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3 août 2012 5 03 /08 /août /2012 00:09

Qualifier un vin d’élégant est très courant, même de plus en plus fréquent, mais, si on se donne la peine de réfléchir un instant à la valeur des mots, ce faisant le dégustateur ou l’amateur ne fait que projeter en direction de ceux auxquels il s’adresse sa propre conception de l’élégance. Mais, dites-moi, c’est quoi au juste l’élégance ? Ce n’est jamais un en soi, c’est toujours un pour soi, même si l’on peut, éventuellement, se référer à une forme de code comme on le fait dans le cas de l’élégance vestimentaire. Celle-ci, a eu, et à toujours, une forte connotation sociale, clive les classes, est un marqueur fort. Nul besoin de vous faire un dessin, il suffit d’ouvrir les yeux, dans la rue, de feuilleter des magazines de toute nature, d’aller au cinéma, de regarder la TV ou de surfer sur Internet.


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Laissons de côté la vêture et revenons au vin : ne subit-il pas, lui aussi, les mêmes codes, la même tyrannie de la mode, de la tendance, de la nostalgie, du refus d’une forme de modernité plus ou moins bien maîtrisée ? N’est-il pas, ou est-il de plus en plus, qu’un pur produit d’affirmation de son statut social par son acquéreur, de ce qui se veut une différenciation qui, parfois, se veut identitaire. Et là, dans une échelle sociale de plus en plus clivée, étirée, où se situe l’élégance : dans un classicisme, que certains vont sitôt qualifier de rigide et même de ringarde, ou dans un retour à une naturalité débridée, militante, que d’autres vont taxer de débraillée, de mal foutue, de n’importe quoi ou encore dans un luxe tapageur, clinquant des nouveaux riches séduits par tout ce qui brille, par les paillettes, le bodybuilding, le prix, la notoriété ? Je sais que ce que je viens d’écrire va choquer les esthètes du vin, ceux qui l’aiment vraiment, qui l’apprécient pour ce qu’ils estiment être ses qualités propres, mais pourquoi se mentir à soi-même ?


Si je puis m’exprimer ainsi trop souvent sous l’élégance affichée, du moins déclinée par les juges aux élégances se cache le faux-semblant, une forme de facilité sémantique. Je m’explique, dans le débat, qui n’en est d’ailleurs pas un car l’échange n’existe pas entre les uns et les autres, les tenants d’une nouvelle conception des métiers de la vigne et du vin, opèrent une forme de transfert entre le vigneron et son vin. Le vin devient un emblème, une affirmation forte, il est vécu comme le reflet de l’élégance morale de celui ou celle qui le fait. D’où surgit un paradoxe extraordinaire dans la conception même de l’élégance d’un vin, plus qu’une simple bataille entre les Anciens et les Modernes, c’est un face à face irréductible entre les vins moraux et ceux qui ne le sont pas du tout ou pas assez selon le camp d’en face qui lui ironise sur le caractère grossier, j’oserais même écrire  péquenot mal dégrossi.


Même si certains pensent que j’exagère il n’empêche que nous sommes très au-delà d’une banale opposition de goût qui se résumerait par tous les goûts sont dans la nature donc laissons à chacun son échelle de sensations. Pour moi c’est un schisme qui menace les fondements de la conception traditionnelle du vin, un mouvement qui s’apparente à la Réforme, à une forme de rejet radical sur la base du refus de dérives, de facilités de la période passée, d’une recherche de pureté originelle, de retour à la simplicité des pères fondateurs. Bien sûr nous ne sommes plus au temps des Dragonnades, aucune Saint-Barthélemy n’est en vue, nul risque de voir coucher par l’INAO un nouvel Edit de Nantes mais je persiste à penser que les femmes et les hommes de la vigne France et les vins de France ont mieux à faire que de s’entredéchirer, à se livrer des batailles stériles, à s’excommunier. 


Comme nous sommes au début du mois d’août et que, comme vous tous, j’ai plus envie de me la couler douce que de me prendre le chou, je ne vais pas vous asséner ma posologie de médiateur, mon savoir-faire de soi-disant rebouteux des maux de notre viticulture. Cependant je vais vous faire une confidence qui ne surprendra que ceux qui ignorent tout de mon esprit d’escalier : cette chronique à l’origine avait pour titre le paradoxe des chaussures bicolores : pompes à maquereaux ou le chic british à la Philippe Noiret ?


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Et pour affliger plus encore les rationo-rationnels l’idée de ma chronique m’est venue lorsque je suis passé devant la boutique JM Weston et que j’ai shooté cette photo. Le sujet est incurable docteur… faites-le taire ! Pas tout à fait chers lecteurs je vais vous gratifier  d’un outing : je n’ai jamais pu chausser des chaussures bicolores, des slades shoes, des Two Tones, car, dans ma petite tête, je les assimile à des pompes à maquereaux. Et pourtant, dans les pieds  des jazzmen black je les trouve supers, dans ceux des bootleggers je les estime bien en phase et, bien évidemment, lorsque je croisais Philippe Noiret, rue de Bourgogne, je bavais d’envie face à son absolue élégance qui incluait des John Lobb bicolores, des co-repondant(GB) ou encore des Spectators (USA) sur mesures (John Lobb se prétendait l'inventeur du co-respondent en 1868, comme soulier pour jouer au criquet). Dernier aveu qui vous montre l’étendue de mes contradictions : je trouve les bicolores des golfeurs ridicules. Comme quoi, pour en revenir à l’élégance d’un vin : toute référence à ce qualificatif renvoie à une palette où les sentiments contradictoires ont toutes leurs places. Ainsi, hier, sur les quais, j’ai croisé un jeune mannequin en séance photos, moulée dans un superbe pantalon de cuir fuchsia : suprême élégance sexy ou extrême vulgarité ?


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1 août 2012 3 01 /08 /août /2012 00:09

« Quel bel homme ce Bacchus ! » se serait exclamé Jack Lang en contemplant les tablettes de chocolat de Bacchus dans ses œuvres avec Ariane. Le dieu du Vin et sa belle adoptant une position qui relève du Kâma-Sûtra, violent en cela la loi Evin qui proscrit toute représentation avantageuse des plaisirs du vin. Afin de ne pas tomber sous le couperet d’une incitation à la débauche des jeunes générations je demande à tout mineur pénétrant chez le Taulier de rebrousser immédiatement son chemin.


Et pourtant je ne fais ici qu’évoquer l’histoire de la peinture italienne du XVIe siècle. En effet je vous conte la vie deux frères italiens Agostino Carracci et Annibale Carracci, tous deux peintres, le second étant considéré comme le rival du célèbre Caravage. Ils travaillèrent souvent ensemble ainsi qu’avec leur cousin Ludovico Carracci.


Agostino, que les français appelleront Augustin Carrache, a vécu plutôt dans l’ombre de son frère qui réalisa des œuvres exposées aujourd’hui dans les plus grands musées d’Europe, il se distingua cependant avec des gravures érotiques qui pourraient en faire rougir plus d’un. Il prit un malin plaisir à interpréter les œuvres de son frère à sa manière.


Lorsqu’Annibale réalise une fresque majestueuse au Palais Farnèse représentant « le Triomphe de Bacchus et Ariane », son frère Agostino met en scène les deux protagonistes dans une posture très chaude, Bacchus prenant Ariane dans une position très acrobatique qui tombe, bien évidemment, sous la censure de la loi Evin. Ce sont les conseillers d’Etat qui vont être contents, ça va les changer de leur triste ordinaire.


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De même lorsqu’Annibale réalise un magnifique tableau représentant « Jupiter et Junon », aujourd’hui à la Galerie Borghèse. Agostino illustra alors les deux personnages en train de faire l’amour, la verge de Jupiter sur le point de pénétrer le vagin de Junon.


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Les gravures érotiques, un chouïa pornographiques d’Agostino Carracci démontrent un caractère libertin peu commun à cette époque.


Ainsi il a représenté le poète Ovide pénétrant de son sexe dur et turgescent son amante Corinne allongée sur un lit. Deux libertins précurseurs de DSK puisqu’Ovide collectionnait les conquêtes féminines mais Corinne n’hésitaient pas à faire des infidélités à Ovide.


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Que dire du puissant Hercule prenant debout la belle Déjanire, sa deuxième épouse qui voulut le tuer car elle le soupçonnait d’être infidèle.


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La fidélité ne semble pas une valeur sûre dans les mythologies grecques et romaines.


La douceur avec Enée fils d’Anchise et de Vénus et Didon la première reine de Carthage, préludes amoureux, Enée caressant la vulve bien ouverte de Didon.


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La brutalité d’Achille prend debout la jeune troyenne Briséis qu’il a enlevée pendant la Guerre de Troie, après avoir tué ses trois frères et son mari, le roi Mynès.


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L’exotisme : Antoine initie l’égyptienne Cléopâtre aux joies du sexe romain.


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Le pouvoir : l’impératrice Messaline s’envoyant en l’air dans la loge de Lisisca et ce n'est pas Claude Evin qui tient la chandelle...


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31 juillet 2012 2 31 /07 /juillet /2012 00:09

Que les âmes prudes se rassurent le Taulier ne se vautre en rien dans le stupre et la fornication, il se contente de faire la promotion d’un loisir simple : le déjeuner sur l’herbe qui, bien plus que le pique-nique, permet d’allier tous les plaisirs de bouche. Ses ingrédients : une grasse et verte prairie naturelle au bord d’une rivière, où vous pourrez plonger vos bouteilles, l’ombre légère d’un bouquet d’arbres afin de ne pas déjeuner sous le feu du soleil, une grande nappe blanche pour y poser vos victuailles, un panier de pique-nique et, pour la beauté du tableau et la partie de jambes en l’air, une vêture légère pour les femmes et de lin pour les hommes.


  

 

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Le déjeuner sur l’herbe le plus célèbre est bien sûr celui d’Édouard Manet mais  savez-vous qu’i fut d'abord baptisé Le Bain, puis La Partie carrée, provoquant un scandale et controverse lorsque l'œuvre a été exposée pour la première fois au Salon des Refusés en 1863. Et pourtant, ce thème de deux couples se reposant dans un parc ou dans un décor champêtre était un sujet classique de la peinture galante, tel La Partie carrée (1713) d'Antoine Watteau et celle de James Tissot, contemporain et ami de Manet, a peint sa propre version du thème en 1870. Si vous souhaitez visionner une rétrospective de Parties carrées et autres déjeuners sur l'herbe allez ICI link

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Puisque mon propos est avant tout culturel je vous propose de lire le texte d’Émile Zola, à propos du déjeuner sur l’herbe (Édouard Manet, 1867)


« Le Déjeuner sur l'herbe est la plus grande toile d'Édouard Manet, celle où il a réalisé le rêve que font tous les peintres : mettre des figures de grandeur nature dans un paysage. On sait avec quelle puissance il a vaincu cette difficulté. Il y a là quelques feuillages, quelques troncs d'arbres, et, au fond, une rivière dans laquelle se baigne une femme en chemise ; sur le premier plan, deux jeunes gens sont assis en face d'une seconde femme qui vient de sortir de l'eau et qui sèche sa peau nue au grand air. Cette femme nue a scandalisé le public, qui n'a vu qu'elle dans la toile.


Bon Dieu ! Quelle indécence : une femme sans le moindre voile entre deux hommes habillés ! Cela ne s'était jamais vu. Et cette croyance était une grossière erreur, car il y a au musée du Louvre plus de cinquante tableaux dans lesquels se trouvent mêlés des personnages habillés et des personnages nus. Mais personne ne va chercher à se scandaliser au musée du Louvre. La foule s'est bien gardée d'ailleurs de juger Le Déjeuner sur l'herbe comme doit être jugée une véritable œuvre d'art ; elle y a vu seulement des gens qui mangeaient sur l'herbe, au sortir du bain, et elle a cru que l'artiste avait mis une intention obscène et tapageuse dans la disposition du sujet, lorsque l'artiste avait simplement cherché à obtenir des oppositions vives et des masses franches.


Les peintres, surtout Édouard Manet, qui est un peintre analyste, n'ont pas cette préoccupation du sujet qui tourmente la foule avant tout ; le sujet pour eux est un prétexte à peindre tandis que pour la foule le sujet seul existe. Ainsi, assurément, la femme nue du Déjeuner sur l’herbe n’est là que pour fournir à l'artiste l'occasion de peindre un peu de chair. Ce qu'il faut voir dans le tableau, ce n’est pas un déjeuner sur l'herbe, c'est le paysage entier, avec ses vigueurs et ses finesses, avec ses premiers plans si larges, si solides, et ses fonds d'une délicatesse si légère ; c'est cette chair ferme modelée à grands pans de lumière, ces étoffes souples et fortes, et surtout cette délicieuse silhouette de femme en chemise qui fait dans le fond, une adorable tache blanche au milieu des feuilles vertes, c’est enfin cet ensemble vaste, plein d'air, ce coin de la nature rendu avec une simplicité si juste, toute cette page admirable dans laquelle un artiste a mis tous les éléments particuliers et rares qui étaient en lui. »


Mais que boit-on pour un déjeuner sur l’herbe ? Pour moi, sans contestation, du léger, du vif, du frais afin d’accompagner tous les plaisirs de chair sans les annihiler. J’exclus totalement le rouge même l’un des chenapans de la Loire, ça tache ; je tolère à peine les rosés, trop communs ; je suis 100% blanc frizzante… en flacon à vis… (S’il faut que je vous fasse un dessin j’y suis prêt)… c’est coquin, ça émoustille, c’est moins convenu que le champagne même si un extra-brut, pour les âmes ardentes, peut convenir. Mon choix pour un déjeuner sur l’herbe, et plus si affinités, se porte sans aucune hésitation sur ZE BULLE ZérO Pointé  www.latourgrise.com peu alcoolisé 9,5%, tendre et acidulé (du chenin biodynamique) gaz naturel de fermentation. Cerise sur le gâteau la bouteille est belle…


Arbot-020.JPGArbot-019.JPGSeward_Johnson_DejaVu1994.jpgJohn Seward Johnson (artiste américain né en 1930) "Deja Vu" - 1994. Il s'agit en fait d'une sculpture monumentale installée dans un parc à Hamilton (New Jersey)

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30 juillet 2012 1 30 /07 /juillet /2012 00:09

L’humour britannique recèle des trésors d’anecdotes vaches se référant à la « gastronomie anglaise ». Ainsi Disraeli, Premier Ministre de la Reine Victoria, qui  détestait les dîners en ville, accepte l’invitation d’une dame de la haute société. « Le dîner se révèle un désastre total. Tous les plats qui auraient dû être servis chauds arrivent froids. Mais comme tout le monde est extrêmement bien élevé, personne ne dit rien. Arrive le dessert. On sert le champagne. Disraeli prend sa coupe de champagne, y trempe ses lèvres puis levant son verre en direction de la maîtresse de maison :


-         Ah ! Madame, enfin quelque chose de chaud !


Alors sacrifions un instant à l’actualité des XXXe Jeux Olympiques de l'ère moderne pour nous intéresser à l’assiette des athlètes et des visiteurs : quelques 14 millions de repas seront servis, soit 25.000 morceaux de pain, 232 tonnes de patates, 75.000 litres de lait, 19 tonnes d'œufs ont été commandés pour le seul village olympique. Outre les 15.300 athlètes et les équipes qui les accompagnent ainsi que les organisateurs et techniciens, il faudra également prévoir de quoi nourrir les visiteurs ainsi que les Londoniens eux-mêmes qui se seront déplacés pour assister à des épreuves disséminées dans 40 lieux différents de la capitale britannique. Jusqu'à 2 millions de personnes sont attendues pour l'occasion, sans compter les jeux paralympiques qui suivront.  D'après les organisateurs, un repas de base pour une famille de quatre personnes coûterait en moyenne 40 livres (environ 51 euros) dans le Stade Olympique.


Bien évidemment, à bouffe de masse : gargotier de masse : McDonald's ouvre à Londres son « plus grand restaurant au monde » (sic) lieu éphémère, situé à proximité du stade olympique qui pourra servir  jusqu'à 1.200 clients en une heure. Même la très conservatrice municipalité de Londres a voté une motion pour demander que soit bannie la « junk food » des lieux où se dérouleront les compétitions. Et ce faux-cul de Jacques Rogge, le président du Comité international olympique a reconnu que la présence de ces grands distributeurs (Coca-Cola, Cadbury…) posait des questions, notamment pour le symbole qu'ils représentent alors que de nombreux pays développés luttent contre l'obésité. Mais il a toutefois défendu leur participation en rappelant que les fonds qu'ils apportent sont vitaux pour l'organisation de cet événement.


« Malgré la forte présence de sponsors américains, le secteur de la restauration britannique devrait tout de même y gagner. Leurs bénéfices pourraient atteindre 46 millions de livres (environ 59 millions d'euros) pendant la seule période des jeux, selon une étude menée par le fournisseur de cartes de crédit Visa. Les retombées entre 2013 et 2015 sont évaluées à 171 millions de livres (218 millions d'euros). Les restaurateurs britanniques profiteront notamment d'un plan de promotion des produits locaux ainsi que de la charte éthique et environnementale  auxquels des associations de producteurs bio ont apporté leur voix. Au menu, donc, la crème de la cuisine britannique: porridge, rôti de porc, bœuf écossais, tartes au fromage de Stilton, et toutes sortes de cakes pour le « high tea »...


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Afin de ne pas me voir accusé d’être un anti-rosbif primaire je rends aux habitants de la perfide Albion ce qui lui appartient en propre : les mots anglais qui sont dans nos assiettes.


« Les Français, si fiers de leur cuisine, n’hésitent pas à utiliser des mots d’origine étrangère pour désigner certains plats et aliments. Des mots italiens, arabes, espagnols, allemands, chinois ou japonais… et des mots anglais, bien que, avec le temps, un fossé d’incompréhension culinaire semble s’être creusé entre les deux pays, bien plus large et profond que le bras de mer qui les sépare. Pourtant, ces mots sont là, utilisés quotidiennement ou presque, dont les fameux « rosbif » et « bifteck ». Ils ne sont pas les seuls, mais il est remarquable qu’un assez grand nombre d’entre eux soit lié à la consommation de viande de bœuf, et depuis bien longtemps, puisque la première apparition d’un mot de cette famille date de plus de trois siècles : en 1691 paraît un « ros de bif » qui, de façon curieuse d’ailleurs, désigne le plus souvent un baron d’agneau.


Vingt ans plus tard, c’est un « beef steak » qui surgit sous une forme encore anglaise mais qui connaît rapidement un début de francisation pour aboutir à l’orthographe assez fantaisiste de « beeft stek ». Ensuite, en moins d’un siècle, la cuisine et le langue françaises se l’approprient totalement, le mot trouve sa forme moderne et sa place dans les livres de cuisine et les cartes de restaurant.


L’utilisation d’un mot étranger est le signe de l’introduction d’une innovation qui n’a pas de nom dans la langue d’adoption. Dans le cas de la cuisine, cela signifie que des manières de faire ou des produits inconnus jusqu’alors ont été introduits.  Quant à l’adoption et à la francisation de ces mots anglais désignant la viande de bœuf, il est à noter que l’un et l’autre ont lieu au cours du XVIIIe siècle, moment charnière de l’histoire gastronomique de la France. Le début de ce siècle voit apparaître la forme moderne de la cuisine française, celle qui assurera sa renommée bien au-delà des frontières, et sa fin consacre l’invention du restaurant et annonce le triomphe de la gastronomie. »


Reste qu’étant un homme de l’agriculture et des bestiaux je ne puis passer sous silence le même transfert dans nos élevages :


« Outre-Manche, cette période est riche de transformations, en particulier dans le domaine de l’agriculture – et tout spécialement concernant les méthodes d’élevage, qui connaissent une véritable révolution. Au cours de la première moitié du XIXe siècle, les éleveurs français s’intéressent à ces nouveaux principes, à ces races de bœufs ou de moutons sélectionnés pour leurs qualités bouchères ou laitières, et d’autres mots anglais – pedigree, openfield, herd-book, stud-book ou redingote – apparaissent dans notre vocabulaire. Sur la trace de tous ces mots, de leur emploi dans les cuisines à leur apparition dans les fermes, à travers trois siècles d’histoire, ce petit livre se propose de partir à la découverte des plus méconnus de nos voisins, ceux que nous appelons, cette fois, avec une ironique et amicale complicité, les rosbifs ! ».


Ce petit livre rosbifs ! L’histoire des relations franco-anglaises au travers de la viande bœuf de Bénédict Beaugé chez textuel.


photoRosbif2-copie-1.JPG

« Des moutons gambadant dans un paysage bucolique, d'immenses cheminées d'usine surgissant du sol, des tambours, une forge de l'enfer, un orchestre symphonique... Il faudrait dérouler un inventaire à la Prévert pour cueillir tous les fruits de l'esprit fertile du réalisateur du film Slumdog Millionaire… » et la Reine m’a-t-on dit s’ennuyait ferme…

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28 juillet 2012 6 28 /07 /juillet /2012 00:09

Tout à la fin de cette chronique j’interrogerai le peuple des vignerons, qui bien sûr ne pratique guère la fabrication de la confiture, pour lui demander, selon le lieu où il pratique son art, quel vin de son cru il substituerait dans cette recette ? Du côté des vignerons alsaciens, la question se pose aussi, à eux de me dire ce qu’ils me conseilleraient en lieu et place du gewurztraminer et pourquoi ? La question n’est pas innocente car elle touche à une forme subtile d’accord mets-vin.

 

Au temps où je vivais dans une maison dans les bois, avec une vraie et grande cuisine je faisais mes confitures. C’est Christine Ferber « la fée des confitures », qui vit et travaille dans son petit village natal de Niedermorschwihr, en Alsace, dont les confitures ont séduit les plus grands chefs, Ducasse, Troisgros et Westermann… qui m’a initié grâce à son petit livre « Mes confitures » chez Payot à l’époque acheté 119 francs. Pour elle «  faire des confitures, c’est avant tout conserver les fruits grâce au sucre. »

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Donc pour faire des confitures il faut tout d’abord des fruits frais. Sauf à les cueillir soit même dans son verger ou un verger ouvert à la cueillette ou dans les bois, le plus souvent il faut les acheter et c’est là qu’il faut être attentif car il faut des fruits à juste maturité. Christine Ferber souligne « qu’à ce moment-là, ils offrent un bel équilibre en acidité et en pectine, qui favorise la prise de la confiture. » La prise en masse de la confiture est la hantise du novice. Donc, comme en tout achat de produits frais de qualité il est important de se trouver un marchand  de 4 saisons de confiance. Ça existe sur les marchés ou dans des magasins spécialisés.

 

Ensuite, il faut du sucre, du sucre cristallisé de belle qualité, blanc et brillant. « Pour obtenir une bonne conservation, la confiture doit contenir 65% de sucre. Sachant qu’il y a déjà 10 à 15% de sucre dans le fruit, on ajoutera donc dans chaque cuisson un poids de sucre plus ou moins égal à celui du fruit. » indique Christine Ferber.

 

Enfin, pour faire la confiture il faut un matériel ad hoc :

 

-          Une bassine de cuivre qui garantit à la cuisson une parfaite répartition de la chaleur. « Cette bassine est plus large que haute, ce qui permet une meilleure évaporation de l’eau des fruits. »

-          Une écumoire qui sert bien sûr à écumer mais aussi à remuer doucement la confiture et à vérifier la cuisson du sirop.

-          Un thermomètre à sucre gradué jusqu’à 200°C

-          Des pots à confiture

-          Une louche pour remplir les pots.


Françoise Ferber indique que l’idéal est de travailler les fruits « quelques heures après la cueillette, au plus tard le lendemain, car ils perdent vite leur qualité. » Elle les « cuis de préférence par petites quantités. Je ne mets jamais plus de quatre kilos de fruits dans une même bassine : les petites cuissons préservent la couleur naturelle et la texture du fruit. »


« La confiture est toujours une création » alors expliquer la manière de faire est une chose acquérir le coup d’œil qui permet de saisir le moment où la cuisson est arrivée à son terme viendra avec le temps et la pratique. « Vous observerez que l’évaporation diminue sensiblement. Il n’y a plus d’écume à la surface, les fruits sont immergés dans le sirop et les bouillons s’amenuisent. » Pour les anxieux et anxieuses pour vérifier la nappe utiliser un thermomètre à sucre : il doit marquer 100°C et si vous n’avez pas de thermomètre : déposez quelques gouttes sur une assiette froide et vérifier sa consistance.


Reste la dernière opération, qui peut sembler simple mais qui demande aussi du savoir-faire, mettre en pots et couvrir ses confitures.


Les pots en verre doivent être stérilisés : soit en les plongeant quelques minutes dans l’eau bouillante, soit en les passant au four à 110° pendant 5mn. Il faut remplir les pots au ras bord en évitant toute coulure sur les bords donc cela suppose une certaine dextérité dans le maniement de la louche.


Pour la couverture plusieurs méthodes :


-          Le couvercle : dans ce cas-là il faut fermer les pots à chaud et les retourner de suite.

-          La paraffine : verser très lentement 3 à 4 mm de paraffine sur la confiture froide dans chaque pot, et laisser durcir.

-          La cellophane : attendre que les confitures soient froides; humecter le papier d'un seul côté et mettre le côté NON mouillé à l'intérieur ceci pour éviter les moisissures. Tendre le papier puis mettre un petit élastique.


Enfin, pour faire joli vous étiquetez vos pots avec des étiquettes d’écolier et vous les rangez dans un endroit sec à l’abri de la lumière.


Je ne fais plus de confitures depuis que j’ai regagné Paris. Cependant j’en mange. J’achète des confitures faites par les monastères, elles ont de très bonne qualité et vendues à des prix raisonnables. Mes préférées : l’abricot, la fraise, la mirabelle, la figue, reine-claude et oranges amères.


Comme nous sommes en pleine saison des abricots je vous propose une recette originale de Françoise Ferber : les 2 abricots à la vanille et au Gewurztraminer.


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1,150 kg d’abricots soit 1 kg net

250 g d’abricots secs

800 g de sucre cristallisé

1 jus de citron

1 jus d’orange

1 zeste d’une demi-orange

2 gousses de vanille bourbon

25 cl de gewurztraminer


La préparation des abricots frais est simple : les laver à l’eau fraîche, les couper en deux et les dénoyauter.


Macération : dans un grand tarrasson mélangez les abricots, le sucre, le jus d’orange, les zeste d’un demi-orange, le jus de citron et les gousses de vanille fendues dans leur longueur. Couvrez d’une feuille de papier sulfurisé. Réservez au frais et laissez macérer une heure.


Première cuisson : versez le contenu dans la bassine à confiture et portez au frémissement. Versez à nouveau dans le tarrasson, recouvrez d’une feuille de papier sulfurisé et réservez au frais pendant une nuit.


Cuisson du deuxième jour : versez la préparation dans un tamis de soie. Retirez la peau des abricots à demi confits. Portez le sirop recueilli à ébullition pendant 5 mn environ : il doit se concentrer à 105°C au thermomètre, c’est-à-dire au petit perlé. Ajoutez les abricots secs détaillés en bâtonnets de 5mm de large et le gewurztraminer. Redonnez un bouillon de 5 mn, écumez soigneusement. Ajoutez les oreillons d’abricot. Donnez un bouillon de 5 mn en remuant délicatement. Écumez à nouveau. Retirez les bâtons de vanille, qui garniront les facettes de vos pots. Vérifiez la nappe.

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25 juillet 2012 3 25 /07 /juillet /2012 00:09

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Pour le Taulier, juillet, c’est carton plein, mon changement de millésime et ma fête. Je croule sous les années, les bises et les cadeaux, mais ce que j’aime par-dessus tout c’est que ça s’arrose ! Donc, si ça vous dit, tout au long de cette journée de mercredi je vous convie à fêter ma fête autour d’un verre – je n’ai pas écrit à faire ma fête – Faites-moi signe, j’accours ! Comment me direz-vous ? Par tous les moyens en votre possession pour me joindre… Juché sur mon fier destrier je promets à toute personne qui me joindra de lui offrir un verre dans Paris intra-muros – je ne passe jamais le périphérique.


Depuis le XVIIe siècle le mot fête désigne aussi la célébration du saint dont une personne porte le nom. La festa en italien. À côté de l’anniversaire personnel et laïque, la fête affirmait l’appartenance de chaque chrétien à la communauté protégée et répartie sous le patronage des saints dûment recensés, et affirmée par le prénom, avant que ce dernier ne se dégage de la tutelle exclusive du calendrier chrétien.


Moi c’est : Saint Jacques le Majeur, fils de Zébédée et de Salomé, était frère de saint Jean l'évangéliste. On le surnomma le Majeur, pour le distinguer de l'Apôtre du même nom surnommé le Mineur, qui fut évêque de Jérusalem. Il était de Galilée et vint au monde douze ans avant Jésus-Christ. Il exerçait la profession de pêcheur, ainsi que son père et Jean, son frère. Un jour qu'ils nettoyaient leurs filets dans une barque sur les bords du lac de Génésareth, Jésus appela les deux frères; à l'instant, quittant leur barque et leur père, ils se mirent à Sa suite et furent bientôt agrégés au collège des Apôtres.

 

Comme ce 25 juillet j’ai l’âme et le cœur léger, à tous ceux que je ne pourrai rencontrer en ce jour de fête j’offre le texte ci-dessous :


Chéri et si nous adoptions un vieux ?


-        Je sais chéri, tu t’ennuies depuis qu’ils t’ont viré comme un malpropre après toutes ces années passées à courber l’échine, à servir, sans piper mot. Oui, oui, je sais, je parle trop et tu ne m’écoutes même pas. Bien sûr tu n’étais pas le balayeur de la boîte mais tout de même le directeur-général adjoint. Une huile, quoi ! Mais pas le numéro un, seulement l’adjoint. Ça fait un peu mesquin directeur-général adjoint, porteur de serviette, pas tout à fait abouti, j’oserai même dire mal formé. Tu t’en es accommodé car tu t’accommode de tout chéri. Et maintenant te voilà scotché à cette putain de télé tout au long de la journée. Tu sens le renfermé. Chéri tu pues !

-        (…)

-        Moi j’en ai marre de t’avoir toujours dans mes pattes comme un vieux chien pouilleux qui se gratte les puces à tout bout de champ pour vérifier s’il est bien toujours en vie. Je vais te faire une proposition honnête mon amour : nous allons adopter un vieux. Ne crois pas que je plaisante : je viens de déposer une demande en bonne et due forme à l’assistance sociale. Des vieux, ils en ont un stock à ne savoir qu’en faire, oui la demande est très inférieure à l’offre : les tableaux de statistiques en Power Point pour tes conférences de direction, tu en raffolais. Ça te rassurait. Comme nous avons de la place, des moyens grâce à mon héritage, que nous sommes bien portants, notre dossier est nickel chrome. Trois coups de tampon sur les formulaires et nous toucherons notre vieux.

-        (…)

-        Tu as beau faire semblant de t’intéresser au énième put de je ne sais quel trou du parcours de je ne sais quel green plein de types bedonnants, je sais que tu m’écoutes. Notre petit vieux je l’ai demandé dépendant et c’est toi, et toi seul, qui t’en occuperas. Comme tu n’as jamais voulu avoir d’enfant, moi non plus d’ailleurs, trop encombrant, ça va te redonner un but dans la vie. Imagine ! Je sais que tu ne peux pas, tu es du genre terre à terre, mais avec non petit vieux adoptif tu vas être servi : pire qu’un bébé qui vient de naître : le lever, le laver, le nourrir, le torcher, le promener, et même s’il est un peu sourd lui faire un brin de causette avant qu’il ne s’endorme.  Beau programme mon chéri et puis, ça te fera un compagnon de télévision. Les petits vieux adorent la télévision.

-        (…)

-        D’accord, je le sais, tu aurais préféré un chien. Moi je le voulais bien à condition que ce soit un brave corniaud que nous aurions sauvé de la fourrière. Mais monsieur voulait un chien de race, le genre qui va se faire bichonner chez une toiletteuse, une chochotte qu’il faut nourrir avec des plats de luxe. Moi je préfère les chats, ils sont libres et indépendants. Tu n’as jamais pu supporter mon Pisolo. Il te le rendait bien le bougre. Paroles, paroles que tu te dis mon chéri mais pour te détromper je vais te lire un petit bout de texte d’un quidam de la belle Province qui a adopté un vieux « Lorsque j’ai accueilli Léo chez moi – je te précise, 99 ans, en fauteuil roulant –, les amis ont cru que je n’allais pas tenir, que j’allais le retourner, avec le hamster. Mais dès leur première visite, ils sont étonnés et s’exclament qu’il est formidable. Je ne peux m’empêcher de me demander s’ils pensaient voir un monstre… »

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24 juillet 2012 2 24 /07 /juillet /2012 00:09

bourgone-011-copie-1.JPGDe quoi je me mêle me direz-vous ? De ce qui me regarde bien sûr ! Je fais mon job : j’informe le nouvel arrivant du 78 rue de Varenne de l’étendue et des particularités de son domaine. Comme votre Taulier fait dans le vin il se devait en priorité d’aborder une histoire singulière, celle de La Tour Blanche, Premier Grand Cru Classé en 1855, fort bien contée, dans un superbe livre, par Isabelle de Montvert-Chaussy aux éditions Elytis 20€. La Tour Blanche une histoire singulière.


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La Tour Blanche « quand on arrive de Haut-Bommes on ne la voit pas. Si on monte par Bommes, les chemins de Baboye ou Thinoy, la longue silhouette blanche de la Tour Blanche apparaît au flanc d’un relief. Ces confins du Sauternais, tout en rondeurs, sont parsemés de châteaux majestueux à la silhouette élégante, auprès desquels La Tour Blanche fait modeste figure. Car ici, au sommet de la colline, rien n’est en hauteur. De loin, on dirait juste une paisible chartreuse dans les vignes. » écrit-elle et son célèbre préfacier de verser lui aussi dans la magie du lieu qu’évoquent ses souvenirs d’élève « C’était il y a 45 ans. Une petite école perdue dans un paysage ourlé de vignes, où des pensionnaires en fin de cursus scolaire venaient parfaire leurs connaissances en viticulture. Quand j’y arrivais la première fois, la lumière de septembre recouvrait le vignoble d’or et me rendait comme plus serein. »


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Le XVIIIe, Juste Frederick Focke achète le domaine de La Tour Blanche en 1815. L’homme né en 1768, à Magdeburg, cité hanséatique, haut-lieu du protestantisme, port fluvial marchand dynamique situé en bordure de l’Elbe s’est installé à Bordeaux en 1806. « Une fois devenu viticulteur, Focke va indéniablement laisser une empreinte indélébile dans l’histoire des vins du Sauternais… non pas en tant qu’ »inventeur » comme on l’a souvent affirmé, mais plutôt « redécouvreur » et homme d’influence (…) Focke a un avantage : sa connaissance des vins liquoreux et sucrés Ill a en tête les crus de la vallée du Rhin, redoutables concurrents pour le Sauternais. Il a aussi l’habitude de travailler avec les pays où  ces vins se vendent bien. Enfin, il est en relation étroite  avec les ports hanséatiques où beaucoup de producteurs de vins sucrés et moelleux du Bordelais se fournissent en merrains. »


« La Tour Blanche est à quelques lieux à peine du prestigieux Yquem. » Focke fort de son expérience des Trockenbeerenauslese et de ses observations sur le développement du botytris cinerea, « est convaincu des similitudes entre le micro-climat de la vallée du Ciron et celui des bords du Rhin. Et lorsque le millésime 1836 se révèle excellent, Focke conforté par les usages voisins (à Yquem, Suduiraut) va batailler pour encourager les récalcitrants à pratiquer systématiquement les vendanges successives et les tris successifs (…) De fait, il mène, bien évidemment, La Tour Blanche au sommet du fameux classement de 1855. Une distinction plus que méritée, mais qui survient hélas peu après son décès, à Bordeaux, 0 87 ans, le 5 février 1855. »


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La suite est remarquablement contée par madame Isabelle de Montvert-Chaussy avec l’extraordinaire histoire de Daniel Iffla Osiris, le banquier sentimental, qui en 1876, se porte acquéreur de La Tour Blanche « dont le vignoble s’étend alors sur 35 ha et produit 40 à 50 tonneaux de vin. » Lorsqu’il décède dans son hôtel particulier parisien en février 1907 « Sa fortune est estimée à 50 millions de francs environ, soit plus de 180 millions d’euros. Plus de 30 millions reviennent à l’Institut Pasteur dont il fait son exécuteur testamentaire. C’est le plus gros legs qu’ait jamais reçu l’Institut et sans aucun doute le plus complexe. » C’est le Dr Emile Roux, ami d’Osiris, qui va prendre le dossier en charge. Pour La Tour Blanche le legs à l’Etat spécifie « Dans le vignoble, l’Etat donnera un enseignement pratique et gratuit de viticulture et de vinification par les soins du gérant de la propriété sans aucun frais pour l’Eta, le legs devant se suffire à lui-même et au-delà, au moyen des revenus du vignoble ». L’Etat accepte La Tour Blanche par un décret signé le 24 mai 1909 par le Président de la République Armand Fallières et Georges Clemenceau, ministre de l’Intérieur et Président du Conseil.


Voici donc les deux moments clés de la vie de La Tour Blanche : le classement de 1855 et la naissance d’une école de viticulture et d’œnologie… Là encore je vous renvoie à la lecture de l’histoire pas toujours simple de cette école particulière telle qu’elle est contée par l’auteur.  L’EVO l’école de Viticulture et d’œnologie de la Tour Blanche est créée en  août 1928 sur décision préfectorale et l’arrêté est pris le 3 janvier 1929. À l’époque moderne, la loi Debré-Pisani de 196à qui harmonise l’enseignement agricole avec les formations relevant de l’EN, diplômes et statut des personnels, l’ENITA de Bordeaux ouvre ses portes en 1963 et le bouleversement fondamental c’est que l’enseignement passe sous la tutelle du Ministère de l’Agriculture, c’est lui qui nomme désormais le chef d’établissement.


De tous ceux qui sont passés à La Tour Blanche j’ai connu suite à mon rapport Jean-Pierre Josserand arrivé en 1983 et qui restera 18 ans. Ce fut l’un des rares chefs d’établissement de la maison agriculture à s’intéresser à mon travail. Il s’attachera à défaire La Tour Blanche de l’étiquette de « vin de fonctionnaire » en dissociant clairement l’école du domaine « Il ne devait plu y avoir de confusion, le vin de La Tour Blanche n’est absolument pas élaboré par les élèves. » Autonomie de gestion, envergure commerciale, La Tour Blanche n’est point le vin du Ministre de l’Agriculture. Autre initiative de ce directeur entreprenant en 1994 changer le nom du deuxième vin « Mademoiselle de Saint-Marc » qui fleurait bon la lessive même s’il se référait à la dernière propriétaire sous l’Ancien Régime, en « Les Charmilles de Tour Blanche » plus bucolique. Pour autant les élèves ne sont pas exclus « chaque élève est responsable de sa micro-cuve. Il la prend en charge de façon autonome. S’organise pour aller faire ses analyses pendant les pauses repas, pour y travailler en dehors de ses cours. » Bref, Josserand fut une « figure » qui marqua  élèves et enseignants.


Reste le plus célèbre, celui qui rend hommage à la sensibilité de Jean-Pierre Navarre l’un des tous premiers directeurs de l’ère post-60 et à son aptitude à percevoir les capacités des élèves « En m’incitant à aller à la Fac, Jean-Pierre Navarre a très probablement changé ma vie… » il se destinait à reprendre, comme la plupart de ses camarades, la propriété familiale et il n’avait pas vingt ans mais il avait compris « que le métier d’œnologue passait par une connaissance du terrain et que l’érudition, aussi scientifique soit-elle, se révélait souvent impuissante face aux aléas de la vigne. Le vin est affaire de vigilance et d’humilité. » C’est signé MICHEL ROLLAND promotion BATA 1966/67.


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L’ouvrage est fort bien documenté, passionnant, et j’espère cher Ministre qu’il parviendra jusqu’à toi. Je te l’offrirais bien en demandant à Michel Rolland de te le dédicacer mais sans doute trouverait-on que je verse dans la courtisanerie. J’espère aussi que sur table tu pourras servir à tes hôtes, hormis l’excellent vin de la Sarthe de mes amis de la Bellivière, la palette des vins du domaine : La Tour Blanche bien sûr, son deuxième vin Les Charmilles de Tour Blanche, et plus modestement Les Jardins de Thinoy un blanc sec à base de Sauvignon, le Cru de Cinquet un rouge merlot-malbec et Horus un rosé. Pour autant ne te croit pas obligé de participer aux réunions de l’UGCC je peux t’y remplacer. Je plaisante bien sûr.


Comme l’écrit Alex Barrau, le directeur actuel : « domaine et école jouent la même partition : l’ouverture et l’excellence, en cultivant la vigne et les valeurs humaines. » Comme l’enseignement agricole t’es cher tu peux être fier de l’Ecole de La Tour Blanche qui accueille chaque année 100 élèves de collège et lycée en formation initiale, 50 élèves de BTSA en formation par apprentissage, 30 adultes en formation continue. Le vignoble c’est 37ha plantés en sémillon (83%), sauvignon (12%) et muscadelle (5%). Le rendement moyen ne dépasse guère 10 à 15 hl/ha. Le domaine produit en moyenne chaque année 65000 bouteilles de sauternes. La vente au Château c’est 15% le reste c’est le négoce de la place de Bordeaux et 50% part à l’export.


Voilà une belle histoire qui se perpétue alors, loin du quand dira-t-on des mauvais coucheurs, ou de l’ironie déplacée du Taulier, La Tour Blanche Premier Grand Cru Classé en 1855 est bien arrimé au Ministère de l’Agriculture , de l’Agro-alimentaire et de la Forêt, même que les vignerons rêvent qu’un jour on adjoigne au titre et de la Viticulture…

 

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23 juillet 2012 1 23 /07 /juillet /2012 00:09

Après un vrai dimanche de vrai soleil, type cagnard qui darde des rayons de feu, rosé d’Estézargues, sardines frittes, accras de morue, calamars, premier raisin du Vaucluse, café glacé, j’ai l’âme légère et l’esprit frondeur. Lire sur la terrasse au neuvième plein sud, d’abord feuilleter un à un la cotriade de bouquins glanés hier après-midi : razzia de librairies ! Des tous petits comme je les aime. Des pieds de cuve à chronique, que du bonheur pour le petit chroniqueur ! Bref, il n’empêche qu’avant de me lancer dans l’écriture à la fraîche je ne pouvais m’empêcher de penser aux segmenteurs de vin qui, selon des gens sérieux bien informés, vont devoir exercer leur métier sur le marché du vin qui en a tant besoin, le pauvre. C’est fou, le nombre d’experts, qui bourdonnent et butinent, au-dessus du berceau de cet enfant terrible : des Diafoirus, des oracles, des Fées, des conseillers… (moi je n’en suis j’ai mes vaches). Ils délivrent leur diagnostic issu de profondes analyses et l’une de leur posologie préférée face aux désordres du marché tient en cette préconisation miracle : il faut segmenter ! Pour preuve j’ai pris bonne note d’une question posée dans l’édito de Vitisphère : Faut-il segmenter les vins bios ?



J’en déduis donc que s’il faut segmenter les vins il existe des segmenteurs de vin ? Mias où sont-ils nichés donc ces manieurs de scalpels qui découpent une droite en plusieurs segments de droite ? Je ne sais, dans ma jeunesse j’ai connu les scieurs de long, des gars costauds pourvus d’une bonne descente qui maniaient à deux une longue scie à ruban, bien plus tard les saucissonneurs des beaux quartiers qui ont eu leur heure de gloire mais ils se contentaient d’empaqueter les bourgeois pas de les découper, et pour en finir avec mon ironie facile, et m’en tenir là, dans les mêmes quartiers officièrent les découpeurs d’immeubleslink, qui achetaient des blocs d’immeubles aux institutionnels pour les revendre appartement par appartement pour faire du blé, pas du jaja.


Longue digression, pas forcément inutile pour redonner aux mots leur valeur : segmenter c’est découper mais la seule question qui vaille c’est qui découpe quoi ? Est-ce une action volontaire émanant de découpeurs de segments de marché ou est-ce le marché qui de par les caractéristiques des consommateurs induit cette segmentation qui se traduit par un étagement des prix du type prix de marchand de chaussures avec des 99 juste après la virgule. Dans les produits de grande consommation issus de l’agro-alimentaire, ou aussi des entreprises d’autres secteurs, il est clair que la segmentation par les prix, le positionnement prix des produits est l’œuvre des petits génies des services de marketing. Ainsi, au travers de la Distribution nous avons : les Grandes Marques, les marques de distributeurs, les produits des hard-discounteurs, des gens qui sont passés maîtres dans ce sport très particulier de soi-disant offrir aux consommateurs le meilleur au plus juste prix. Tout dépend de la pression mise sur les fabricants et sur le fait d’inclure dans le prix les coûts publicitaires et autre mises en avant par exemple. C’est un raccourci rapide mais il est clair que les mêmes produits peuvent se retrouver à des niveaux de prix très différents.


Et le vin dans tout ça ? Peut-il faire l’objet d’une telle forme de segmentation en notre beau pays ? Sans grand risque de me tromper la réponse est non car nous n’avons pas l’équivalent d’une marque comme Jacob’s Creek. Les nôtres sont des reliquats du passé destinées à couvrir un maximum d’espace dans les linéaires de la GD et du HD et leur positionnement est au ras des pâquerettes. Les tenants du petisme vont applaudir à tout rompre sauf que le problème posé est bien réel : la lisibilité de l’offre de nos vins n’est pas claire et le positionnement prix est souvent lié à des éléments historiques : notoriété de l’appellation, conservatisme des acheteurs de la GD, habitudes des consommateurs les plus anciens… qui ne correspondent plus très bien à la réalité des vins.


Alors me direz-vous, c’est bien beau de se gausser, de charrier les braves petits soldats qui segmentent, mais que faut-il faire pour que le consommateur s’y retrouve ? La réponse est simple à formuler, et difficile à appliquer : prendre le problème par les deux bouts :


-         Au cep : produire le raisin dédié à un vin donné, ce qui signifie que l’on sort de l’ambigüité actuelle de beaucoup d’AOC de grande dimension et dans les vignobles mixtes des choix clairs et connus soient fait. Tant que nous produirons une ressource mal définie nous ne bâtirons rien de solide dans le bas de la pyramide.


-         À la bouteille : partir de la réalité des modes de distribution du vin en notre vieux pays et appréhender pour chacun d’entre eux ce qu’il est possible de faire de pour tenter de mieux coller aux réalités de la production.

Grande Distribution, cavistes, CHR, vente directe sous toutes ses formes… Chacun a suffisamment de quoi balayer devant sa porte pour sortir de la simple stigmatisation ou du refus de s’organiser. C’est pas l’optimum ! Les surcoûts sont partout et ce sont les vignerons qui trinquent.


Le chantier est ouvert depuis belle lurette mais les lieux de confrontation sont maintenant aux abonnés absents. Chacun pour soi, à hue et à dia, plus aucune réelle perspective d’ensemble, les bassins ne sont que des petites bassines pilotées par l’inefficace consortium administration-profession, je ne vais pas me perdre en conjectures mais j’affirme sans grand risque que, remettre un peu d’intelligence dans certains zinzins : l’INAO et le diverticule vins de FranceAgrimer, grand paquebot sans réel capitaine, ne saurait nuire à la nécessaire lisibilité de notre offre de vins. Silence, on gère des procédures ! Alors, pour entretenir l’illusion : segmentons, hiérarchisons, classons en chambre ça occupera les segmenteurs et autres conseilleurs et pendant ce temps-là nous continuerons de « vendanger » – et oui c’est facile mais je n’ai pas trouvé mieux – notre position en nous contentant d’esquiver et de tergiverser, laissant à d’autres le soin de récupérer des parts de marché en croissance.


Ce premier dimanche de vrai été j’ai payé mon Côtes du Rhône rosé de la coopé d’Estézargues 6,50€ aux Papilles. La question est-elle de savoir si il y avait entre ce flacon et moi une concordance segmentaire ou tout bêtement ne suis-je pas allé au bon endroit pour satisfaire mon besoin du moment ? Les 2 bouts vous dis-je : le vin et moi…

 

Sans aucun rapport avec ce qui précède, habitué à passer ses vacances dans le Finistère, Stéphane Le Foll a mis les pieds pour la première fois aux Vieilles Charrues, ce dimanche. Au côté de Jean-Luc Martin, co-président des Vieilles Charrues, le ministre de l’Agriculture s’est dit « très impressionné » par l’ampleur du festival et l’immensité du site. Certes labourages et pâturages sont les deux mamelles de l'agriculture française mais n'oublie pas la vigne monsieur le Ministre...


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22 juillet 2012 7 22 /07 /juillet /2012 00:09

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La Bourgogne me tend les bras : présidence de la marche de Ladoix, intervention chez les amateurs éclairés au Clos Vougeot, seuls les politiques n’ont pas pris conscience de cette idylle : les 2 François sans doute encore grisés par le succès  du PNR, reste l’unique François qui sache ce qu’une souris veut dire : j’ai nommé François Desperriers qui ne manque jamais une occasion pour donner un coup de main au Taulier. Et puis voilà que tout d’un coup ça monte d’un cran :

 

Cher Monsieur,


Je fais suite à votre conversation téléphonique avec monsieur Benoît Goujon, Grand Prieur de la Confrérie des Chevaliers du Tastevin.


Parmi les activités de la Confrérie, nous organisons depuis 1950 le Tastevinage.


Il s'agit d'une dégustation, comme vous le savez, réunissant 250 membres d'un jury composé de professionnels du monde viti-vinicole et grands amateurs de vins. Les vins sont présentés par les producteurs bourguignons et dégustés sous l'anonymat le plus complet.


La prochaine séance, la quatre-vingt dixième du nom, se tiendra le vendredi 7 septembre à 10 heures au Château du Clos de Vougeot.


Nous souhaitons tourner cette 90eme séance autour du web et envisageons de réunir pour la première fois en notre cellier plusieurs bloggeurs qui pourront participer activement à cette dégustation. Comme Benoît vous l'a indiqué il nous serait agréable de pouvoir vous compter parmi nous afin que vous puissiez présider cette séance.


Un déjeuner dans les salons Renaissance du château réunira après la séance les membres du jury  et se terminera à 15 heures après la lecture du palmarès ainsi que le discours du président de séance.

J'espère que vous pourrez accepter notre invitation, et, dans l'agréable perspective de prendre connaissance de votre réponse,

 

Cordiales salutations

 

Arnaud ORSEL

 

Conseiller d'Honneur

Confrérie des Chevaliers du Tastevin


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Je sais Léon va se gausser, d’autres ironiser, certains me charrier, mais qu’importe, votre Taulier qui n’a jamais couru après les intronisations ou les festivités, lui ça lui fait plaisir qu’on pense à lui. Bref, fier d’être Bourguignon d’occasion !


Cependant y’a un blème : votre serviteur séjourne à cette époque en Corse et Ajaccio-Dijon n’est pas en ligne directe, ce serait même plutôt galère genre Ajaccio-Nice-Lyon en avion 4H30 de trajet transit compris, puis Lyon-Dijon en TGV… bref une bonne demi-journée pour l’aller et autant pour le retour… À la limite pour la rapidité et le côté pratique c’est de faire Ajaccio-Orly-Gare de Lyon-Dijon : en s’y prenant bien 1h30 de vol+1h30 de train avec le trajet vers la gare : je pars la veille et je suis de retour le 7 au soir. Ça c’est la France : tout vers Paris.


Pour l’heure je n’ai rien décidé mais je remercie la Confrérie des Chevaliers du Tastevin de son invitation. Si je m’y rends je promets de faire un discours dans le plus pur style Taulier Bourguignon d’adoption.

 

Affaire à  suivre donc !

 

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21 juillet 2012 6 21 /07 /juillet /2012 00:09

Le syndicat de Tavel annonce la couleur : 1ier rosé de France, le Roi des Rosé… « Dans l’univers du vin, il y a le blanc, le rouge, le rosé… et le Tavel » D’accord, je prends bonne note, on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même mais dans ce cas il ne reste plus qu’à tenir son rang et nos belles ombrelles que sont nos AOC sont parfois bien larges, pour être lapidaire sous le couvert de la typicité, d’un vague air de famille, on fait plus dans le prix Cognacq-Jay que dans le cousu main. Tavel, avec l’irruption des folles du rosé, plus pâles les unes que les autres, branchées, speedées, qui apparaissait comme une dame chic un peu effarouchée par ces gueuses, se crispait, s’installait dans une forme de retrait hautain. Sans vouloir être mauvaise langue force était de constater que face aux petits culs bien frais, faciles, frétillants, aguichants, où même certains n’hésitaient pas à y jeter des glaçons, nos Tavel paraissaient un peu lourds, franchement plon-plon, à cent lieues de la tendance.

 

Ainsi va la vie d’une appellation, des hauts, des bas ou des coups de mou, face à l’impérialisme dominateur des Côtes de Provence rosé et de tous les petits derniers qui se mettent à faire du rosé, à le faire savoir, pensez-donc même les seigneurs de Bordeaux condescendent à s’y mettre, le Tavel affirme sa singularité. C’est un bon parti et je ne suis pas en mesure de jauger si ce parti-pris très compréhensible est ainsi perçu par le consommateur. En effet, pour se différencier encore faut-il afficher des différences qui dépassent le simple affichage des communicants.

 

Pour palier mes insuffisances je suis allé chercher dans la poussière deux guides que l’on m’a offert je ne sais plus dans quelle condition : Hachette 2009 et Gault et Millau 2011. D’abord pour le pékin de base la bonne question basique est : c’est où Tavel ? Avec Google Maps c’est simple à trouver : dans le Gard ! Fort bien mais le Gard est, comme chacun sait, ou ne sait pas, écartelé entre le Languedoc et la vallée du Rhône. Donc, comme moi je sais que le président d’Inter Rhône est de Tavel j’en déduis que Tavel est classé Rhône comme les Côtes du Rhône Gardoises. Facile, comme vous pouvez le constater.


Dans le Hachette je galère pour enfin trouver coincé entre le Lirac et les Costières de Nîmes, le Tavel. Je lis 933 ha et 38 933 hl. J’y apprends que Tavel est considéré par beaucoup comme le meilleur rosé de France et que c’est la seule appellation rhodanienne à ne produire que du rosé. 16 domaines, 1 coup de cœur pour le domaine Lafond Roc-Epine, je n’y connais que le domaine de la Mordorée mais je n’ai jamais dégusté leur Tavel et bien sûr le Prieuré de Montezargues dont je cause dans mon titre. Aucune trace de la cave coop de Tavel, on peut être président sans pour autant faire des vins qui séduisent les faiseurs de guide. Je file alors dans le Gault et Millau plus récent. Même souk pour trouver Tavel qui là est coincé par l’alphabétique entre Saint-Péray et Vacqueyras. 7 domaines sélectionnés avec 2 quatre étoiles : la Mordorée et Pélaquié avec des 14,5/20, mais aussi le château d’Aquéria qui n’a que trois étoiles mais 16/20 pour un rosé qualifié de sec : les voies des guides me seront toujours impénétrables. Toujours pas de cave coopé mais bon je ne vais rechanter le même couplet. Du côté des prix pas beaucoup d’évolution entre le Hachette 2009 et le Gault et Millau 2011 ça se situe dans la fourchette des 8 à 12 € donc abordable par le pékin moyen supérieur.


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Je fais donc ma contrition sans acte ni pénitence mais ça faisait un sacré bail que je n’avais pas mis le nez au-dessus d’un verre de Tavel. L’autre jour, passant mes vieux abatis du côté de l’Annexe Richard à l’invitation de Corinne Richard, sous la houlette de la très experte Myriam Huet, ayant une petite soif : il faisait à peu près beau ce jour-là, mon regard est tombé sur une bouteille de rosé au frais et j’y lis sur l’étiquette : Prieuré de Montézargues ! Je me dis  dans ma petite Ford intérieure assoiffée, « voilà un bien beau nom… » C’est mon côté élevé par les frères dans la Vendée profonde sans doute. Alors je me sers ! Belle couleur vineuse, tout le contraire des pâlichons à la mode, un nez de fruits murs assez intense : rare chez les rosés me dis-je ! En bouche de la fraîcheur, de la vivacité, ce même fruit et alors que fais-je ?  Et bien je me désaltère. C’est vraiment une belle gourmandise. Un vin, un vrai vin de caractère. Là, j’approche mon museau au plus près de l’étiquette et je découvre que c’est un Tavel. Bien sûr mon approche va me valoir le courroux de mes confères experts mais je plaide non coupable : c’est ma soif qui m’a fait aller vers ce vin et n’est-ce pas là le seul geste qui compte pour ceux qui le font ? Pour étancher sa soif, que fait-on ? On s’assied à la terrasse d’un café par exemple, on consulte la carte et on hèle le tavernier « un Tavel Prieuré de Montézargues 2011 ». Voilà, c’est ce que j’ai fait et, en plus, j’ai réalisé une dégustation à l’aveugle comme on dit dans le jargon. C’en était une ! Nullement désinvolte mais, disons-le tout net, nature.


Avant de prendre congé j’ai fait part à Corinne Richard de l’excellence de ce Tavel dont, circonstances aggravantes pour le prétendu connaisseur que certains prétendent que je suis, j’ignorais qu’il était depuis 2003 la propriété de la famille Richard (un détail que le guide Hachette 2009 ne mentionnait pas d’ailleurs). Bref, le millésime 2011 est issu d’un assemblage 55% Grenaches (rouge et blanc), 30% Cinsault, 13% Clairette et 2% de cépages divers (Syrah, Mourvèdre, Carignan, Bourboulenc). C’est 12€ le flacon et vous ne les regretterai pas.

viewermontezargues.pngEnfin, pour les férus d’histoire le prieuré de Montézargues, une belle bâtisse, est issu de l’abbaye de Grammont, à laquelle Guillaume II et Rostang II de Sabran donnèrent, en 1199, le moulin, l’eau qui lui est nécessaire et les bois indépendants. Les moines qui s’installent alors au Prieuré de Montézargues obtinrent un droit de pêche sur l’Etang de Pujaut (asséché depuis). Le Pape Innocent III, écrivit à l’Abbé de Gramont pour lui enjoindre de recevoir en grâce cette nouvelle communauté. Ce à quoi il consentit. En 1295, ne demeuraient que trois religieux.

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