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10 novembre 2012 6 10 /11 /novembre /2012 00:09

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L’AFP indique dans une dépêche « que le distributeur en ligne Amazon a lancé jeudi un service de vente de vin en ligne, limité pour l'instant à une partie des États-Unis mais susceptible de bouleverser le système de distribution très réglementé dans ce pays.


Le service permet actuellement, pour des frais d'envoi uniques de 9,99 dollars, de se faire livrer jusqu'à 6 bouteilles dans 13 États américains, avec "davantage à venir bientôt", promet Amazon dans un communiqué. Le groupe dit proposer sur sa plate-forme www.amazon.com/wine plus d'un millier de vins provenant de divers vignobles américains. »


Le groupe précise que sa plate-forme propose plus d’un millier de vins provenant de divers vignobles américains. Mais Amazon.com permet aussi d'accéder à des vins d'autres pays par l'intermédiaire d'autres vendeurs. Des vins en majorité européens (France, Italie, Espagne, Portugal, Allemagne, Autriche) ou sud-américains (Argentine, Chili), mais aussi australiens, sud-africains et japonais. Voir le communiqué de presse link 


«Que ce soit pour aider les consommateurs à trouver leur cépage préféré, faire des achats pour les fêtes ou agrandir leur cave avec une bouteille spéciale, nous fournissons les outils et l'information nécessaire pour les guider jusqu'au vin parfait», indique dans le communiqué Peter Faricy, vice-président responsable des plates-formes de vente d'Amazon.


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Il est possible de faire son choix en fonction du prix des bouteilles, de leur origine, du cépage ou encore l'arôme dominant. Amazon délivre également des conseils sur les mets qui se marient le mieux avec la bouteille choisie.


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Affaire à suivre de près donc car Amazon avait déjà fait une tentative d'incursion dans le monde des vins. En 1999, la société américaine avait acheté 45% de Wineshopper.com pour 30 millions de dollars. Cet essai s'était soldé par un échec, de nombreuses restrictions étant imposées par certains états américains à la distribution de vin en ligne. En 2000, le site avait finalement été racheté par son concurrent Wine.com. Les projets d'Amazon dans le vin 100 fois évoqués depuis plusieurs années n'avaient jusqu'ici débouché sur rien de concret, pour de multiples raisons mais principalement du fait des restrictions à la vente d'alcool dans le pays. Le système de distribution du vin aux États-Unis, hérité de la prohibition, repose sur une série d'intermédiaires (importateurs, grossistes), ce qui contribue à renchérir le prix final payé par les consommateurs. En outre, chaque État a ses propres réglementations, et certains interdisent les achats de vin par correspondance.


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9 novembre 2012 5 09 /11 /novembre /2012 14:00

Il n’y a pas que le vin dans ma vie. Souvent j’ai vu certains sourire lorsque je m’échinais à tenter de capter l’attention sur mes histoires laitières. Tu nous gonfle Berthomeau ce n’est pas parce que tu fais le médiateur dans le terroir profond que les questions que tu soulèves sont importantes. Soigne ton ego Berthomeau… » Ben oui, et voilà que l’actualité claque le bec

La nouvelle est tombée hier matin au comité central d’entreprise extraordinaire à Paris : Candia envisage de fermer trois sites, dont celui du Lude (Sarthe), qui emploie 190 salariés. La fermeture serait programmée en 2014. Un comité d’entreprise doit se tenir au Lude vendredi 9 novembre. Les deux autres sites, Saint-Yorre (Allier) et Vienne (Isère), seraient concernés par la fermeture. 313 postes sont menacés au total. Pour les non-initiés Candia est la propriété du groupe coopératif SODIAAL qui a cédé le contrôle de sa marque Yoplait au groupe américain General Mills 51% de Yoplait dont 50% par le Fonds PAI de Paribas pour un prix de 800 millions d’euros. Sodiaal, qui a repris Entremont, emploie près de 7.000 salariés en France et travaille avec plus de 12.000 producteurs de lait auprès desquels il récupère le lait pour le transformer.

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Le groupe Sodiaal a donc programmé «le regroupement de la production de la société Candia sur cinq sites de conditionnement de lait de consommation à l'horizon 2014, au lieu de huit actuellement», afin «de renforcer» l'entreprise dans le secteur du lait de consommation qui «voit, année après année, sa compétitivité se dégrader face à la concurrence européenne».


Le Lude c’est dans la Sarthe. C’est le pays de mon amie Magot avec qui je déjeune aujourd’hui, étrange coïncidence. J’y suis allé un dimanche à la foire aux plantes qui se tenait sur les pelouses du château. En arrivant au Lude, en contre-bas, sur les bords du Loir, j’ai vu cette usine enclavée dans l’agglomération. Elle est là depuis 1910 je crois. Rude coup pour cette petite ville mais, sans vouloir jouer les oracles, c’est ce que j’ai pensé sur le moment : c’était inscrit dans ce que j’observais au cours de ma mission. La concentration des outils, liée à la concurrence sauvage induite par la Grande Distribution, condamnait cette usine en ce lieu si paisible et si champêtre.


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Pour Gervais Bergeot, secrétaire du syndicat CFDT agroalimentaire de la Sarthe, «C’est un coup très dur. 180 licenciements sur un territoire où l’emploi souffre beaucoup depuis des années… Le reclassement des salariés va être très compliqué. L’usine est enclavée en ville, en bord de Loir. On voit mal comment on pourrait y implanter une nouvelle activité. Le seul point positif, c’est qu’on a un peu de temps, jusqu’en 2014, pour travailler au reclassement des salariés. On pense notamment au bassin d’emploi de Sablé, où il y a Bel. Au niveau régional, la CFDT va contacter la personne en charge du redressement productif à la préfecture de Région, pour que l’État nous vienne en aide. »


Le second site qui va fermer ses portes je le connais aussi puisqu’il s’agit de celui de Vienne dans l’Isère dont mon Ministre, Louis Mermaz, était le maire. Il en était fier et vous vous doutez bien que nous surveillions à l’époque son devenir comme du lait sur le feu. Candia est implanté à Vienne depuis 1965. « On s'attendait à une restructuration, mais pas de cette ampleur » a confié à l'AFP Yvon Gérard, délégué syndical central CFDT chez Candia.

 

La filiale de Sodiaal subit de plein fouet les effets de la « guerre du lait " » en Europe. « Si notre chiffre d'affaires se maintient à 1,2 milliard d'euros, nos marges se réduisent alors que nous n'arrivons pas à répercuter la hausse des prix du carburant, des emballages et autres matières premières. Nous devrions être dans le rouge en 2012 » assure M. Vandoni DG de Candia.


« Depuis quelques années, la grande distribution fait appel à des laits produits hors de nos frontières, en particulier du lait allemand vendu sous marque distributeur (MDD), pour faire pression sur les prix ", explique M. Gérard délégué CFDT. « Celui d'une brique de lait UHT de base n'a quasiment pas bougé en une décennie à 55 ou 57 centimes », affirme M. Vandoni. Et, en début d'année 2012, sous la pression des concurrents, Candia a concédé une baisse de 12 % à 15 % du prix des laits vendus sous MDD (ils comptent pour 70 % du marché français).


Parmi ces agressifs rivaux, il y a le français Lactalis avec sa marque Lactel mais aussi l'allemand Muh. Ce dernier, qui a dégagé un chiffre d'affaires de 680 millions d'euros en 2011 et vient de fusionner avec le danois Arla Foods, s'est développé en vendant du lait UHT aux chaînes de hard-discompte allemandes comme Lidl ou Aldi. «  Nos plus grands sites produisent 300 millions de litres », explique M. Vandoni, alors que l'usine de Muh, à quelques encablures de la frontière luxembourgeoise, peut produire 1,4 milliard de litres par an. La capacité des sites de Villefranche et de Saint-Yorre, entrés dans le groupe Sodiaal il y a deux ou trois ans au gré de rachats successifs, sont respectivement de 15 millions et de 80 millions. Le site du Lude aurait, lui, pour désavantage de ne produire que des briques de lait et pas de bouteilles. » Nous gardons les sites "europerformants ». Nous voulons saturer les sites et assurer un équilibre géographique pour maintenir la collecte de lait, souligne encore M. Vandoni. Nous nous préparons à la fin des quotas laitiers prévus en 2015. La compétition sera alors encore renforcée. » (source Le Monde)

 

Le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll, élu de la Sarthe, va recevoir ce vendredi au Mans des représentants du personnel du site de Lude à l'issue d'un comité d'entreprise, pour apprécier l'ensemble du dossier et ensuite nous exprimerons la position que nous aurons défini ensemble », a déclaré à l'AFP le ministre délégué à l'Agroalimentaire, Guillaume Garot.

Ma réserve et mon devoir de réserve ne me permettent pas d’aller au-delà de ce pur constat mais  permettez-moi quand même de regretter que les petites voix qui tentent d’alerter ceux qui nous gouvernent, ceux d’avant comme ceux d’après, ne soient pas entendues. Ça ne changerait pas forcément le cours des choses mais ça permettrait d’anticiper, de prévenir les consommateurs que leur comportement d’achat « au moins cher du moins cher » est le vecteur le plus puissant de la destruction de leurs emplois.


La désindustrialisation de notre beau pays, et dans les IAA c’est patent, est intimement liée aux problèmes de sourcing des usines : coûts de collecte et taille des outils  et au comportement des consommateurs. La fin des quotas laitiers va bouleverser la carte laitière de ce pays. De plus les usines ça pue et ça pollue. Enfin, qui se soucie d’où vient sa brique de lait UHT ? Ce qui compte c’est le prix, ce qui peut se comprendre en ces temps de budgets serrés, et les prix cassés font des dégâts en bas justement. Arrêtons de chouiner ! Soyons un plus citoyens ! Désolé pour ceux qui ne boivent pas de lait, c’est mon cas, mais je suis un gros consommateur de fromages et de laitages que je fais moi-même avec bien sûr du lait. 

 

Et pendant ce temps-là « Comme toujours, F.M*. accueille chacun à l’entrée dela Villa d’Este, à la descente de la Maserati Gran Turismo qui nous a exfiltré de l’aéroport, le pilote (à ce niveau, ce n’est plus un chauffeur) a fait vite, mais on ne dit pas combien. En pleine forme, minci, bonne mine, M fait plaisir à voir, la bonne humeur est un cadeau. L’hélicoptère d’un participant se pose sur les pelouses, ce n’est même pas un vacarme, surtout pas une surprise. Le Riva d’un autre s’arrache du ponton avec quelques invités à bord, le gros bourdon du V8 américain s’estompe déjà… » Putain le Réservoir d’Idées va déborder même si pour l’heure c’est plutôt du kérosène qu’il y a dans le réservoir… Vive l’emprunte carbone mais quand on aime on ne s’attache pas à ce genre de détail si mesquin. Au fait, est-ce que l’un des participants ne serait-il pas venu en montgolfière ? Amen…

 

* Il ne s'agit pas de François Mitterrand bien sûr

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9 novembre 2012 5 09 /11 /novembre /2012 00:09

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Lorsque j’entends certains cavistes déclarer qu’ils dispensent des cours d’œnologie à monsieur et madame tout le monde je sors ma sulfateuse et je dézingue : c’est ridicule. Pour autant je ne me sens nullement œnophile dans la mesure où l’exercice d’une dégustation professionnelle en tant qu’amateur de vin, au sens d’aimer le vin, ne me passionne guère. Ce positionnement, qui se révélait être un non-positionnement, faisait que jusqu’ici j’errais dans un no man’s land lexical qui permettait à certains d’ironiser sur ma capacité à chroniquer valablement sur le vin. Sans jouer les ramenards, afin de ne pas m’attirer les foudres des grands dégustateurs, je me gardais bien de faire remarquer que la plupart d’entre eux n’avaient acquis leur titre qu’à la force de leur plume sans jamais avoir eu à faire la preuve de la réalité de leur compétence affichée. Sauf peut-être, même si ce genre de sport m’interroge, les meilleurs sommeliers de… Pour l’œnologie il y a un diplôme : le DNO, pour l’œnophilie queue d’chi et c’est heureux.

   

Cette solitude incertaine du sans-papiers, d’apatride du vin, ne m’empêchait guère de dormir mais, comme le disait en son temps Mgr Marty, ça m’interrogeait. Trop de singularité nuit. Et puis j’ai ouvert le livre du grand œnologue Émile Peynaud, « Le Vin et les jours » qui, en homme sage, commence par écrire « il faut définir les mots tant que les pages sont blanches » et je suis tombé sur un mot qui me va bien : œnomane car il associe oeno tiré de oinos vin à μανία, mania « folie ». Bien sûr, les puristes de la langue vont m’objecter, que ça sonne comme manie, obsession, donc personnifie le gus ou la nana qui ne pense qu’à ça, ce qui n’est pas mon cas bien sûr. Je me vis œnomane comme je me sens mélomane avec l’opéra, au pur instinct de la passion amoureuse qui enflamme, vous fait basculer dans le plaisir, l’extase. L’amour ne s’intéresse pas aux détails, les ratiocineurs ceux qui décortiquent tout pour prétendre ensuite aimer  ne sont que des calculateurs, de simples comptables de leurs sentiments. Dieu qu’ils sont souvent pédants, chiants, ennuyeux et parfois même arrogants ces poseurs de mots sur tout vin y compris. L’amour se prête mal au discours, il est du domaine de l’intime, du ressenti intérieur, point trop n’en faut dans l’affichage. Et puis, une passion peut toujours en cacher une autre ou même beaucoup d’autres, le grain de folie peut se nicher dans les multiples pans de notre vie. La passion unique c’est comme la pensée unique, une forme d’enfermement qui fait que très vite on tourne en rond dans son pré-carré et le risque est grand de devenir chèvre.


Bien sûr, loin de moi l’idée de contester à qui que ce soit la liberté de s’exprimer, d’écrire sur le vin, de parler du vin, ce que je fais quotidiennement, mais lorsque l’on se risque à écrire ou à causer du vin de quelqu’un, là, c’est une autre histoire et que ça se complique. Le monde du vin dans toutes ses composantes s’est forgé un langage commun et c’est heureux (voir ICI link) mais pour autant son utilisation exclusive en direction de ceux qui ne cherchent pas à mettre des mots sur leurs émotions, simples buveurs en quête de plaisir pour qui le vin est un ami de passage accompagnant leur repas ou leur conversation sur le terrasse d’un café, n’est pas de bonne politique. Même si je rabâche, mais mes vieux professeurs m’ont appris qu’il faut savoir pour enfoncer un clou lui frapper régulièrement sur la tête, l’enjeu est d’importance car la transmission, jusqu’alors familiale, des codes du vin, passe par d’autres canaux dont bien évidemment ceux de la Toile, ses blogs, ses réseaux sociaux. Nos communicants du vin, n’étant pas de grands inventifs, se contentent de décliner de longs tunnels, sur la cuvée ceci ou le millésime cela, qui font grands plaisirs à leurs commanditaires mais qui tombent des mains des pékins.


En me déclarant comme œnomane au Grand fichier des Écrivins je me place dans la position de celui qui dit aux gens du vin, un peu au nom de ceux qui se contentent d’ aimer le vin tout simplement, sans pour autant être leur porte-parole, soyez tous des POUDOU ICI link, donnez nous envie, les vins, les vôtres ou ceux que vous aimez pour les avoir dégustés et appréciés, nous parlerons tout seul dans notre langage, tenez-vous prêts tout de même à répondre à nos questions, même les plus stupides, à nous éclairer, mais de grâce ne nous prenez pas trop la tête avec la géologie,  les tables de tri en gants blancs et la cuisine des barriques, vos références et tout votre saint-frusquin. Ce qui est pénible, pour celles et ceux qui, comme moi, c’est de n’entendre parler que de ça. Quand je sors écouter Ernani de Verdi je n’ai nul besoin que l’on me raconte sa vie, son œuvre et pire encore, d’entendre un Alain Duault pérorer sur la tessiture de la cantatrice. Les musicologues sont chiants. Ma plaidoirie pour l’œnomanie est celle d’un tendre amoureux du vin qui n’a nulle envie que  des grands prêtres ou même des fées tiennent la chandelle au-dessus de ses ébats.

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Dictionnaire du diable d’Ambrose Bierce. Définition de connaisseur qui pourrait illustrer ce billet: « Connaisseur n. Spécialiste qui sait tout à propos d'une chose et rien à propos de tout le reste. »

 Un vieil amateur de vin avait été sérieusement blessé lors d'une collision ferroviaire, un peu de vin lui fut donné à boire pour le ranimer. « Pauillac 1873, » murmura-t-il dans son dernier soupir. Merci Olivier.


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4 novembre 2012 7 04 /11 /novembre /2012 00:09

Pour se réjouir l’âme et le cœur y’a pas que le vin dans la vie y’a aussi le lit, la lie aussi et l’hallali aurait surenchéri Pierre Dac, et c’est ainsi que votre Taulier a décidé d’explorer ce nouvel espace, qui devrait être de liberté, même si pour beaucoup de prédateurs c’est celui du repos du guerrier. Le Repos du guerrier c’est un roman de Christiane Rochefort paru en 1958. Il reçut le Prix de la Nouvelle Vague. Roger Vadim en fit un film en 1962 avec Brigitte Bardot et Robert Hossein.


Le lit j’y lis, j’y dors aussi, mais je n’aime pas y prendre mon petit déjeuner, y flemmarder au petit matin : oui mais il me faut un lieu qui s’y prête, pas chez moi, dans une chambre d’hôtel fenêtre grande ouverte face à la mer alors que point l’aurore. Le lit la nuit, le jour pour faire l’amour c’est un terrain de jeu parmi bien d’autres, ceux qui peuplent les phantasmes, le plus souvent masculins, les portes cochères, le bureau : maudit soit l’open space, la table de la cuisine, la baignoire, ou en hommage à Sylvia Christel : la première classe en avion et bien sûr les hôtels borgnes pour le 5 à 7. Amours légitimes, illégitimes, qu’importe, le lit est une plaine pour les envolées extatiques, l’extase et l’épectase, les orgasmes bruyants, les mots crus, les mots doux, les confidences sur l’oreiller post petite mort, lorsque le corps exulte les humains se font la guerre en dentelles : les dessous chics effleurent la peau des femmes que pour être admirés et ôtés, et comme le proclamaient les hippies « faire l’amour, pas la guerre… »


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Reste que « mourir dans son lit… » est considéré comme banal, sans grandeur, mesquin presque, alors que mourir à la guerre ou en escaladant le Mont-Blanc ou en chassant le lion d’Afrique serait plus glorieux. Bien sûr il y a le cas d’école du président Félix Faure décédé dans l'exercice de ses fonctions le 16 février 1899, dans les bras d'une admiratrice, une demi-mondaine dénommée Marguerite Steinheil, épouse d'un peintre en vogue. Le Président, faute de Viagra, avait l'habitude d'absorber une dragée à base de phosphure de zinc avant de recevoir ses « amies »  afin d'exciter sa virilité défaillante, mais avait aussi pour effet secondaire de bloquer la circulation rénale. Ceci lui fut fatal. L’anecdote la plus célèbre raconte que « les domestiques prévenues de « l'accident » avaient transporté le président inconscient dans son lit. Le curé de l'église voisine de la Madeleine, appelé alors en urgence, demanda en arrivant : le président a-t-il toujours sa connaissance ? Non, on l'a faite sortir par derrière, s'entendit-il répondre. » C'est de là, bien sûr, que Clemenceau tira sa fameuse répartie « Il a voulu vivre César et il est mort Pompée ». La belle, quant à elle, gagna comme surnom celui de « pompe funèbre ».


Mais le lit est bien sûr fait pour dormir : » nous passons en moyenne vingt-quatre ans à dormir, « ce qui représente, pour les couples, la plus longue période passée ensemble », note le professeur Damien Léger de l'Hôtel-Dieu à Paris. Ce spécialiste du sommeil reconnaît voir « très régulièrement des personnes qui ont du mal à dormir à deux, mais qui n'osent pas l'avouer » Vive les ronfleurs !


Dormir à deux nous le devons à notre sainte mère l’Eglise qui « a sacralisé la conjugalité et le lit pour lutter contre le paganisme et maîtriser la société et sa reproduction », précise l'ethnologue parisien Pascal Dibie, auteur d'Ethnologie de la chambre à coucher (Métaillé, 2000). Voir aussi « Le lit conjugal est latin et catholique » . Michelle Perrot, historienne.link

 

Laure Bellot dans son article du Monde « Pour une vie de couple épanouie au lit, le confort compte : un matelas de 160 cm vaut mieux que le classique 140, selon les spécialistes du sommeil » enfonce le clou « N'en déplaise à l'Eglise, dormir à deux est un acte récent pour notre espèce, et qui n'a rien de naturel. Jugez plutôt : nous faisons en moyenne quarante mouvements chaque nuit, " mais cela peut facilement aller jusqu'à soixante ", précise M. Léger. Nous sommes, comme de nombreux mammifères (singes, cochons, chiens, chats), des ronfleurs (un homme sur trois, une femme sur six). Et pour pimenter le tout, les générations ne cessent de grandir et de grossir (en trente ans, plus 2 cm et 2 kg pour les femmes, plus 5 cm et 5 kg pour les hommes). Ce changement morphologique accentue le ronflement... et quatre Français sur dix déclarent souffrir de troubles du sommeil, selon l'Institut national du sommeil et de la vigilance.


Les Français ne détiennent pas seulement le record mondial de consommation d'anxiolytiques, ils utilisent, avec leurs voisins espagnols, les lits à deux places les plus étroits du monde occidental (135 centimètres de large en Espagne, 170 en Italie). Pour rappel, les 140 centimètres français représentent deux carrures et quelques d'un homme bien charpenté. »


Foin des détails d’intendance sur les mensurations du lit ce qui compte c’est que « Les femmes ont un sommeil plus reposant sans leur partenaire, alors que les hommes ont un sommeil plus doux quand ils dorment avec leur compagne », expliquent les auteurs de Ein Bett für zwei (un lit pour deux, Herbig Verlag, 2008, non traduit).


« Les femmes, par exemple, semblent subir le lit à deux, mais ne veulent pas laisser leur place, arguant que cela rassure leurs compagnons », notent-ils. « La culture est le plus grand ennemi du sommeil, lance John Dittami. Dans chaque pays, cette culture nous dicte quand et comment il faut dormir. Alors qu'on dort bien quand on fait ce que l'on veut.

D'une traite, en petites siestes, seul, en groupe...


Lure Bellot souligne : En bons Autrichiens, ces deux chercheurs ont choisi, pour leurs couples respectifs, des lits jumeaux avec chacun sa couette : La grande couette commune est un désastre. Chacun dans le lit veut la tirer à lui. C'est une source de tension énorme que nous avons mesurée. »


Ah, la couette ?

 

« une aberration due à... Ikea » tempête Pascal Dibie pour lui «  La France appartient aux sociétés dites « bordées » qui vont jusqu'à l'Egypte. Dans ces pays, traditionnellement dépendants de la culture du lin, on dort habillé et sur le dos, bordé d'un drap et de couvertures, dans des chambres non chauffées. » Une habitude opposée à celle des pays nordiques « Du nord de la France à la Scandinavie, la domestication des canards eiders a créé des sociétés à couettes. Les gens dorment nus, lovés en chien de fusil dans des couettes personnelles, même s'ils dorment côte à côte. Et les chambres sont chauffées. »


Laure Bellot de conclure que « le typique lit à deux en largeur 140 utilisé avec mono couette et pyjama est donc un ovni français générateur de stress dont, estime M. Dibie, « on ne nous a pas vendu le mode d'emploi »

.

Moi qui ai horreur de la typicité, je ne suis pas dans la norme, j’ai opté pour le confort d’un lit suisse, double couchage 200x80 motorisé (c’est excellent pour lire ou se relaxer) avec grande couette car j’ai horreur d’être compressé, je suis suffisamment con, j’aime le côté léger de la plume de canard et j’ignore jusqu’à l’existence du pyjama : nu l’été et tee-shirt l’hiver. Le petit matériel a besoin de cet espace de liberté pour se détendre et s’exprimer.


« Nous séparons notre sommeil de notre désir », déclaraient en 2009 un couple de paysans âgés suisses qui venait de décider de faire chambre à part et cela, émouvait famille, village et même pays. Je signe des deux mains et j’ajoute que parfois, à la Montaigne « J'aime à coucher dur et seul, voire sans femme, à la royale, un peu bien couvert. »

 

Aux marches du Palais Guy Béart link


 

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3 novembre 2012 6 03 /11 /novembre /2012 12:00

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Au Bourg-Pailler, là où je suis né et j’ai vécu jusqu’à l’âge de 16 ans, nous n’avions pas de poubelles. Les épluchures, les restes allaient aux animaux de la basse-cour, aux cochons et ce qui n’était pas comestible jeté sur le tas de fumier. Le clan des femmes veillait au grain : ne jamais jeter le pain qui était béni par la croix tracée, même par les hommes, à la pointe du couteau, avant de l’entamer.  Les emballages se résumaient au papier journal ou à des pochons de papier kraft, le beurre était enveloppé de papier sulfurisé et la viande du boucher dans de grande feuille avec son nom dessus. Nulle trace de plastique tout était transporté dans nos paniers. Autre temps, autre mœurs, nous étions à la campagne et l’essentiel de notre nourriture était proche de nous. Nous étions des locavores avant l’heure.


Pour autant nous n’étions pas très conscient de l’environnement, guère écologiste au sens moderne, mais nous vivions dans une forme d’harmonie respectueuse d’une nature souvent dure mais nourricière. Ne voyez pas dans mes propos une quelconque trace de nostalgie ou de « que c’était mieux avant » car étant un urbain soumis à un approvisionnement largement exogène je fais comme tout le monde j’achète au mieux ce qui m’est proposé. Pour autant je fais mes courses avec un panier, je fais la chasse aux poches plastiques et aux suremballages et j’ai horreur de jeter. Les DLC sont certes utiles, surtout sur des produits à risque comme le steak haché, mais elles sont calculées avec une marge qui pousse certains consommateurs à balancer le produit à la poubelle alors qu’il est encore parfaitement comestible. Le principe de précaution poussé jusqu’à ce stade déresponsabilise le consommateur et est source d’un énorme gâchis. D’ailleurs, moi qui suis cycliste je peux constater, à l’heure où les supermarchés poussent leurs poubelles au-dehors, leur visite par une population « normale » loin du cliché du clodo cherchant sa pitance.


S’ajoute, pour les fruits et légumes, la religion de la belle apparence encadrée par une normalisation stupide. Sus aux pommes mal foutues, aux carottes tordues, à la grenaille de patates… Tout doit être rond et lisse, récuré et maintenant en sachet pour ne pas avoir à être trié, épluché et lavé. Bien évidemment toutes ces opérations ne sont pas le fait de petites mains mais d’opérations où la chimie joue un rôle majeur. Le temps, le temps, pas le temps ou souvent ne pas prendre ce temps pour privilégier un mode de vie avachi devant sa télé, les consoles de jeu ou Face de Bouc. Nous gaspillons donc allègrement tout en nous émouvant des files nocturnes de distribution de repas des Restos du Cœur et, donnons une fois l’an à la Banque Alimentaire un paquet de pâtes et une boite de haricots verts, et plus simple encore un chèque glissé dans une enveloppe.


Nulle posture morale de ma part mais pur constat qui devrait nous amener à réfléchir un chouïa avant de tout réclamer à nos pouvoirs publics impécunieux et donc de plus en plus fauchés. « D'après l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), les dépenses incompressibles des Français ont fortement augmenté entre 2001 et 2006. Elles sont passées de 50 % à 70 % pour les 20 % des ménages aux revenus les plus bas. Leurs dépenses de logement atteignent 44 %, contre 31 % cinq ans plus tôt. La précarité énergétique, liée à la hausse des factures de chauffage, augmente au rythme de la montée des prix du gaz ou de l'électricité. En province, la mobilité en voiture est touchée par les cours du pétrole. La montée de ces dépenses contraintes fait baisser de fait le pouvoir d'achat des dépenses non contraintes, c'est-à-dire le plus gros du marché de la grande consommation.

Le nombre de consommateurs sous contrainte de pouvoir d'achat est donc en forte augmentation, les plus démunis coupant dans leurs dépenses de santé ou d'alimentation. On retrouve le « marché de la pauvreté » des années 1990. Il concernerait aujourd'hui près de 50 % des Français et renvoie à trois grandes pratiques de consommation économe, comme l'ont observé les enquêtes réalisées à l'échelle des familles. » constate Dans une tribune du Monde « Du consommateur malin au consommateur contraint » Dominique Desjeux anthropologue, professeur à l'université Sorbonne René-Descartes, directeur du diplôme doctoral professionnel en sciences sociales, et membre de l'Observatoire de la consommation. Il est coauteur, avec Fabrice Clochard, de Le Consommateur malin face à la crise, entre cadrage et marge de manœuvre, (L'Harmattan).


Guillaume Garot profitant de l'ouverture du Salon international de l'agroalimentaire (Sial), la grand-messe de la consommation de masse, Guillaume Garot, ministre délégué chargé du secteur, a donc annoncé la mise en place d'un plan d'action visant à réduire de moitié le gaspillage alimentaire d'ici à 2025. Légumes abîmés, yaourts périmés, assiette entamée des cantines ou pain des restaurants «Chaque Français jette de 20 à 30 kilos de nourriture par an. Ce gaspillage représente environ 400 euros pour une famille de quatre personnes, autant d'argent jeté par la fenêtre ou à la poubelle. Consommateurs et industriels, «tout le monde» est concerné.


Le site du Ministère de l’Agriculture et de l’Agro-alimentaire répond à la question : Qui gaspille le plus ?


« Ce ne sont pas forcément ceux que l’on croit ! Contrairement aux idées reçues, les restaurants traditionnels perdent et gaspillent beaucoup plus que les cantines, au sein desquelles existent de fortes disparités.


- la restauration commerciale : si la restauration rapide est peu concernée par le gaspillage alimentaire, les restaurants traditionnels et gastronomiques ont les plus grosses pertes, avec 230 grammes de denrées perdues ou gaspillées par personne et par repas. En cause : la difficulté à estimer les commandes en amont et à gérer les stocks, les minima de commandes imposés par certains fournisseurs, les règles strictes de sécurité sanitaire et les manières de cuisiner (déchets).


- la restauration collective (167 grammes par repas et par personne) : les plus grosses pertes se situent chez les patients en court séjour à l’hôpital. La restauration collective des établissements de santé et médico-sociaux est confrontée à différentes difficultés, notamment : la grande variété des profils nutritionnels à satisfaire (souvent une trentaine de profils différents),  le peu de temps pour se restaurer, la présentation et la qualité des plats les difficultés des patients pour se nourrir.


Côté restauration scolaire, les meilleurs élèves sont les écoles primaires. Au collège et au lycée, on surévalue souvent les quantités à préparer, et on peine à satisfaire des convives aux préférences variées et qui manquent souvent de temps pour déjeuner. Enfin, et contrairement à ce que l’on pourrait penser, les restaurants d’entreprise gaspillent peu (125g par personne et par repas).


La différence entre la restauration et de la distribution alimentaire rend difficile les comparaisons entre ces deux métiers. L’étude révèle que dans la grande distribution, l’importance du gaspillage est directement corrélée à celle du chiffre d’affaires et du nombre de salariés (moyenne : 197 tonnes / établissement /an). Les métiers de bouche gaspillent quant à eux 2,6 tonnes par établissement et par an.


Manger un acte citoyen ? « Manger, c’est accomplir quelque chose qui a du sens, participer à un projet citoyen. » Comme l’affirmais récemment le New York Times « l’alimentation peut changer le monde » Comme l’écrit avec une pointe d’ironie Corinne Maier « La nourriture, une idée neuve en Europe ? » et de noter que « le nombre d’émissions, de blogs et de télés consacrés à la jubilation du goût est phénoménal. Masterchef, La cuisine express de Jamie Oliver, l’école des chefs, Affaire de goûts, Suivez le chef, Escapade gourmande… » et de lancer « Après la Révolution sexuelle des années 1970, voilà la révolution gustative des années 2000 » Le dernier avatar de ce déluge, qui me permet de faire le lien avec ce qui précède, nous vient d’Angleterre avec l’incroyable émission TV « Great British Waste Menu » où des grands chefs ont pour mission de réaliser des plats dignes d’un grand restaurant avec des détritus… disons des produits récupérés dans les poubelles… Peut-être que les Français auront droit à cette émission puisque Christophe Dechavanne, jamais en reste d’une pitrerie pour remonter à la surface, aurait acheté les droits. Mais comme l’explique  Angela Hartnett, à la tête d’un établissement londonien réputé et l’une des quatre professionnels de la version originale, son objectif est louable : « Tout le monde veut des carottes, des pommes ou des oranges parfaites. Mais cela n’a aucun rapport avec le goût. Ce qui compte, c’est la saveur du légume. La génération d’après-guerre n’aurait jamais rien gâché »

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En guise de conclusion bien provisoire je rebondis sur notre chef anglaise via la célèbre formule de Guy Roux (parrain auxiliaire de la vente des Hospices de Beaune cette année)  « Faut pas gâcher… » appliqué par un blog  au vert des blettes «Autant il y a des légumes qui sont de vrais plats de pauvres, comme les artichauts (« Les artichauts, c’est un vrai plat de pauvres. C’est le seul plat que quand t’as fini de manger, t’en as plus dans ton assiette que quand t’as commencé ! »dixit Coluche), que y’en a d’autres qu’on dirait réservé aux riches, comme les petits pois ou les blettes. Quand tu vois le prix affiché au kilo, et ce qu’il te reste dans l’assiette une fois préparés et cuits, ça fait un peu mal au crapaud (NDLR: nom argotique d’un porte-monnaie. Pas mal vu, hein ?). » Suite ICI link


« Le domaine Philippe Girard a reçu vendredi dernier Guy Roux, venu voir ses nouvelles vignes fraîchement vendangées, dans la commune de Savigny-lès-Beaune. Souriant, détendu, l’ancien entraîneur d’Auxerre a goûté le raisin tout en racontant l’histoire de la colline, où se trouvait une léproserie aujourd’hui détruite.

L’histoire, Guy Roux l’aime avec passion. Au moins autant que le vin et le football. Il y a du monde pour l’écouter distiller ses anecdotes : la famille Girard – c’est avec Arnaud, le fils de Philippe, le propriétaire du domaine, qu’il a acheté les vignes et créé un groupement foncier agricole –, sa compagne, son amie Safia Otokoré, venue en coup de vent avec une délégation chilienne, et d’autres amis.

Après les vignes, la cave. La vinification de ses parcelles est en cours. Guy Roux se la fait expliquer, puis vient la traditionnelle dégustation, en petit comité. C’est là que la magie opère. L’ancien entraîneur reconverti consultant sportif est comme un jeune homme. Les questions fusent sur les millésimes, le vocabulaire, les climats. Guy Roux, l’œil rieur, prouve que sa Bourgogne, il l’aime tout entière. »


Tous droits réservés © Bourgogne-Vins.com


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2 novembre 2012 5 02 /11 /novembre /2012 14:00

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Quand je suis passé, place Denfert-Rochereau devant le panneau Decaux à vélo, en ce jour de la Toussaint doté d’un temps de Toussaint, j’ai balancé aller acheter un pot de chrysanthèmes pour le déposer à ses pieds. Moi qui me suis battu pour que nos fromages AOC retrouvent le chemin de l’authenticité j’étais atterré par ce je contemplais et me prenais l’envie d’enterrer mes dernières illusions sur les capacités des grands bouzins aspirateurs de CVO à comprendre le consommateur. Comme je n’aime pas les plantes en pots je me suis contenté de descendre de vélo pour prendre des photos.


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Franchement si nos penseurs des fromages maintenant AOP pensent c’est avec ce type de publicité générique moche et mal foutue, quasi-illisible et incompréhensible,  qu’ils vont attirer les consommateurs vers leurs fromages, ils se gourent. Il va m’être rétorqué que tout ça est fait sur la base de savantes études, de panels, de je ne sais quoi vendus par les agences de pub et que l’objectif principal est de porter à la connaissance du grand public le nouveau logo AOP. Je veux bien mais ce pédagogisme lourdingue ne me convainc guère. Pas sûr que les automobilistes qui filent vers l’avenue du Général Leclerc, à fond la caisse, soient en mesure de décrypter les lettres du logo : Appellation d’Origine Protégée ». Quant au slogan il faudra qu’on me le décrypte :


« ON VEUT DU VRAI, DU BON, DU GOÛT ! »


« UNISSONS-NOUS POUR LES FROMAGES AOP ! »


Mes vieux neurones ne connectent pas, atones, c’est mignard, incolore, inodore et sans saveur alors que l’on dit mobiliser les masses pour la défense de les fromages d’origine, qui puent, de notre beau pays. C’est minablement soft ! Y’a un côté politiquement correct qui m’exaspère. Un côté pub réaliste socialiste de la grande époque de l'URSS ou étant donné le code couleur les campganes de Mao au temps des 100 fleurs. Une manif c’est une manif, ça revendique dur. Peut-être que la pub s’adresse aux gamins et il ne faut pas leur donner de mauvaises idées mais je ne suis pas sûr qu’elle les accroche avec ses petits bonshommes avec leurs petites pancartes et des plateaux de fromages qu’ont des tronches aseptisées. C’est propre sur soi mais ça a vraiment la gueule d’une campagne menée sur la base d’un truc mou, vaguement consensuel.


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Vous devriez demander à MEL de vous conseiller, lui qui adore vous plumer, il est bon en communication, c'est un expert, et il sait même détourner les slogans de 1968 où manifester c'était notre tasse de thé...


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Donc, en tant que gros consommateur de fromages AOP, des vrais, des authentiques, des bons, des qui ont du goût – ce qui malheureusement pas le cas de tous – que j’achète chez des fromagers affineurs : Alleosse et Quatrehomme, je m’octroie le droit d’attribuer au CNIEL et à la CNAOL le prix de l’affiche la plus ringarde et du slogan le plus tarte pour 2012.


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Peut-être que je pourrais demander à José Bové, ex-chantre des brebis Lacaune dont le lait fait le Roquefort, de le remettre en mains propres ça mettrait de l’ambiance à la maison du lait. Le Taulier  s’engage à fournir le jaja AOP pour le Vin d’Honneur…

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1 novembre 2012 4 01 /11 /novembre /2012 08:00

La semaine passée fut agitée, échevelée, et sans emphase je peux dire qu’elle a fait du mal à ma Vendée, à celle de mes origines, de mes valeurs. Comme l’aurait dit ma mémé Marie : « l’a pas de honte… » si vous voyez de qui je veux parler. La présente, coupée en deux par la Toussaint,  frisquette m’a plus encore fait douter de mes engagements, de ce dont je rêvais pour notre foutu pays au vu de l’incapacité de nos politiques à gouverner ce pays fourbu, pessimiste et râleur : entre la grande gueule de Mélanchon qui traite des grands patrons « d’incapables » et un Copé en appelant à la rue comme un vulgaire ligueur de février 34, face à un gouvernement qui ne comprend pas que c’est le moment d’en appeler à nos responsabilités, je me suis mis à  rêver à mon père sur la fin de sa vie qui appelait de ses vœux une France résolument social-démocrate, loin des extrêmes flattant nos éternelles insatisfactions, des protestataires qui ne savent que dire non.  L’équilibre, ce vieil équilibre dont parle François Bon dans un très beau texte tiré de son dernier livre « Autobiographie des objets » Je souhaite vous le faire partager. Vraiment, si vous avez envie de mieux connaître le fond de votre Taulier, ce qui l’a fabriqué, lisez-le ! Un petit mot au taulier lui ferait bien plaisir mais c’est comme vous voulez…


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Mais qui donc est François Bon ?


« François Bon est né en Vendée en 1953. Après des études d’ingénieur en mécanique à l'École Nationale Supérieure d'Arts et Métiers, il se spécialise dans la soudure par faisceau d’électrons. Ce métier l’amène à travailler plusieurs années dans l’industrie aérospatiale et nucléaire, notamment en France et à l’étranger. Il poursuit ensuite ses études, de 1980 à 1982, en philosophie. Cet auteur prolifique publie en septembre 1982, aux éditions de Minuit, son premier roman intitulé Sortie d'usine. Il décide alors de se consacrer entièrement à la littérature et son corpus très varié compte plus de trente œuvres  dont plusieurs romans, récits, poèmes en prose et romans pour adolescents. Il enseigne ensuite à l’Université de Bordeaux et à l’École nationale supérieure des Beaux-Arts à Paris. Parallèlement à son travail d’écriture, il se spécialise depuis 1992 dans des ateliers d’écriture auprès de gens en difficulté sociale. En 2001, il fonde le site de littérature remue.net. »


C’est donc un gars de mon pays, du Marais Poitevin, il a passé son enfance et son adolescence à Saint-Michel-en-l ‘Herm en Vendée, puis à Civray dans la Vienne. Son père était mécanicien et sa mère institutrice.


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La caisse à grenouilles


« On ne vivait pas dans des espaces limités. Il y avait des granges, des buanderies, et à Damvix le fenil.


Les outils n’y étaient pas forcément rangés, mais on savait où les retrouver. Chaque fonction avait son outils, quand bien même on ne l’utilisait qu’une fois l’an : il y a un nom pour cette gouge dont on glisse la lame sous la terre pour casser l’asperge au plus profond de la butte sableuse.


Les yeux fermés, à tant d’années de distance, il me suffit de me projeter en pensée dans le fenil pour que soulever le bâti de bois de la caisse à grenouilles, avec les deux grillages à maille fine sur le côté et la trappe à ressort sur le dessus, redevienne possible.


Ensuite on est dans la barque, côté conches, celui qui est à l’arrière pigouille lentement sur l’eau recouverte de lentilles, et sur la planche du plat-bord avant, côte à côte, on s’allonge avec l’appui sur la poitrine, les deux mains en avant le plus loin possible, effleurant ce contact grumeleux de l’eau végétale.


Il existait un très vieil équilibre entre les ressources qu’offrait le marais et ceux qui en usaient – nous en étions les derniers témoins, mais n’aurions pu le savoir. Chaque maison avait sa barque, et le trémail pour la rivière. Les conches donnaient sur les jardins que chacun entretenait. On s’y perdait facilement, mais cette lenteur faisait de l’errance elle-même un prolongement des vieilles légendes d’ici, et chaque ruine ou chaque arbre avait une histoire. C’était bien longtemps avant qu’on draine les conches au tracteur, que le marais s’appauvrisse, hors le petit mouchoir de poche réservé au tourisme régional. Les grenouilles, les escargots, les nèfles : ces nourritures du peuple que Rabelais atteste déjà, trop méprisées pour qu’en soit interdit le libre ramassage, même sous le régime féodal.


Alors on repérait les yeux dorés, qui sont le seul signe par quoi on la reconnaît. Elle est là, verte, lourde, elle ne repère pas la masse géante qui la surplombe. On a brusquement refermé la main là où brillaient les yeux dors. On sent dans la paume que ça se gonfle et se crispe pour sauter, mais on tient bien. Le corps est gros comme la main qui le prend. On se redresse, la caisse à grenouilles est posée sur le fond de la barque, on la pousse par la trappe. Dans ces deux heures de l’immobilité chaude d’après-midi, en voilà quelques douzaines.


Je ne crois pas que ma grand-mère maternelle ait jamais témoigné d’une once de méchanceté envers quiconque, et cela jusqu’au terme de sa vie –une vie simple ( mais ce titre est déjà pris). Pourtant, dans un des encastrements  parmi les vieilles pierres du mur extérieur du fenil, un clou ancien, rouillé, énorme. C’est là qu’on pend les lapins, une ficelle accrochée aux deux pattes arrière : le sang égoutte en bas dans une cuvette, puis on arrache la peau tout net, ils émergent roses, devenus consommables. La peau on la sèche. Dans un autre coin on a la réserve de charbon, boulets et anthracite, et dans un carré pour accueillir tout ce qui pourra faire compost. On a un coin avec deux seaux de sable, non pour y jouer, mais parce que c’est le seul moyen de saisir des anguilles qu’une nasse fournit régulièrement – bien curieux de les voir s’agiter même après avoir été coupées en tronçons.


Il n’y avait pas de cruauté inhérente à ces modes d’organisation, où chacun disposait de ressources pour sa propre consommation. Mais lorsqu’on ramettait la caisse aux grenouilles à ma grand-mère, on préférait quand même ignorer, et regarder de très loin. Il lui fallait du temps. On revoyait les yeux dorés, la détente brusque du corps mou sous la paume qui serre. Elle, elle les prenait une à une, passant la main par la trappe, les appliquait sur un billot de gros bois, et tranchait au hachoir. Les longues pattes arrière épiautées dans une passoire, le reste dans une bassine en zinc.


Quand je repense à la caisse aux grenouilles (qui doit y être encore, il n’y a aucune raison que mon cousin Jean-Claude, propriétaire de la maison maintenant, ait rien touché au fenil de l’enfance), je ne sais pas bien ce qu’il faut y associer de la mécanisation agricole, qui a fait tant de mal au marais, polyculture à échelle familiale remplacée par des parcelles sans haies et drainées pour le maïs ou l’élevage. On trouve dans les étals des brochettes de cuisses de grenouilles, mais importées en général de Roumanie ou Hongrie : je n’en achète pas.


On ne faisait pas d’elles, les yeux dorés, un repas ordinaire : elles étaient fêtées par le plat préparé, la quantité respective distribuée à chacun. On remerciait l’animal et le marais, comme on faisiat pour un sandre ou un brochet livré par la rvière.


Restait la bassine en zinc. On sortait par le garage, on traversait la route, et en bas du pont on la vidait côté rivière, depuis l’autre embarcadère, celui de la barque de rivière, plus lourde, où il était encore fréquent, en ces temps, de croiser un agriculteur y convoyant des vaches, ou toute une famille en balade. La bassine vide, la masse inerte de chair batracienne coulait à vingt mètres d’où on les avait prises, mais dans une eau qui n’était pas la leur.


On en plaçait une partie dans les nasses : la semaine suivante, les anguilles et les écrevisses nécrophages feraient à leur tour le plat familial. »

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31 octobre 2012 3 31 /10 /octobre /2012 09:49

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« Avec la «monétisation», une partie de la blogosphère vit désormais dans l’ambiguïté. Depuis 2009, la publicité s’est invitée dans le contenu, les entreprises rémunérant les blogueurs pour tester leurs produits. Les billets sponsorisés, l’équivalent du bon vieux publi-reportage dans la presse, fleurissent sur la Toile. A la différence près que l’auteur du blog et celui du billet sponsorisé ne font qu’un. D’après Technorati, 30% des blogueurs professionnels y ont eu recours en 2011. «Je suis payé, mais je reste indépendant !» clame le blogueur pro outré que l’on remette en cause son intégrité. You to You a même inventé le concept de «billet indépendant sponsorisé» pour légitimer la pratique. » écrit dans Libération Michèle Foin dans son enquête « Les blogueurs sont de plus en plus courtisés et payés par les entreprises pour faire la promotion de produits, au risque de flirter avec l’illégalité et de perdre toute crédibilité. »


De là à crier : « tous pourris ! » il n’y aurait qu’un pas qu’il ne faut pas franchir allègrement car comme le souligne Naël Hamameh, directeur associé de You to You, une agence de communication interactive : « 99,9% des blogs n’attirent guère plus d’une centaine de visiteurs par mois.» En clair, si plusieurs millions de personnes tiennent aujourd’hui un blog en France, ceux qui peuvent intéresser les marques se comptent plutôt par centaines. Pour ces derniers, la mue vers la professionnalisation s’est faite très rapidement. »


Qu’une poignée d’opportunistes attirés  par la toute nouvelle provende se soient rués sur ce nouveau créneau ça n'a rien d'étonnant. Là où il y a de la confiture, des producteurs de confiture conscients de l’intérêt qu’ils ont à poser des appâts, il y a des candidats pour s’en goinfrer. Dans notre société de consommation basée sur la séduction l’irruption des blogueurs sur le Net c’est un nouveau média à utiliser, à dominer, à presser comme un nouveau citron au risque de lui faire perdre toute crédibilité. Qu’importe pour les produits de grande consommation à forte valeur d’image portée par des grandes marques carburant avec des budgets de promotion et de communication pharaoniques le rapport coût/bénéfice est bien évidemment à leur avantage.


Résultat : « à tel point que l’influence des blogueurs les plus connus en terme de prescription d’achat approche désormais celle des médias traditionnels. Selon l’enquête Technorati 2011 sur la blogosphère mondiale, 42% des consommateurs utilisent les blogs comme source d’information… et 30% achètent un produit sur la base des informations qu’ils y ont trouvées. »


« Or l’indépendance du blogueur, tout le monde a intérêt à ce que le lecteur continue à y croire : les blogueurs qui veulent conserver leur audience comme les marques qui préfèrent une recommandation éditoriale à une publicité. J’ai une audience ciblée, combien tu me paies pour la toucher ? »


« Le blogueur indépendant des premières heures aurait-t-il vendu son âme en se professionnalisant ? »


C’est une bonne question mais elle contient un biais de première importance : en quoi consiste la professionnalisation du blogueur ?


Si elle se traduit par une reprise à son compte par le blogueur des pratiques en vigueur dans le milieu d’une presse du type de celle décrite par Renaud Revel dans son blog à propos de l’affaire Lubot, alors la réponse est claire : le blogueur n’est plus qu’un haut-parleur, un simple passeur de plats au service de celui qui le paie. Même la mention «billet sponsorisé» ne change rien à l’affaire car elle est antinomique avec l’esprit d’une vraie chronique. Il est rare que l’on morde la main  qui vous nourrit.  On peut tout justifier mais il n’en reste pas moins vrai que la rémunération directe est un lien de suggestion qui entrave la liberté donc l’indépendance de ton.


Si, au contraire, elle marque un retour vers une pratique journalistique d’investigation, à un travail de recherche de sources d’information fiables, à la mise en perspective de sujets d’ordinaire présentés en noir et blanc, alors oui il y a là une réelle professionnalisation qui apporte à l’espace public une nouvelle respiration. La limite de cette façon de faire c’est que ce type de blog ne repose pas sur un modèle économique classique où le rédacteur est rémunéré comme un salarié ou comme un entrepreneur de services. Le blogueur indépendant doit vivre d’une autre activité sur laquelle il adosse son indépendance.


Pas simple mais tout à fait praticable à la condition d’être patient pour labourer, semer puis récolter les fruits de son indépendance et s’imposer à ceux qui veulent bénéficier de votre notoriété. On inverse ainsi l’ordre des facteurs et ça change la donne. Les gros blogs plus ou moins stipendiés n’étoufferont pas les petites voix, celles qui, certes, ont une part de bruit très faible mais qui peuvent, en certaines circonstances, se révéler de forts leviers d’influence. « Patience et longueur de temps… »


La marchandisation ne me dérange pas, elle m’indiffère car elle se situe dans un tout autre registre tel la pratique très lucrative qui consiste « à insérer dans ses billets des liens sponsorisés vers les sites où le lecteur pourra acheter les produits mis en avant. Le blogueur touche alors une commission, de 2% à 3% du prix de vente pour des produits techniques et jusqu’à 10% dans l’habillement, selon Zanox. Comment ça marche ? Les marques proposent des programmes de rémunération, via les plates-formes d’affiliation comme Zanox ou Netaffiliation. Le blogueur n’a plus qu’à piocher parmi les produits qui correspondent à son univers et insérer les liens sur son blog. »


Le mélange des genres n’a jamais fait bon ménage avec la déontologie : il est quasi-impossible d’endosser les habits de VRP d’un produit ou d’une marque en se présentant comme un chroniqueur indépendant et de garder sa crédibilité auprès de ses lecteurs. J’ai bien écrit lecteurs soit des êtres pourvus d’une intelligence minimale leur permettant de faire la différence entre un vendeur – profession honorable – et un chroniqueur révélant ses vrais coup de cœurs.


Et notre petit monde du vin dans tout ça, où se situe-t-il ? Tout d’abord point d’importance : le créneau est étroit et nos blogs sont bien modestes, donc notre pouvoir de prescription, tout comme celui de la presse spécialisée ou même des guides est aussi mince qu’un top-modèle anorexique cher à Karl Lagerfeld.  Pour autant nous ne sommes pas exonérés, hors-jeu, car nous faisons l’objet de sollicitations du même type que nos « confrères » gravitant dans la mode et les produits de luxe en général.


Comme je n’ai pas vocation à distribuer des bons et des mauvais points aux uns et aux autres et que je reste intimement persuadé que le temps fera son œuvre dans le foisonnement actuel, permettez-moi simplement de sourire, d’observer, tel un anthropologue, les mœurs de notre petit monde de blogueurs de vins ou de bonne chère, que pour l’heure celui-ci ne me semble pas receler beaucoup de futurs millionnaires. Elles ou ils sont plutôt jeunes, hormis certains qui se disent journalistes et qui tentent de se recycler, ils rament, ils se démènent, font des petits boulots. Je les croise, je les vois tenter de se faire une place au soleil et je trouve que la plupart d’entre-eux font de la belle ouvrage. Leur avenir, quel avenir ? Je ne sais mais, passé le temps des engagements radicaux ou des beaux combats, des illusions perdues parfois, certains d’entre eux, j’en suis persuadé, trouveront leur voie, vivrons quoi. De quoi ? De leur travail, de leur talent, de leur volonté de bâtir, d’entreprendre. Que voulez-vous, même si le suis : vieux ou presque, jamais je ne me résoudrais à désespérer d’une jeunesse qui ose, se cherche, galère, entreprend.


L’important, à tous les âges de la vie, c’est d’assumer ses contradictions et de ne pas laisser accroire que l’on est à soi seul le monde en capacité de le changer par son seul génie, ses seules forces. La Toile abrite le pire et le meilleur mais évitons les amalgames réducteurs, soyons citoyens trions le bon grain de l’ivraie, arrêtons de chouiner sur les marchands du Temple, ignorons-les ou bottons leur cul et je suis sûr que tout irait mieux dans notre foutu monde mondialisé… En général les cons s’adressent et ne sont compris que par les cons, alors je ne m’acharnerai ni sur les premiers qui promeuvent de la merde moyennant finances, ils n’en valent pas la peine, ni ne plaindrai les seconds car ils n’ont que ce qu’ils méritent en faisant confiance  aux premiers.

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30 octobre 2012 2 30 /10 /octobre /2012 14:00

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Le premier à tirer, le vin de Loire, n’est pas anglais mais écossais, John Burside est né le 19 mars 1955 à Dunfermline dans le Fife, en Écosse où il vit toujours. Il a étudié au Collège des Arts et Technologies de Cambridge, il enseigne aujourd’hui à l’Université de Saint Andrews. Poète et romancier, plusieurs de ses romans ont été traduits en français et publié chez Métailié : La Maison muette (2003), Les Empreintes du Diable (2005, Un mensonge sur mon père (2009), et Scintillation (2011). Son recueil de poésie Chasse nocturne est publié dans la collection bilingue aux éditions meet en 2009. Il a séjourné à Saint-Nazaire en 2005.

 

Il s’agit d’un extrait :


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« Une carte postale »


La première fois que j’ai entendu le mot Loire, ou plutôt que je l’ai vu, imprimé en caractères tarabiscotés, un tantinet désuets et sans doute imprononçables, c’est quand une amie de lycée du nom de Caroline m’a envoyé une carte postale, alors qu’elle était en vacances avec ses parents. Pour le garçon de quatorze ans que j’étais,  ce voyage avait paru irréel d’emblée : nous étions en 1969, et dans mon entourage, les gens passaient leurs congés d’été sur le remblai d’une ville pluvieuse des côtes d’Angleterre, où ils mangeaient des sandwiches au pain de mie saupoudrés de sable fin et de gravillons dans des sacs en papier, tandis que le soleil déclinait lentement dur l’Empire britannique ; mais cette carte postale (du château de Chenonceau, si ma mémoire est bonne) était une destination tellement inattendue que je la trouvais franchement surréaliste (…)


« (…) Qu’entend-on au juste quand on parle de fleuve ? »


« (…) Pour le garçon de quatorze ans que j’étais, la Loire aurait dû se résumer à une colle de géographie – Quelque chose qu’on cherche dans l’atlas du lycée et qu’on étudie en noir et blanc –, mais dans sa dimension physique, elle n’était pas plus réelle que le Nil ou l’Amazone, et même avec la carte postale de mon amie en main, elle restait avant tout un écran vide sur lequel je projetais les idées sur l’exception française que j’avais piochées dans les nouveaux documents audiovisuels récemment acquis par le lycée

 

Dans l’un d’eux, je crois me rappeler que madame Thibault et ses enfants pique-niquaient près d’une rivière et que j’avais appris par cœur les mots fromage, pain, une bouteille de vin sans vraiment croire que ces choses fussent réelles, car elles ne ressemblaient en rien à ce que ma famille et moi mangions lors du pique-nique dominical au cimetière. C’était apparemment une vieille tradition là où j’ai grandi, que ma mère respectait avec toute la solennité voulue, et tous les dimanches après-midi, elle nous conduisait à la tombe de ma tante Eleanor, morte prématurément, pour y faire un repas silencieux et d’une étrange dignité, composé de pain de mie rassis, de terrine de poisson et d’un soda tiède pour faire descendre le tout. Ô comme j’enviais ces petits Français, leur prairie ensoleillée, leurs fleuves aux eaux claires et lumineuses. Leurs victuailles ne provenaient certainement pas d’une petite épicerie poussiéreuse, et il me semblait que tout ce qu’ils dégustaient, dont quelques gorgées de vin auxquelles je n’aurais jamais eu droit, était baigné de soleil, frais et doré. »


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Pour illustrer cette chronique je choisis, dans le catalogue « Vini Be Good » fondé par les créateurs du Tastevin, un domaine et un vin de Loire, bien sûr, pour remercier John Burside de sa belle contribution.


Le Domaine de Bellivière de mes amis  Christine et Eric Nicolas


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27 octobre 2012 6 27 /10 /octobre /2012 14:00

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« Si j’avais su j’aurais venu… au « Théâtre de la Cité internationale » qui est à deux pas de chez moi, je peux y aller à pied, à vélo ou en prenant le 21. C'est en face du Parc Montsouris et c'est un lieu que Patrick Modiano a mythifié.


J’aurais dû lire Rue89 qui nous proposait de gagner dix invitations (cinq places valables pour deux personnes), afin d’assister à la performance « les héros de la pensée » Que fait Antonin pour informer le Taulier.


Ben oui, des héros de la pensée, dont Emmanuel Giraud z’ont, le 20 octobre dernier, de 11h jusqu'à 13h le lendemain, bu en pensant. Putain les janissaires de la loi Evin vont faire des cauchemars rétrospectifs. Passe encore que les intellos aient été, de tout temps, des adeptes de la dive bouteille mais là, mettre en scène des libations en agitant ses neurones, c’est l’équivalent d’un bras d’honneur aux hygiénistes, une provocation, une incitation intolérable à penser en buvant. Ne dit-on pas que la vérité est au fond des verres.


Les spectateurs étaient libre d'entrer, sortir à tous moments, ou même d'amener son sac de couchage. Les tarifs de 11à 22 euros.


Les héros de la pensée donc, de Massimo Furlan, mis en scène par Massimo Furlan, Claire de Ribaupierre au Théâtre de la Cité internationale était  un marathon avec une seule règle : boire en pensant.


Massimo Furlan, selon Laurent Carpentier, accoudé au bar en mangeant des pâtes souligne qu’il « ne cherche rien à prouver L'idée est venue à Bruxelles, on était en tournée pour 1973, un spectacle qui tentait de reconstituer le concours de l'Eurovision de cette année-là, et dans lequel un certain nombre de ces philosophes intervenaient. Le soir, je les écoutais parler. Et j'adore les écouter. Je trouve fascinant ce qu'ils disent, comment ils le disent. »


Bon, comme je n’y suis pas allé, je confie le reportage au gars du Monde :


A comme affinité,

B comme bègue,

C comme colère,

D comme danse,

E comme écho ...


« Echo du canon ! Canon, c'est le nom de ce vin blanc gras et puissant, très long en bouche qui pour moi me paraissait bien illustrer le propos ", explique, facétieux, Emmanuel Giraud, artiste plus que sommelier, issu de l'école du Fresnoy, qui sert ici de maître de l'ivresse et des papilles. Il fait ostensiblement circuler le vin dans sa bouche. " Le viticulteur qui le fabrique s'appelle Hirotake Ooka, c'est un Japonais qui s'est installé dans une grotte sous le château de Crussol du côté de Valence… »

 

« Entrechoquement des verres. Sur scène : deux anthropologues de l'Ecole des hautes études en sciences sociales, Daniel Fabre et Marc Augé ; un historien du Moyen Age à la coupe rock'n'roll, Pierre-Olivier Dittmar ; une écrivaine, Christine Lapostolle ; et trois philosophes : Bastien Gallet versé dans la musicologie, l'Italienne Barbara Formis, spécialiste d'art et d'esthétique, et la Belge Vinciane Despret, psychologue et mention spéciale de notre jury personnel pour ses interventions toujours pleines de piquant et d'intuition. »


« Ici, on dort allégrement et sans vergogne ; là, on boit au goulot et en cachette, car la salle, elle, n'a pas le droit à l'ivresse, ou alors elle va au bar... Ici, on note avec assiduité ; là, un couple de jeunes au look gothique reste enlacé comme une statue géméllique et immuable (à quel moment ont-ils disparus ? Au premier métro du petit matin ? Je ne saurais dire). »


P comme paresse. 2 h 10 du matin


« Toujours le même rituel : au bout d'une heure, Massimo Furlan se lève de son fauteuil en retrait, ajuste sa veste, attrape sur la table derrière lui un trombone, un tuba, et les tend aux philosophes dont le gang se transforme derechef en un big band free - timide au début, mais de plus en plus sonore à mesure que la journée, puis la nuit, avance. 


4 heures du matin. Quelque part entre Q comme " qui-vive " et R comme " ruse ". Autour des philosophes, les corps se lovent sur la scène dans des sacs de couchage, dans les travées, deux filles sont effondrées sous une couette qu'elles ont apportée jusqu'ici. La plupart s'affalent à même leur fauteuil. La nuit n'est plus habitée que par le babil des penseurs et, ici et là, quelque mouvement reptilien. »


Elle est en master de philosophie, il enseigne les lettres en collège. Cet après-midi, il dormait, elle notait ; maintenant, il jubile, elle somnole. « Ce qu'il y a de bien, c'est qu'on est totalement libre de faire ce que l'on veut : se lever, partir, revenir, dormir, un truc impensable dans un amphithéâtre, ou pendant un spectacle. La longueur finalement libère. »  Ils étaient venus pour deux heures, ils resteront toute la nuit.


Laurent Carpentier ne peux s'empêcher d'avoir le sentiment « d'un long (immensément long) voyage en voiture bercé par France Culture. »


L'assistance n'a pas vocation à intervenir. Et c'est tant mieux.

Exit les interventions lénifiantes des insomniaques en mal de reconnaissance.


« Au petit matin, alors que la salle se remplit de nouveau (une petite centaine de philophiles au cœur de la nuit, plus de cent cinquante à l'heure de la messe), nos penseurs commencent à patiner sérieusement. Ça tourne café du commerce, souvenirs et confessions.


Alors que la lumière blafarde d'un ciel tout blanc inonde la coupole du théâtre, Marc Augé, le doyen, 77 ans (l'homme du célèbre Non-lieux - 1992) penche comme la tour de Pise en essayant vainement d'ouvrir un œil digne, non pas tant à cause de l'ivresse (« A vrai dire, ces vins n'étaient pas tous fameux, j'ai des goûts peut-être plus classiques... ») que de la fatigue.


Et quand après Y comme " yé-yé ", on annonce Z comme " Zorro ", on se met à prier que ce dernier arrive fissa. »


Symposion, signifie étymologiquement (en grec) boire ensemble. C’est-à-dire boire et débattre ensemble.


« Le héros, ici, c’est la figure du penseur : celui dont les principales vertus sont le langage et la réflexion. Les performeurs s’engagent donc à aller jusqu’au bout de leur pensée, au-delà de leur fatigue, au-delà de leur résistance à l’alcool, par-delà leurs limites physiques. Ils s’engagent à tenter ensemble de porter le projet jusqu’au bout. Il s’agit de solidarité, de tactique, de ruse, afin de surpasser l’épuisement et l’ivresse : entretenir la conversation le plus longtemps possible, et construire ensemble une pensée vive et inattendue »


Quelques PHOTOS de ce marathon de la pensée arrosée…

 

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