Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
23 juillet 2018 1 23 /07 /juillet /2018 06:00
Ce lundi je suis d’humeur taquine et flemmarde alors je vous propose un duo sur la tielle de poulpe qui à Sète se nomme pouffre... avec un R s’il vous plaît !

Au hasard de ma revue de presse je tombe sur un article publié le 18 juillet 2018 par Blandine Vié La « tielle », tourte aux poulpes, emblème culinaire de la ville de Sète ICI 

 

Bien sûr je lis, puis je me dis, mon ego étant ce qu’il est, surdimensionné, que j’avais pondu le 14 juin 2016, une chronique qui valait son pesant de Picpoul de Pinet.

 

Vive la Tielle de Pouffre de Sète, plat du pauvre, fille des pêcheurs de Borgo de Gaete au nord de Naples !

 

Extrait :

 

Certains esprits chagrins trouvent que mon cœur penche trop souvent ces temps-ci du côté de l’Italie mais dans le cas de la tielle qui, certes est venue d'Italie dans les bagages des émigrants italiens de la petite bourgade de Borgo de Gaeta au nord de Naples à la fin du XIXe siècle, ce sont les espagnols qui sont les géniteurs de cette tourte.

 

Le Royaume de Naples était sous la domination espagnole au siècle de Charles Quint et les autochtones se nourrissaient frugalement d’un peu d'huile, quelques anchois et olives, l'ancêtre de la pizza était l'ordinaire... Ils remarquèrent très vite que la troupe ibérique confectionnait à peu près la même chose avec toutefois un couvercle de pâte par-dessus et ils se rendirent compte que cette façon de faire se conservait plus longtemps que leur pizza.

 

La technique se perfectionna et par souci pratique on ne mit plus directement la pizza sur la sole du four mais dans un plat de terre cuite appelée TEGLIA...et ainsi la tielle était née.

 

En Espagne c’est une empanada...

 

À Gaeta le tielle se décline de plusieurs façons, selon les propres mots des natifs du lieu, il y a les tielles de la mer, au poulpe, sardines, anchois, crevettes, moules etc... et les tielles de la terre à la scarole et aux pignons, aux œufs et aux courgettes…

 

À Sète seule la tielle de poulpe connut la célébrité.

 

Au début de leur installation à Sète, les pécheurs Gaétans faisaient la tielle comme dans leur mère patrie et lorsque les enfants allaient à l'école, la maman mettait souvent une tielle de pouffre dans le cartable fait de morceaux de vieille voile cousue, aujourd'hui les anciens racontent qu'à l'école ils se cachaient pour la manger car les petits Sétois mangeaient des croissants du boulanger.

 

La tielle était l'ordinaire des pécheurs installés au quartier haut ou était regroupée la communauté italienne, comparé à l'opulente société Sétoise enrichie par le commerce du vin, c'était un quartier pauvre ou ils vivaient selon leur coutumes et parlaient le napolitain. La majorité de la nourriture était tirée de la pêche que le père ramenait à la maison. Ces pêcheurs ne descendaient que rarement en ville et la belle société Sétoise de l'époque ne connaissait pas la tielle qui était vue comme étant une nourriture de pauvre.

 

Le tout ICI 

 

Le plus du lundi :

 

 

Partager cet article
Repost0
22 juillet 2018 7 22 /07 /juillet /2018 06:00
Les liaisons dangereuses d’Elisabeth Schwarzkopf avec Joseph Goebbels ministre du Reich à l'Éducation du peuple et à la Propagande

Les britishs ont très mauvaise langue, ainsi Philip Kerr, né à Édimbourg, qui se la joue allemand dans Prague fatale, tout comme Alan Jefferson qui, en 300 pages, a rédigé une biographie Elisabeth Schwarzkopf publiée par l'éditeur londonien Gollancz.

 

 

En 1946, le célèbre chef d'orchestre Herbert von Karajan, lui aussi mouillé avec les nazis, la décrit comme « probablement la meilleure chanteuse en Europe ».

 

Après la Seconde guerre, sous la houlette d’un producteur et directeur artistique anglais, Walter Legge, qui lui fait réaliser ses premiers enregistrements commence une carrière internationale d’une incomparable qualité. Elle l’épouse en 1953.

 

1992 anoblie par Elizabeth d'Angleterre.

 

Lors de la débâcle des vinyles j’ai acheté sur une brocante Les Introuvables d’Elisabeth Schwarzkopf chez EMI 5 33 tours.

 

Je savais qu’il y avait anguille sous roche. Messieurs les anglais tirez les premiers :

 

  • Philip Kerr La dame de Zagreb

 

« Qu’est-ce que Küttner a dit exactement sur votre liaison avec cette petite chanteuse d’opéra ? demandai-je à Jury sans prendre de gants.

  • Vraiment je tiens à protester. »

Il me décrocha un regard noir, comme s’il souhaitait que je sois allongé sur le lit avec une balle dans le torse.

« Quel est son nom déjà ? Elisabeth quelque chose. Elisabeth Schwarzkopf, c’est bien ça ?

  • Et si nous laissions son nom en dehors de cette histoire ?
  • Très bien. Pourquoi pas.

 

[…]

 

« Le fait est, Gunther, que le capitaine Küttner a appris cette histoire par moi. C’est moi qui lui ai parlé de la liaison du général avec Fräulein Schwarzkopf. Je suis désolé Hugo, mais tout le monde à Berlin est au courant de ce qui se passe. Sauf peut-être le Führer et votre femme, Karoline. Espérons qu’elle au moins pourra rester dans l’ignorance de tout ceci.

 

« Mais, Herr Kommissar, je pense que la partie de l’histoire qui a le plus offusqué le général Jury à propos de cette Fraülein concerne moins ses talents au lit, qui, je présume sont considérables, que ses qualités de chanteuse. Je regrette, mais c’est vrai, Hugo. Si elle était vraiment valable comme soprano, elle chanterait à l’Opéra d’État et non à l’Opéra allemand de Berlin. Or, vous l’ignorez peut-être, mais le Kommissar a parfaitement raison de dire qu’elle accorde également ses faveurs au Ministre de la Propagande. J’en détiens la preuve irréfutable, que je serais, à un stade ultérieur, heureux de vous soumettre. Il est donc inutile de monter sur vos grands chevaux. Vous la baisez tous les deux, un point c’est tout. Enfin, comment croyez-vous qu’elle a pu devenir soprano principale si peu de temps après avoir intégré le chœur ? C’est Goebbels qui a arrangé ça pour elle. En échange des services qu’elle lui rendait horizontalement. »

 

Les joues de Jury étaient maintenant écarlates et ses poings violemment serrés. Je me demandai s’il fallait y voir l’image d’un homme suffisamment en colère pour tuer un collègue officier de sang-froid.

 

« Je n’aime pas vos manières, général Heydrich dit Jury.

 

ELISABETH SCHWARZKOPF, ÉCHO «NAZILLARD». UNE BIOGRAPHIE ANGLAISE RÉAFFIRME QUE LA DIVA FUT MEMBRE DU PARTI NAZI.

Christian LEBLE

 

Alan Jefferson se veut exhaustif et a travaillé hors du contrôle d'Elisabeth Schwarzkopf (alors que toutes les archives et les commentaires du film l'Album souvenir diffusé par Arte avaient été sélectionnés par la chanteuse). «Quand Gollancz a proposé d'écrire ce livre, contact fut pris avec Elisabeth Schwarzkopf. Elle a répondu que si biographie il devait y avoir, elle l'écrirait elle-même. Elle n'a fourni aucune aide», commente Alan Jefferson au téléphone et ajoute que «la politique n'est pas l'aspect principal du livre».

 

Le récit de ses débuts, entre 1935 et 1945, restait jusqu'ici approximatif ou carrément omis. «Je me suis adressé au Berlin Documents Center, poursuit Alan Jefferson, qui possède les dossiers individuels que le ministère de la Propagande du Reich avait ouvert et qui n'avaient pas été détruits au moment de la prise de Berlin. On m'a répondu que le dossier Elisabeth Schwarzkopf contenait 200 pages, j'en ai obtenu copie par l'intermédiaire de l'ambassade britannique, avec l'appui de l'éditeur.» Le dossier Schwarzkopf synthétise, d'après l'auteur, la carrière de la chanteuse au Deutsche Oper, situé dans le quartier de Charlottenburg, sous contrôle du ministère de la Propagande de Goebbels, et qu'elle intègre en 1938. Auparavant, indique Alan Jefferson, Elisabeth Schwarzkopf a été membre de l'Association des étudiants nationaux-socialistes quand elle était à la Berlin Hochschule. Le 1er mars 1939, peu avant de quitter l'université, écrit Alan Jefferson en se référant aux dossiers berlinois, «Elisabeth Schwarzkopf est admise comme membre du Reichstheaterkammer (RTK) du Promi, le ministère de la Propagande et des Spectacles, sous le numéro 67784. (...) Elle rejoignit le Parti national-socialiste un mois après son arrivée au Deutsche Opera. Il fallut deux ans avant qu'elle soit inscrite comme membre, inscription qui ne fut ratifiée que neuf mois plus tard quand lui fut transmis son numéro d'adhésion (n$ 7548960) et son carnet de travail (Arbeitsbuch n$ 40/1 238 359).»

 

L'auteur s'acharne-t-il à citer les prestations d'Elisabeth Schwarzkopf, en France en 1941, sur le front de l'Est en décembre 1942? Ces précisions semblent plus que nécessaires, pour deux raisons (outre celle de la stricte réalité historique). D'abord, il s'agit là des années où l'interprète prend son élan et que, faute de les prendre en compte, on sous-estime le mélange de talent et d'ambition qui la caractérise. Alan Jefferson explique comment elle s'est lancée dans la mêlée, comment elle a menti sur les rôles qu'elle connaissait pour obtenir son engagement, comment elle a cherché à se distinguer des autres membres de la troupe de chanteurs permanents par des frasques (absence aux répétitions), des revendications sur des rôles de valeur. La correspondance avec Wilhelm Rode, le directeur du Deutsche Opera membre du parti nazi depuis 1933, figure dans son dossier, ainsi que les lettres du directeur à sa hiérarchie réclamant sans succès des sanctions contre la soprano indisciplinée, de même que les avenants au contrat de la chanteuse «confirmant que le président du Reichsmusikkammer, Joseph Goebbels, autorisait les dépassements de cachet par rapport à la grille du Deutsche Opera».

 

 

La seconde raison, et peut-être la principale, Elisabeth Schwarzkopf a toujours voulu dissimuler cette période et tout particulièrement à la fin de la guerre. A l'époque, la chanteuse avait déjà fait ses débuts à l'Opéra de Vienne avec le chef d'orchestre Karl Böhm (dérogeant ainsi aux règles du Deutsche Opera) et craignait qu'une condamnation de son passé politique ne se traduise par une interdiction de se produire en scène et l'arrête dans son élan. Alan Jefferson explique comment la cantatrice a rempli quatre questionnaires successifs sur son passé de guerre, le dernier en mai 1946, tous divergents. Au cours du procès mené par la commission Hurdes, chargée en Autriche de clarifier les cas, Elisabeth Schwarzkopf, puis son avocat, reconnurent que les «déclarations avaient été falsifiées et que la chanteuse avait rejoint le parti nazi pour chanter au Deustche Opera». Aujourd'hui encore, néanmoins, face à la publication du livre d'Alan Jefferson, Elisabeth Schwarzkopf a nié avoir été membre du parti nazi, mais prétend avoir simplement déposé une demande d'adhésion à laquelle il n'aurait jamais été donné suite, le tout sous la pression de son père. »

 

« Le son numérique rend toutes les voix beaucoup trop claires. Elles deviennent perçantes au point de nous faire mal, on croirait des lames de couteau. Mais la jeune génération ne connaît rien d'autre ; son oreille est faussée, pervertie. »

Elisabeth Schwarzkopf

Partager cet article
Repost0
21 juillet 2018 6 21 /07 /juillet /2018 06:00
Dédié à la corporation des addictologues et aux naturistes « Ces joyeux drilles, prêchant la vendange, assureraient en leur trogne qu’un jeune médecin vit moins qu’un vieil ivrogne.  Mathurin Régnier (1573-1613)

J’appelle Pie II, pape et poète, à la rescousse, qui déclara : je vais, provisoirement, « quitter Vénus pour Bacchus » Formule qu’il prononça lorsqu’il entra dans les ordres, les prêtres étant réputés aimer le vin de messe.

 

Je convoque ce pochtron de Raoul Ponchon (1848-1937)

 

« Si j’étais roi de quelque endroit,          

Tout mon peuple serait ivrogne,

Et je punirais sans vergogne        

Tous ceux qui marcheraient trop droit. »

 

La peinture comique, spontanément rapprochée des gueuseries paysannes d’un Bruegel l’Ancien ou d’un Jan Steen, trouve une expression originale dans l’Italie de la Renaissance.

 

La présence d’une Scène bachique attribuée au peintre vénitien Niccolò Frangipane dans les collections du musée Saint-Léger, à Soissons, et sa restauration, constituent le point de départ de cette étude du burlesco, envisagée plus spécifiquement sous l’angle du repas.

 

De la confrontation à d’autres tableaux attribués à Frangipane, à son entourage ou aux maîtres du genre, Vincenzo Campi et Bartolomeo Passerotti, à la réappropriation de cet univers pictural par le cinéma italien : une invitation à la « Grande Bouffe », telle que Marco Ferreri l’avait imaginée dans son long métrage d’anthologie.

 

 

La grande bouffe

PEINTURES COMIQUES

DANS L’ITALIE DE LA RENAISSANCE

C’était du 28 octobre 2017 > 11 mars 2018 au Musée Saint-Léger de Soissons

 

Je n’ai pu y aller la faute à mon vol plané.

 

Scène bachique

 

 

« Douze personnages vus à mi-corps sont réunis autour d’une table recouverte d’un drap vert. Entassés au premier plan, ils envahissent la surface picturale dans une composition très serrée, si bien que le joueur de luth, assis sur un tabouret, semble prendre appui sur le rebord du cadre. Le personnage central, qui focalise l’attention de l’assistance, possède tous les attributs identifiant Bacchus : couronné de pampres, il presse de sa main droite une grappe de raisin dont le jus s’écoule dans une petite coupe, et serre un petit tonneau sous son bras gauche. Derrière lui surgit un satyre reconnaissable à son teint hâlé, à sa pilosité abondante, son visage en pointe et son expression lubrique. Dans ce contexte mythologique, les deux femmes à gauche pourraient être des ménades, comme le suggère le large décolleté de la première, qui laisse deviner un sein généreux. Deux enfants au premier plan s’abreuvent du divin nectar. Les hommes s’esclaffent, ouvrant d’immenses mâchoires. »

 

Face à une telle débauche le président de l’ANPAA, appuyé par la syndicat des addictologues, a exigé la censure de ce tableau incitant notre belle jeunesse à téter le divin nectar, ici sans contestation possible du vin nature sans additifs œnologiques.

 

« Actif dans les dernières décennies du XVe siècle à Venise et à Rimini, Niccolò Frangipane était réputé pour ses scènes comiques possédant une dimension parodique. La toile de Soissons s’inscrit pleinement dans le registre défini en  1582 par le cardinal Paleotti des pitture ridicole, majoritairement produites en Italie du Nord, et dont le but était de déclencher le rire du spectateur par mimétisme avec le personnage.  Les historiens anciens désignent  Frangipane comme un élève du Titien. »

 

« La figure centrale ne représente pas Bacchus mais un personnage travesti en Bacchus. Les femmes ont des allures de courtisanes et le joueur de luth renvoie explicitement à l’univers de la comédie : le masque qui couvre le haut de son visage le rapproche des Zanni de la commedia dell’arte. »

 

« La confrontation du tableau soissonnais avec les rares œuvres signée par Frangipane incite à rester prudent sur l’attribution. Malgré la vigueur du coloris, caractérisé par de beaux accords d’harmonies rares – rose framboise, jaune citron, vert « Véronèse » –, quelques maladresses dans le rendu de l’anatomie et du traitement de l’espace, tout comme l’absence de ce poudroiement lumineux typiquement vénitien qui caractérise sa production aussi bien religieuse que profane, ne plaident pas en faveur d’une œuvre autographe. »

 

Partager cet article
Repost0
20 juillet 2018 5 20 /07 /juillet /2018 07:50
Les allemands aimaient autant le Calvados que le schnaps alors les normands ont obtenus l’AOC en 1942…

« Je descendis, m’adjugeai quelques cigarettes supplémentaires ainsi qu’un schnaps bien tassé d’une bouteille posée sur un plateau d’argent dans la bibliothèque – la meilleure sorte, fabriquée avec les meilleurs fruits, des poires en l’occurrence, probablement autrichienne, comme la plupart des grands schnaps et vous donnant l’impression de déguster la poire la plus succulente que vous ayez jamais mangée, pour vous apercevoir soudain qu’il s’agit d’une merveilleuse poire magique dont l’effet s’étend bien au-delà de la bouche, jusque dans tous les recoins du  corps humain, tel le sort bienfaisant d’une sorcière. Je m’en versai rapidement un autre et sentis un sourire s’étaler sur mon visage comme un nuage s’écartant du soleil. Cette bouteille était beaucoup trop bonne pour la laisser traîner dans un endroit pareil. Si quelque chose méritait d’être délivré des nazis, c’était bien elle. »

La Dame de Zagreb Philippe Kerr

 

Le héros récurrent des polars de Philippe Kerr, Bernie Gunther est un grand buveur de schnaps, il en siffle en permanence, surtout pour oublier les atrocités nazies, des quantités considérables.

 

 

Le schnaps désigne normalement une eau-de-vie transparente, distillée à partir de céréales, de racines ou de fruits, en particulier de cerises, (Kirschwasser), de pommes, de poires, de pêches, de prunes, d'abricots ou de mirabelles. Il arrive souvent que le produit de base utilisé soit le marc restant après que les fruits aient été pressés pour en extraire le jus. Le véritable schnaps ne reçoit aucune adjonction de sucre et n'est pas aromatisé. En bien des points, le schnaps ressemble à la vodka, mais avec un léger goût de fruit qui dépend des ingrédients utilisés. Le taux d'alcool est généralement proche de 40%.

 

Il existe dans le monde un grand nombre de boissons alcoolisées et baptisées "schnaps" qui ne répondent pas à la stricte définition du terme, telles le schnaps de pêche, ou le schnaps au caramel connus en Amérique du Nord. Elles peuvent résulter de procédés différents, n'impliquant pas la fermentation d'un produit avant sa distillation. Certaines d'entre elles utilisent une base alcoolique (telle que schnaps, vodka ou rhum) pour extraire les arômes de fruits. Souvent, elles comportent des ingrédients supplémentaires, en particulier du sucre.

 

D’une manière générale dans tous les romans de Kerr les culottes de peau allemandes apprécient les eaux-de-vie, surtout le Cognac mais ce matin je souhaite évoqué un épisode peu connu celui de l’appellation Calvados.

 

Ce n’est qu’en effet qu’en 1942 que le Calvados obtint son appellation d’origine contrôlée. Plus prosaïquement, il s’agissait au temps de l’occupation d’éviter la réquisition par les Allemands du cuivre des alambics et de l’alcool, car seules les eaux-de-vie classées étaient exemptées de saisie.

 

Et pourquoi ce nom : Calvados ?

 

Au début du XVIe siècle, la culture des pommiers à cidre, est encouragée par l'arrivée de nouvelles variétés de pommes, en provenance du Pays Basque. La légende veut, que ce nom tiendrait d'un navire espagnol "San Salvador" ou "El "Salvador" de l'Invincible Armada du roi Philippe II d’Espagne, échoué en faisant route sur les côtes anglaises en 1588. Le nom du bateau aurait été transformé en "Calvador" puis "Calvados".

 

Le 28 mars 1553 est la date de la première apparition du Calvados dans le journal du Sire Gilles de Gouberville, agronome du Cotentin. Il s'intéresse tout particulièrement à la culture de ses vergers, qui ne comptent pas moins de 40 variétés de pommiers.

 

Il faut ensuite attendre 1942 pour qu'un décret reconnaisse le Calvados du Pays d'Auge en Appellation d'Origine Contrôlée et, les Calvados produits dans les autres zones, en Appellation d'Origine Réglementée. L'appellation d'origine réglementée Calvados est promue, en Appellation d'Origine Contrôlée le 11 septembre 1984 par décret. Le Calvados Domfrontais, qui possède une saveur très originale due à la présence dominante de poiriers dans cette région, attendra le 31 décembre 1997

 

Le cidre distillé en dehors des aires consacrées ne peut être que de l’eau-de-vie de cidre.

Partager cet article
Repost0
19 juillet 2018 4 19 /07 /juillet /2018 07:30
Je l'avais appelé Mao parce que je revenais de Chine : mes tribulations matinales dans la Chine de Mao Zedong ou Mao Tsé-toung (毛泽东 Máo Zédōng et un petit verre de Maotai pour la route de la soie !

En 1935, les communistes chinois, en pleine débâcle, font halte dans le village de Maotai et les soldats vont trouver dans la puissante eau-de-vie « une alliée idéale pour panser leurs plaies et reprendre courage. « La Longue Marche a été un succès en grande partie grâce au Maotai » assurera Zou Enlai lors de la proclamation de la République populaire. Peu après, la distillerie devient propriété de l’Etat et la boisson fétiche accède au rang d’alcool national. »

 

Le 19 octobre 1935 s'achève la Longue Marche des communistes chinois et de leur chef Mao Zedong. Après une épopée de douze mille kilomètres à travers la Chine, les communistes se réfugient au Chen-si (ou Shaanxi). Dans cette province montagneuse isolée du nord-ouest, ils échappent aux attaques du parti rival du Guomindang ou Kouo-Min-Tang et de son chef, Tchang Kaï-chek. Mais de 130.000 au départ, un an plus tôt, ils ne sont plus que 30.000. La faim et la lutte contre les troupes du Kouo-Min-Tang ont eu raison des autres.

 

Depuis  le toast réussi avec Nixon lors de sa visite à Pékin en 1972, les dirigeants chinois font couler le Moutai, eau-de-vie de sorgho titrant 53° (dit aussi Maotai petite ville de la province du Guizhou au sud de la Chine) dans le gosier de tous les chefs d’Etat et hauts dignitaires en visite en Chine. En effet, lorsque Deng Xiaoping, deux ans plus tard, se rend aux USA, Henry Kissinger lui confiera « Si nous buvons assez de Moutai nous pourrons résoudre tous nos problèmes. »

 

Après l'arrivée au pouvoir des communistes, en 1949, les États-Unis avait refusé de reconnaître la Chine populaire. Les relations entre les deux pays restaient tendues au début des années 70. Cependant, l'accueil fait à une équipe américaine de ping-pong en tournée et les visites secrètes en Chine du conseiller du président Nixon, Henry Kissinger, pavent la voie à un rapprochement. Le 21 février 1972, Nixon entreprend un voyage officiel en Chine au cours duquel il rencontre le premier ministre Zhou Enlai et l'ancien président Mao Zedong.

 

« Nixon n'a pas été reçu comme le représentant coupable d'un impérialisme vaincu par les contradictions du capitalisme. Il n'a pas été reçu comme un tacticien avec lequel on fait une expérience que l'on se réserve le pouvoir de désavouer aussitôt. Il a été reçu comme un chef d'État avec lequel on peut conclure la paix et on peut fonder la coexistence. Mao lui-même s'est engagé. Il n'est plus en mesure, comme certains sinologues s'aventuraient à le conjecturer, de désavouer Chou En-lai.»

 

Jean Daniel, «Les surprises de Nixon» Le Nouvel Observateur 28 février 1972

 

Je l'avais appelé Mao parce que je revenais de Chine. Je voulais qu'il règne sur moi comme le grand empereur de la nouvelle dynastie sur son peuple. Certains virent là un signe de mépris pour le vainqueur de la Longue Marche. Pour cela, il aurait fallu donner son nom à un porc ou à un veau. Mon dernier chien s'appelait César comme celui de la ferme de mes grands-parents dans la Mitidja. Ainsi à nous deux portions-nous le nom du général qui conquit la Gaule et la soumit à Rome. Dans l'idée que, ce Mao-là, du moins, je pouvais l'aimer, et qu'il m'obéissait, j'avoue qu'on pourrait discerner quelque secrète démarche ou fourberie : sans penser à ramener, symboliquement, la Chine au servage de l'Occident, j'admets que se nichait là une innocente ironie, mais quoi, j'aurais aussi bien appelé mon chien Charlie pour me gausser espièglement de notre roi, si grand, si fier et si puissant. Après tout, quand on donne aux chiens le nom d'un homme, c'est que cet homme est illustre, et l'hommage ainsi décerné flatteur pour un monarque, qu'il soit roi de France ou empereur de Chine. Et puis Mao peut s'écrire comme un vieux nom français. Un gendarme de Vézelay s'appelle Mahaut, et il eut assez d'humour pour ne pas se vexer quand il a su que mon chien portait le même nom que lui. Chaque fois que nous allions chez le menuisier, c'était des Mao par-ci et des Mao par-là. La gendarmerie est au-dessus, et le fils du gendarme Mahaut un familier de l'artisan, qui tient bistrot.

 

Ne devrais-je pas employer l'imparfait de l'indicatif ? A présent, la gendarmerie a été bâtie hors des murs de la ville, le menuisier s'en est allé, le bistrot a changé de propriétaire. Serais-je en vie quand ces pages paraîtront ?

Jules Roy

La Mort de Mao écrit en 1969 à Vézelay et publié chez Christian Bourgois.

 

« 1972.

Yenan. Au musée de la Révolution, après les manigances ourdies contre Liou Chao-chi d'abord, et contre Lin Piao ensuite, les plus habiles retoucheurs chinois, les experts ès laboratoires, avaient retouché des centaines de photos. Un travail d'orfèvre. La plus impressionnante, pour moi, était celle de Mao à cheval, avec à ses côtés, Lin Piao, à cheval lui aussi. Maintenant, sur le cheval de Lin Piao il n'y avait plus de Lin Piao, mais un petit halo blanchâtre, un ectoplasme, et Mao regardait le photographe droit dans les yeux, en faisant dans le même temps un mouvement de bras pour appuyer les propos qu'il tenait à son ami Lin. Mais à présent que le bandit Lin Piao n'était plus en selle, Mao paraissait s'adresser au cheval, qui d'ailleurs tournait attentivement ses naseaux vers lui, comme s'il comprenait son discours (...)

 

A Yenan, pendant la nuit, j'eus une discussion animée avec les Chinois qui m'accompagnaient. « Pourquoi retouchez-vous les photos ? » demandai-je.

 

«  Nous ne les retouchons pas, répondirent-ils. Nous avons seulement une conception différente de la photographie.

 

- N'est-ce pas une conception différente de l'histoire ?

 

- De la photographie plutôt...

 

 - Non, c'est une conception mutilante de l'histoire, insisté-je (...) "

Extrait de " Deux mille ans de bonheur " Maria-Antonietta Macciocchi chez Grasset  pages 88-89

 

Mao Zedong ou Mao Tsé-toung (毛泽东 Máo Zédōng) : l'ex-grand timonier de la Chine rouge pour l'éternité

 

«Les maîtres de la Chine-rouge-pour l’éternité n’aimaient pas La Cause* (ou plutôt les bureaucrates qui s’occupaient de ces affaires subalternes dans un recoin de la Cité interdite) : ils y voyaient non sans raison un ramassis d’irresponsables anarchisants susceptibles de gêner leurs négoces avec la France du président Pompe. Et ce n’était pas l’ambassade d’Angelo* qui risquait de les faire changer d’avis. Ils avaient commencé par l’expédier d’autorité chez le coiffeur, ils lui trouvaient les cheveux trop longs. Angelo avait eu beau protester, il avait dû se laisser détourer les oreilles. Puis devant le maréchal Lin Piao, le dauphin de l’époque, il avait détaillé son plan qu’il avait conçu d’établir dans le périmètre Saint-Jacques-Soufflot-Sainte-Geneviève-Saint-Germain une Commune insurrectionnelle étudiante et lycéenne défendue par les armes. Cela fait beaucoup de saints avait juste observé ce maréchal à tête de valet de comédie qui allait quelques années plus tard se désintégrer dans le ciel mongol. On avait finalement introduit Angelo, au sein d’une délégation « d’amis occidentaux», devant le Soleil rouge incarné : boudiné dans la toile kaki, ses petits pieds chaussés de vernis noirs croisés entre les dragons de bois-de-fer de son trône, le despote verruqueux portait à sa bouche, de cette petite main rose et comme bouillie qui avait si fort impressionné Malraux, d’incessantes cigarettes blondes. De l’autre il se tripotait nonchalamment la braguette. Le vieux Minotaure venait sans doute d’honorer une des lycéennes qu’il se faisait livrer »

Olivier Rolin « Tigre en papier »

* Angelo pseudo d’un mao de la GP délégué à Pékin lors d’un Congrès quelconque pour représenter les peuples soutenant la ligne chinoise contre la ligne soviétique

 

Histoire du petit livre rouge

Pascale NIVELLE

 

« Best-seller international, le petit livre rouge a été imprimé à plus d’un milliard d’exemplaires. Ce recueil de citations de Mao est rapidement devenu le manifeste de la Révolution culturelle et un objet de culte aussi bien en Chine que pour les maoïstes occidentaux.

 

Apparu en 1964, les Citations du président Mao Tsé-toung, bréviaire inspiré des discours ou des œuvres du fondateur de la République populaire, est d’abord conçu comme un outil d’éducation politique pour l’armée, puis devient l’« arme spirituelle » des gardes rouges et le manuel de vie de 700 millions de Chinois. En Europe, il séduit une partie des intellectuels, les « maos » français de Mai 68, qui le rebaptisent « petit livre rouge » et en font le talisman de leur propre « révolution », ignorants les atrocités commises par le régime chinois.

 

Cinquante ans après le début de la Grande Révolution culturelle prolétarienne et quarante ans après la mort de Mao Zedong, la journaliste Pascale Nivelle raconte l’épopée de cette petite bible en vinyle rouge vif qui a été, de Pékin à Paris, le coeur d’une immense et folle passion collective. »

 

Dans ce livre passionnant je souhaite extraire, pour leur rendre hommage, l’aventure du couple Claudie et Jacques Broyelle emblématique de la mouvance maoïste française, qui travaillait comme traducteurs à mon Pékin Information.

 

Lui, normalien, prochinois historique, fondateur de l’UJC-ML (Union des Jeunes Communistes marxistes-léninistes)

 

Elle, a écrit un livre à la gloire des Chinoises émancipées, La Moitié du ciel.

 

« Leur boulot consiste à mettre en bon français les traductions de leurs collègues chinois pour Pékin Information.

 

Ils déchantent assez vite. A plupart des articles exportés sont tirés du Quotidien du Peuple, principal organe en langue de bois du Parti. Au siège du journal, raconte Jacques Broyelle, il règne « un culte quelque peu exagéré de la division du travail ». Il décrit un cycle bureaucratique kafkaïen : chaque traduction nécessite une dizaine d’opérations enchaînées les unes aux autres, sans aucune coopération entre les six ou sept personnes qui travaillent dans l’unité française. Procédé qui qui entraîne « le désintérêt absolu des travailleurs », note le normalien coincé dans la chaîne, et la « multiplication des personnes inutiles ». Tout cela, expliquera-t-il plus tard, pour produire « des articles d’une monotonie éternellement triomphaliste ».

 

« Les traducteurs n’ont aucune marge de manœuvre. Ils sont obligés de piocher dans un énorme fichier d’expressions toutes faites, auxquelles il ne faut pas enlever un tiret ou une majuscule. Tel le bloc « Notre Grand Dirigeant le président Mao » ou le triptyque sacré « ouvriers-paysans-soldats ».

 

[…]

 

« Même aliéné par la propagande, même anesthésié par une situation matérielle confortable qui tranche avec celle des années de militantisme parisien, et même aveuglé par sa propre foi, Broyelle a encore quelques réflexes. Un jour, il voit passer la phrase « le modernisme, le fauvisme, le rock’n’roll et le strip-tease dominent dans les pays occidentaux pour la plus grande corruption des peuples ». À envoyer tel quel à Paris et dans toute l’Afrique francophone. Cette fois, le normalien proteste, oubliant d’y mettre les formes : « cette analyse est surtout la preuve de l’ignorance du rédacteur, elle exhale un chauvinisme assez malvenu. » Que n’a-t-il dit ! L’article en question a été dicté à un quotidien chinois par Jiang Qing en personne ! On ne touche pas à madame Mao. « Ce fut une affaire d’État a raconté Jacques Broyelle en 1977, deux ans après être rentré (traumatisé) de Chine.»

 

Johann Schneider-Ammann: «La Route de la soie n’est pas une utopie» ICI 
Partager cet article
Repost0
18 juillet 2018 3 18 /07 /juillet /2018 06:15
Alessandra Pierini quel vin de l’Aspromonte boire avec des tripes des chèvres enroulées autour du gras et des frites, noyées dans un bain d’huile, oignon et poivre ?

« … une fois par an, on allait en montagne pour honorer le saint patron du lieu et visiter Ascruthia et Coraci, deux villages de montagne abandonnés après l’inondation qui avait tout balayé au temps où les grands parents étaient jeunes mariés. Après les visites aux villages et la messe dans l’église dédiée au saint, on s’arrêtait dans la pinède, on mangeait et on buvait pendant des heures […]

 

« J’étais impatient que le déjeuner finisse : les poivrons rôtis à la braise du feu de yeuse ; les pommes de terre et les œufs enfouis à cuire sous la cendre brûlante ; les tripes des chèvres enroulées autour du gras et des frites, noyées dans un bain d’huile, oignon et poivre ; et puis les macaronis cuits à la maison   , assaisonnés de sauce de chèvre blanche ou rouge ; le capocollo, les lardons, les salamis piquants, les fromages doux de brebis et de vache et piquants de chèvre ; les tartes à la mûre des ronces et à la mûre de mûrier, à la cerise de montagne… »

 

Si les Calabrais de l’Aspromonte peuvent apparaître comme un «peuple de mâles», une race maudite qui n’a pour horizon que la guerre, leurs femmes, à l’opposé, «trament depuis toujours pour la paix».

 

« La ‘ndrangheta est comme la nature infecte d’une très belle femme ; les amants inexperts la pénètrent, brûlants de désir, et au lieu de l’apaisement des sens, ils trouvent l’anéantissement de l’âme. »

 

« Dans les livres comme dans la vie, il n’y a pas d’un côté «les bons» et de l’autre «les méchants». Une troisième catégorie d’individus existe: les «assassins par nécessité historique». Inclassables en termes moraux. Echappant à toute forme de jugement. Des êtres qui sont le siège d’une culture ancestrale et qu’il est impensable de vouloir étiqueter. Encore moins condamner. Et qui résident prioritairement en Calabre, terre de grande tradition grecque et de grande désespérance économique.

 

Tel est le thème du thriller calabrais à succès, «la Soie et le fusil», signé Gioacchino Criaco. Où il est démontré qu’«un homme et un peuple qui ne sont pas en mesure de défendre leur propre territoire cessent d’être un homme et un peuple».

 

 

Tout ici remonte à la nuit des temps, à la mythologie des «Aigles» (la famille Therrime) et des «Loups» (la famille Dominici). Deux clans qui s'affrontent et se disputent des terres. L’auteur affiche nettement une préférence pour les Dominici. Dans leur guerre, ils ont toujours refusé, même aux pires moments, de s’allier avec la mafia locale, la célèbre 'Ndrangheta, le bras armé des puissants. »

 

Lire ICI la critique de Marcelle Padovani le 06 avril 2018 : Avec "la Soie et le fusil", l'écrivain calabrais Gioacchino Criaco signe un romanzo criminale aux accents mythologiques. Epique. 

 

Résumé :

 

De part et d’autre d’une vallée de l’Aspromonte, deux familles s’affrontent dans une guerre sans âge et font le décompte de leurs morts : les Therrime contre les Dominici, les Aigles contre les Loups. Leur inimitié est balayée un jour par l’inondation qui emporte toute la vallée fertile jusqu’au bord de la mer et les deux peuples migrent sur la côte dans les « Jardins », où parmi les vergers les enfants font des courses à cloche-pied. C’est là que Julien, dit le Gecko, et Agnese, la Nymphe, deux descendants des lignées ennemies, tombent amoureux pour la vie, sous le regard jaloux du frère jumeau d’Agnese, Alberto, le Chiot, et avec la complicité des vieilles tisseuses de soie.

 

Mais dans l’Aspromonte les trêves ne durent jamais bien longtemps, et lorsque le père de Julien Dominici est tué, la vendetta reprend et la peste noire s’abat sur la vallée : Julien devient un monstre, un tueur. Alors qu’il sort de prison, vingt ans plus tard, il découvre qu’il est mêlé contre son gré à une sombre histoire de trafic de drogue avec les triades chinoises. Le combat reprend.

 

Souffle épique et antique, sentiment de la nature, affrontement des mythologies (épopées calabraises, mais aussi légendes de la Chine), thriller ultra contemporain, ce roman fait magnifiquement la fusion entre le polar et les batailles mythologiques qui se poursuivent aujourd’hui, sous le poids d’un implacable destin.

 

 

CANESTRATO D'ASPROMONTE

 

Sur le massif montagneux d'Aspromonte (Calabre), au pied du quel ce fromage est élaboré, paissent de nombreux troupeaux de brebis, de chèvres et de vaches. Aussi, utilise-t-on toujours au moins deux laits, en fonction des saisons de mise bas des animaux. Les meilleures origines, les plus caractéristiques du cru, sont sur le versant tyrrhénien, les communes de Scilla, San Syefano d'Aspromonte, Sinopoli, Scido. C'est un fromage caillé divisé et à égouttage acceléré sous presse. Il se présente sous la forme d'une petite roue à talon convexe de 1,5 à 4 kg. On le consomme après 2 mois de cave, soit en dessert, soit en hors d'oeuvre, lorsqu'il est conservé dans l'huile d'olive à la mode locale.

 

 

« Bordé par la mer Tyrrhénienne à l’ouest et la mer Ionienne à l’est, le territoire de la Calabre jouit d’une géographie très diversifiée composée d’un vaste littoral, de hauts plateaux et de montagnes luxuriantes. Séparée de la Sicile par le détroit de Messine, la région forme la pointe de la botte italienne dans l’extrême sud de la péninsule. Bien qu’on y cultive la vigne depuis le 7e siècle avant notre ère, la Calabre figure aujourd’hui parmi les régions d’Italie où il se produit le moins de vin. Optant longtemps pour une production de vin en vrac exporté vers le nord, la Calabre mise depuis les années 1970 sur la commercialisation de ses vins d’origine. Bien qu’elle accuse un certain retard par rapport aux autres régions du Mezzogiorno en termes d’investissement, la Calabre a entamé depuis peu la modernisation de son vignoble avec des résultats forts encourageants.

 

La Calabre demeure une région essentiellement agricole. Dans l’ensemble, la vigne reste toutefois secondaire par rapport aux autres formes de cultures telles les agrumes et les olives. Deux principaux cépages d’origine grecque, le Gaglioppo, pour les rouges, et le Greco, pour les blancs, dominent aujourd’hui le paysage viticole calabrais. L’écrasante majorité des vins de la région sont rouges avec 90 % de la production totale.

 

Surnommée Enotria (terre de vins) pendant l’antiquité, la Calabre produit sans doute l’un des plus anciens vins d’Italie, le vin Cirò DOC, cultivé dans les environs de la ville de Cirò Marina près de Crotone. De loin l’appellation la plus réputée de la région, ses collines ensoleillées situées sur la côte ionienne sont particulièrement propices à la viticulture.

 

Le vin de Cirò découlerait du vin de Kremissa, le nom de la colonie grecque qui occupait initialement l’emplacement de Cirò Marina à l’époque de la Magna Graecia (la Grande-Grèce). On raconte que c’est le vin que buvaient les athlètes calabrais pour célébrer leurs victoires lors des premières olympiades.

 

Confituré, puissant et acidulé, le Cirò est un rouge typique des chauds climats du sud de l’Italie et l’incarnation même du cépage Gaglioppo. Sa forte personnalité exprime un charme rustique intimement associé à son terroir d’origine. Contrairement à d’autres cépages du Mezzogiorno reconnus pour leurs robes denses et opaques, les vins de Cirò possèdent une teinte plus pâle et des nuances orangées. Les Riserva se conservent aisément pendant une bonne décennie. La récente modernisation du vignoble et des techniques de production tend à donner des vins moins alcoolisés, plus ronds et moins susceptibles à l’oxydation. De récentes expérimentations avec le cépage Magliocco et d’autres cépages internationaux comme le Cabernet Sauvignon assemblé au Gaglioppo livrent dernièrement d’assez bons résultats qui contribuent au rayonnement des vins de la région. Mais, le récent boom commercial vécu dans les Pouilles et la Sicile tarde encore à venir et la Calabre demeure toujours marginale dans le circuit des œnophiles.

 

Le vin de Cirò représente à lui seul près de 85% de la production du vin DOC calabrais. Les DOC de Lamezia, Scavigna et Savuto, sur la côte tyrrhénienne, constituent le second pôle viticole significatif de la région. Les autres DOC de la Calabre telles que Melissa, Donnici, Bivongi ou Pollino perdent de plus en plus de terrain et sont rarement exportées. Produit dans la ville de Bianco au sud de Reggio Calabria, le Greco di Bianco figure parmi les meilleurs vins doux d’Italie. Rare, il s’agit d’une curiosité gastronomique à ne pas manquer lors d’un séjour dans la région. »

Partager cet article
Repost0
15 juillet 2018 7 15 /07 /juillet /2018 10:40
Le « penalty manqué » par Faruk Hadzibegic le 30 juin 1990 à Florence, les Yougoslaves affrontaient en1/4 de finale les Argentins de Maradona.

Rappeler un fait d’histoire enterré et ignoré, surtout par les Français, ce n’est pas faire injure au présent, ni verser dans la stigmatisation d’une équipe de football.

 

Le football yougoslave m’a toujours séduit et passionné, un régal pour ceux qui aiment le beau jeu.

 

Dans cette Coupe du monde j’ai visionné peu de matches mais le hasard veut que j’aie vu jouer la Croatie qui possède l’essentiel des talents de cette Yougoslavie oubliée. Avec la Belgique, elle est sans contestation une grande équipe.

 

Elle s’est qualifiée à plusieurs reprises après prolongation et tirs au but.

 

Les tirs au but ne sont pas des pénaltys car ce sont des fusils à un coup.     

       

« Ce que je sais de la morale, c’est au football que je le dois… » Albert Camus

 

« On se souvient de ce titre magnifique du roman et film éponyme de l'écrivain autrichien Peter Handke : «L'angoisse du gardien de but au moment du penalty».

 

Gigi Riva, dans son livre le Dernier Penalty écrit :

 

« Dans les Balkans, dire que le sport est comme la guerre n’est pas une métaphore. La guerre est la continuation du sport par d’autres moyens.

 

Le Dernier Penalty, est une formidable enquête, histoire de football et de guerre, ne manque pas de le rappeler, l’explosion de la Yougoslavie, «une idée romantique à l’agonie» alors, bruissait depuis quelque temps – dix ans après la mort du dirigeant Tito, la fédération socialiste n’était maintenue à flot qu’à coups d’illusions. Ainsi, ça avait chauffé fort lors d’un match entre le Dynamo Zagreb et l’Étoile Rouge de Belgrade. Dans le stade, les supporters avaient déployé des banderoles avec des slogans identitaires et créé une émeute.

 

Gigi Riva est rédacteur en chef de l’hebdomadaire italien L’Espresso, homonyme d’une légende de la Squadra Azzura et il a couvert la guerre des Balkans. Son livre raconte comment foot et politique se sont croisés durant un demi-siècle, jusqu’au paroxysme de Florence en 1990.

 

En 1990, l’Italie accueille le Mondial de foot, le 30 juin à Florence, les Yougoslaves affrontent, en quarts de finale, les Argentins de Maradona. Au coup de sifflet final, le score est nul. La séance des tirs au but s’achève sur ce qui a été qualifié à tort le penalty raté du capitaine, Faruk Hadzibegic.

 

Ce sera l’ultime apparition de l’équipe nationale d’un pays en voie d’implosion. C’est dans les virages des stades, tenus par la pègre, qu’ont été formés, en Serbie et en Croatie, les groupes paramilitaires, dont les méfaits, dans les années 1980, préfigurent les conflits de la décennie suivante.

 

Ce « penalty manqué » par Faruk Hadzibegic devenait soudain une histoire de football et de guerre. Le symbole, le déclencheur de l’éclatement d’un pays.

 

Croates et Serbes jouaient sous le même maillot, celui de la Yougoslavie – ce fut la dernière fois, une fin précipitée par le dernier penalty… Dans les mois qui suivirent, tant et tant de supporters devinrent les miliciens d’une guerre civile. Une guerre durant laquelle les nationalismes se sont affrontés dans le sang, sous les bombardements. »

 

Ce sont des pages d’Histoire les rappeler n’entache en rien le moment d’une finale de Coupe du Monde, que le meilleur gagne et quel qu’il soit, loin des excès de nationalisme chauvin, lever un verre de vin naturel de Croatie me va, j’aime ça comme j’aime l’eau de Vichy aussi.

FARUK HADZIBEGIC ICI

né le 7 octobre 1957 à Sarajevo, Yougoslavie, en Bosnie-Herzégovine fut un footballeur international yougoslave d'origine bosnienne, mais désormais de nationalité française, qui évoluait au poste de libéro. Il s’est reconverti en entraîneur depuis 1995.

Partager cet article
Repost0
15 juillet 2018 7 15 /07 /juillet /2018 06:00
Pavelic Ante

Pavelic Ante

Dans sa lettre politique du 13 juillet Laurent Joffrin écrit :

 

Et la Croatie ?

 

« Une équipe beaucoup plus uniforme dans un pays au nationalisme sourcilleux, une équipe au blason terni par des vilaines histoires de corruption. La Croatie indépendante est née d’une guerre, celle des années 90, terrible et meurtrière. Elle a été gouvernée longtemps par Franjo Tudjman, leader identitaire s’il en fut. Son passé oustachi est de sinistre mémoire – une légion croate s’est distinguée par ses exactions aux côtés de l’armée allemande. Pourtant, cette ancienne province de l’empire austro-hongrois s’est aussi distinguée par son ouverture et sa résistance au nazisme : Tito était croate. Son nationalisme moderne est né, pour une bonne part, de la prétention serbe à dominer la fédération, alors même que c’est la Croatie, dans les années 30, qui avait pris l’initiative de réunir les «Slaves du Sud». Les temps changent et les dirigeants croates ont préservé la démocratie dans leur pays. Ils ont aussi refusé l’enfermement. Dès l’indépendance, ils ont demandé l’adhésion de leur pays à l’Union européenne, ce qui est chose faite. De quoi, là aussi, faire réfléchir les souverainistes… »

 

En 1941, alors que la deuxième guerre mondiale sévit depuis deux ans avec ses nombreux morts et combats, les Nazis attaquent la Yougoslavie et mettent en place en Croatie un Etat indépendant qui va devenir satellite de l'Allemagne, l’Etat indépendant de Croatie. Ses autorités, les Oustachis, se fondent sur une politique basée sur le modèle nazi et prônent un Etat croate ethniquement pur, qui sera débarrassé des « éléments indésirables », Serbes et Juifs. Le tristement célèbre Ante Pavelic, chef des Oustachis, ne cherche pas à dissimuler les massacres qu'il compte mener contre ces populations. Des lois raciales sont édictées [Loi pour la protection du peuple et de l’état (17 avril 1941), loi sur l’appartenance à la race (30 avril 1941), loi sur la protection du sang aryen et de l’honneur du peuple croate (30 avril 1941)] qui mettent en place de fortes discriminations envers les Serbes et les Juifs : Ceux-ci sont chassés des centres des villes, victimes d'expropriations, et doivent porter des signes distinctifs. Ceux qui refusent l'oppression ainsi que les Croates qui défendent les victimes sont accusés de haute trahison et emprisonnés ou fusillés.

 

Les Oustachis déclenchent rapidement des massacres. Le 2 juin 1941, le ministre de la justice de l'Etat indépendant de Croatie, Milovan Zanic, annonce que « les massacres déjà commis s’inscrivent dans un plan national de massacre des populations serbes et juives. [la Croatie], est seulement pour les Croates et pour personne d'autre. Il n'y a pas de méthode que nous, Croates, puissions négliger dans le but de faire ce pays vraiment nôtre et de le nettoyer des Serbes (et des éléments "hostiles"). (...) Nous ne cachons pas notre pensée, c'est la politique de notre État, (...) nous ne ferons pas autre chose, mais seulement ce qui est écrit dans les principes oustachis. »

 

Certains hauts responsables oustachis vont même plus vite que les autorités centrales de Zagreb : Le gouverneur oustachi de la région de Banja Luka, Gutic, lance des appels à la haine et signe des papiers autorisant " Tout Croate à exterminer les Serbes partout où on les rencontrera".

 

Durant le seul mois de Juin 1941, on compte 100 000 hommes, femmes et enfants serbes tués par les soldats oustachis et les paramilitaires qui les aident.

 

D'autres massacres encore plus vastes ont eu lieu en Herzégovine durant la même période. Dans la banlieue de Ljubinje, les oustachis ont entrepris le 2 juin un massacre en masse. Trois jours plus tard, les oustachis ont égorgé quelque 180 paysans du village de Korita, près de Gacko. Le 30 juin, à Ljubusko, nouveau massacre. En juin, c'était le massacre des Serbes sur le territoire de la Dalmatie du Nord. Encore plusieurs dizaines de milliers de morts.

 

Fin Juillet et début Aout 1941 ont lieu les massacres de Vrgin-Most qui seront de l'aveu même des soldats italiens alliés des Oustachis un déclenchement de la barbarie la plus affreuse. Des femmes de villages serbes sont affreusement violées puis mutilées, plusieurs milliers de civils exécutés. Lors du raid du 3 Aout, on comptera 5 survivants sur les 5000 Serbes qui ont été arrêtés par les Oustachis. Bien qu'alliée de ces derniers, l'armée italienne décidera d'intervenir et de prendre le contrôle de la région pour faire cesser cette barbarie, ce qui fâchera passablement les autorités centrales de Zagreb.

 

Concernant les camps de concentration, la Croatie sera le seul « État » d'Europe à mettre en place une politique concentrationnaire sans l'aide des Nazis. Et une différence remarquable entre les camps nazis et croates est que les exécutions dans les camps croates avaient le plus souvent lieu à l'arme blanche ou même.... à la hache comme dans le funeste camp de Jasenovac, l'Auschwitz des Balkans, dans lequel furent exécutes 360 000 personnes, comprenant des Serbes, des Juifs, des Tziganes et des opposants, ce qui en faisait selon les historiens le camp le plus meurtrier après ceux d'Auschwitz et de Treblinka.

 

Le bilan de ce génocide varie. Déjà en 1941, un rapport intitulé Documentation sur les actions illégales et brutales commis par les oustachis sur la population yougoslave, commandé par l’État-major de l'armée italienne, fait état de plus de 80 000 Serbes tués entre Avril et Aout 1941.

 

Le bilan total du génocide se chiffre lui en centaines de milliers de morts et de disparus : 744 000 selon un rapport du président Roosevelt lors de la conférence de Téhéran, dont 330 000 environ rien qu'à Jasenovac selon le United States Holocaust  Memorial Museum.

 

Force est néanmoins de constater que si le thème du génocide de 1941-1945 est bien connu des historiens des Balkans et de certains historiens américains, on en parle relativement peu. Et il a fallu attendre Avril 2011 pour qu’un officiel croate, le président Josipovic, fasse enfin des excuses pour les crimes commis par l’Etat indépendant de Croatie.

 

Source AGORAVOX ICI  : 

 

La Croatie face à ses fantômes oustachis. L'extradition d'un commandant de camp nazi réveille le passé par Thomas Hofnung — 18 juin 1998

 

« L'ancien officier nazi croate Dinko Sakic devait être extradé hier soir vers la Croatie où il sera jugé pour des crimes commis pendant la Seconde Guerre mondiale. Dinko Sakic, 76 ans, qui réside en Argentine depuis 1947, avait été arrêté en avril à son domicile, quelques heures après l'enregistrement officiel par l'Argentine d'une demande d'extradition présentée par la Croatie.

 

Zagreb envoyé spécial, Le 30 avril, c'est par un silence assourdissant que Zagreb avait accueilli la nouvelle de l'arrestation en Argentine de Dinko Sakic. Un silence révélateur de la gêne qu'éprouve le régime du président croate Franjo Tudjman face à la réapparition inopinée de l'ancien commandant du camp de concentration de Jasenovac (Croatie), où furent massacrés par les oustachis (pronazis), de 1941 à 1945, plusieurs dizaines de milliers de Serbes, de Juifs, de Tsiganes et de Croates antifascistes.

 

Dinko Sakic, un retraité d'apparence paisible, ayant reconnu à la télévision argentine qu'il avait dirigé le camp de sinistre mémoire, les autorités de Zagreb n'ont pas eu le choix. Elles se sont rapidement résolues à demander son extradition, en partie pour prendre de vitesse le «frère ennemi» yougoslave qui venait d'entamer la même démarche auprès de Buenos Aires. La Croatie se prépare désormais à juger l'ancien responsable oustachi au cours d'un procès qui promet d'être douloureux. Car, depuis 1990, les autorités de Zagreb n'ont pas ménagé leurs efforts pour réhabiliter partiellement le régime d'Ante Pavelic, qui avait collaboré avec l'Allemagne nazie. »

 

La suite ICI 

Pavelic Ante

 

Publié le par Mémoires de Guerre

Ante Pavelić (Bradina, Bosnie-Herzégovine, 14 juillet 1889–Madrid, 28 décembre 1959), était un homme politique yougoslave d'origine croate. Fondateur du mouvement nationaliste croate des Oustachis (Ustaše), il fut le dirigeant de l’État indépendant de Croatie (Nezavisna Država Hrvatska, NDH) pendant la Seconde Guerre Mondiale.

La suite ICI

Partager cet article
Repost0
11 juillet 2018 3 11 /07 /juillet /2018 06:00
Le palais d'hiver, résidence des tsars, où s'étaient réfugiés le gouvernement provisoire qui abdique face aux communistes dans la nuit du 7 au 8 novembre 1917 | Olivier Pauly / Ouest-France

Le palais d'hiver, résidence des tsars, où s'étaient réfugiés le gouvernement provisoire qui abdique face aux communistes dans la nuit du 7 au 8 novembre 1917 | Olivier Pauly / Ouest-France

Cette chronique est écrite en temps réel pendant la demi-finale Belgique-France à Saint-Pétersbourg.

 

Je suis calfeutré car je ne veux pas être influencé par les cris de joie ou de déception montant de la rue : beaucoup visionnent le matche dans un café…

 

Pendant toute la sainte journée sur les réseaux sociaux les deux camps se sont affrontés,avec plus ou moins d’humour, on sentait chez mes amis belges une jubilation sourde : enfin ils allaient claquer le bec à ces ramenards de Français jamais avare d’une bonne histoire belge. 

 

Moi ça ne me dérange, ça ne me touche pas, ce n’est que du football, un jeu, que le meilleur gagne je l’espère sans aucune contestation.

 

Comme je vous l’ai avoué je n’ai pas l’âme d’un supporter, j’aime le beau jeu et ces deux équipes sont capables d’en produire. C’est tout le mal que je leur souhaite.

 

Ça se passe à Saint-Pétersbourg la capitale des tsars, cette improbable ville flottante, fondée il y a plus de trois siècles (1703) Pierre le Grand a voulu faire de Saint-Pétersbourg une ville européenne et donner son premier port à l’empire. N’avait-il pas conçu ce rêve en apprenant la navigation en Hollande, dont il imposa les multiples canaux lors de sa construction ?

 

« Née d’une double victoire sur les Finlandais et les marais, Saint-Pétersbourg est un acte contre nature, issu d’un désir impérieux de voir triompher la volonté sur les éléments. Ici, tout est démesure : palais, ponts en fonte et quais de granit, jardins et églises, statues de bronze. La Neva, surtout. Fleuve qui inspira nombre de poètes et dont les reflets changeants, à l’aube comme au crépuscule, au soleil ou dans la brume, donnent à la ville une aura si particulière. Une sorte de douceur de vivre qui tranche avec la rudesse du climat.

 

Ce n’est donc pas un hasard si tous les auteurs russes, de Pouchkine à Gogol, ont vécu ici et non à Moscou. Si Voltaire, Gérard de Nerval, Sartre, Gide ont été fascinés par la bipolarité de la cité. Une fois visités les incontournables musées, palais et églises, il faut donc se faufiler dans le roman russe.

 

La perspective Nevski d’abord, chère à Gogol, qui s’étend sur plus de 4 km, de l’Amirauté à Ligovski Prospekt.

 

à 20 km de la ville : le palais Sainte-Catherine, dit Tsarskoïe Selo, et ses 100 hectares de parc. C’est dans le lycée impérial, contigu au palais d’Eté, d’inspiration baroque orné d’une splendide façade turquoise et or longue de 300 m, que Pouchkine, autre grand poète russe, fit ses études. Celui qui décrivait Saint-Pétersbourg « comme étrangère à sa propre patrie »

Magali Cartigny Le Monde

 

Les soirs d’été, lors des nuits blanches, une lumière inégalable décrite par Custine comme une fantasmagorie. Alexandre Dumas, dans Le Maître d’armes (1859), le résume ainsi : « Aimer pendant de pareilles nuits, c’est aimer deux fois. »

 

Aimer oui aimer…

 

Lorsque le résultat tombera, faisant des heureux et des malheureux, j’aurai une pensée pour Arno chantant Adamo.

 

Deux symboles de l’absence de frontière grâce à la musique.

 

Lorsque mon amie Magalie vendait des fromages français qui puent aux belges j’allais la rejoindre le week-end à Bruxelles. Elle habitait dans le quartier d’Arno et nous nous étions promis d’aller l’écouter ensemble.

 

23 mars 2016

Cher Arno, longtemps je me suis rendu à Bruxelles par le Trans-Europ-Express pour que nous ne connaissions plus la guerre… et la voilà chez toi... 

 

Arno en 2012 dénonçait l'absurdité de notre société de repus, il se méfiait de la contestation érigée en tendance, en ligne officielle.

 

« Je ne veux pas appeler à la révolte, autrement je serais comme Staline, Hitler, Mao. Moi, je suis seulement un chanteur de charme raté, donc je constate seulement ». Pas optimiste, optimiste notre Arno « J'ai peur parce que la gauche d'aujourd'hui est devenu la droite, et la droite est devenue l'extrême-droite. En Europe, le tendance d'extrême-droite est incroyable. Regarde ce qui se passe en France, en Belgique, en Hollande, en Italie, en Espagne, en Grèce… Mon père a vécu une guerre, mon grand-père deux, je suis la première génération qui n'a pas vécu une guerre en Europe. En 68, j'avais 19 ans et c'était la première fois dans l'histoire que les jeunes avaient leur propre culture. Pour nous, tout était possible. Maintenant j'ai des enfants et je vois que des jeunes font des études pour un métier qui n'existera plus dans trois ans. On vit le même changement que dans les années 60, mais avec un Etat des années 30. »

 

22 mai 2016

 

Et moi, pendant ce temps-là, je me retrouve dans une salle de concert, Le Trianon, pleine à craquer, c’est la première fois depuis la nuit du Bataclan que je retrouve au pied d’une scène, au coude à coude, comment ne pas y penser puisque lorsque j’avais réservé ma place j’avais noté « Les dates d'Arno, initialement prévues au Bataclan, sont reportées au 19 et 20 mai 2016 à 20h00 Le Trianon 80 boulevard de Rochechouart. Tous les âges, toutes les conditions, Arno a mis le feu pendant deux heures avec ses musiciens qui envoyaient du bois, même que la salle a chanté juste avec lui Putain, putain, nous sommes tous des Européens et, bien sûr, tout à la fin, les filles du bord de mer, nous ont permis de reprendre en chœur : et encore, et encore… de faire tchouin, tchouin… que du bonheur. Y’a pas d’âge pour ça et ça c’est aussi Paris…

 

Révolution russe. 100 ans plus tard, Saint-Petersbourg oublie et se souvient 

 

 

La statue de Lénine s’adressant au peuple est toujours en place. Monumentale, devant la gigantesque maison des Soviets. Un peu plus loin, le tout nouveau centre commercial arbore une architecture volontairement stalinienne. Mais sous ses arcades, ce ne sont que marques de luxe et autres étendards de la société occidentale, de la mondialisation.

 

Selon un récent sondage, un jeune russe sur deux ignorerait qui est… Lénine. Pourtant, dimanche, une foule immense, jeune, s’agglutinait place du Palais d’hiver, pour un son et lumière commémorant la révolution de 1917.

 

Cent ans plus tard, une génération de Russes qui n’a jamais vécu sous le communisme atteint la majorité. « Pour eux, il est extrêmement compliqué de concevoir ce qu’était l’URSS, estime Eugène Berg. Et vis-à-vis de l’Histoire, la Russie ne peut pas évacuer complètement Staline comme l’Allemagne a pu le faire avec Hitler. Les crimes commis sous Staline ne sont pas contestés mais il reste aussi celui qui a défait les nazis. C’est très compliqué. »

 

Point de départ de la révolution bolchevique d’octobre 1917, celle qui mettra un terme au tsarisme et bouleversera la marche du monde, Saint-Petersbourg est aujourd’hui à l’image d’un pays qui a tourné la page, et la tourne encore, d'un vingtième siècle communiste.

 

Cent ans plus tard, une génération de Russes qui n’a jamais vécu sous le communisme atteint la majorité. « Pour eux, il est extrêmement compliqué de concevoir ce qu’était l’URSS, estime Eugène Berg. Et vis-à-vis de l’Histoire, la Russie ne peut pas évacuer complètement Staline comme l’Allemagne a pu le faire avec Hitler. Les crimes commis sous Staline ne sont pas contestés mais il reste aussi celui qui a défait les nazis. C’est très compliqué. »

 

D’autant que pour chaque Russe, la relation à la période communiste est singulière. « Quand une famille a été privée de ses biens au nom du collectivisme, elle n’en a pas retrouvé la jouissance avec l’écroulement de la société communiste, explique Ivan Medved, dont les grands-parents ont vu leurs terres confisquées. Cela laisse des traces… »

 

Néanmoins, de l'autre bord, il reste des nostalgiques. Pour Youri, 55 ans, cela peut s’expliquer. « Sous l’URSS, nous avions un système éducatif très performant, rappelle ce Moscovite de passage dans l'ancienne capitale russe. Pareil pour la santé. Les droits acquis étaient nombreux. Quand on a fait le ménage à la chute du communisme, on est peut-être allés trop loin. »

 

Les cafés soviétiques : un concept nouveau à Saint-Pétersbourg 

 

« Les deux « cafés soviétiques » visités sont bien différents de ce à quoi on aurait pu s’attendre.  Est-ce vraiment comme cela que vivaient les Soviétiques, quand ils allaient prendre un verre ? Eh bien, tout simplement, ils n’allaient pas au café. A leur arrivée au pouvoir, les Bolcheviks ont tenté de mettre fin à ces enseignes, ainsi qu’à tout type de restaurants privés. Ces derniers, contraints de fermer, devaient être remplacés par des cantines collectives ou stalovaya, modèle socialiste de la restauration. Avec la croissance urbaine, nombre de ces cantines ont été construites, aménagées et gérées par le pouvoir central. Du fait de leur qualité médiocre, des restaurants privés « secrets » se sont développés en marge du système légal.

 

Après l’époque stalinienne et surtout sous l’ère gorbatchévienne, des établissements, restaurants et cafés privés sous forme de coopératives, ont été autorisés. Néanmoins, le café comme place de repos, où l’on peut s’asseoir et discuter, restait assez rare. Le système de restauration soviétique était marqué par une hiérarchisation. En haut de celle-ci se trouvaient les restaurants, réservés aux membres du Parti. A l’étage intermédiaire, les cafés proposaient des glaces, gâteaux, bonbons et autres produits sucrés. En théorie ouverts à tous, ils correspondaient en pratique à une population relativement aisée. Enfin, les stalovaya proposaient une nourriture de mauvaise qualité pour une population plus pauvre. »

 

Comme c’est étrange au moment où je mets le point final à cette chronique je regarde mon compte Twitter qui annonce :

 

 

La France disputera dimanche (17h00) à Moscou la 3e finale de Coupe du monde de son histoire après 1998 - victoire face au Brésil (3-0) - et 2006 - défaite face à l'Italie (1-1, 5 t.a.b. à 3) #CM2018 #AFP

Pour moi les terrains de foot n’ont pas de frontières je suis fou d’Arno lorsqu’il chante Adamo, ma part de belgitude est entière…

C’est fini. Enfin, pas vraiment, parce que les Belges joueront samedi pour la troisième place du Mondial, mais l’incroyable espoir qui traversait tout le pays depuis quelques jours, l’espoir de pouvoir gagner la Coupe du monde de football, le Graal absolu du sport numéro 1, s’est évaporé dans la nuit de Saint-Pétersbourg.

 

Un petit but qui fait toute la différence. Un petit but qui change un destin et qui transforme un rêve en réalité ou en regrets éternels, selon le camp où l’on se place.

 

On n’a pas assisté à une rencontre flamboyante, ce mardi, contre la France. Loin de la remontada face au Japon ou du football total contre le Brésil. On a, au contraire, eu droit à un match tactique, fermé, cloisonné par une formation hexagonale pas forcément chatoyante mais très impressionnante d’organisation, de maîtrise et d’efficacité. Une équipe de France plus que jamais à l’image de son entraîneur, Didier Deschamps. L’homme qui contrôle tout et qui s’adapte à toutes les oppositions a créé un collectif prêt à mettre le talent individuel au service de l’intérêt général et de la roublardise. La quintessence du football moderne, où il n’y a pas de place pour les sentiments mais où tout se joue sur le résultat. Chapeau.

 

La beauté et la cruauté du football à la fois

 

Et au final, donc, c’est un petit but, sur une phase arrêtée, qui a fait la différence. C’est toute la beauté et la cruauté du football à la fois. Ce petit supplément d’âme entre une occasion ratée et un corner réussi. Un petit but mais une différence énorme. Car toute la Belgique, ou presque, était devant le match en croyant plus que jamais dans l’histoire du pays, en un destin triomphal et à une semaine encore de fêtes et de passion dans les rues, devant les écrans et sur les terrasses.

 

Car c’est le plus grand mérite des Diables rouges : ils ont donné de la joie et de la fierté à tout un pays pendant trois semaines. On a oublié, un moment, les querelles et les soucis pour passer quelques jours d’émotion collective, simple, contagieuse, dont on manque sans doute cruellement.

 

Alors, évidemment, c’est un silence assourdissant qui s’est abattu sur le Royaume sur le coup de 22h.

 

La Belgique ne gagnera pas la Coupe du monde. Elle ne gagnera peut-être jamais la Coupe du monde. Mais la génération en or rentrera de Russie avec le sentiment d’avoir rempli plus que sa mission. Elle a prouvé qu’elle n’était pas seulement un espoir potentiel ou une simple addition de jeunes vedettes sans âme, mais bien une réalité tangible dans le football mondial et elle a passé un cap en s’installant dans le carré final et en alignant cinq succès d’affilée.

 

Évidemment, et c’est sans doute neuf dans l’état d’esprit belge, on en aurait voulu un peu plus et le potentiel était là pour aller jusqu’au bout. Mais il faut garder l’image de ce formidable groupe qui allie le talent, la solidarité, la volonté de briller et qui donne le sourire de Bruges à Arlon.

 

Un but. Un tout petit but. Mais un but qui change le destin. En somme : la définition du foot.

Partager cet article
Repost0
9 juillet 2018 1 09 /07 /juillet /2018 06:11
« En Russie, une bouteille vide sur une table est de mauvaise augure » chekouschka et zakouski autour du massacre de Katyn

Pour coller à l’actualité parlons ce matin de la Russie.

 

Nous sommes à Smolensk le samedi 27 mars 1943

 

« … un homme au faciès comme une boîte de limaille de fer et avec qui, visiblement, Bartov avait été en affaire par le passé, me vendit une chekouschka, un quart de litre de vodka estonienne. La bouteille était assymétrique, de sorte que vous aviez l’impression d’être déjà ivre, et la gnôle qu’elle contenait n’avait pas l’air moins douteuse que le samogon, mais Bartov m’assura du contraire, raison pour laquelle, probablement, je décidai d’en acheter deux et lui proposai de me tenir compagnie. »

 

« Nous bûmes deux autres verres, mangeâmes le pain et les cornichons – Batov appelait ces amuse-gueule des zakouski –, et la première bouteille fut bientôt finie. Il la posa à côté du pied de la table.

 

 « En Russie, une bouteille vide sur une table est de mauvaise augure »

 

Le berlinois Bernie Gunther et Batov le russe discutent, ce dernier explique :

 

« Depuis la guerre de 1920, il est presque aussi difficile d’être polonais sous les bolchevicks que juif  sous les Allemends. Une vieille cicatrice historique, mais, comme toujour, ce sont des cicatrices profondes. Les Russes ont perdu, vous comprenez. Les forces soviétiques commandées par le maréchal Toukhatchevski ont été battues par le général Pilsuldski devant Varsovie – le miracle de la Vistule, comme on l’appelle. Staline en a toujours imputé la faute à Toukhatchevski, qui, de son côté, en imputait la faute à Staline. Ils ne pouvaient pas se voir, de sorte qu’on se demande comment il a duré aussi longtemps. Finalement, il a été arrêté en 1937,et lui, sa femme et deux de ses frères ont été exécutés ; il me semble que ses trois sœurs et une de ses filles ont été envoyées dans un camp de travail. Alors je suppose que nous pouvons nous estimer heureux d’être encore là pour pouvoir relater les faits, ma fille et moi »

 

  • Et moi qui pensais que Hitler était un sale type »

Batov sourit.

 

« Hitler n’est qu’un démon mineur de l’enfer, mais Staline est le diable en personne. »

 

La Pologne célèbre "le Miracle de la Vistule" le 14 août 2010

 

« La Pologne a célébré samedi le 90e anniversaire de la Bataille de Varsovie contre l'Armée rouge en 1920, qui a permis de lui barrer la route dans sa marche vers l'Europe de l'Ouest. Le nouveau président polonais Bronislaw Komorowski a assisté à une messe solennelle célébrée à l'église d'Ossow en présence de militaires hauts gradés. plusieurs centaines de personnes en uniformes d'époque et armes à la main ont pris part samedi à une reconstitution des opérations militaires, en présence des milliers de spectateurs. La Pologne a remporté cette guerre, également appelée "le Miracle de la Vistule", peu après son retour à l'indépendance en 1918, mettant fin à 130 ans de son partage entre la Russie tsariste, la Prusse et l'Empire austro-hongrois. »

 

« Les Soviétiques commencèrent à concentrer sur les frontières polonaises les meilleurs détachements parvenus de tout le pays. Le 10 mars 1920, à Smolensk, eut lieu la réunion des chefs de l’Armée rouge, du « Front occidental » et des commissaires communistes, dont Staline. C’est alors que furent prises les décisions d’attaquer la Pologne et l’Europe selon un plan qui devait se dérouler le long de la trajectoire Varsovie, Poznan, Berlin et Paris.

 

Grâce au brillant travail de l’espionnage polonais, le maréchal Josef Pilsudski, le chef charismatique de l’armée polonaise, était au courant des plans soviétiques et il décida d’agir immédiatement. Le 25 avril, anticipant l’attaque bolchevique, Pilsudski lança l’armée polonaise contre les Russes pour disperser l’Armée rouge et pour créer sur le territoire conquis un État ukrainien indépendant. Malgré la conquête de Kiev, ces objectifs ne furent pas atteints et l’armée polonaise dut se retirer. »

 

Les zakouski

 

« Il est d’usage en Russie, le jour d’un dîner, de préparer dans une pièce, laplus près de la salle à manger, une table couverte de différents hors-d’œuvre : tels que, radis, beurre, anchois, caviars, saucissons en tranches, et quelques petits hors-d’œuvre chauds de cuisine, plusieurs carafons de liqueurs, telles que : eau-de-vie blanche, amer, pomeranz, anisette, genèvre de Hollande et arak ; quelques  assiettes de tranches de pain blanc et bis. Les convives avant d’aller se mettre à table, passent dans cette pièce et s’arrêtent autour de ce buffet, pour y prendre chacun selon son goût un peu de ces hors-d’ouvre et un petit verre de liqueur ; c’est ce qu’on apelle prendre le zakouski. »

 

               

Les ombres de Katyn de Philip Kerr

 

« C'est la plus sombre des enquêtes de Bernie Gunther. Non seulement parce que, contrairement à l'habitude que nous a donnée l'auteur de La trilogie berlinoise, notre héros, Bernie, n'ouvre pas le bal avec des baffes d'anthologie balancées aux nazis de l'hôtel Adlon, mais manque de périr enseveli sous les décombres de Berlin pilonnée en 1943 par la Royal Air Force... Mais sombre, encore et surtout, parce que Philip Kerr, malgré l'alacrité de son humour anglais (qu'il est), soufflant à Bernie un esprit chevaleresque un brin misogyne (il faut bien coller à l'époque...), s'empare cette fois d'un épisode effroyable de notre Histoire. En 1940, 14 500 hommes, Polonais pour la plupart, furent massacrés et enterrés par les soldats soviétiques aux abords de la ville de Smolensk. »

 

La suite ICI 

« En Russie, une bouteille vide sur une table est de mauvaise augure » chekouschka et zakouski autour du massacre de Katyn

Katyn, l'un des pires massacres de Staline

 

Les communistes soviétiques éliminent, en avril 1940, l'élite de la Pologne. Ils feront porter le chapeau aux Allemands durant cinquante ans. Par Michel Colomès

 

C'est pire qu'un massacre, c'est un abattoir, tant les gestes sont calculés, méthodiques, froids, précis, et surtout répétés en une procédure implacable, des dizaines et des dizaines de fois. Sans un tremblement, sans l'ombre d'une hésitation, sans une pause. Un homme à la fois, d'abord un noeud coulant passé autour du cou, puis les mains garrottées derrière le dos, trois pas à peine, le temps d'ébaucher une prière, il est saisi aux épaules par deux aides, une seule balle dans la tête tirée par un troisième. Le corps est déjà poussé sur un plan incliné et la flaque de son sang lavée d'un coup de seau.

 

4 404 officiers polonais au moins sont morts ainsi, ou plus expéditivement encore, exécutés au bord de la fosse commune qui allait les ensevelir, en avril 1940, dans la forêt de Katyn, près de Smolensk, en Russie. À l'occasion de l'anniversaire de ce qui fut une tragédie pour la Pologne et pour le genre humain, Arte a eu la bonne idée de diffuser, le 14 avril, le sombre et magnifique film d'Andrzej Wajda, dont le père, capitaine au 72e régiment d'infanterie, fut parmi les victimes. Wajda, ardent patriote polonais, a toute sa vie voulu reconstituer l'histoire et, surtout, rétablir la vérité sur Katyn. Car à l'atrocité des faits s'est ajoutée la honte de leur négation pendant plus de 50 ans par les Soviétiques. Et leur travestissement pour accuser le coupable idéal, le Troisième Reich, responsable, il est vrai, de tant d'horreurs dans cette région d'Europe, et dans d'autres.

 

Épuration de classe

 

Lorsque les Allemands envahissent la Pologne, le 1er septembre 1939, ils sont suivis, quinze jours plus tard, par l'Armée rouge. En vertu de leur pacte d'août 1939, Hitler et Staline avaient décidé de se partager les dépouilles du pays. Tout de suite, les Soviétiques font prisonniers 250 000 soldats et officiers polonais. Les agents du NKVD, à qui Staline a demandé de s'occuper spécialement de ce dossier, libèrent une partie des soldats et livrent les autres aux Allemands. Mais ils gardent les officiers, pas seulement ceux de carrière, mais tous les réservistes, étudiants, médecins, ingénieurs, chefs d'entreprise, qui représentent l'élite de la Pologne. Afin de supprimer une menace potentielle pour le nouveau régime qu'il veut imposer à Varsovie, Staline décide de procéder à une véritable épuration de classe. Le 5 mars 1940, il donne l'ordre d'exécution des officiers polonais "nationalistes et contre-révolutionnaires". Le massacre de Katyn est acté.

 

Tout le monde l'ignorera, jusqu'à ce que l'armée allemande, qui s'est retournée contre l'URSS et a dénoncé le pacte germano-soviétique, envahisse la Russie occidentale et tombe sur les charniers. Dès avril 1941, des identifications sont faites, et de rares objets personnels rendus aux familles. Commence alors une monstrueuse polémique qui prend d'abord la forme, pendant toute la guerre, d'une campagne de propagande organisée par les nazis, accusant les officiers juifs de l'Armée rouge du forfait.

 

Des revolvers de marque allemande

 

À cette accusation répondra, pendant 50 ans, un déni total de responsabilité de la part de Moscou. Les communistes non seulement nient toute implication, mais appliquent leur tactique habituelle de l'amalgame, un terrorisme intellectuel très efficace, surtout à la fin de la guerre : ceux qui mettent en doute la thèse soviétique sont des pro-nazis. Au point qu'en 1944, Roosevelt refusera les conclusions d'une commission d'enquête défavorable aux Russes. Les Anglais feront de même après un rapport de leur ambassadeur auprès des Polonais qui aboutissait à la même conclusion. Même la Croix-Rouge refusera de rendre publique l'enquête qui lui a été remise par ses services précisant les responsabilités soviétiques du massacre. En dépit des protestations des Polonais libres - les autres sont devenus un satellite de l'URSS -, Katyn va être catalogué pendant toute la guerre froide comme "une tentative sans importance (sic) des Allemands pour retarder leur défaite".

 

Il faudra attendre Gorbatchev et la glasnost, vraie déstalinisation, pour qu'à la suite des travaux d'une historienne soviétique, l'URSS reconnaisse, en 1990, la responsabilité de sa police secrète dans la tuerie organisée par le chef du NKVD, Lavrenti Beria. Deux ans plus tard, Boris Eltsine, nouveau président russe, remet à Lech Walesa, président de la République polonaise, plusieurs documents émanant du comité central, dont l'ordre d'exécution des officiers polonais.

 

Dans ces archives, une note montre à elle seule le cynisme et la duplicité des communistes soviétiques : elle indique que les exécutions doivent être accomplies avec des revolvers Walther, de marque allemande, et des munitions allemandes, elles aussi, saisies en Estonie que l'URSS vient d'annexer. Dès 1940, alors qu'il était encore son allié, Staline avait donc monté une opération destinée à faire croire à la responsabilité de son compère Hitler dans les atrocités de Katyn.

Partager cet article
Repost0

  • : Le blog de JACQUES BERTHOMEAU
  • : Espace d'échanges sur le monde de la vigne et du vin
  • Contact

www.berthomeau.com

 

Vin & Co ...  en bonne compagnie et en toute Liberté pour l'extension du domaine du vin ... 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

Articles Récents