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22 mars 2010 1 22 /03 /mars /2010 00:03

original 12795Pour qui, comme moi sur I-télé il y a quelques années, s’est retrouvé en face du dénommé Durand dans une émission a pu constater l’absolue suffisance du bonhomme et son incommensurable j’m’en foutisme. Les Guignols de l’Info lui ont, en leur temps, à juste raison, taillé le seul costard qu’il méritait, celui qui sied à un j’en foutre, un j’en foutre rien. Ce type est un ramier de la pire espèce : l’arrogante.

Que ce bouffon postmoderne, dans son habituelle syntaxe approximative, qualifiât les vins bios de dégueulasses, dans une émission de télévision du Service Public – que je finance comme vous tous par l’impôt – consacrée au réchauffement climatique avec l’ex-Mammouth Jospinien, relève de la vacuité de sa pensée qu’il compense par le recours systématique à des petites phrases qui se veulent provocatrices. Durand est à l’image de la télévision d’aujourd’hui : creux, frimeur et racoleur.  

Quand j’ai vu sur notre blog des 5 routards – pas mal comme appellation Catherine, je m’imagine bien dans la peau de Peter Fonda ou de Denis Hopper en Harley, avec une veste à franges et des santiags, filant sur la route 66 – que Christine Ontivero avait pris la peine de lui écrire, en l’interrogeant « Savez-vous que la plupart des plus grands vignerons français et étrangers produisent leurs vins avec des raisins issus de l'agriculture biologique? » je me suis dit : « c’est vraiment lui faire trop d’honneur que de laisser supposer une seule seconde qu’il puisse savoir... » puis j’ai ajouté, dans ma petite Ford intérieure, « en plus elle perd son temps... »

Et puis, réflexion faite – ici, contrairement à la crèmerie d’Arlette, on réfléchit – à la lecture des noms cités par Christine Ontivero « Cazes à Rivesaltes, Domaine Zind-Humbrecht en Alsace, Alphonse Mellot à Sancerre, Domaine Huet à Vouvray, Domaine des Roches Neuves à Saumur, Chapoutier dans la Vallée du Rhône, Anne Claude Leflaive à Puligny Montrachet, François Chidaine à Montlouis sur Loire, Château Fonroque à St Emilion, Domaine St André de Figuière à La Londe les Maures, Pontet Canet à Pauillac, Domaine Singla dans le Roussillon dont les vins viennent de rentrer à l’Elysée… » j’ai goûté avec délice la honte fondant sur le beau costar du Durand. Ses copains ont du le vanner grave dans les dîners en ville : « Guillaume t’es vraiment trop... tu t’es salement vautré... allons comment as-tu pu zapper Michel Chapoutier... tu sais le braille sur les étiquettes d’Ermitage, ignorer Alphonse Mellot... tu sais c’est lui qui, au moment des présidentielles... non tu ne sais pas... et patati et patata »

Encore heureux que Christine n’ait pas cité Aubert de Vilaine et la Romanée-Conti, ou Nicolas Joly et la Coulée de Serrant, car là, pour notre pauvre Durand c’était l’abomination de la désolation, l’aurait même été la risée du plus petit grouillot de la rédaction. Pour un buveur d’étiquettes de son acabit se faire tacler de la sorte relève d’une forme civile d’excommunication des cités du Livre Rouge – le Who’s who –. Le voilà pris en flagrant délit d’ignorance crasse. Carton rouge ! Exclusion. Ainsi va la vie de ceux qui se prennent pour des stars alors qu’ils ne sont que de simples haut-parleurs ânonnant des fiches préparées par une batterie de petites mains sous-payées. C’est vraiment Vérigoud !

Attention, que ceux d’entrevous qui n’apprécient les vins bio que du bout des lèvres ne prennent pas trop vite le parti du Durand des beaux quartiers car le qualificatif de dégueulasse il pourrait bien le leur servir sans autre forme de procès lors d’une émission du même tonneau que celle de ses consœurs d’Envoyé Spécial. Je l’imagine fort bien balancer à un digne représentant de l’INAO « mais votre vin bourré de pesticides il est dégueulasse... » L’important pour Durand c’est d’être dans le sens du vent.

Même si, en remettant le Durand à sa juste place : dans les cintres,  je passe un peu de baume sur vos blessures je sais bien qu’en ce moment nous ne sommes pas vraiment gâtés, et par les gars et les filles de la Télé, et par la Sandrine Blanchard du boulevard Auguste Blanqui, et par tout les couards qui s’abritent derrière la loi Evin. Pour vous consoler je vais faire une confidence : croyez-moi Durand il est proprement imbuvable !


PS. à l’attention de mes compagnons routards, Michel et Hervé, qui pourraient s’estimer rudoyés par mon franc-parler à propos de l’opération Beaujolais « Grand Corps Malade » : je souhaite leur faire comprendre que, avec toute l’amitié et le respect que j’ai pour eux, comme je suis en « mission » - auto-missionné certes – mon intérêt prioritaire est de faire remonter de la « base » du matériau. Ce qui a déjà commencé. Délivrer une ordonnance, comme le font les médecins d’aujourd’hui, vite fait bien fait sur le gaz, c’est souvent ne s’attaquer qu’aux symptômes plutôt qu’aux causes. Dans mes missions semelles de crêpe je prends plutôt le profil médecin de campagne. En effet, c’est plus chiant d’aller à l’AG de la coopérative de Moulin à Vent que de déguster au château des Jacques, mais ainsi va la vie du missionnaire (un jour l’ami Robert Skalli m’avait qualifié de moine civil pour un portrait de Catherine Bernard dans la Tribune). Bref les gars vous me prenez comme je suis, chiant et tourné vers l’objectif que je me suis fixé. Nos pays, et pas seulement le Beaujolais, et pas seulement pour le vin, comme l’aurait dit le Général il y a pour notre vieux Pays une « ardente obligation » de se colleter à leurs problèmes qui, s’ils étaient si simples à régler, ne seraient pas face à nous. Comme l’aurait dit Pierre Dac « si tout le monde faisait du bon y’aurait pas de mauvais... »  

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20 mars 2010 6 20 /03 /mars /2010 00:00

« Je le dis une fois pour toutes : j’aime la France avec la même passion, exigeante et compliquée, que Jules Michelet. Sans distinguer entre ses vertus et ses défauts, entre ce que je préfère et ce que j’accepte moins facilement.

Se purger de ses passions

« Mais cette passion n’interviendra guère dans les pages de cet ouvrage. Je la tiendrai soigneusement à l’écart. Il se peut qu’elle ruse avec moi, qu’elle me surprenne, aussi bien la surveillerai-je de près. Et je signalerai chemin faisant mes faiblesses éventuelles. Car je tiens à parler de la France comme s’il s’agissait d’un autre pays, d’une autre patrie, d’une autre nation. « Regarder la France, disait Charles Péguy, comme si on n’en était pas. » D’ailleurs, en évoluant, le métier d’historien nous condamne de plus en plus à la sécheresse, à l’exclusion du cœur. »

La longue durée impose ses services

« Il est évident qu’une nation en train de se faire, ou de se défaire, n’est pas un personnage simple, « une personne » comme disait poétiquement Michelet. Elle est une multitude de réalités, d’êtres vivants sue saisit mal le fil d’une histoire chronologique à la petite journée, à la petite semaine, à la petite année. Se cantonner dans le temps bref, c’est le défaut mignon de l’histoire-récit, de ce « feuilleton de l’histoire de France », comme dit Jacques Bloch-Morhange, que nous avons appris par cœur, enfants, et non sans émoi, dans les pages inoubliables du Malet-Isaac. Mais pour qui n’est plus un enfant, c’est une autre forme d’histoire, inscrite dans de plus longues durées qui permet de dégager les invraisemblables accumulations, les amalgames et les surprenantes répétitions du temps vécu, les responsabilités énormes d’une histoire multiséculaire, masse fantastique qui porte en elle-même un héritage toujours vivant, le plus souvent inconscient, et que l’histoire profonde découvre, à la façon dont la psychanalyse, hier, a révélé les flux de l’inconscient. »

L’hexagone, l’Europe, le Monde

« De même  l’espace français actuel, l’ « hexagone », n’est pas la seule mesure à laquelle il faille se référer : au-dessous d’elle il y a les infra-mesures : régions, provinces, « pays » qui ont longtemps gardé, gardent encore une autonomie certaine ; au-dessus d’elle, il y a l’Europe, et au-dessus de l’Europe, le monde. Marc Bloch affirmait : « Il n’y a pas d’histoire de France, il y a une histoire de l’Europe » ; mais reprenant un autre de ses propos : « La seule véritable histoire est l’histoire universelle », on pourrait ajouter : « Il n’y a pas d’histoire de l’Europe, il y a une histoire du monde ! ». « Je ne conçois l’hexagone, écrivait Paul Morand, qu’inscrit dans la sphère. »

En fait, l’Europe, le monde sont parties prenantes dans notre passé : ils nous bousculent, à l’occasion ils nous broient. Mais, à leur endroit, sommes-nous, nous-mêmes innocents ? Les mots d’Edgar Quinet, « une grande gloire pour les peuples modernes est d’avoir conçu l’histoire universelle », ont eu le temps, depuis qu’il les écrivit en 1827, de se charger de bien des ambiguïtés. Mais qu’il soit entendu que, pour aucune nation, le dialogue obligatoire et de plus en plus pesant avec le monde n’entraine une expropriation, un effacement de sa propre histoire. Il y a mélange, non pas fusion. « Le changement le plus radical survenu en France, écrit T.Zeldin, [est-ce] la perte pour les Français du contrôle de leur destin ? » Assurément non. Cette ambiguïté d’une histoire de France confondue, pour une partie de sa surface et de son volume, avec les destins du monde et de l’Europe, m’a, à l’avance, beaucoup gêné dans mes projets. Inutilement pourtant. Car je me suis aperçu, chemin faisant, qu’une histoire de France est, en soi, un admirable sondage, une mise au clair, au-delà de ses aventures propres, de la marche de l’Europe et du monde. »

 

Fernand Braudel dans son Introduction à « L’identité de la France » 3 volumes chez Arthaud 1986

 

 

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19 mars 2010 5 19 /03 /mars /2010 00:09

Au tout début de février j’ai reçu dans ma boîte aux lettres ce message d’un de mes lecteurs : « Je suis fils de viticulteurs, petit viticulteur du Beaujolais, métayer, donc loin des grandes dynasties Bourguignonnes. Malgré tout, je suis un amoureux de ce terroir, mais pour être franc je ne vois pas comment le sortir de cette crise qu'il connait. Mon père n'a de cesse de me dire chaque jour que le Beaujolais est perdu et qu'il vaut mieux vendre du Bourgogne ou du Champagne, et je trouve cela très triste. » Et de conclure :


« Je viens vers vous aujourd'hui pour avoir votre avis d'amoureux du vin et surtout de professionnel du vin sur l'avenir de ce Beaujolais, quel est votre point de vue sur sa situation ? »


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J’avoue que j’étais à la fois assez ému de cette confiance et embêté car, contrairement à ce que pensent certains, je n’ai pas d’avis sur tout et, dans le cas spécifique du Beaujolais, j’estimais et j’estime encore, que mon éloignement du terrain, ce besoin que j’ai avant de me forger une opinion d’arpenter la région, d’écouter les uns et les autres, de voir, de sentir, de me plonger dans la complexité, de définir le champ des possibles, de tester des solutions, ne me permettait pas d’être en mesure de répondre de manière pertinente à mon correspondant.


Alors j’ai rongé mon frein mais, comme rien ne me chagrine plus que l’impuissance j’ai lu tout ce que j’ai trouvé sur le sujet en me disant : « quand ce sera mûr tu tenteras d’écrire quelque chose. » Le temps passait et j’avoue que, dès que je m’asseyais face à mon clavier pour écrire ce qui me trottait dans la tête, je repoussais au lendemain la ponte de la première phrase qui chez moi déclenche tout.


Et puis, aujourd’hui – hier pour vous – en fin de matinée, après bien des tergiversations, j’ai décidé de me lancer, comme ça, sans trop savoir où j’allais aboutir, en me disant que peut-être ces premiers pas sur la Toile mettraient en branle je ne sais quel processus de réflexion pour que la prise de conscience des maux du Beaujolais débouchât sur une réelle réflexion stratégique. Bien évidemment je sais pertinemment que personne ne m’attend sur ce sujet et j’ai bien conscience que ma seule bonne volonté, mon besoin de servir ne vont pas me propulser au cœur d’un processus qui déboucherait sur des choix clairs et assumés éclairant l’avenir bien sombre du Beaujolais.


En clair, je m’auto-missionne. C’est une grande première. J’irai à mon pas en espérant trouver sur le chemin des femmes et des hommes de bonne volonté pour prendre avec mon aide en charge leur destin.

 

« Dix ans. Le Beaujolais vit sa dixième année de crise d’affilée. Durant cette décennie 1500 viticulteurs ont mis la clé sous la porte » écrit le magazine Lyon Capitale dans son numéro de février sous le titre choc « Un vin à l’agonie » avant d’ajouter « sans doute pas en danger de mort, mais plus probablement en voie de paupérisation. Clochardisation, diront certaines langues vipérines ». Pour moi l'abus de mots excessifs, tonitruants nuit alors je les laisse aux journalistes et me tourne vers un grand amoureux du vin et du Beaujolais tout particulièrement : Bernard Pivot.


À la question : « Le beaujolais est donc réellement en danger ? » : le créateur du Comité de Défense du Beaujolais, répond : « Ce n’est pas nouveau. Le Beaujolais va mal, il est souffrant. En plus d’une grave crise économique, le beaujolais est victime, depuis pas mal d’années, d’un ostracisme moutonnier, d’une sorte de défiance, souvent irrationnelle. Il existe un snobisme à dire que le beaujolais ce n’est pas bon. C’est complètement aberrant. C’est un vignoble extraordinaire. Les vignes sont arrachées, abandonnées... »


Que le beau vignoble du Beaujolais soit un « Grand Corps Malade » j’en suis bien d’accord mais, sans prendre la distance un peu froide qu’affiche encore trop souvent le corps médical face à la souffrance morale de ses patients, il me semble qu’il faut se garder d’en rester à une telle approche purement compassionnelle. Avoir de l’empathie, j’en ai et je ne fais pas parti de ceux qui couvrent le Beaujolais d’opprobre,  ne doit pas conduire ni à une forme de globalisation des problèmes qui se posent, ni à s’enfermer dans une victimisation du produit. La recherche de « coupables » peut rassurer mais elle n’apporte guère de lumière au diagnostic. Vraiment c’est faire trop d’honneur à certains « prescripteurs » crachant sur le Beaujolais que de leur attribuer le désamour des consommateurs. Qui les entend ? Qui les suit ? Pas grand monde ! Le mal est bien plus profond. D’ailleurs, sans le vouloir, Bernard Pivot en répondant à la question « Pour vous, le Beaujolais, c’est... » apporte de l’eau à mon moulin.

Que dit-il en effet : « Le Beaujolais est avant tout un vin de lutte des classes. C’est le vin des canuts et le vin des rad-soc’s. Le vin de Gnafron et le vin d’Édouard Herriot. Le vin des bleus de chauffe et le vin des costumes-lavallières. Le vin de la Vache-qui-rit et le vin du gigot qui pleure. Le vin des mâchons entre vieux potes et le vin des déjeuners en famille. Le vin de la gauche-saucisson et le vin de la droite pot-au-feu. Le beaujolpif des meetings et le saint-amour des mariages. »

Avec tout le respect que je dois à Bernard Pivot je dois avouer qu’il prononce là un très bel éloge funèbre d’un monde englouti. Il y a dans son propos de l’Amélie Poulain et la France qu’il décrit n’est plus. Mais, par delà ces regrets, le Beaujolais qui «pendant des décennies, voire des siècles, a été considéré, comme l’écrit Eric Asimov le critique vin du New York Times, comme un vin simple, léger, amusant (...) pas sérieux n’est-il la nouvelle victime d’une vision élitiste du vin à la française. Comme je l’ai déjà souligné, les écrits de Roland Barthes dans Mythologies sont datés. « Le vin est senti par la nation française comme un bien qui lui est propre, au même titre que ses trois cent soixante espèces de fromages. C’est une boisson totem... » Le vin populaire n’est plus et ça ne date pas d’hier. Pour s’en persuader il suffit de visionner la fameuse émission de Michel Polac « Les vignes du seigneur » de mai 1982 pour déceler, dès cette époque, la ligne de fracture qui était en train de se creuser entre le vin du populo et celui des amateurs éclairés. Le père Bréchard, figure emblématique du Beaujolais y défend becs et ongles, contre un Jean Huillet héraut des va-nu-pieds du Midi qui l’accuse de jouer sur le même terrain que lui, son modèle beaujolais. C’était il y a presque 30 ans. Réécrire l’Histoire, l’enjoliver ou la tirer vers le bord qui est le sien, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, ça rassure mais ça masque aussi des réalités bien moins agréables à analyser et à traiter.

Reste donc à entrer dans le vif du sujet : « le Beaujolais est-il perdu ? » comme l’affirme le père de mon correspondant ou comme le journaliste de Lyon Capitale interrogeant Bernard Pivot : « est-il mort ? » Celui-ci répond : « Non, je ne crois pas. Mais le Beaujolais a mal, il est souffrant, il demande une assistance. Si on ne lui porte pas remède, il ira de plus en plus mal... » C’est donc avec mon petit balluchon que je me porte volontaire pour « aider » avec ma méthode semelles de crêpe, pas pour « assister », le Beaujolais n’a pas besoin de béquilles, d’infirmiers  ou de docteurs miracles – ce qui ne signifie pas pour autant que les conséquences sociales des difficultés ne doivent pas être traitées avec les moyens adéquats – mais d’un accoucheur de décisions. Le salut – c’est mon côté vendéen qui ressort – du Beaujolais viendra de l’intérieur, de ses propres forces. C’est donc à dessein que j’ai titré ma chronique « Grand Corps Malade » en référence à ce grand garçon sympa qui a su, avec ses propres forces, surmonter son handicap lié à son accident pour « réussir ».

Tout reste donc à faire : à bientôt donc sur mes lignes pour ce bout de chemin en Beaujolais et si vous voulez contribuer vous y êtes les bienvenus...

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18 mars 2010 4 18 /03 /mars /2010 00:04

« Rien ne surprend davantage un amateur de vin d’aujourd’hui*, que le réputation des vins d’Ile-de-France au temps jadis » Vins d’Argenteuil, du Laonnois, de Marly, de Meulan, de Montmorency, de Pierrefitte, de Deuil, de Saint-Yon, étaient connus : on savait distinguer ces crus les uns des autres.

Au commencement du XVIIIe siècle, Paumier, médecin normand, qui a écrit sur le cidre et le vin, ne parle qu’avec enthousiasme des vins français, car c’est ainsi que l’on désignait les vins de l’Ile de France. Il va jusqu’à leur donner la préférence sur ceux de Bourgogne : « Tout ce que peut prétendre celui-ci, dit-il, quand il a perdu toute âpreté, et qu’il est en sa bonté, c’est de ne point céder aux vins français ».

Le vin de Suresnes était l’un des plus connus de ces vins français.

« C’est le premier vin, dit, l’Encyclopediana, qu’on ait vanté en France. » 

Jean Gonthier, médecin de François 1ier, dans ses Exercitationes hygiasticae, nous apprend que le vin de Suresnes et celui de Ris faisaient les délices de la table royale : regi sunt in deliciis.

Ce Vin de Suresnes provenait de la récolte faite dans le clos de la Seigneurie (Clos des Seigneurs, où fut plus tard la propriété du couturier Worth) et était offert chaque année au roi par les religieux de Saint-Germain-des-Prés, propriétaires de la terre et seigneurie de Suresnes depuis l’an 918.

Ces mêmes vins, dit Pierre Gauthier de Roanne (il y ajoute ceux de Ris), font les délices du monarque. Il s’agit ici de Louis XIV, qui avait alors trente ans.

Il semble que ce fut l’hiver de 1709 qui porta un coup terrible à la renommée du vin de Suresnes. Les vieux ceps firent place à des nouveaux qui ne donnèrent plus qu’un reginglard.

En vain, en 1724 et 1725, de graves docteurs  de la Faculté de Médecine de Paris soutinrent des thèses publiques pour prouver que le vin de Suresnes l’emportait, en qualité, sur les vins de Bourgogne et de Champagne. Leurs efforts furent inutiles. Comme dit Sancho Pança, qui veut prouver trop, ne prouve rien.

Devant ce retournement de l’opinion, on s’est demandé si l’on n’avait pas confondu, pour leurs vins, Suresnes près de Paris avec Suren ou Surey du Vendômois, dont le vin est de qualité.

Mais non, nous sommes en présence, pour le vin de Suresnes, d’une de ces évolutions dans la qualité des vins qui sont plus fréquentes qu’on ne l’avoue dans les pays viticoles. L’Encyclopediana dit fort bien que « les habitants de Suresnes, qui jouissaient depuis Henri IV de la liberté indéfinie, on t abusé de cette vogue. Ils ont changé peu à peu les plants et la culture pour tirer à la quantité, et ne font plus que de la piquette »

Seuls, les vignerons des grands crus classés savent encore faire du vin, et l’abaissement du cru de Suresnes n’est qu’un exemple entre cent.

Quelques cultivateurs, avant la guerre, récoltaient encore sur le coteau de Suresnes un vin qui avait un léger bouquet rappelant les vins tourangeaux, nous dit Edgard Fournier dans son livre, Suresnes, paru en 1890.

Nous n’en sommes plus là. Les constructions de tous genres ont envahis les pentes du Mont Valérien : en vain chercherait-on aujourd’hui des vignes... Dans les guinguettes, des demoiselles fardées demandent des cocktails ou du thé »

 

Extrait du livre Le Grand Paris de Louis Thomas datant de 1941 qui écrivait dans sa préface : « Pour ce qui est du grand Paris, la tâche est d’autant plus urgente, que les erreurs ont été plus lourdes. Pour l’instant, le pourtour de Paris est un monument de désordre, de stupidité et d’horreur. » Ce cher homme mettait « une confiance entière dans noter chef, le Maréchal Pétain » pour remettre d’équerre le grand binz du Grand Paris. Bref, notre homme était Pétainiste, comme bon nombre de Français – nous sommes en 1941 – nul n’est parfait mais son analyse devrait plaire à notre Périco national chargé de redonner au vin de Suresnes tout son lustre d’antan. Vaste programme aurait dit le Général !


 

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Antoine, vigneron sur le toit de Paris

 

Antoine Chopin, 25 ans, Parisien à la formation et l’expérience en viticulture déjà solides, a été recruté par la ville de Suresnes pour prendre soin des vignes municipales.

Il a 25 ans et c’est probablement le seul vigneron de France à se rendre dans sa vigne avec un Pass Navigo et à la bichonner avec vue sur la Tour Eiffel. Antoine Chopin a été recruté par la ville de Suresnes pour prendre soin des 4 800 pieds de la vigne municipale, plantés sur les pentes du Mont Valérien. Ce Parisien de naissance qui s’est destiné à l’âge de 20 ans à la viticulture, s’attendait logiquement à poser ses bagages professionnels en province. Jusqu’à ce qu’il tombe sur l’annonce passée par Suresnes.

Ancien élève du lycée Henri IV, Antoine doit sa passion pour le vin à ses parents, amateurs éclairés, et son grand père «chimiste de profession mais qui exploitait quatre hectares de vigne à Villié-Morgon (Beaujolais) ». De là sans doute son tropisme pour la Bourgogne voisine. « Ce qui m’a très vite intéressé c’est la rencontre entre l’agronomie et la culture, entre la viticulture et le patrimoine ». Un profil doublement fait pour Suresnes, dont le vignoble aujourd’hui replanté à 80% de Chardonnay, cépage bourguignon par excellence, remonte au 3 ème siècle de notre ère et orne le blason de la ville.

Après avoir intégré l’Institut national agronomique en, 2005 ; il part à Montpellier faire une spécialisation d’ingénieur en viticulture-œnologie. De 2007 à 2009 il enchaine ensuite les expériences de terrain dans des domaines prestigieux : un an de stages au Château Gazin (Pomerol) et au domaine Leflaive (Puligny-Montrachet), puis des contrats de vinifications au domaine Carrick (Nouvelle-Zélande) et au domaine Faiveley (Mercurey).

Depuis le mois dernier il a pu se familiariser avec la vigne qui fait la fierté de la commune et prendre en charge son entretien. « Pour l’instant je n’ai fait que la taille, mais à partir d’avril tout va s’accélérer. Quand elle poussera il faudra procéder à l’ébourgeonnage, appliquer des traitements éventuels et beaucoup surveiller jusqu’aux vendanges ». Auparavant il aura procédé, après filtration, à la mise en bouteilles du 2009, à ce jour encore en cuves. « Je l’ai goûté et ce millésime m’a très agréablement surpris… »

Objet d’améliorations constantes, la vigne de Suresnes avait produit, selon le critique gastronomique Perico Légasse, responsable de la vinification à la Confrérie du vin de Suresnes, un millésime 2008 au « fruité tirant sur les agrumes, le chèvrefeuille, l’amande fraiche », et aux « délicats arômes de mirabelle bien mûre ». A l’instar du célèbre chroniqueur, de grands œnologues (comme Jacques Puisais) ou des viticulteurs renommés (Michel Mallard ou Henri Marionnet) ont prodigué leurs conseils pour améliorer la qualité du vin de Suresnes qui est aujourd’hui le seul d’Ile de France autorisé à la vente. « Avec l’aide de l’Institut français du vin nous avons entamé des démarches afin d’obtenir le nouveau label d’Identité géographique protégée », souligne Jean-Louis Testud, adjoint au maire de Suresnes, en charge des vignes depuis 1983.

 

 

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17 mars 2010 3 17 /03 /mars /2010 09:26

 


Comme je suis un grand provocateur et un petit plaisantin, désolé Jean-Michel mais ça ne mange pas de pain, imaginez la tête des Sots d'eau&consorts au visionnage de ce clip sur EDONYS TV : l'horreur absolue ! Rassurez-vous braves protecteurs de nos corps et de nos âmes faibles une telle horreur vous sera épargnée vous devrez vous contenter de doctes dégustateurs en pantalons sur vos écrans. Une séquence hyper-hard, vins bodybuildés peut vous être envoyée par courrier électronique sur demande par Vin&Cie...  

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17 mars 2010 3 17 /03 /mars /2010 00:06

Tom-7113.JPGL’oreille collée à mon transistor j’écoutais Radio Pékin. Je devais tourner autour des 12 ans et je trouvais cette voix, souvent féminine, très recto-tono, venue d’ailleurs, exotique. Le discours béton sur le Président Mao Tse Dung je m’en tamponnais la coquillette. Mon objectif : avoir un correspondant chinois alors je pris ma plus belle plume et je pondis une lettre à Radio Pékin. Pour réponse je reçus en de grosses enveloppes siglée République Populaire de Chine : « Pékin Informations », le Petit Livre Rouge, toutes les pensées imprimées du Grand Timonier. Rien de très intéressant sauf qu’un beau matin les pandores débarquèrent au Bourg Pailler pour voir avec mon père la tête du révolutionnaire qu’il abritait sous son toit. Ils n’ont vu que mes culottes courtes et mon sarrau. Papa leur a payé un verre et j’ai pu continuer mes « activités subversives ». En cadeau je vous offre un poème de Mao : Les Immortels, en souvenir de ces années de sauvageon rouge du bocage.

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Depuis lors beaucoup d’eau se sont écoulées entre les rives du Fleuve Jaune et, depuis le fameux «
Peu importe que le chat soit noir ou gris ; S'il attrape les souris, c'est un bon chat» et son mot d'ordre aux Chinois : «Enrichissez-vous» de Deng Xiaoping, le célèbre avertissement d’Alain Peyrefitte en 1973 «quand la Chine s’éveillera... le monde tremblera» a pris tout son sens.
Pour preuve, le Quotidien du Peuple en ligne du 11.02.2010  s’interroge sur  un sujet qui nous interpelle Chine : qui consomme le vin rouge importé ? Et ce n’est rien moins qu’une «sommité» bordelaise,  Robert Beynat directeur de Vinexpo, qui alimente la réponse. Donc, toujours pour votre édification, je retranscris in extenso cet hymne au Grand Vin Rouge Français.
J’en profite aussi pour rendre un vibrant hommage à une espèce disparue, qui aurait beaucoup apprécié ce glissement du Petit Livre Rouge vers les Grands Rouges Classés : je veux parler ici des célèbres « Mao Spontex » de mai 68, après tout les éponges sont faites pour absorber du liquide.

 

« La Chine, ainsi que les Etats-Unis, l'Inde et le Brésil figurent parmi le petit nombre de pays dont la consommation du vin continue à s'accroître. », a déclaré récemment Robert Beynat, inspecteur général exécutif de Vinexpo (Salon international du vin et des spiritueux)

En réalité, à partir de 2008, la Chine était déjà à la tête du monde quant à sa consommation du vin et durant cette seule année, sa population a consommé 899,68 millions de bouteilles de vin rouge, alors qu'elle a battu tous les records en multipliant par quatre la quantité de vins importés et vendus au cours des quatre années allant de 2004 à 2008.

« En Chine, les principaux consommateurs de vins importés sont des habitants urbains et surtout des femmes et des jeunes de familles aisées de la classe moyenne. », a indiqué Robert Beynat qui a ajouté que vu de la répartition régionale, la consommation de vin est principalement concentrée dans de grandes métropoles chinoises, dont Guangzhou, Shanghai et Beijing.

D'autre part, a-t-il dit, les fêtes produisent aussi leurs effets : la Fête du Printemps, la Fête nationale du Premier Octobre et la Fête de la mi-automne (ou bien Fête de la Lune qui a lieu le 15 du huitième mois lunaire selon le calendrier chinois) constituent des moments où la consommation de vin atteint son pic, car un grand nombre de Chinois pensent que le vin rouge importé est le meilleur cadeau à offrir à leurs parents ou à leurs amis.

Il a poursuivi en disant que vu sous l'angle mathématique, l'énorme croissance de la consommation en Chine est due à ce que sa consommation par tête d'habitant est relativement bas et faible. « Les Chinois consomment en moyenne chacun chaque année 0,5 litre de vin contre 3 litres pour les japonais, 11 litres pour les Américains et 50 litres pour les Français. », a-t-il précisé.

D'après le dernier rapport d'enquête établi par Vinexpo Asie-Pacifique, de 2009 à 2013, 57% de la croissance mondiale de consommation du vin sera due à la Chine et aux Etats-Unis, soit à peu près 53,241 millions de boîtes de neuf litres chacune.

En parlant de l'enthousiasme des Chinois pour la consommation du vin, Robert Beynat a indiqué qu'elle est due à une « économie dynamique », à une « pratique à la mode », à une « idée saine » et au « développement d'un grand pays producteur de vin ».

Mais ce qui mérite d'être noté, c'est que les données établies montrent qu'en tant que le dixième des principaux pays du monde producteurs de vin, la Chine occupe une quote-part de 88,2% du marché pour le vin de production locale contre seulement 11,8% pour le vin importé. Toutefois, le volume de vente de ce dernier représente plus de 40% de la vente globale sur le marché intérieur.

Cependant, d'après Robert Beynat, le plus grand défi c'est le moyen de faire connaître aux consommateurs chinois la culture du vin rouge. « La plupart d'entre eux demeurent perplexes, indécis et hésitants devant les divers et différents choix à faire. », c'est pourquoi, a-t-il fait remarquer, la Chine constitue un « colossal marché qui attend d'être cultivé et formé », d'un côté en renforçant et en intensifiant les connaissances spéciales sur le vin rouge des distributeurs-vendeurs, des hôtels-restaurants ainsi que des autres commerçants qui pratiquent le métier, et de l'autre côté, il est nécessaire d'apprendre aux consommateurs les moyens essentiels pour connaître et différencier la qualité du vin rouge et pour choisir la variété de vin qu'on désire. « Seuls, les consommateurs raisonnables, sensés et judicieux permettront au marché du vin de se développer de façon saine et stable. », a-t-il conclu. »

 
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16 mars 2010 2 16 /03 /mars /2010 00:09

Anne-Laurence fut pour d’abord pour moi, si elle me permet ce raccourci, « Rouge, Blanc, Bulles... » son blog qu’elle me présentait sitôt né. Belle plume, précise, pertinente, sensible, et je dois l’avouer avec une approche du vin qui est mienne, le professionnalisme en plus : « Il y a les vins qu'on a envie d'aimer parce qu'on aime les hommes (et les femmes!) qui les ont faits. Il y a les vins qu'on a envie d'aimer pour l'endroit où ils sont produits et la beauté du métier. Il y a ceux qu'on a envie d'aimer pour le souvenir qu'ils évoquent. Car le vin, comme la musique, ou un lieu particulier, est aussi un marqueur du temps. » écrivait-elle récemment.
Anne-Laurence de part sa naissance à Quimperlé est une voisine de la belle et grande province du nord de ma petite Vendée : la Bretagne, et il était écrit que nous devions nous rencontrer pour la première fois à Angers là où elle fit, à l’ESA, ses études d’Ingénieur en Agriculture. Ce fut fait au salon des Vins de Loire où elle recevait des lauriers amplement mérités.
Anne-Laurence donc, même si nous ne nous connaissons guère, apporte ce que je souhaite depuis longtemps à notre petit univers du vin : de la fraîcheur, des fenêtres ouvertes sur, un regard porté qui va droit au but. Lui proposer le questionnaire de Marcel Proust allait donc de soi. Ses réponses lui ressemblent bien sûr mais, comme souvent avec ce questionnaire, bien plus que dans un texte construit, les contours de la personnalité se précisent, s’affinent.
J’y ai découvert avec plaisir qu’Anne-Laurence et moi avions une admiration commune, celle d’Edmond Dantès, le comte de Monte-Cristo qui représente, à mon sens, la plus belle porte ouverte sur l’imaginaire, la pure quintessence du héros surmontant la trahison, les pires vicissitudes de la vie avec panache et humilité : l’homme n’oublie jamais d’où il vient et reste fidèle en amitié.
Avec un tel bagage, en sus de celui de ses études et de son parcours professionnel, je suis persuadé qu’Anne-Laurence saura prendre le temps d’explorer et de comprendre la vraie vie qui, comme chacun devrait le savoir, se situe quelque part à l’intersection de ses rêves et de ses choix... Merci Anne-Laurence d’avoir bien voulu vous soumettre à cet exercice pas aussi facile qu’on ne le pense de prime abord.

Tom-1035.jpgVotre vertu préférée : La Sagesse.

Vos qualités préférées chez l'homme : La gentillesse, l'honnêteté, l'ouverture d'esprit, la modestie, l'humour.

Vos qualités préférées chez la femme : Les mêmes !

Votre occupation favorite : Les soirées avec mes amis

Votre caractéristique maîtresse : Entière

Votre idée du bonheur : Une grande tablée, dans une jolie campagne, sous le soleil, avec de bons amis, de bons vins, de bons plats, et des éclats de rire.

Votre idée du malheur : La perte d'un enfant

Vos couleurs et votre fleur préférées : le vert, les tulipes blanches 
 
Si vous n'étiez pas vous-même, qui voudriez-vous être ? : Quelqu’un de zen
 
 
Où aimeriez-vous vivre ? : En Nouvelle Zélande, dans l'Otago 

 
Vos auteurs préférés en prose : J'ai des livres préférés (Siddhârta, Ensemble c'est tout, Des fleurs pour Algernon,...) mais pas d’ « auteurs » préférés

Vos poètes préférés : Baudelaire

Vos peintres et compositeurs préférés : Matisse, Miro, Poliakoff, Soulages. Bach, Beethoven.

Vos héros préférés dans la vie réelle : il y en a plein !

Vos héroïnes préférées dans la vie réelle : ma mère 
 
Vos héros préférés dans la fiction : Le comte de Monte Christo
 
 
Vos héroïnes préférées dans la fiction : Amélie Poulain 
 
Votre mets et votre boisson : Le bar en croûte de sel (de préférence avec vue sur la mer...). Pour la boisson (évidemment le vin!), j'ai bien réfléchi, et malgré mon gros gros faible pour Chave en Hermitage, je crois que le vin pour lequel j'ai le plus d'affectif, c'est incontestablement Léoville Las Cases. En particulier j'ai un souvenir précis du 86, bu plusieurs fois avec des amis.

 Vos prénoms préférés : Jacques

Votre bête noire : L'injustice

Quels personnages historiques méprisez-vous ? : Hitler

Quel est votre état d'esprit présent ? : Ça dépend

Pour quelle faute avez-vous le plus d'indulgence ? : Le retard (modéré) 

Votre devise préférée : « On ne peut comprendre la vie qu'en regardant en arrière. On ne peut la vivre qu'en regardant en avant. »  (Kierkegaard)Tom-3829.JPG

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15 mars 2010 1 15 /03 /mars /2010 00:05

J’adore les dire d'experts en marketing, des qui ne voient pas plus loin que le bout de leur petit bout de nez, qui enfilent des évidences comme d'autres les perles, qui voudraient doctement nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Pour preuve ce beau titre dans WineAlley.com : « Tendance : l’insolente santé des vins de marques de distributeurs. »
Face à lui je me gondole comme un gérant de tête de gondoles se prenant pour un marchand de vins.
Je m’explique : par construction la « marque de distributeur » est une suceuse de roues, celles des marques nationales qui dépensent à tout va pour leur notoriété alors que les gros pépères malins de la GD avec leurs marques dites de distributeurs y suivent juste au cul les gros cylindres et z'empochent pénard des marges sympas.
Bon plan, sauf que dans le vin les grandes marques nationales ne courent pas les rues, qu’elles sont fauchées comme les blés et qu’en définitive le consommateur captif d’une enseigne se retrouve forcément nez à nez avec les fameuses marques de GD. Sauf que ces soi-disant marques ne sont pas des marques puisque je ne peux les retrouver dans n’importe quel point de vente. Si je veux des Panzani je peux descendre chez mon épicier tunisien d’en face et j’en trouve. Si je veux à tout prix de l'Augustin Florent par exemple pour épater la galerie faut que je carapate chez Carrefour qui positive à nouveau. Et du côté de chez moi y'en a pas! Donc, sans être de mauvaise foi, la fameuse insolente santé des soi-disant marques de distributeurs tient à ce qu’il n’y a pas grand-chose en face : « à vaincre sans périls on triomphe sans gloire ! »

Mais pour nous sauver de nos angoisses y'a l'expert Olivier Dauvers, es-grande consommation, cité par Rayon-boissons.com, « Ces croissances vont à l’encontre des codes traditionnels du vin. Les rosés révolutionnent les codes de consommation, les cépages remettent en cause les codes de la réglementation et les Bib® mènent la vie dure à la bouteille. »
Là j'avoue que je suis estomaqué, époustouflé par autant de pertinence à postériori. Constater les tendances plutôt que de les pressentir rend le métier d’expert très père pénard et me fait dire qu’il y a des « décideurs » qui ont du temps à perdre, et parfois de l’argent, pour s’entendre débiter de telles évidences. Ça doit les rassurer sans doute. Mais bon si y’a de la demande pourquoi pas la cajoler, la consoler, la caresser dans le sens du poil avec des ordonnances à deux balles.
Dernière remarque : l’hyperconservatisme des acheteurs de vins de la GD (pas tous, pas tous mais ceux-là ils ont du mal à se faire entendre dans leur crèmerie) et du fameux marketing d’enseigne me fascine : pour sûr qu’ils regardent les révolutions passer comme les vaches les trains (mais celles-ci assument leur fonction économique : ruminer pour faire du lait).

Enfin pour en finir avec cette chronique hautement jubilatoire je ne résiste pas au plaisir de vous offrir les hautes pensées des « penseurs » du Mammouth essoufflé de la GD qui positive à nouveau pour rassurer ses goinfres d'actionnaires de référence qui piaffent devant leur bas de laine qui a fondu « Les résultats mitigés de Terroir d’Arômes nous ont amenés à revoir notre offre au niveau des MDD premium, explique Jérôme Peter, responsable marketing vins de Carrefour Market. Nous avons alors ressorti la signature Reflets de France qui dispose d’une très forte identité sur ce segment de marché dans le reste de l’épicerie.»
La marque a été repensée. Le rayon vin se distingue par l'absence d'étiquette Reflets de France : on laisse l'étiquette du vigneron, pour renforcer la perception d'authenticité et de terroir, on ajoute le repère Reflets de France, au moyen de la collerette : « C’était déjà le cas auparavant et il n’est pas question de faire des étiquettes dédiées à la marque à l’instar des spiritueux, poursuit Jérôme Peter. En revanche, l’approche pourrait évoluer si un Bag-in-box® venait enrichir la gamme. »  Pour le vigneron, c'est une satisfaction, assortie d'une obligation d'exclusivité à l’enseigne. Les vins Reflets de France sont vendus en moyenne 30 % plus chers que les MDD classiques. Avec une quinzaine de références en vins tranquilles d'AOC, la gamme des vins Reflets de France pourrait donc encore s'agrandir, de Bag-in-box®, mais aussi de vins effervescents. »

Sont bons chez Carrefour : ils ressortent de la hotte de leur aïeule la normande de Bayeux : Promodès des signatures qui fleurent bon le terroir. Rappelez-vous d’Augustin Florent : voir chronique du 9 avril 2009 Signé Augustin Florent «négociant de nulle part» : avec Carrefour je ringardise… http://www.berthomeau.com/article-30017583.html . Pour Reflets de France je serai moins sarcastique que pour le pauvre Augustin car c'est une signature qui en son temps anticipait une tendance de fond : comme quoi les empiriques sont parfois bien plus pertinents que les experts, conseilleurs ou petits génies autoproclamés du marketing, et qui dispose encore d’un beau potentiel mais faudrait-il pour ça passer la surmultipliée du côté des gars de Levallois-Perret. Puisque que Carrefour est de retour, c’est la pub qui le proclame, il ne me reste plus qu’à attendre les résultats car si je comprends bien, après de multiples gamelles, c’est dans les vieux pots qu’on ferait le meilleur vin... C'est d'ailleurs pour cela que j'affiche une bouteille de cidre vu que j'ai fait le président normand, en n'étant pas normand, du côté de Caen...

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13 mars 2010 6 13 /03 /mars /2010 00:09

Lorsque mon ami d’enfance Dominique Remaud rejoignit Strasbourg pour y terminer ses études de pharmacie nous étions persuadés à la Mothe-Achard qu’il quittait la douceur océanique, certes un peu pluvieuse, pour les froidures d’un rigoureux et austère climat continental. Il nous décrivit Strasbourg comme une ville universitaire accueillante et chaleureuse ça nous rassura. Bien avant cet épisode, en dehors de mes connaissances d’Histoire et de Géographie sur l’Alsace – des matières dont je raffolais – mes images de cette province frontalière écartelée se résumaient dans deux de ses symboles, qu’un char de notre quartier, lors de la fête des fleurs, avait reconstitués : la cigogne et la grande coiffe alsacienne avec ses deux ailes de papillon noir (le tout fait avec des fleurs de papier crépon). Du côté des vins, hormis des noms de cépages dont certains se révélaient pour nous imprononçables, en ce temps-là je les rangeais dans une étrange trilogie : les Monbazillac, les Layon, et bien sûr les Alsace. Les puristes vont me fusiller mais que voulez-vous l’ignare, que j’étais et que je reste, ne retenait que la sucrosité. Ma relation au sucre est depuis toujours proche de l’ascétisme, de la dose infinitésimale, je n’aime guère les bonbons, les desserts sucrés et je bois mon café nature. Le sucre masque, alourdit, empâte. Donc, hormis le nez des Alsace qui me plaisait je préférais tremper mes lèvres et égailler mes papilles dans d’autres nectars.

 

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Ensuite je suis monté à Paris et là, surprise, les vins d’Alsace n’étaient guère présents sur les cartes des restaurants. Je passe sur les détails de ma vie mais je dois confesser que si sur cet espace de liberté je n’ai jamais chroniqué sur les vins d’Alsace c’est sans doute de ma part une forme de retenue, de pudeur car j’ai du mal à pénétrer dans l’univers des vignerons alsaciens. En effet, dans mon parcours je n’ai jamais arpenté le terroir alsacien – tant mieux pour lui d’ailleurs car mes chefs m’envoyaient plutôt en terre de mission – et si j’ai tout au long de ma vie personnelle pu apprécier des Grands Vins d’Alsace mon côté semelles de crêpe dans les chais et les vignes, mon goût pour le contact des hommes, n’ont jamais été assouvi. Bien sûr il ne tient qu’à moi d’aller m’immerger un de ces quatre du côté de Ribeauvillé chez Etienne Sipp ou de Bergheim chez Jean-Michel Deiss ou chez quiconque voudra bien me recevoir. Les longs nez et les gorges profondes doivent en lisant ces lignes faire déjà des gorges chaudes « au lieu de nous enfariner de tes angoisses t’as qu’à déguster mon petit c’est le B.A.BA des écrivains du vin... » Ben non, chers éminents collègues, je ne suis qu’un chroniqueur pas un dégustateur, moi j’ai besoin de sentir, de ressentir avant de m’aventurer sur un terrain qui n’est pas le mien.

 

Le titre de ma chronique semble indiquer que je me suis lancé dans le grand bain. Yès et, qui plus est, dans un salon majestueux du Grand Hôtel ce lundi passé. Faisait frisquet sur mon vélo j’avais la goutte au nez. J’y suis arrivé via l’Assemblée Nationale à l’heure du déjeuner et j’ai ainsi pu admirer la population des pique-assiettes à l’œuvre autour des buffets. Des morts de faim ! Faut dire que le troisième âge était fort bien représenté. Autour du foie gras ça se bousculait. Je ne vais pas vous refaire mon petit couplet sur la population de ce genre d’évènements mais permettez-moi de douter de la pertinence de la catégorie étiqueté « professionnels » comme disait le père Joseph S « combien de divisions ? ». Bref, auréolé de mon statut journalistique pendu à mon cou j’ai choisi de me soumettre à une vraie dégustation chez Louis Sipp www.sipp.com de Ribeauvillé sous la houlette d’Etienne Sipp dont j’avais déjà apprécié les vins lors du Grand Tasting de B&D sans pour autant me lancer.

 

De retour at home une première angoisse me saisit : dois-je mentionner dans mon titre le cépage en vis-à-vis du Grand Cru ? Si oui, l’ami Jean-Michel Deiss va me faire les gros yeux (et il aura raison car je pense qu’il pointe la bonne direction pour les Grands Crus d’Alsace) : sur les 27 exposants il est le seul à n’afficher que ses dénominations de Grand Cru Schoenenbourg, Mambourg, Altenberg de Bergheim millésimés 2006. Si c’est non je ne fais pas mon boulot d’info alors je me cale sur le catalogue. Nous rediscuterons de tout ça lors de ma grande plongée dans les terroirs alsaciens. J’ai donc goûté 6 Riesling : 2 Grand cru Osterberg millésimés 2008 et 2007 et 4 Grand Cru Kirchberg de Ribeauvillé millésimés 2008, 2006, 2004, 1999.

 

Tout d’abord les présentations : les vignobles Louis Sipp c’est 40 ha situés uniquement sur les coteaux historiques de Ribeauvillé, à densité élevée, maintien des vieilles parcelles, choix de porte-greffes peu vigoureux, cultivés avec attention et précision, avec je dirais respect des gestes fondamentaux. En 2008 sera le premir millésime certifié Bio. Dans la petite musique de notre conversation avec Etienne Sipp ce qui me frappe c’est cette approche paisible, réfléchie, sans emphase qui traduit une manière de concevoir et d’être qui sait faire partager ce faire de chaque jour patient, soucieux, méticuleux. Le langage est alors un trait union indispensable non pour enjoliver, enserrer le vin dans des enluminures, mais pour traduire son parcours jusqu’au verre pour le boire ensemble. Donc maîtrise, respect des spécificités et des individualités, patience et longueur de temps, douceur, soin. Rien de très révolutionnaire mais une suite de gestes, d’actions pour rechercher à exprimer au mieux l’originalité de ces grands terroirs.


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Osterberg : soleil à l’Est (Ost), pentes douces et terroir marneux

Kirchberg de Ribeauvillé : sud sud/ouest, pentes plus raides, marno-calcaro-gréseux.

 

Une petite brochure très bien faite : Terroirs des Vins d’Alsace et géologie distribué par le CIVA donne une bonne vision de la diversité.

 

J’ai beaucoup aimé les 2 Osterberg pour leur droiture sans raideur, ce sont des vins de grande tenue, rigoureux sans être austère car leur plénitude en bouche est telle qu’ils savent sourire et faire sourire. Pour moi ils illustrent bien la tension chère à mon ami Jacques Dupont Merveilleux du vignoble au sens où dans leur netteté ils vibrent, s’élèvent. Dieu que je suis à 100 lieues de mes souvenirs de jeunesse ! (bravo pour l'échelle de sucrosité sur l'étiquette ça c'est une info consommateur). Le 2007 est un grand séducteur qui ne s’affiche pas mais sait bien mieux que les beaux parleurs faire valoir ses charmes secrets.

 

Pour les 4 Kirchberg de Ribeauvillé nous sommes sur un autre registre, plus d’amplitude, de complexité aromatique, tout en gardant une forme d’élégance faite de fraîcheur mais aussi de rondeur souple. C’est du soyeux sans le côté crissant, lisse, de la soie. Le 2004 est un grand beau jeune homme à l’élégance raffinée, il ne se la pète pas tant il est sûr de son charme. Mais ce qui me frappe le plus c’est que le 1999 est toujours en superforme, il n’a pas pris une ride. Vous ne pouvez pas savoir comme à mon âge j’apprécie cette belle jeunesse du cœur nichée dans un Grand Cru sur qui le temps ne semble pas avoir de prise. C’est tout le contraire du jeunisme triomphant, la mâturité sereine, le potentiel de garde des vins Louis Sipp sont bien les meilleur marqueurs de leur authenticité. Là on ne triche pas !

 

Voilà, c’est fait et même si ça doit faire sourire les dégustateurs patentés écrire ainsi sur le vin est une « douleur ». Je dois forcer ma nature de taiseux. Moi qui aime tant jouer avec les mots, convaincre, ferrailler, je me retrouve dans une position proche du moine cloîtré soumis au grand silence. J’aime le grand silence. Comme je l’ai déjà écrit je déteste m’épancher sur mes émotions esthétiques de quelque nature quelles soient. Je préfère faire ça dans mon petit intérieur. Pour autant j’aime partager le plaisir d’une émotion intense et pour ça je reste persuadé que les mots ne sont guère utiles. Je remercie donc Etienne Sipp de m’avoir permis de m’aventurer sur un terrain difficile mais ses Grands Vins et son affabilité m’ont grandement facilité la tâche.

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12 mars 2010 5 12 /03 /mars /2010 18:04

C'est une chronique du 8 février 2006 dédiée à l'ami Régis qui attend son magnum... Bon c'était Gus qui parlait des Rogations mais je me suis pris les pieds dans le tapis car je passais en coup de vent devant mon écran avant d'aller voir un grand film : NORD...
Au temps de mes culottes courtes j'étais un enfant de chœur aux motivations pas très catholiques : le service des mariages et enterrements m'offrait une école buissonnière légale, la soutane et le surplis empesé me seyaient bien, le service des burettes, de la clochette, de l'encensoir, le latin débité, les processions, reluquer les filles pendant la communion, ensemençaient mon imaginaire. Faute avouée est à demi pardonnée.

Dans le calendrier liturgique, outre le lavement des pieds du jeudi saint, la procession des rogations était un must. Pendant les trois jours précédant l'Ascension, nous partions au petit matin avec le curé et nos instruments : croix, chandeliers, aspersoir et goupillon au long des chemins creux, suivis par la petite cohorte des grenouilles de bénitier. L'air vif, le chant des oiseaux, une nature en pleine renaissance, ce transport agreste me transfusait une légèreté fine et dense. Nous allions gaillardement bénir la terre, le terroir dirait-on de nos jours, pour attirer sur lui la grâce divine afin que les travaux des champs et les récoltes apportent un peu de prospérité à notre communauté paysanne.

L'Eglise dispensatrice d'indulgences pléniaires, tenant bien en mains ses ouailles par l'entremise des femmes, a laissé place à une ONG de la commisération. Que les évêques du Languedoc-Roussillon, et même l'archevêque de Montpellier, appellent à la solidarité avec les vignerons, ne me choque pas bien au contraire, leur texte traduit l'inquiétude et le désarroi de beaucoup de vignerons. Ce qui me trouble c'est que la forme suggérée de cette solidarité est l'organisation de réunions d'information entre viticulteurs et autres membres du village. Thérapie collective : nos liens sociaux sont-ils aussi distendus pour qu'il faille attendre du haut clergé un appel à la rencontre pour compatir aux difficultés des autres ?

Solitude, repli sur soi vont de pair avec l'incapacité des élites à prendre la responsabilité de dire, d'expliquer, ici au peuple vigneron qu'une grande mutation se lève, qu'elle n'est pas forcément un risque majeur pour l'avenir si l'on s'y prépare, bien au contraire car le vin de leurs vignes au lieu de s'en tenir à notre beau pays peut finir ses jours, tel est son meilleur destin, dans un verre anglais, californien ou chinois. J'ajoute, que parfois assemblé avec ses cousins d'autres régions de France, il peut porter haut la bannière France et ainsi nos évêques pourront bénir les bateaux emplis de caisses en partance pour le Nouveau Monde des buveurs de vin...

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