Le sieur G.N.B dont le patronyme assemble avec un trait d’union le nom d’un vieux distributeur de vins Nicolas et un bout de celui d’un GCC prestigieux Brion est le taulier du blog « Du Morgon dans les veines » référence transparente au « père spirituel » des vins dits naturels l’ami et regretté Marcel Lapierre. Guillaume, donc, est pour moi la référence, le mètre-étalon du versant des buveurs de vin nu (dixit la Woody Allen du vin Alice Feiring).
Très beau cliché de GNB emprunté pour la bonne cause au blog : www.fou-rgeot-de-vin.com merci !
Le 07 janvier 2013, il a commis une chronique « Cheval-Blanc et Yquem, deux mythes à mourir d'ennui » link qui, loin d’être une simple charge ou un pur pamphlet raillant deux icones, met bien en lumière, même si ça dérange les tenants de l’orthodoxie, deux approches du vin. Vous le savez elles ne sont pas pour moi antinomiques, bien au contraire, elles se frictionnent, elles se fractionnent, et surtout de l’arborescence parfois confuse des nouvelles ramures nait une nouvelle canopée et les dominants actuels, les branches maîtresses, auraient torts de traiter par le mépris ce petit monde de jeunes pousses. Tout change pour que rien ne change, en 10 ans le paysage du vin sous l’apparence d’un lourd conservatisme s’est bouleversé et c’est heureux.
C’est heureux car eux ce sont des consommateurs, des vrais, des tous neufs. Pas des vieux bonzes vitrifiés dans leurs certitudes, brassant les mêmes idées reçues, les mêmes phantasmes, grande armée de geignards non-voyants, sourds mais malheureusement pas muet. Libre à eux de railler les GNB et la cohorte de ses frères et sœurs, quitte à pédaler derrière eux via des blogs, Face de Bouc et maintenant Tweeter, mais de grâce qu’ils se souviennent du temps où ils ont laissé passer les bons trains perchés qu’ils étaient sur leurs certitudes. Pour autant, je ne brosse pas Guillaume, les vignerons qu’il vénère dans le sens du poil, tout n’est pas comestible, tout n’est pas à la hauteur, parfois ça pue des pieds et ça flirte avec le jus de chausse. Cependant j’adhère à ce qu’écrit le zébulon des quilles qui font rire les filles :
« Le vin est une boisson, et par cette nature, il est fait pour être bu, avalé et donner les idées heureuses. Ici, je me sens loin de tout ça. Une armée des ombres faite de buveurs, de néophytes, d'amateurs, de connaisseurs, de professionnels en a conscience, elle est justement en train de sortir de l'ombre. En tant qu'amateurs-blogueurs, nous avons aussi une responsabilité. J'irais même jusqu'à paraphraser un vieux barbu : les blogueurs n'ont fait qu'interpréter diversement le monde du vin, il s'agit maintenant de le transformer. Quitte à être les idiots utiles du système qui en accouchera. »
Je ne sais à quel vieux barbu ce jeune pourfendeur de GCC fait allusion, peu me chaut, mais ce dont je suis convaincu c’est que le vin installé dans un unique statut « d’onction extrême » c’est-à-dire comme un marqueur social, un moyen d’affirmation statutaire, n’est pas le seul avenir du vin. Je déguste donc je suis, c’est goûter de l’art officiel et l’art officiel c’est parfois chiant, très chiant. Pour autant, je n’adhère pas aux idées fumeuses de l’alter-vin qui n’est qu’une captation d’un concept fort lointain de la réalité des vins dit naturels. Que ceux qui les produisent se réfèrent à des valeurs, à une éthique, à une conception du monde, j’en conviens, mais à l’autre bout de la chaîne ce ne sont pas les masses laborieuses qui sont au rendez-vous de l’acte d’achat. Nous sommes bien loin du commerce équitable. Souligner les contradictions des autres c’est aussi assumer les miennes et je ne jette la première pierre à qui que ce soit. Ceci écrit il vaut mieux éviter, du côté consommateur, de se la jouer rebelle par procuration. Chacun vit sa vie là où il la vit.
Dans le papier de G.N.B comme dans une pièce de Feydeau, il scande ses propos sur ces « fameux vins que plus personne ne peut boire » par des piques et des rires qui virent au jaune (sans allusion aucune à la robe d’Yquem)
« Enfin, l'exceptionnel, c'est surtout leur prix : tout cela nécessite un coup de fil à Cetelem avant le passage en caisse. Parait qu'un mythe n'a pas de prix... Ben si, en fait. »
« On commence avec Y de Yquem 2006 (…) autour de 120 euros. Je me marre. Il s'agit bien d'une bouteille de 75 centilitres, pas d'un magnum ni d'un jéroboam… »
« Le Petit Cheval en 2006… Chez le caviste, on débourse un peu plus de 150 euros pour une simple bouteille. Je me marre (bis). »
« Le 2001 est certes plus léger (heureusement, d'ailleurs) mais ennuyeux à mourir. Plus de 200 euros la quille. Je me marre (ter). »
« Le Cheval-Blanc 2006 à l'amertume exécrable (et Dieu sait que j'aime l'amertume) qui monte à 620 euros les 75 centilitres (là aussi, on parle toujours du prix d'une bouteille normale). Je me marre, mais là ça tire sur le rire jaune. »
« Puis, tel un destroyer qui vient tout sauver, voici Cheval-Blanc 2000… « Tu dois avoir le palais sacrément déviant pour ne pas apprécier un vin à 1200 euros ». Il n'y a pas de faute de frappe, il faut bien lire 1200 euros. 1, 2, 0, 0. Quatre chiffres. Soit un vin qui coûte plus d'un smic net, un vin dont le centilitre coûte plus de 15 euros... En le buvant, je m'ennuie et vu le prix du vin, je ne me marre plus du tout.
« Le grrrrrand Yquem… La version 2007 est plutôt jolie… Parker lui met 98/100 avec ce mot "magique". A 550 euros la bouteille, c'est une aberration. »
« Yquem 2005 s'avère crémeux avec pas mal de sucre : bref, tout ce que je déteste… L'accord avec le pata negra pourrait me faire exploser de rire. Entre 600 et 700 euros la quille, je ne rigole plus, mais alors plus du tout. »
Enfin un Yquem un peu plus vieux, le 1996 qui se montre champignonné, donc je dirais joli mais là encore assez ennuyeux. A 300 euros, on casse les prix, c'est presque abordable... Non évidemment, je déconne. »
Fermez le ban, je sens que l’autre Nicolas trépigne depuis longtemps dans ses Richelieu bien lustrées, crie au crime de lèse-majesté, clame son mépris à l’endroit de ce maraud incapable d’apprécier à sa juste valeur ces nectars divins. Que ne fut-il venu avec nous déguster pour relever le gant ? Reste que ces prix pharaoniques frisent l’indécence et, comme le fait très justement remarquer GNB, sauf à vouloir nous épater, on se demande bien pourquoi les communicants du BM nous ont embarqué, nous des petits blogueurs, sur cette galère ? Erreur manifeste de cible, manque de discernement, qui marque pour moi leur incapacité à assumer ce qui avait fait leur réputation : l’art de dénicher des belles quilles vendues à des prix abordables. Tout ce décorum glaciaire, ce côté galerie marchande pour gros comptes que l’on peut retrouver partout ailleurs dans le monde mondialisé, y compris sur les nouveaux paquebots de croisière, est à 100 lieues de l’esprit caviste qui restait encore présent auparavant.
Sur ces fortes paroles, qui ne plairont à personne, je forme le vœu que les vieux ou presque, dont je suis, assez confis dans leurs certitudes, leurs habitudes, leur confort intellectuel, les nouveaux entrants modèle GNB et ses frères-sœurs de lichette souvent radicaux, parfois folâtres, quelquefois de passage, et les entre-deux qui ne savent pas toujours où ils habitent, contribuent à l’extension du domaine du vin de convivialité. Trop de sérieux nuit à la crédibilité : comme l’écrivait Jean-Louis Buer, alors directeur de l’INAO, dans sa réponse à mon interpellation « bonnes fêtes et large soif » Avec le vin la fête c’est tous les jours… alors buvons à notre guise ce qui nous fait plaisir chers amis… tout le reste n’est que littérature… et l’on ne fait pas du vin avec des mots.
Vous pouvez tirer à vue sur la pianiste il est à l’épreuve des balles virtuelles…