Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
10 janvier 2011 1 10 /01 /janvier /2011 00:09

Longtemps je me suis demandé en arpentant les allées des salons divers et variés ce que j’y faisais. Derrière leurs saintes tables emplies de beaux flacons alignés tels les biffins du 152e régiment d'infanterie de ligne (152e RI) – créé sous la Révolution française et surnommé régiment des Diables Rouges – Vigneronnes&Vignerons, hormis ceux qui me connaissaient, dès que je pointais ma tronche de cake, se demandaient avec un soupçon d’angoisse « avons-nous ferré un gros poisson ? »  Normal car, en dépit des étiquettes que l’on me colle « haut-fonctionnaire parisien », « petit rapporteur », « dragueur de câlines », j’ai la tête et la mise d’un acheteur doté d’un beau portefeuille. Espoir cruellement déçu lorsque je déclinais mon absence totale de profession, le vide sidéral de mes occupations. Comme je les comprenais, les salons ne sont pas faits pour drainer des « parasites » de mon espèce plus portés sur le bavardage que sur le colportage de flacons en direction de la consommation. Voilà donc une bonne raison de mon abstention.

 

Pour autant je ne suis pas en train d’écrire que les journalistes de profession n’ont rien à faire dans les salons. Bien au contraire, le rassemblement en un seul lieu des flacons et des vignerons leur permet d’exercer leur profession dans d’excellentes conditions. D’ailleurs, l’an passé j’ai eu le plaisir de croiser une petite poignée d’entre eux avec qui j’ai fait ensuite cause commune pour une aventure électronique dès plus sympathique dites les 5 du Vin. Eux iront sans nul doute et mon abstention aux salons de début de saison : Millésime Bio à Montpellier et le Salon des Vins de Loire à Angers ne troublera guère le petit monde du vin. Bref, ne croyez surtout pas que je joue le cabot qui veut se faire désirer et qui attend que le public vienne le supplier de remonter sur scène. Chez moi le mal est plus profond : comme une envie d’un temps sabbatique, hors le cercle, loin des petits clapots du marigot et de certains agités du clavier qui me gonflent passablement. Mon seul regret sera de ne pouvoir saluer mes amis vendéens et autres, mais je saurais trouver le temps d’aller leur dire un petit bonjour chez eux dès que l’occasion m’en sera donnée.

 

Ce souhait est une bonne transition vers mon incapacité notoire à faire de la dégustation de type « abattage ». Je fatigue, ça m’ennuie, et plus encore si de surcroît le vigneron m’assène un cours de géologie, d’ampélographie et de plein de science en i je coule car je ne sais pas tenir mon verre, prendre des notes, humer, déguster, gazouiller et donner le change. Moi j’aime le silence des bibliothèques et des librairies ou le bruit des cafés mais pas ce chemin de croix, à station multiples, où je souffre en silence sans qu’aucune Marie-Madeleine ne vienne à mon secours en me proposant les délices d’un ciboire annonciateur de plaisir. Vignerons&vigneronnes, vendeurs de vin de toute obédience, ne prenez pas à mal ce que j’écris car je suis un inadapté inguérissable qui ne sait que baguenauder, flirter avec les lignes, bavasser, chroniquer à tort et à travers. N’essayez pas de me convertir, de me tirer les vers du nez pour en savoir plus sur mon moi profond, faites tranquillement votre boulot sans vous soucier de moi. Que voulez-vous, contrairement à certains, je ne suis pas 100% vin, j’ai une autre vie, même une double vie, ce qui ne m’empêche pas pour autant d’en consacrer une belle part à l’extension du domaine du vin en ferraillant contre tous ceux qui veulent l’enfermer dans leur pré-carré ou carrément le transformer en friches pour nous défendre contre nous-mêmes.  

Bons salons à tous et à toutes, à bientôt... je pars de ce pas courir la peurtantaine http://gasdutsarollais.free.fr/textes/la_peurtentaine.htm  

 

Pouffe 4088

Partager cet article
Repost0
9 janvier 2011 7 09 /01 /janvier /2011 00:09

Je suis fou de Verdi ! C’est tripal ! Je vous propose donc en ce dimanche où certains vont tirer les rois à la fois le texte d’une vieille chronique : « Pépé aimait l’opéra» et la scène 1 du premier acte d’Ernani avec le célèbre chœur Evviva ! Beviam ! Beviam !

 

« Je m'appelle Léone Gémény. Mon grand-père était fou d'opéra. Il avait entendu la Callas, Tebaldi et tutti quanti. Pendant quarante ans il alla de Salzbourg à Vérone, de Bayreuth à Vienne et - surtout - à la Scala...

En septembre 1954, grand-père fêta ses quatre-vingts ans. Très affaibli : il marche difficilement, cherche querelle à sa gouvernante pour un rien et ne sort de cet état pitoyable que pour écouter des disques de bel canto. Le 6 décembre, coup de téléphone de sa gouvernante : il a disparu. La gendarmerie, prévenue, ne retrouve pas sa trace. Un avis de recherche est diffusé, avec sa photo, dans la Voix du Nord.

Le 10 décembre. Nouvel appel de Marthe. Il est réapparu cet après-midi extrêmement fatigué et s'est couché immédiatement. Il refuse de donner la moindre explication. Nous arrivons en hâte. Calé sur un oreiller brodé à son chiffre, grand-père raconte : « Je voulais m'offrir une escapade à Milan et je suis allé entendre le spectacle d'ouverture de la saison à la Scala. » Puis, il s'endort. Nous rentrons à la maison.

13 décembre. Mme Marthe en pleurs, au téléphone. Elle a trouvé grand-père mort dans son lit. »

 

Extrait de Opéra La diva et le souffleur Autrement juin 1985

 

J'aime bien ce petit texte. J'aime bien les gens capables de prendre le premier train pour... J'aime beaucoup les grains de folie. J'aime beaucoup ceux qui gardent leurs passions intactes. J'aime beaucoup l'opéra, surtout celui de Verdi. Mon tube : Ernani du génial Giuseppe dans la version enregistrée le 7 décembre 1982 à la Scala de Milan avec à la baguette Ricardo Mutti et Romano Gandolfi comme maître du choeur. Pour les interprètes : Placido Domingo, Mirella Freni, Renato Bruson, Nicolai Ghiaurov... Si le spleen vous gagne en ces temps mous et gris, chargez sur votre Ipod le choeur de la scène 1 du premier acte, ça vous redonnera goût à ma vie. En traduction libre ça donne : Hourra ! Buvons ! Buvons !

                          Trouvons du plaisir au moins dans le vin !

                          Que reste-t-il d'autre au bandit,

                          évité par tous

                          S'il n'a pas un verre ?

                          Jouons, car l'or

                          est un trésor inutile,

                          qui vient et qui part.

                          Jouons, si la vie

                          n'est pas rendue plus agréable

                          par une beauté souriante.

                          Dans les bois et sur les collines

                          nous avons nos seuls amis,

                          le mousquet et le poignard.

                          Lorsque descend la nuit

                          dans la triste grotte

                          qui nous sert d'oreiller.

                          Soyons gais et buvons. Buvons !

                          Trouvons du plaisir au moins dans le vin.

 

Bien sûr c'est mieux chanté par le choeur de la Scala en italien. C'est édité chez EMI. Le livret d'Ernani est de Francesco Maria Piave d'après Victor Hugo. La première d'Ernani eut lieu le 1er mars 1844 à la Fenice de Venise.

 

Je vous propose une version classique en audio et une version populaire en vidéo 

Partager cet article
Repost0
8 janvier 2011 6 08 /01 /janvier /2011 00:09

Dans le petit monde confiné de ce que certains dénomme le Bloglouglou – dénomination qui sent la régression comme le note à juste raison notre consœur vigneronne-journaliste Catherine Bernard – la propension à qualifier de débat de fond une certaine forme d’agitation verbeuse me ravit. Les rôles sont bien distribués, chacun joue sa partition, délivre son message, le plus souvent avec des on tout rond, bien creux pour contenir tout et rien. C’est pratique, c’est même très commode, ça fourre ceux qui se reconnaîtraient dans le sac prévu à cet effet. Est-ce à dire pour autant que nommer c’est dénoncer, être un délateur. La réponse est bien évidemment non, dire ce que je considère – le moi ici s’impose – comme contraire soit à ce que j’estime être la vérité, soit inexact, soit outrancier, n'est en rien une dénonciation et pire une délation...Mettre en vis-à-vis de mon opinion le nom de celui dont je conteste les dires ou les écrits ou celui d’un groupe n’a rien d’une délation. Nommer est bien plus respectable et courageux que l’hypocrisie de la généralité. Pour autant dire ou écrire, même avec vivacité, n’est pas insulter. C’est se confronter, même s'affronter, sans se masquer. Bien plus méprisable sur le Net est l’anonymat de certains commentateurs vindicatifs. Là sont les délateurs, les pleutres, les méchants, ceux qui se complaisent dans l’anonymat couard. Je préfère ceux qui me disent en face que je suis un con ou tout le mal qu’ils pensent de moi à ceux qui se font patelin, gentil en façade pour cacher les aigreurs d’estomac à mon endroit. J’ai toujours pratiqué cette franchise directe, quoiqu’il m’en coûte, comme ce refus de serrer la main, lors d’un pince-fesses « glouglou » à un député – toujours député – car je ne supportais pas ses propos xénophobes dans son bulletin municipal d'une ville qui sonne comme un Grand Chateau de Bordeaux. J’eus droit à des menaces sur mon devenir. En toutes circonstances je préfère le dire à qui de droit à l’amalgame large et pâteux. De même lorsque j’estime que Michel Rolland profère des énormités – qu’il déclare ne pas avoir dites – je l’écris au risque de voir ses adorateurs claquer la porte de mon espace de liberté.

 

Bref, tout ça pour présenter une de mes dernières acquisitions chez un libraire à Apt Traité de la Délation par Romain Motier citoyen de Genève 1947 publié Aux dépens de Romain Motier. L’auteur, mort le 17 novembre 1946 dans sa modeste maison du Plan-des-Ouates, était né à Carouge en 1873, a suivi une carrière paisible à la Bibliothèque publique de l’Université. Pendant les deux grandes guerres il prodigua ses soins à l’Office Central de la Croix Rouge. Grand voyageur, érudit, s’adonnant à des travaux historiques et philosophiques, En France, connu d’une élite littéraire, il amassa lors de ses longs et fréquents séjours une importante documentation car « les vicissitudes de ce malheureux pays l’intéressaient beaucoup » Son opus le plus fameux fut son Traité de l’Intolérance achevé en 1945.

img211.jpg

 

« De la délation en général »

 

« Il est curieux que le mot délation s’applique tout ensemble, chez les auteurs qui savent les nuances de leur langue, à la dénonciation politique et à une démarche méprisable. Pourquoi ce sens péjoratif ? Parce que la délation est censée, en principe secrète, tortueuse et au surplus intéressée. »

 

ARTICLE 58 du Code Pénal Soviétique, paragraphe 12

 

« L’omission de la dénonciation, s’il s’agit de la préparation dûment connue ou de l’exécution d’un délit contre-révolutionnaire, comporte la peine de privation de la liberté pour une période de temps qui ne sera pas inférieure à six mois. »

 

Le « Vice National des Français »

 

«La délation est devenue le vice national des Français » écrivait récemment M. Lourenço Barretos, l’éminent journaliste d’Amérique du Sud. Cette assertion a paru étonnante à quelques personnes peu au courant de la psychologie des peuples. Comment l’esprit de délation pourrait-il fleurir dans une nation qui a pris pour devise : Liberté, Égalité, Fraternité ?

Mais justement cette formule mérite d’être expliquée.

En matière de fraternité, il est bien connu que la vertu de ce nom représente un idéal inaccessible et non pas une pratique établie. Toutefois, il y a des peuples où le sens fraternel, communautaire, existe à quelque degré. On se plaît à le reconnaître chez les Russes, chez les Allemands (à l’intérieur de leur race, bien entendu) et chez des peuplades primitives où l’on se sent encore proche des origines, uni par le sang, par les préjugés de la tribu, par l’inceste, par la religion. Les Français ont, depuis longtemps, dépassé ce stade. Ils ne sont plus qu’une poussière d’individus et s’en vantent parfois. Il est naturel que nulle part plus que chez les Français on ne voit servir le férocité personnelle, le struggle-for-life, le système du débrouillage aux dépens de la société, bref l’égoïsme. Passons condamnation et n’en parlons plus. »

 

Et de citer le témoignage d’un magistrat d’une petite ville de province ayant instruit des affaires avant, sous et après Pétain « j’y ai observé tous (vous m’entendez bien : tous) les actes possibles contre l’amitié. Les amis s’y sont poursuivis, dénoncés, trahis, livrés, persécutés et parfois, je puis bien le dire : assassines. Et cela, non par politique ni par patriotisme, non par le commandement d’un idéal qui expliquerait le sycophante s’il ne l’excuserait pas. Non ; mais par la plus basse crainte, par une peur abjecte d’être confondu dans la même réprobation du bras séculier – quand quelque sordide intérêt de pécune ne poussait pas encore plus profond au terreau de la foule les racines de ces horreurs. »

 

En matière de liberté, la France n’a jamais marqué l’appétit sincère du libéralisme, qui est le respect des libertés réciproques ; son histoire offre une longue suite d’intolérances et d’oppressions. Elle s’accommode très bien de la tyrannie, comme tous les peuples dit démocratiques, pour qui il s’agit simplement d’établir un tyran collectif, l’hégémonie d’une classe et d’un parti.

Actuellement, nous voyons très bien les Français tolérer la suppression de toutes les libertés publiques, spécialement de la liberté de pensée et d’expression, et ne s’en porter guère plus mal. Chacun d’eux se moque de la liberté d’autrui, et ne proclame sa liberté propre que pour faire litière de celle-là. Ici, encore : n’insistons pas, il faudrait retracer la chronique de trois siècles pour démontrer une vérité si évidente. Nous n’aurons pas le ridicule de chercher tout un trousseau de clés pour ouvrir une porte déjà béante. »

 

« Mais en matière d’égalité, le peuple français est sans rival. Il nourrit la passion, la manie, l’obsession de l’égalitarisme. Il est chicanier, revendicateur, jaloux, inquisiteur. C’est lui qui, seul dans le monde, avait inventé des numéros d’ordre imprimés pour les gens qui attendent l’autobus : seul moyen, à Paris, par exemple de les empêcher de s’entretuer ! Seul moyen de créer un droit écrit, un titre palpable, un document pour la priorité, sans quoi chaque retardataire hurle contre celui qui a eu la chance d’arriver avant lui... Et encore, quiconque a vu les regards de haine que suscitait un porteur de carte spéciale (femme enceinte, mutilé, médecin) peut mesurer l’affront que cause à l’égalitarisme français la moindre exception, le moindre privilège fût-il réglementé et justifié... Haro sur le plus riche, sur le plus heureux, sur le moins bête ! De quel droit a-t-il ce que je n’ai point ?

La haine de l’ordre naturel découle justement chez les Français, de ce grief : la nature distribuant inégalement ses faveurs, la vengeance consistera à l’accuser d’injustice ; et en effet la nature n’est point du tout républicaine.

 

Or, quand on en vient à accuser ses favoris, nous voici à la dénonciation. Car la dénonciation consiste essentiellement à récriminer contre celui qui vous a fait tort, soit d’intention, soit de fait simplement. Si nous employons cette expression, c’est que dans le Midi de la France, elle est courante : M’en-fa-tort, le ils m’ont fait tort, ne sont autres que ces éternels envieux sans cesse prêts à se plaindre du voisin au maire, au garde-champêtre, au curé, au préfet, au Vénérable de la Loge au député, au bon Dieu ou à ses saints. Ils se sentent offensés, outragés, dépossédés par l’existence même de leurs rivaux. Ils ne peuvent supporter qu’ils soient gratte-culs quand il y a des roses, noisetiers quand il y a des chênes, caporaux d’infanterie quand il y a des lieutenants de hussards, cocus quand il y a des séducteurs, ni que le poison morde à la ligne du camarade, ni que la peinture soit plus chère que la photographie. Avec des dispositions pareilles il est évident que la délation germe naturellement dans un peuple si à cheval sur ses droits, ou plutôt sur ses notions du droit. »

 

Citation ne vaut pas approbation de tous les propos de l’auteur mais, même si ceux-ci peuvent paraître datés, il n’en reste pas moins vrai qu’ils recèlent un part de vérité qui est certes peu agréable à entendre mais que nous aurions tort d’ignorer. Apposer à qui que ce soit l’étiquette de délateur, même par dérision, sous-entend que l’on y fourre tout ce qui précède, c’est infamant. Les mots ont une valeur, un poids, les aligner sans aucun souci ou pire avec l’intention de blesser, participe bien à une volonté de nuire. C’est moche. C’est très petit. C’est très français. Mais que voulez-vous « Nous qui sommes forts, nous devons supporter les faiblesses de ceux qui ne le sont pas. » Paul. Rom., XV, 1. Quoiqu’il en soit je ne me sentirais pas à l’aise ni dans la peau d’un dénonciateur ni dans celle d’un délateur, je suis un attaqueur parce que j’aime l’attaque, au sens sportif, et que j’ai une bonne défense. Ayant pratiqué le basket de haut niveau, jeu ou l’on est tour à tour défenseur puis attaquant, j’aime l’homme à homme, le marquage à la culotte, la passe décisive ou le shoot à distance. Voilà c’est dit, après ce petit match en chambre, je m’en retourne à mes occupations domestiques... Comprenne qui pourra !

Partager cet article
Repost0
7 janvier 2011 5 07 /01 /janvier /2011 00:09

« T’es pas chiche ! » et nous n’étions point chiche pour aligner les conneries dans l’ennui de nos jeunes années à la campagne ; pas des grosses bien sûr, nos défis se cantonnaient à pisser dans les trous de cri-cri ou à tirer la sonnette du pharmacien. La Vendée pays des fayots, des mojettes, où nous passions nos veillées à trier les lingots ou à jouer aux haricots, ignorait bien sûr le pois chiche plus familier des terroirs méditerranéens. Prière de ne pas affirmer pour autant que nous ayons un pois chiche à la place du cerveau.

 

Je ne renie pas le haricot de mon enfance, il fait parti de l’Histoire de mon pays crotté ; rapportées d’Amérique du Sud au XVIème par des navigateurs, les graines de haricots blancs furent en effet confiées aux moines de Vendée qui, habilement, parvinrent à les acclimater et à les multiplier, pour en faire, durant de longues décennies, le quotidien des paysans. J’adore manger une tartine, légèrement dorée, embeurrée au beurre salée, graissée de mojettes froides, mais le pois chiche, que j’ai découvert avec le couscous, mais le pois chiche occupe une place à part dans ma culture culinaire.

 

Domestiqué, selon Candolle, dans « des pays entre la Grèce et l’Himalaya, appelés vaguement l’Orient », le Cicer arietinum a sans aucun doute une naissance méditerranéenne. Dans l’Hérault «  le site le plus ancien est la grotte de l’Abeurador et les paléosemences trouvées ont été datées de 6800 environ avant JC. » Aux temps homériques il jouait, grillé, un rôle dans les libations parmi les tragemata, pousse-la-soif que l’on offrait aux convives. Cicéron lui devrait son nom car sa famille se serait illustrée dans son commerce (les mauvaises langues affirment que ce patronyme fut forgé ironiquement par ses contemporains en raison de la verrue qu’il avait sur le nez).

 

Cependant dans sa Flore populaire Eugène Rolland recense « plus de 90 dénominations relevant aussi bien des dialectes d’oc que ceux d’oïl » du cigron catalan au txitxirio basque en passant dans le Midi du cèé niçois au ciouron roussillonnais, le tchyi provençal d’Aups, le ticché limousin ou le cézé békin gascon de Lectoure. Il remonte jusqu’en Wallonie avec le codriyò ou se niche dans les vallées alpines pézé golou dans le dialecte franco-provençal. Le cicer apporte partout sa « note ensoleillée ».

 

Mais, comme je suis lu par une tripotée de canaillous, la forme du pois chiche « arrondi, déprimé et aplati sur les côtés, le grain présente une sorte de bec formé par le relief de la radicelle, et son aspect d’ensemble est celui d’une tête de bélier flanquée de ses cornes enroulées. » Je suis sûr que ça va inspirer notre ami Charlier, d’autant plus que le sillon qui sépare ses deux cotylédons lui confère en Languedoc le surnom de petit-cul (Marie Rouanet dans son Petit Traité romanesque de la cuisine). Les espagnols lui donnent du « nez de veuve et derrière de couturière » Vision renforcée par sa réputation, en dehors de ses vertus curatives et toniques, d’aphrodisiaque.

 

« Le botaniste arabe Ibn al-Baytâr (1179-1248) rapporte qu’Oribase (qui, au Ive siècle, sous l’empereur Julien rassembla les écrits des anciens médecins) condensait ainsi la contribution du Cicer arietinum à la perpétuation de notre espèce : « Le coït, pour être complet, a besoin de trois choses. La première est un surcroît de chaleur qui se communique à la chaleur naturelle et qui excite l’appétit vénérien ; la seconde est un aliment nutritif doué en même temps d’une humidité qui humecte le corps et accroisse la somme du sperme ; la troisième est de développer des vents et de la tuméfaction qui se transmette aux veines de la verge. Toutes ces choses se rencontrent dans le pois chiche » (beau texte pour Flo qui doit acheter ses pois chiches chez Carrefour au prix du hard). Pino Correnti dans son livre Cinq Mille ans de cuisine aphrodisiaque recommande de goûter au pilaf de Palmyre ou au cocido castillan où le pois chiche est indispensable.

 1270818_3174770.jpg

Toute ma science du pois chiche est extraite du remarquable Traité du pois chiche de Robert Bistofi et Farouk Mardam-Bey L’Orient gourmand chez Sindbad Actes Sud qui nous offrent aussi cette belle phrase « Et comme la verve populaire refuse le désenchantement du monde qui accompagne les avancées de la science, comme elle se moque également de la bienséance, rappelons que dans certains coins de Provence le cese désigne argotiquement le clitoris... » Nous aussi, sur cet espace de liberté, nous refusons le désenchantement et nous nous moquons aussi de la bienséance.

 

Et nos auteurs de citer, entre autres, « un plat original, les ciceri e tria, ou massaciceri des Pouilles » qui « relient le pois chiche à une ancienne pratique charitable. » J’en salive car « elle mélange pois chiches et larges nouilles faites à la main, celles-ci étant pour partie cuites à l’eau, et pour partie frites. L’assaisonnement des trois ingrédients, mélangés au moment de servir, se fait simplement avec l’huile de friture des pâtes, dans laquelle on a fait blondir de l’ail coupé en fines lamelles. » Ces massaciceri étaient servies aux pauvres à la table familiale la veille de la saint-Joseph le 19 mars.

 

Alors dites-moi : quel Saint Joseph serviriez-vous avec les massaciceri de Lecce ?

Ce brave charpentier si discret a bien droit à un peu d’attention en ces périodes de bombance.

 

Comme vous connaissez aussi mon penchant pour la convivialité alors je ne résiste pas au plaisir de vous citer un texte du VIe siècle avant JC, Parodies, de Xénophane de Colophon, fondateur de l’école d’Elée, qui est montre la contribution du pois chiche au bien vivre ensemble. « Il fait bon en hiver, devant un grand feu sur un lit mollet, le ventre plein, en buvant un vin délicieux et s’amusant à picorer dans un plat de pois chiches, il fait bon dis-je, de demander : De quel pays êtes-vous, mon ami ? Quel âge avez-vous ? Quelle taille aviez-vous quand les Mèdes prirent la fuite ? »

 

Pour finir, une plongée dans l’Histoire, avec en 1282, Les Vêpres Siciliennes, le soulèvement des Palermitains révoltés contre les Angevins qui usèrent d’un subterfuge pour les identifier : « ils demandaient à chacun de dire le mot cicero (pois chiche en sicilien), mot difficile à prononcer correctement par les étrangers, fussent-ils depuis longtemps dans le pays. Un « pois chiche » prononcé de travers, et c’était la mort... »

 

Enfin je signale que « Le pays d’Orb, dans le nord de l’Hérault, présente une palette de roches colorées prisée des géologues : le blanc du calcaire des causses, le rouge de la bauxite et le noir du basalte, sur lequel pousse le pois chiche de Carlencas qui est vendu à la Maison de pays de Bédarieux, à La Rosée, et à la SICA du Caroux, à Villemagne-l’Argentière. »

 

Alors je pose la même question que boire avec un Cappuccino de pois chiches aux cèpes de Jean-Marc Bonnano à « l’Auberge de Combes », 34 240 Combes ? www.aubergedecombes.com 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
6 janvier 2011 4 06 /01 /janvier /2011 08:00

En cette période de l’année certains enfilent les vœux à la chaîne. Pour ma part, sans sacrifier à une quelconque tradition je ne puis m’abstenir de me joindre à ma façon au cortège officiel en m’essayant à l’humour anglais. Pour ce faire je vous propose un excellent conseil de François Mauss cru 2008 qui, comme les bons vins, vieillit bien puis un plus récent de l’ami David Cobbold. À vous de juger et d’en faire votre miel.

 

 

Un blog à consulter régulièrement : celui de Berthomeau

 

Jeudi 11 Septembre 2008, 17:45 GMT+2 Par GJE Cet article a été lu 676 fois

 

Je viens de parcourir les textes de Berthomeau qu'on connaît par le grand rapport qu'il a écrit sur les problèmes de la viticulture française, et les solutions qu'il préconise.

Je ne peux que recommander une lecture régulière de ce blog souvent magistral et surtout de la part de quelqu'un qui a des idées précises et n'a pas sa langue dans sa poche.

 

Bravo !

 

François Mauss

 

 

 

Roulez Bien en 2001

Have great ride this year

carte_de_voeux_2011_2.jpg 

David Cobbold

 

Excellent vœu de l’ami David sauf que rouler à gauche en notre beau pays françois peu s’avérer des plus dangereux pour la santé comme dirait nos amis du Ministère de la Santé. Bien sûr je pourrais croire que cette carte de vœux étant à moi seul destiné David suggèrerait ainsi que je dusse rouler pour la gauche mais ce serait là nuire gravement à ma sécurité...

 

Partager cet article
Repost0
6 janvier 2011 4 06 /01 /janvier /2011 00:09

crois-au-rouge-530x544.jpg

« Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil... » ironisait le grinçant Jean Yanne, s’il eut connu Facebook je suis persuadé qu’il nous aurait concocté une pochade sur le grand lac des « amis». C’est simple comme un clic de s’en faire sur le réseau communautaire créé par Mark Zuckerberg. Dans son film, alors que Prévost délire à la radio sur les amis : Blier le big  chef comme Yanne le râleur ponctuent : « c’est de la merde ! » Attention, je ne suis pas en train de cracher dans la soupe puisque je suis moi-même sur Facebook. J’y ai, à l’heure où j’écris cette chronique, 732 amis dont plus de 99% que je n’ai jamais vu, jamais entendu et qui à priori se préoccupent plus de poster que d’engager un réel dialogue avec moi. Ainsi je suis sollicité pour des évènements, pour faire parti d’un groupe de ceci ou de cela, pour partager les goûts de X ou de Y... bref, à de rares exceptions, la canalisation coule toujours dans le sens descendant et ça ne remonte jamais. Certes certains dialoguent en direct mais n’ayant pas de temps à consacrer à ces échanges je n’en mesure ni l’importance ni l’intérêt. Attention je ne dénie pas aux réseaux sociaux leur capacité à créer des liens entre les personnes mais j’y sens plus de communautarisme que de sociabilité et surtout j’y sens la main prégnante du marché.

 

Moi-même si je poste chaque jour mes chroniques sur Facebook c’est pour accéder, entre guillemets, à une nouvelle clientèle. La diffusion sur le Net exige que l’on soit présent partout. J’assume donc cette présence sans aucun complexe mais j’avoue rester parfois perplexe sur le contenu et sur le devenir de certains contenus. Ce n’est qu’une forme de doute, je ne porte pas de jugement péremptoire ni ne qualifie de gamineries l’inventivité de certains. Comme l’aurait dit Mao, grand spécialiste du maniement du peuple, il y a un côté cent fleurs (百花运动/百花運動) – campagne qui visait à redonner une certaine liberté d'expression à la population, tout particulièrement aux intellectuels, pour critiquer le Parti – car le but affiché sur un réseau social est l’échange, la création de liens alors qu’en fait, dans la majorité des cas, c’est un grand théâtre d’ombres où chacun cherche à se faire une place au soleil, sortir du gris de l’anonymat, être connu quoi. Ambition louable j’en conviens mais qui nous vaut des miss France ayant fait HEC et des débiles profonds, style Stevie, qui passent à la Télé. Le web, comme je l’ai écrit récemment, « pousse les murs » de l’espace public tout « en enlevant le plancher » et devient la nouvelle frontière pour monsieur et madame tout le monde. Là encore nulle ironie de ma part mais pur constat du fossé qui se creuse entre ceux, une poignée, qui prennent toute la lumière et ceux, la masse, qui se morfond dans l’ennui de la classe moyenne, dans le désintérêt de jobs peu gratifiants, dans le froid glaciaire du chacun pour soi. Je force sans doute un peu le trait mais moi qui suis dans la dernière ligne droite d’une vie professionnelle qui m’a donné beaucoup de satisfactions – pour autant je ne dis pas que j’ai réussi ma vie – je sens mariner des frustrations, des pourquoi pas moi.

 

Que viens faire le marché dans tout cela ? Pour faire simple je dirais que nos jeunes pousses l’ont totalement intériorisé, il est leur façon de respirer. Nous, les connards de soixante-huitard, qui avons ouvertes grandes les portes de la société de consommation, affichions des idées en béton puisés dans les grandes idéologies, nous voulions refaire le monde et, sans doute, n’avons-nous que refait les peintures de nos salons pour mettre en valeur nos meubles design. L’heure n’est plus à ces balivernes, sauf pour quelques minorités plus jacassantes qu’agissantes, mais au modèle économique de l’instantanéité si bien illustré par les traders qui se goinfraient, et qui continuent de le faire, pour en une petite poignée d’années atteindre le top des nouveaux riches. Bien sûr les réseaux sociaux sont plutôt peuplés de petits caïmans mais des caïmans tout de même. Sur le web l’économie de moyens pour s’y positionner donne à tous de grands espoirs. Trouver le bon truc qui fera le buzz, le tour du monde en 80 secondes, et qui vous propulsera au nirvana de la notoriété. Devenir le Gary Vaynerchuk français du vin ou le nouveau Bob Parker de la Toile... le rêve quoi ! Comme nous sommes dans une phase où les seuls qui s’en foutent plein les poches sont les fabricants de tuyaux (la valeur de Facebook dépasse celle de Yahoo), sur les réseaux sociaux le petit monde se presse en rangs serrés et l’heure est à « embrassons-nous Folleville... ». Tout le monde y attend tout le monde en se gardant bien d’avoir des aspérités, des angles, une ligne. Les provocations sont surtout formelles alors que le fond ne contient guère de matière : les sujets défilent et leurs enterrements se font sans fleurs ni couronnes dans l’indifférence générale.

 

Le marché est sans pitié dans un « Océan Rouge » où l’intensité de la ponction affaiblit chaque jour la ressource. L’essoufflement et l’épuisement viendront sans aucun doute et, à mon sens, ne survivront que ceux qui auront su aller jeter leurs lignes dans le paisible « Océan Bleu » là où, pour l’heure, il ne se passe rien. En n’écrivant cela je ne joue pas les rabat-joies mais je m’essaie à mesurer l’importance d’un phénomène dont je ne saisis sûrement pas toutes les composantes. Réfléchir n’a jamais fait de mal à qui que ce soit et la transmission, même si l’expérience et les apprentissages sont raillés par les jeunes boutures, devrait être au centre des fameux réseaux sociaux plutôt que cette concurrence ripolinée « en tout le monde il est beau, tout le monde, il est gentil... » Le monde est dur et sans pitié, marcher sur la tête de son voisin avec le sourire n’est pas différent de l’écraser avec cynisme. Retrouver le sens du collectif, une culture du bien commun ne nuit en rien à l’épanouissement personnel, à l’esprit d’entreprendre. Alors, comme je crois toujours en la vertu de l’intelligence, j’attends que les « amis» des réseaux sociaux fassent autre chose que de s’empiler comme les briques d’un mur de l’indifférence même si celui-ci est peint aux couleurs des bons sentiments. Sachez que mon espace de liberté est ouvert à tous les talents qui voudraient venir s’y exprimer et y « bénéficier » de ma toute petite parcelle de notoriété...

 

Afin de bien me faire comprendre, et je ne suis pas sûr pour autant d’être bien compris, ces quelques réflexions sur ce que je ressens face à l’observation du comportement de certains sur Facebook, ne vaut pas condamnation. Je n’ai instruit aucun procès et je ne m’érige pas en juge. J’émets simplement le souhait que sur cette nouvelle trame s’instaure entre les « amis » un vrai dialogue qui dépasse le convenu, le simple affichage, la pure ingéniosité, la quête éperdue de soi-même. Sans doute suis-je un Vieux Con mais que voulez-vous je ne me soigne pas et je suis prêt à relever tous les défis d’une vraie convivialité, d’un réel bien-vivre au travers de goûts communs. « Un peu de douceur dans un monde de brutes... » oui mais bien au-delà d’un Bloglouglou bien réducteur, bien fermé... Levons le nez de nos verres pour voir les gens qui sont autour de nous... ça ne peut que faire du bien à tout le monde y compris à l’extension du domaine du vin...  

 



Tout le monde il est beau,Tout le monde il est gentil
envoyé par DinozzoGibbsProd. - Plus de vidéos fun.

 

mardi 4 janvier 2011

Goldman Sachs investit lourd dans Facebook valorisé 50 mds

Facebook a levé 500 millions de dollars auprès de la banque Goldman Sachs et du groupe russe Digital Sky Technologies (DST) dans le cadre d'un accord valorisant le site de réseau social 50 milliards de dollars, selon une source proche du dossier.
Les deux groupes prévoient en outre de lever au moins un milliard de dollars supplémentaires à investir dans Facebook, a dit la source qui s'exprimait sous le sceau de l'anonymat.
L'investissement réalisé par Goldman et Digital Sky donne à Facebook une valorisation supérieure à celle de géants plus anciens de l'Internet, tels que Yahoo! et eBay et pose une nouvelle fois la question de l'introduction en Bourse du site de réseau social.
Le cycle d'investissement, dont le New York Times s'était fait l'écho le premier, survient un an et demi environ après un investissement de 200 millions de Digital Sky. Il valorisait alors Facebook 10 milliards de dollars.
Goldman Sachs prévoirait de créer un véhicule d'investissement destiné à l'investissement dans Facebook pour ses gros clients, selon le New York Times.
"Nous avons choisi une stratégie de total et inconditionnelle concentration sur l'Internet comme outil de consommation, et je dirais même l'Internet social", avait indiqué Yuri Milner, le président de DST, le 28 décembre dans une interview au quotidien des affaires russe "Vedomosti".

Partager cet article
Repost0
5 janvier 2011 3 05 /01 /janvier /2011 08:00

Chers lecteurs, la vie sur cet espace de liberté est pleine de rebondissements, de saillies, de variété, de questions idiotes, de réponses savoureuses ou idiotes, mais comme le dit l’adage populaire « il vaut mieux en rire qu’en pleurer » Dans la case pourvoyeur de rire salubre, de salubrité publique même, François Morel est l’un des meilleurs. La preuve cette chronique de la Nativité sur France Inter que je vous propose d’écouter ou de réécouter.

 

* Ma question titre est moins idiote qu’il n’y paraît, en effet Bethléem étant Judée, région productrice de vins, Joseph, qui était aussi tonnelier pour des raisons de diversification, y était venu livrer des futs au dénommé Luc Charlier, Dr en médecine reconverti en vigneron, qui étant un peu juste du côté trésorerie, a revêtu ses habits anciens d’accoucheur... pour...   


Nativité
envoyé par franceinter. - Gag, sketch et parodie humouristique en video.

Partager cet article
Repost0
4 janvier 2011 2 04 /01 /janvier /2011 08:00

mini_le-nom-des-gens.jpg

« Moi, je couche toujours le premier soir. C'est un principe ! » Bahia Benmahmoud pratique donc en vertu de ce principe « la lutte des corps » en ouvrant ses cuisses pour convertir ses ennemis politiques, de droite bien sûr. Fille d’un brave émigré algérien de la 1ière génération et d’une militante féministe post-soixante-huitarde, elle est trop française pour qu’on la prenne pour une beurette : « Bahia, c’est brésilien » l’interroge-t-on ? La rencontre entre cette tornade, au sourire éclatant, aux convictions brandies comme des étendards, avec Arthur Martin, est celle du feu avec l’eau qui dort. Lui, en effet, coincé de chez coincé, adepte du principe de précaution - tant dans sa profession au Centre Français des épizooties où il recense et étudie les oies bernaches mortes et lesquelles pèse la suspicion du fameux virus H5N1- qu’à titre personnel, jospiniste effacé, porteur d’un lourd héritage silencieux, est au sens propre en état d’attrition. Saisi ! Jacques Gamblin est un contre-point cravaté mais ébranlé face à une Sara Forestier formidablement vivante : vêtue que de ses petits brodequins violets on en oublie qu’elle est nue dans la rue.

 

Ce film est jubilatoire. Bien écrit, ciselé même, sans temps mort, c’est un feu d’artifice d’humour qui frappe juste, c’est aussi une comédie citoyenne joyeuse, profonde, pétulante, qui ne nous prends pas la tête, c’est la vraie vie projetée l’air de rien, sans gros sabots, avec le double questionnement sur l’identité nationale et intime. Ce film est une thérapie par un rire franc et massif. C’est un film qui à la sortie vous donne envie d’en parler. Chaque scène recèle des trésors de drôlerie, de tendresse, de vérités toutes bêtes. Moi ça m’a donné de l’oxygène, aéré la tête, m’a ému, m’a fait jubiler, rire à en pleurer. Sans déflorer le scénario, la scène avec Lionel Jospin, le vrai, détendu et rigolard – oui, oui... – est un vrai bijou de drôlerie et d’inventivité. Si vous ne courrez pas voir ce film c’est que primo, en dépit de vos protestations, vous ne me faites aucune confiance, et que secundo vous êtes d’affreux réactionnaires craignant de se voir retourner par la belle Bahia Benmahmoud qui affiche la couleur sans aucune impudeur malgré la propension de ses seins à jouer les montgolfières. Même Télérama trouve le film réjouissant alors allez-y en masse ou, lorsqu’il sortira, achetez le DVD et organisez une petite soirée entre amis.

 

À mon avis seul les irrécupérables de quelques bords qu’ils fussent, et je suis persuadé que du côté gauche y’en a un paquet qui va s’offusquer de la légèreté de ce film, vont détester. Mais qu’importe pour une fois que la  critique et un large public sont d’accord ne boudons pas notre plaisir. Antidote à la morosité ambiante « Le nom des gens » vaut que l’on soutienne l’aventure des auteurs Baya Kasmi et Michel Leclerc – compagnons dans la vie – qui, comme l’écrit un critique : « lorsqu'ils se sont lancés, ne songeaient sûrement pas faire l'ouverture de la Semaine de la Critique 2010 et encore moins recueillir l'ovation méritée qui leur fut réservée à la fin de la projection. Et pourtant, rien de plus normal puisqu'ils signent simplement l'une des plus savoureuses comédies françaises de ces dernières années, tout en se targuant de convoquer Lionel Jospin dans son premier rôle » Moi j’aime les gens qui réussissent dans leur entreprise en redonnant à nos vies ce qu’il faut de sel pour ne tombent pas dans l’affadissement le plus sinistre. Rire bordel ça fait du bien !  

Partager cet article
Repost0
4 janvier 2011 2 04 /01 /janvier /2011 00:09

 

80QCA4KGGIVCACF81S2CAVG35Z3CAEW4LQQCAFUGL2WCA5N179CCAN5E502

C’est toujours le jour où tu ne t’y attends pas que tu  prends une tuile sur le coin de ta gueule enfarinée. Ainsi, alors que le Bojolo Nuovo lançait une offensive de charme en sortant dans les vignes notre pépé Coffe, j’ai chroniqué sur le sujet. Bonne pomme j’ai même cité dans son intégralité un petit billet d’humeur du correspondant du Progrès de Lyon à Villefranche. Le gars était content, il me l’a même écrit sauf que quelques heures après, un peu penaud, sur ordre de ses chefs, on m’intimait le retrait au nom de la protection de la propriété intellectuelle. Ce que je fis mais ce n’était pas fini car pour montrer la tronche de JPC j’avais glissé une vidéo You Tube qui le montrait dans son opération de promo de Leader Price. Deuxième sommation dans le même style émanant d’un manant très pincé. Moi vous me connaissez, toujours aussi léger, je réponds que c’est avec plaisir que je mets le tout à la poubelle mais que tout cela c’était normal vu que le truc sentait le ménage. Mal m’en pris en retour on sortait le gros calibre : huissier, photo du fonds d’écran, donc emmerdement. Ebahi qu’on prenne ma petite crèmerie en ligne de mire pour un tir nourri je me dis « vaut mieux un bon compromis qu’un mauvais procès... » J’appelle donc le susdit – il est alors 23 heures – nous nous expliquons entre hommes et tout rendre dans l’ordre.

 

Qu’est-ce qui c’était donc passé ? J’avais fait l’objet d’un contrôle par la patrouille qui surveille le Net pour le compte de la presse écrite. Aux abois les gars quand tu en es réduit à venir chercher des poux dans la tête à un petit gars comme moi c’est qu’il y a le feu au lac. Certes la loi c’est la loi certes mais tout de même en quoi la reproduction d’un court billet qui, si je l’avais tronçonné, aurait perdu de sa saveur, et qui à l’heure de ma publication était déjà enfoui dans la poubelle de l’Histoire, s’assimilait à un pillage, à une usurpation ? Sans me pousser du col je lui donnais un écho qui dépassait largement les frontières du canton de Villefranche. Mais non, faut payer pour lire ! Rire jaune ! La diffusion de l’info ils s’en tamponnent la coquillette, faut sauver le bateau qui coule. Protection oui mais protection de quoi ? D’un pré-carré qui rétrécit chaque jour. Courte vue, absence totale de compréhension du phénomène des blogs, érection de frontières qui confinent plus encore les détenteurs de l’info écrite dans leur petit monde, fin d’un monde, pour autant la presse écrite, tout comme le livre, ne sont pas condamnés. Encore faut-il ne pas tirer le rideau de fer, lâcher les chiens et les Vopos, mais plutôt jeter des passerelles, dialoguer, s’épauler, donner aux lecteurs du contenu, leur redonner de l’appétit, sortir d’une info aseptisée, copié-collé, incolore, inodore et sans saveur.

 

Pour autant la gratuité n’existe jamais. Il faut bien vivre, trouver des ressources, assurer la pérennité des entreprises de presse écrite, parlée, télévisée ou du Net. Pour l’heure, en dehors du secteur public qui vit de la redevance et aussi de la publicité, ces médias sont entre les mains de quelques groupes bien connus de nous. Dans le cas d’espèce c’était une banque, dites mutualiste, qui ramasse les canards boiteux, mais la question n’est pas là. Internet existe, lui appliquer les recettes du passé relève de notre esprit ligne Maginot. L’important dans l’affaire n’est pas de se payer de mots mais d’être sur le théâtre des opérations pour comprendre, agir plutôt que réagir. Bref, je vous propose donc ce matin de lire un extrait de l’Introduction : Internet une révolution démocratique de Dominique Cardon paru au Seuil.

 

« Internet n’est pas un média comme les autres. Beaucoup voudraient l’inscrire dans une chronologie qui commencerait avec la presse et se poursuivrait avec la radio et la télévision. Internet serait en quelque sorte l’aboutissement naturel de l’évolution des médias de masse, puisqu’il parvient à associer le texte, le son et l’image dans le format numérique du multimédia. Mais cette conception, qui fait s’enchaîner les grands supports d’information, est trop simple. Elle transpose paresseusement vers Internet des modèles qui sont forgés dans le monde des médias traditionnels : une pratique du contrôle éditorial, une économie de la rareté, une conception passive du public. Il suffirait de dompter ce jeune média rebelle pour que se perpétuent les modèles économique, culturel et politique qui se sont établis tout au long du XXe siècle. »

 

« Le web ne se laisse pas apprivoiser facilement. Il pose des défis redoutables aux producteurs d’informations, aux détenteurs de la propriété intellectuelle, aux politiques de communication des entreprises, des institutions et des partis. » Le vieux modèle séparant l’espace de sociabilité (les échanges interpersonnels) et l’espace public voit ses frontières devenir poreuses. Autrefois « entre les deux, des « gardiens », les bien-nommés gate-keepers, éditeurs ou journalistes, se sont chargés de surveiller la frontière. C’est sur cette séparation que se sont édifiées les principales oppositions qui structurent l’espace public : la conversation et l’information, les individus et les citoyens, le privé et le public, le marché et la politique, etc. Ce découpage, renforcé tout au long du XXe siècle, est au fondement d’une économie de la représentation qui place d’un côté l’espace des interactions entre les individus, de l’autre les univers de plus en plus professionnalisés et clos sur eux-mêmes de la politique, de l’information et des industries culturelles. »

 

Brouillage, effacement de la ligne de démarcation, « Internet élargit l’espace public. Il ouvre grand les portes d’un univers qui s’était enfermé dans un dialogue entre des journalistes encartés et des professionnels de la politique. »

 

Danger crient les initiés « agressivité des débats, fausseté des informations, diffusion de rumeurs, rétrécissement de l’espace privé, pillage des œuvres protégées, exhibition narcissique... »

 

Chance proclament les révolutionnaires du Net ce serait 3la disparition de l’espace public et la prise du pouvoir des internautes »

 

On se calme ! « Il est cependant hasardeux de tenir des positions aussi tranchées, dans la mesure où Internet instaure moins une compétition entre professionnels et amateurs qu’un système d’interdépendances agissant sur les uns et les autres. »

 

Comme l’écrit Dominique Cardon dans son petit livre rouge « La démocratie Internet » promesses et limites au Seuil La République des idées « Internet pousse les murs tout en enlevant le plancher. Il ôte d’abord le privilège d’accès à la publication dont bénéficiaient naguère les professionnels. L’apparition des amateurs sur la scène publique étend considérablement le périmètre du débat démocratique. La parole publique ne reste plus sans réponse, dans une posture d’autorité imposant à son public silence et déférence. Elle peut désormais être commentée, critiquée, raillée, transformée par un grand nombre de personnes autrefois inaptes ou ignorantes. Mais Internet aspire aussi dans l’espace public les expressions personnelles des internautes. Le web s’empare de conversations qui n’étaient pas reconnues comme « publiques », en profitant des nouvelles pratiques d’exposition de soi des individus. »

 

Sur son blog Hervé Lalau, un peu excédé par cette profusion, cette agitation, cette obsession du flux, à juste titre craignait un raz-de-marée du moins disant. Ce n’est pas une crainte injustifiée car l’autoédition ouvre la porte au déferlement du n’importe quoi et au triomphe du plus petit commun dénominateur. L’histoire de la bande-FM libérée en 1981 en est un bon exemple : les grands gagnants de celle-ci furent les diffuseurs en boucle de musique-soupe : NRJ tout particulièrement. Cependant le contre-exemple c’est la chaîne de TV ARTE née sous les lazzis au temps de Jack Lang qui, sur une ligne éditoriale de qualité, a su s’imposer dans le paysage des généralistes. L’intérêt du Net c’est que nos diffuseurs vivent sur un modèle économique qui, pour l’heure, ne nous impose aucune ligne éditoriale. Alors à nous de faire en sorte de mettre dans les tuyaux des contenus de qualité qui petit à petit gagneront une audience fidèle pratiquant le bouche à oreille. Moi qui fais parti de la génération des baby-boomers, je considère le blog comme mon devoir de transmission. Je l’assume au jour le jour, sans souci de reconnaissance mais pour le plaisir de créer ou de recréer des liens sans le souci des gate-keepers chargés de surveiller la frontière de l’info d’origine contrôlée. Reste aux journalistes professionnels à retrouver dans leur rédaction le sens profond de leur métier et notre vie en commun fera progresser le débat démocratique...

 

Si ça vous dis en cliquant sur ce lien vous pouvez avoir accès à une chronique qui se mettra en ligne à 9 heures sur mon blog sans message d'annonce http://www.berthomeau.com/article-arthur-martin-aime-jospin-les-tribulations-d-un-specialiste-de-la-bernache-h5n1-et-d-une-militante-de-la-lutte-des-corps-64088182.html

Partager cet article
Repost0
3 janvier 2011 1 03 /01 /janvier /2011 00:09

img210.jpg

Un jour gris, en feuilletant vaguement les feuilles mortes du web, je suis tombé sur une envolée d’un grappilleur bien connu à propos d’un projet visant à créer « un site en chinois qui reprenne les principaux textes de nos meilleurs critiques » qui m’a laissé songeur. En effet, ce saint homme, en une tournure d’esprit qui m’étonnera toujours, s’emportait avant même d’avoir tenté d’agir : « Mais on n'aime pas les idées simples, et on va avoir 40 fonctionnaires sur le dos qui exigeront 50 réunions totalement improductives pour nous lister des arguments byzantins et n'avoir qu'un regard suspicieux sur ce qui devrait enthousiasmer tout le monde du vin ! » J’adore les on, c’est rond et c’est d’un vide très pratique qui enveloppe tout et rien.

 

Moi qui me suis vu accoler, après mes écrits iconoclastes, l’étiquette infamante de « haut-fonctionnaire parisien », solidaire de tous les sans-grades enfournés dans le même sac d’infamie, je me suis interrogé pourquoi tant de haine chez certaines gens du vin contre les fonctionnaires de ce vieux Ministère de l’Agriculture ? De plus, fort de ce qu’écrivait à mon propos nos amis de Harpers dans « First Berthomeau, now it’s plan B ... Cependant, une décennie plus tard, alors que la période visée par le rapport touche à sa fin, Berthomeau doit se demander pourquoi il a consacré presque une année de sa vie pour écrire ce plan. La plupart des perspectives font de 2009 l’annus horibilis du vin Français dans ce qui a déjà été une décennie châtiment. » je me sens investi d’un droit de réponse en défense de leur honneur outragé.

 

En effet, quelle est la responsabilité de ces fonctionnaires dans l’émergence puis le développement de cette « décennie châtiment » ? Bien sûr, comme toutes les machines administratives, lourdes, paperassières, tatillonnes, le petit monde des fonctionnaires porte sa part de responsabilité. Mais, rapporté à ce qui s’est passé pendant 10 ans, elle me semble dérisoire et peu décisive. Alors faire d’eux des étouffeurs d’initiatives privées, des fossoyeurs du dynamisme des entrepreneurs, des ratiocineurs, des emmerdeurs, des empêcheurs de décider, ceux par qui l’immobilisme arrive, c’est leur faire trop d’honneur. Que certains trouvassent commode de les installer dans la position de boucs-émissaires je le comprends aisément car ça les dédouane – sans jeu de mots – de leur propre responsabilité. En écrivant ce que j’écris je ne défends pas ma « corporation » – où je suis, si je puis m’exprimer ainsi, un corps étranger – mais je me permets de remettre les pendules des ouvriers de la 25ième heure à l’heure. C’est trop facile de charger la mule – voir plus bas – lorsqu’on se contente du pur magistère des mots. Gonflé certes mais surtout enflé comme des bulles éphèmères.

 

À ce stade je pourrais entonner mon petit couplet sur les Nouveaux Fermiers Généraux collecteurs de CVO mais je m’abstiendrai car je ne vais pas prendre des coups pour le compte de gens dont les propos me gonflent. Parker n’est pas allé demander des subventions pour faire du Parker. Il a fait du Parker. Alors, au lieu de chouiner, de couiner, de taper à bras raccourci sur ces « cons » de fonctionnaires qui ont la vue basse et l’esprit tordu, prenez-vous par la main mes petits loups, allez frapper aux bonnes portes, présentez vos projets, défendez-les auprès des responsables professionnels qui détiennent les beaux euros. Ce ne devrait pas être très difficile pour des gens qui ont autant d’entregent que vous. Cependant permettez-moi de sourire un instant sur ce beau sujet de l’influence, où je serai sans aucune indulgence, pour constater que le temps des banquets est depuis longtemps terminé. Certes se congratuler entre soi en des lieux idylliques, faire comme si le monde tournait autour de vous alors que tout le monde s’en fout, est fort sympathique mais sans aucune efficacité. Personne ne vous attend, ne nous attend, alors continuons gaiement notre chemin.

 

Pour ne rien vous cacher cette chronique, dans sa forme initiale, avait pris la forme d’une opérette leste. Cependant, la nuit portant conseil le matin je me suis dit mon petit, certains vont se reconnaître et tu vas te faire une foule d’ennemis. Au panier mon livret mais je ne puis m’empêcher d’en extraire une seule réplique : celle de la baronne des exclus bien connue qui ironisait, seule au milieu d’un monde viril, sur le comique de la situation et lançait à la cantonade – sacré Cantona – « vous devriez aller faire la manche dans le métro ça vous rapporterait gros... » Pour vous dédommager de ce manque à gagner je vous offre cet extrait de la Périchole d’Offenbach avec le célèbre duo « En avant, vite, vite... Ma mule va grand train... Mais n'allons pas si vite... N'allons pas si grand train...» Tout un symbole ne trouvez-vous pas. Après cela vous vous imaginez bien que je n’aurai pas l’audace d’aller offrir mes services à l’érecteur du projet. J’ai déjà beaucoup donné sur plein de sujet avec que de belles paroles en réponse...

 

Partager cet article
Repost0

  • : Le blog de JACQUES BERTHOMEAU
  • : Espace d'échanges sur le monde de la vigne et du vin
  • Contact

www.berthomeau.com

 

Vin & Co ...  en bonne compagnie et en toute Liberté pour l'extension du domaine du vin ... 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

Archives

Articles Récents