Mes très chères amies blogueuses,
Je vais vous faire une confidence matinale : de mon temps, comme disait souvent ma grand-mère, il était un constat qui, dans la bouche d’une belle-mère, à propos de sa bru, me faisait toujours sourire « Elle travaille… » sous-entendu la femme de mon fils quitte son foyer chaque jour pour aller gagner sa vie comme un homme.
Dans sa préface de l’excellent livre de Vanessa Postec Le goût des femmes à table chez PUF 14€, le directeur de la collection Le Manger vrai Marc de Champérard écrit « dans les couples français, la cuisine était une affaire de femmes, la reléguant aux tâches aux tâches soi-disant subalternes : faire le ménage, torcher les gamins, arroser les fleurs, j’en passe et des meilleures.
Est-ce toujours le cas ?
Vanessa Postec, jeune mère qui vit en couple, vous apporte sa réponse. (je commettrai une petite chronique dès que mes vaches iront au pré).
Qu’en est-il aujourd’hui de la transmission orale du savoir gourmand de mère à fille ?
En se libérant, les femmes n’ont-elles pas privilégié les plats industriels tout prêts à la cuisine de nos jardins, de notre élevage, dans la ligne d’une tradition française qui fait de notre pays la première nation gastronomique d u monde ?
Alors, faut-il plaindre les générations futures ?
Est-il vraiment important que les bons petits plats de nos grands-mères aient été remplacés par l’industriel congelé paraît-il libérateur ? »
Que de questions mes belles, mais rassurez-vous je ne vous y soumets pas et, n’ayant pas de vocation de sociologue ménager, je n’enquêterai pas auprès de Laurent, d’Alex et d’Antonin pour déterminer qui tient le balai, fait le lit, les courses, étend le linge, repasse et se penche sur les fourneaux. Tout ce que je sais de vous c’est qu’Eva a une belle descente de quilles qui ferait se pâmer beaucoup de vignerons , qu’Isa à un coup de fourchette qui mettrait en déroute une escouade de Tartares et que Samia sait infuser à ses plats des sentiments qui vont de l’enfer au paradis.
En m’adressant à vous à l’heure du petit déjeuner – tient pendant que j’y pense les copines je ne lis pas beaucoup de chroniques sur ce moment important de la journée. Va-t-il falloir que le taulier s’y colle ? – je ne fais que passer les plats. Josy Ambroise-Thomas dans son Avant-Propos à son opus, écrit en 1948, Le Livre de cuisine des petites filles, se livre à un plaidoyer qui est une belle illustration du chemin parcouru depuis lors. À vous de me dire, si ça vous chante, le chemin qui reste à parcourir mais, pour ne rien vous cacher, ce qui me porterait au sommet de la volupté c’est que vous syndiquiez vos talents pour me concocter un festin de vos belles mains avec bien sûr de grands accords mets-vins ! Vous imaginez la chronique qui ensuivrait, une première sur la Toile qui ferait rougir Face de Bouc. Ce serait Grand car à vous trois vous assemblez un triple A !
« Un livre de cuisine pour les petites filles ?À quoi bon ? Nos filles ont maintenant tant de leçons à apprendre, tant de cours divers à suivre, sans compter le tennis et les autres sports. Elles peuvent à peine jouer quelques minutes dans une journée ! Leur enseigne-t-on, comme à leurs grand-mères et leurs mères, à coudre, à tricoter ; à raccommoder ? Non, elles n’en auront pas besoin. Quand elles seront grandes, elles deviendront médecins, avocats, ingénieurs, usiniers, comme leurs frères. Les besognes ménagères seront faites par les employés.
En êtes-vous bien sûrs ? Et croyez-vous que les jeunes filles actuelles qui s’habillent sèchement en garçon, fument comme des garçons et ne s’intéressent, n’ont l’air de s’intéresser, qu’à des choses de sport ou à des questions techniques ardues, réalisent le rêve d’un homme ?
Que deviendra la famille dans les ménages où la femme sera médecin, par exemple, et le mari ingénieur ? occupés l’un en dehors du foyer, l’autre dans un cabinet professionnel d’où la famille est bannie ? Les enfants laissés à la garde des domestiques ?
- Croyez-vous qu’une mère pourra former l’âme et le cœur de ses enfants si, tout le jour, elle est prise par un travail absorbant ?
La femme est à sa place dans sa maison. Plus elle est instruite, intelligente et courageuse, plus elle saura rendre les siens heureux.
Son rôle n’est pas le même que celui de son mari. À lui le soin d’amener le blé au moulin ; à elle de le faire tourner, sans perdre la farine.
Et croyez-vous que toutes les jeunes files de France soient ainsi masculinisées ?
Je suis sûr que non. Je connais de plus instruites que leur grand-mères et leurs mères, car elles sont bachelière et même licenciées, qui cependant ne dédaignent pas le rôle de la femme : assurer le bien-être et la grâce dans la maison ; remplacer la servante absente le cas échéant, et ce cas est fréquent à l’heure actuelle.
Personne ne peux plus se faire servir comme autrefois. L’exigence de la vie supprime dans bien des ménages ce rouage essentiel : la bonne.
Les jeunes filles ont raison, parce que l’existence facile d’autrefois ne reviendra plus, de s’instruire, d’apprendre assez pour remplacer leur mari si le malheur le fait disparaître ; pour subvenir seules à leur existence si elles n’ont pu se créer un foyer.
Mais les sages sont celles qui, ayant appris, gardent leur savoir en réserve, l’utiliseront seulement s’il en est besoin, et soignant leur maison, leur famille, créent la joie et le bonheur autour d’elles.
À celles-là, je dédie ce livre. Qu’elles laissent leurs fillettes – dix, douze, treize ans – jouer à la ménagère, les aider dans leur tâche quotidienne. Toutes les petites filles devraient savoir préparer des hors-d’œuvre, arranger un joli dessert, exécuter quelques plats simples. Je suis certaine que beaucoup d’entre elles s’amuseront en les préparant.
C’est excellent de faire quelque chose d’utile en s’amusant.
Ne dédaignez pas la cuisine, mes petites filles c’est une occupation très intéressante et
c’est un art, oui un art, et un art bien français. Il y a eu, il y a des cuisiniers de génie.
La gourmandise n’est un défaut que lorsqu’elle est excessive et si les gourmands peuvent être égoïstes, ils ne sont jamais méchants.
Un bon repas rend joyeux, indulgent, aimable. La réunion de la famille autour de votre plat « apprécié » sera pour vous une jolie récompense.
Et si, d’être cuisinière, quelqu’un d’autorisé l’a écrit, cela développe l’esprit, vous serez plus tard des maîtresses de maison spirituelles et des femmes précieuses. »
Mes très chères, comme je ne suis pas Marxiste tendance Groucho, je ne vous dirai pas comme lui que « Les grandes guerres sont celles qui sont menées entre les sexes plutôt qu’entre les nations… » que « Les hommes et les femmes ne s’aiment pas et ne se fréquentent que pour des motifs sexuels. » et que « Sinon, les hommes éviteraient les femmes comme la peste. »
Non, je vous citerai Vanessa Postec qui note que dans la nouvelle génération « ces presque trentenaires se partagent les casseroles sans se marcher sur les pieds, les jeunes hommes cuisinant presqu’autant (à 82%) que leurs petites camarades, qui sont 84% à voir dans la poêle à frire autre chose qu’une arme blanche. »
Voilà les filles, il faut que je vous laisse aller travailler. Grosses bises et à bientôt pour des agapes joyeuses et bien arrosées.
Le taulier recyclé en défenseur des jeunes femmes qui ne sont pas au foyer
PS. Eva, Isa, Samia, sont devenues amies un peu par mon entremise.
La photo des 3 Quilles est un clin d’œil aux 3 filles qui s’identifieront en l’une d’elle. Le choix des flacons ne correspond à aucune sorte de hiérarchie mais à un code secret que je laisse à mes chers lecteurs le soin de retrouver.
- Alsace Grand Cru Furstentum Pinot Gris 2009 Albert Mann
- Bordeaux Supérieur la bouteille d’Elwan 2009 Domaine de la Vrille Têtue
- This Side Up® Cidre 2010 de Cyril Zang
Eva chronique sur www.oenos.net et une fois par mois chez le Taulier : le vin du mois d’Eva.
Isa chronique sur www.leboutdemalangue.blogspot.com
Samia chronique sur http://cuisineetsentiments.wordpress.com/
Elles sont toutes les 3 sur Face de Bouc (appellation popularisée par Isa) et si un jour je les retrouve toutes les 3 ensemble, par exemple le jour du Grand Festin du Taulier, je vous promets une photo de groupe.