elle a son aire délimitée. Elle pourra s’appeler Côte de Provence cru Sainte-Victoire. »

 

Conditions d’accès ICI 

 

DGC Côtes de Provence Notre Dame des Anges by Julia Scavo - ASNCAP  Association des Sommeliers de Nice Côte d'Azur Provence dégustation voyages  organisation événement vin et vignoble millésimes

 

AOC : que signifie la création d’un nouveau niveau hiérarchique pour le monde viticole ?

 

L’Institut National de l’Origine et de la Qualité autorise la création de «crus» au sein des Dénominations Géographiques Complémentaires.

 

Par Thierry Masclot

 

Publié le 28/02/2022

 

C’est peut-être un détail pour les non-initiés, mais pour les vignerons cela veut dire beaucoup. Le comité national des vins d’appellation a validé la création d’un niveau supplémentaire à la pyramide des vins d’appellation. Une proposition issue d’un rapport du groupe de travail de hiérarchisation de l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO).

 

Explications : jusqu’à présent, au sein de chaque Appellation d’origine contrôlée (AOC), certains territoires plus restreints pouvaient ajouter une Dénomination Géographique Complémentaire (DGC).

 

Un exemple ?

 

La DGC Notre Dame des Anges, qui regroupe depuis 2020, 10 communes varoises au sein de l’appellation Côtes-de-Provence. Le problème, ce travail de délimitation de micro-terroirs spécifiques est quasi sans fin…

 

Les DGC se sont multipliées au fil des ans. Jusqu’à perdre une partie de leur caractère valorisant auprès des consommateurs. D’où l’idée de créer un échelon hiérarchique en leur sein. Ainsi, certaines DCG pourront désormais ajouter la mention «cru» sur leurs étiquettes, ce qui donnera «nom de AOC + cru DGC».

 

 

L’esprit de cette réforme est de valoriser les DGC qui ont réussi à développer leur notoriété, et à afficher une réussite économique. Pour espérer ajouter «cru» à leurs étiquettes, les DGC doivent être celles d’un lieu-dit ou d’une zone de 1 à 10 communes pas plus, avoir un terroir homogène et des conditions de production spécifiques, et enfin, être reconnues par les professionnels, lors notamment de dégustations. Dans un contexte de concurrence exacerbée et de baisse de la consommation, cette décision va clairement dans le sens de la Premiumisation de l’offre des AOC.

Partager cet article
Repost0
9 mars 2022 3 09 /03 /mars /2022 06:00

Les Promesses de Thomas Kruithof - la critique

Ça fait un bail que je n’ai pas posé mes fesses sur le velours d’un fauteuil  d’une salle de ciné, suis devenu casanier, confinement oblige, je feuillette même pas Télérama, alors j’suis guère au parfum des sorties de film.

 

C’est le titre d’un article du Monde : Reda Kateb : « Le vin est comme un océan et moi, je reste dans un petit coin en baignade surveillée » qui m’a mis la puce à l’oreille.

 

 

VINS & AUTRES PLAISIRS LIQUIDES

 

Le vin, la politique : Reda Kateb incarne un directeur du cabinet de la maire d’une ville de Seine-Saint-Denis, interprétée par Isabelle Huppert, l’Algérie de son père, un cocktail qui colle bien avec la ligne éditoriale de ce blog.

Stickers Silence on Tourne - Art & Stick

 

 

Les Promesses | Festival 2 Cinéma de Valenciennes 2021

 

L’acteur est à l’affiche des « Promesses », avec Isabelle Huppert, un long-métrage qui explore les ressorts de la politique, en pleine campagne présidentielle. Sans se targuer d’être un spécialiste, il évoque volontiers son rapport au vin, fait de souvenirs et de coups de cœur.

 

Propos recueillis par Rémi Barroux ICI

 

Dans Les Promesses, film de Thomas Kruithof, sorti le 26 janvier, l’acteur Reda Kateb incarne un directeur du cabinet de la maire d’une ville de Seine-Saint-Denis, interprétée par Isabelle Huppert. Révélé dans Un prophète (2009), de Jacques Audiard, il a joué dans des dizaines de films, dont Hippocrate, Django, Le Chant du loup, et des séries télévisées aussi passionnantes que Possession ou En thérapie. Il va bientôt tourner en Algérie Omar la Fraise avec le réalisateur Elias Belkeddar. Accompagné (toujours) de son chien, Paulo, un croisé yorkshire et fox-terrier, Reda Kateb, Montreuillois de 45 ans né à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), évoque la politique et le vin, qu’il aime goûter « sans en être spécialiste », prévient-il.

 

  • Dans « Les Promesses », vous refusez de boire du vinho verde lors d’un déjeuner de travail avec la maire mais vous acceptez moult verres d’une eau-de-vie lors d’une fête de la communauté serbe. Goût personnel ou effet du scénario ?

Le scénario bien sûr mais il est vrai que, pour un vrai déjeuner de travail, je suis plutôt eau pétillante. Pour la soirée serbe, comme c’était la dernière scène à tourner, on en a fait une sorte de fête de fin de tournage. La belle bande de Serbes nous a accueillis dans le café et on a bien goûté cette eau-de-vie.

 

  • Aimez-vous le vin ?

 

Sans être fin connaisseur, j’aime bien. Un petit verre de rouge le soir. Ma première approche du vin, c’était à 17 ans, quand j’étais étudiant en lettres à la Sorbonne. J’étais porteur de hotte lors de vendanges à Château Margaux, dans le Médoc. Cette rencontre avec le travail de la terre reste un bon souvenir même si j’en suis sorti avec le dos brisé. Il y avait des paysans du coin, des routards, des étudiants, une mixité qui me plaît et que je retrouve à Montreuil. J’adorais la pause, vers 10 heures, avec le pâté des Landes, le verre de rouge – de château margaux quand même…

 

« Je me souviens des apéros que je partageais avec mon père. C’était une façon de nous approprier la culture populaire en France. »

 

A mon adolescence, ma mère est partie vivre à côté de Bordeaux. Elle achetait du vin en cubi, à Saint-Emilion, pour le mettre en bouteilles. C’était leur vin de table. Le goût familial était beaucoup entre-deux-mers, médoc, graves, mais ces vins m’ont un peu écœuré, avec un boisé assez fort. J’ai eu envie d’aller chercher autre chose, du côté de la Bourgogne. J’aime beaucoup le pinot noir, les hautes-côtes-de-nuits. C’est un nom qui me fait rêver, comme une belle chanson.

 

  • Cette nouvelle approche du vin, vers quel âge était-ce ?
  •  

Quand j’ai commencé à m’embourgeoiser, dans la trentaine, après le film Un prophète. Avec les repas de travail, les voyages, j’ai eu accès à de bonnes tables. Cela dit, quand je fais des soirées palabres jusqu’à pas d’heure, dans un café de Montreuil avec mes copains, on est plutôt bière. J’ai gardé cette habitude festive de ma période étudiante et même après.

 

  •  Avez-vous des vins préférés ?
  •  

Pour moi, un bon vin est indissociable d’un lieu, d’une histoire et d’un plat à partager. Les vins que j’apprécie sont ceux que je veux goûter avec des amis et qui vont s’accorder au mieux avec notre repas. J’ai un coup de cœur pour les vins blancs secs, les bourgognes – notamment [du domaine] Les Enracinés, un petit mâcon –, les chablis, des languedocs… Des vins italiens aussi, comme le terre-brune sarde ou ceux des Cinque Terre, où j’aime à me promener, du côté de Levante [sur la côte ligure]. Ces vins sont magnifiques sur des pâtes alle vongole ou à la poutargue et aux pistaches, que j’aime cuisiner.

 

  • Etes-vous conseillé pour acheter des bouteilles ?

 

Je possède une armoire à vins que je renouvelle souvent. J’achète et on m’offre. A la fin du tournage des Promesses, on m’a offert quelques bouteilles de meursault et des médocs. J’ai un ami qui m’a fait découvrir des vins nature. On passait des soirées dans un restaurant à Montmartre qui porte bien son nom, Le Grand 8, car on finissait souvent la tête à l’envers, après avoir dégusté par exemple des juras, légers et complexes à la fois. Un autre ami qui vit au Japon m’a aussi initié au vin. Il avait le talent pour parler d’une bouteille, vous mettre sur la piste de votre goût, sans vous saturer d’informations.

 

  • Le vin doit-il raconter une histoire, comme un film ?

 

Oui et la comparaison va plus loin. Il y a des films légers, comme celui du dimanche soir, où on ne veut pas s’engager émotionnellement. Dans le vin, c’est pareil. J’aime bien, de temps en temps, un petit beaujolais qui sait se faire discret avec un plat de bistrot.

 

  • Le champagne n’est-il pas incontournable dans le milieu culturel ?

 

De moins en moins. J’ai connu, il y a douze ans, des rivières de champagne. Aujourd’hui, il arrive souvent qu’on serve de la sangria ou des kirs lors des fêtes de fin de tournage. Pour des raisons de budget et parfois d’image. Mais j’aime beaucoup le Mumm, le Piper-Heidsieck aussi. J’apprécie des champagnes plus modestes mais je ne sais pas encore les trouver. J’aimerais faire un stage d’œnologie pour découvrir ce monde. J’ai l’impression que le vin est comme un océan alors que moi je reste dans un petit coin en baignade surveillée.

 

  • Le vin est souvent stigmatisé pour des raisons culturelles, religieuses ou de santé. Qu’en pensez-vous ?

 

Je me souviens des apéros que je partageais avec mon père [Malek-Eddine Kateb, acteur franco-algérien de théâtre et de cinéma, et neveu de l’écrivain algérien Kateb Yacine]. C’était une façon de nous approprier la culture populaire en France, ses codes, voire de les transformer. Les enfants d’immigrés, à qui il arrive de ressentir une forme d’exclusion sociale devant des pratiques culturelles, peuvent découvrir et apprécier ce qui ne leur est pas promis.

 

Dans une scène des Promesses, lors d’un repas un peu tendu, je raconte une longue anecdote sur Barack Obama à la maire, jouée par Isabelle Huppert. J’ai proposé au réalisateur que je finisse mon récit en croquant un morceau de saint-nectaire, avec du pain et une gorgée de vin rouge. Ce geste veut dire beaucoup pour un enfant d’immigré qui se retrouve à une table bourgeoise. Il signifie : « Je peux comme vous apprécier tout ce qui est bon. » C’est une forme d’appropriation. Comme quand des jeunes de quartier s’habillent en Lacoste. Il n’y a pas de limites et de frontières aux identités. On peut accéder à des choses qui ne nous sont pas destinées et exceller.

 

  • Boire du vin dans les sociétés de culture musulmane pose-t-il problème ?

 

Il y a un rapport parfois schizophrénique, un monde entre ce que l’on montre et ce que l’on est. J’ai bien sûr connu les mariages où on trouvait sur les tables de l’eau, du Coca, pendant que, dehors, les hommes buvaient du vin et de l’alcool sortis des coffres des voitures. Je propose plutôt de relire le grand poète et philosophe persan des XIe et XIIe siècles, également mathématicien, Omar Khayyam. Il a écrit les Rubayat, des quatrains à la gloire du vin, et notamment : « Bois du vin ! Tu ne sais pas d’où tu es venu ! Vis la vie ! Sais-tu, vers où t’en iras-tu ? » Omar Khayyam voit dans ce breuvage quelque chose de mystique, la louange du plaisir ici-bas. Une transcendance [ce poète est également l’auteur de L’Amour, le désir et le vin]. L’alcool produit souvent des excès mais le plaisir, c’est le dosage de son ivresse.

 

  • « Les Promesses », un film sur l’ambition et les décisions d’une maire, ne colle-t-il pas au climat actuel de rejet de la politique ?

 

Non. Les réactions lors de projections et débats dans de très nombreuses villes, par exemple à Clichy-sous-Bois [Seine-Saint-Denis], où a eu lieu le tournage, disent le contraire. Les gens voient dans le film autre chose que le « tous pourris », l’ambition démesurée, la corruption… Ils restaient après les projections pour parler. Ils nous disaient merci de montrer « autre chose que ce début de campagne présidentielle », la notion de dévouement par exemple. Ce film montre, il est vrai, les ressorts intimes des petits travers, des renoncements, de la médiocrité parfois. Mais au milieu de ces tambouilles, il y a un projet très concret de réhabilitation d’une cité – et on voit le véritable impact que peut avoir le politique sur la vie des gens. Cela donne, à l’arrivée, une vision de la banlieue qui, pour une fois, ne passe pas par le prisme de la délinquance, de la police, de l’islamisme dans les quartiers.

 

Je suis en phase avec ce film, une certaine finesse dans la façon de montrer la réalité, une confiance aussi dans le spectateur, de suggérer enfin que des responsables politiques gagneraient à ne pas prendre les gens pour des cons. Au-delà, j’ai aimé jouer un directeur du cabinet qui n’est pas un élu mais se révèle important sur l’échiquier politique – une première pour moi. Et puis j’ai été séduit par le scénario. Je suis très attentif au rythme, aux dialogues. C’est un film de langage, l’action et la mécanique narrative se déroulent par la langue.

 

  • Le film est sorti au début de la campagne présidentielle. Est-ce un hasard ?

 

C’était un choix délibéré. J’étais content de pouvoir évoquer autre chose que ce que l’on entend en ce moment, avec un déficit terrible de propositions, l’instrumentalisation de la peur et de la colère pour cibler des boucs émissaires, alors qu’il faut au contraire instiller une note d’espoir, qui est l’essence même de la politique.

 

  • Au générique apparaît un nouveau « métier » du cinéma : « référent Covid ». Comment avez-vous vécu les confinements ?

 

Le premier avec beaucoup d’incertitudes même si la période a été pour moi assez salutaire. J’avais besoin de me poser un peu après avoir beaucoup tourné, beaucoup voyagé. C’était bien de marquer une pause, d’être plus en famille [Reda Kateb est père d’un garçon de 7 ans, Enzo], de voir mes voisins…

 

On a tourné Les Promesses pendant le deuxième confinement, à l’automne 2020. C’était étrange. On traversait la ville, il n’y avait quasiment personne dans les rues ; que des gens masqués. Ça manquait terriblement de vie alors qu’un tournage, pour ses scènes urbaines, a besoin de figurants mais aussi d’une animation normale, avec des personnes qui bougent et circulent. La production a dû recréer des moments de « la vie d’avant ». C’était comme si la réalité et la fiction étaient inversées…

 

Rémi Barroux

Partager cet article
Repost0
8 mars 2022 2 08 /03 /mars /2022 06:00

Josh Arkey avec des clients dont Sally Quinn (à droite) au Karen's Diner à Sydney.CRÉDIT:RENÉE NOWYTARGER

 

En Australie chez Karen’s Diner c’est du marketinge, de la frime, un coup pour faire du buzz, alors qu’à  Paris c’est un état d’esprit :

 

  • Champions toute catégorie de l’exécrabilité les garçons de café des terrasses parisiennes (bien évidemment, il y a des exceptions qui confirment la règle)

 

  • Sur un registre moins radical, les sommeliers ou ières, les serveurs ou euses des maisons étoilées ou des bistronomiques bobos qui, sur instruction du chef, vous récitent, interrompant souvent la conversation, la composition des œuvres du maître-queue, ou pour les fourgueurs ou euses de jaja, étalent leur science des vins avec des airs compassés, nous sommes tous des ignorants bien sûr, afin de nous fourguer une boutanche avec au cul plein de zéros.

 

Certains penseront que je pousse le bouchon un peu loin, je le fais à dessein pour souligner le formatage du langage : « bonne dégustation » par exemple, le convenu fade des conseils, l’absence de spontanéité, l’incapacité à laisser, ceux qui servent, s’adapter aux désirs du client, corseter la politesse…

 

Pour modérer mes propos je concède qu’une part de la clientèle des établissements cités est chiante, suffisant et méprisante…

 

Bref, pourquoi faire simple quand on peut faire compliquer !

 

Dans les établissements de la chaîne australienne Karen’s Diner, le client n’est pas roi et le personnel est détestable. Un curieux concept, devenu viral sur les réseaux sociaux.

 

Revenons aux kangourous : ICI

 

 

« Nourriture délicieuse, serveurs exécrables. » Telle est la devise de la franchise de restaurant australienne Karen’s Diner. Dans ces établissements au style des diners américains des années 1950, les clients n’ont clairement pas leur mot à dire. The Age ICI a relaté l’expérience vécue par Sally Quinn, une cliente du Karen’s Diner de Sydney. « Le serveur leur a crié dessus quand ils sont arrivés et a jeté les menus sur la table », rapporte le quotidien australien :

 

Il les a également plantés au beau milieu des commandes, a fait tomber le sac de Sally Quinn, s’est moqué de la coiffure de sa fille et n’arrêtait pas de jurer et de faire des gestes obscènes quand les clients lui posaient des questions.”

 

Ce qui semble être une terrible mésaventure s’avère être un nouveau concept de restauration. En effet, les serveurs et serveuses d’un Karen’s Diner ont le droit d’être désagréables et impolis envers la clientèle. D’ailleurs, le panneau affiché sur la devanture du restaurant annonce la couleur : « Prenez place et fermez-la ».

 

Une cliente réprimandée parce que végane

 

C’est grâce aux réseaux sociaux, et notamment à TikTok, que ces restaurants ont vu leur popularité augmenter. Des vidéos tournées au sein du restaurant de Sydney sont devenues virales :

 

Dans celle ci-dessous, la cliente qui a filmé se fait réprimander par une serveuse car elle est végane. L’employée incite toute la clientèle à huer la végétalienne.

 

 

Un humour auquel il vaut mieux avoir été préparé, concède Sally Quinn, qui a été informée du concept avant de se rendre au restaurant :

 

Je n’apprécierais pas du tout de me retrouver ici par hasard, en touriste, sans savoir à quoi m’attendre, en pensant passer un bon moment et simplement manger un burger dans un ‘diner’ à la déco des années 1950.”

 

Selon The Age, le “Karen” de Karen’s Diner fait référence « à un terme d’argot qui désigne ce genre de client pénible qui se croit tout permis et demande à parler au patron pour des détails insignifiants ».

 

Comme le rappelle le site chilien The Clinic, on désigne sous le nom de “Karen” “une femme de la classe moyenne, qui se croit supérieure aux autres parce qu’elle est blanche.”

 

Au sein du Karen’s Diner, les personnes nommées Karen sont d’ailleurs invitées à venir – et à se plaindre – pour obtenir une boisson gratuite sur présentation d’une preuve d’identité.

 

 

Les 10 comportements qui énervent le plus les serveurs des restaurants ICI

 

Voici dix manies qui énervent les serveurs des restaurants ICI

Partager cet article
Repost0

  • : Le blog de JACQUES BERTHOMEAU
  • : Espace d'échanges sur le monde de la vigne et du vin
  • Contact

www.berthomeau.com

 

Vin & Co ...  en bonne compagnie et en toute Liberté pour l'extension du domaine du vin ... 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

Articles Récents