Vin & Cie, en bonne compagnie et en toute liberté ...
Extension du domaine du vin ...
Chaque jour, avec votre petit déjeuner, sur cet espace de liberté, une plume libre s'essaie à la pertinence et à l'impertinence pour créer ou recréer des liens entre ceux qui pensent que c'est autour de la Table où l'on partage le pain, le vin et le reste pour " un peu de douceur, de convivialité, de plaisir partagé, dans ce monde de brutes ... "
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Bonne journée à tous, ceux qui ne font que passer comme ceux qui me lisent depuis l'origine de ce blog.
Je n’avais nul souvenir de Jessica Lange née le 20 avril 1949 à Cloquet, dans le Minnesota, même si j’avais beaucoup aimé en 1989 : Music Box de Costa-Gavras.
Depuis que j’ai décidé d’écumer la bibliothèque de DVD je me tape, plutôt en fin de journée, en moyenne 2 ou 3 toiles par jour afin de rompre mon rythme de lecture, je découvre des films.
Tel fut le cas, samedi soir 13 février, du film de Bob RafelsonLe Facteur sonne toujours deux fois The Postman Always Rings
J’avais bien aimé Le facteur sonne toujours deux foisréalisé par Tay Garnett en 1946 avec Lana Turner, John Garfield, Cecil Kellaway
Tay Garnett ne fut pas le premier à porter à l’écran ce drame de la passion adultère. Avant lui, Pierre Chenal adapta le roman de James M. Cain, publié en 1934 qui remporta un grand succès, avec un Michel Simon tendre et pathétique, dans Le Dernier Tournant (1939). Et Luchino Visconti établit des liens entre cette histoire déchirante et le fascisme italien, dans Les Amants diaboliques (1943).
Alors que la première adaptation représentait plutôt une femme maléfique causant le malheur d’un homme faible, dans le style des “films noirs” très en vogue dans les années 40, la seconde version de 1981 par Bob Rafelson a plutôt recréé l’époque sociale où le roman a été écrit : l’Amérique de la Dépression et des coureurs de route cherchant un travail, un port d’attache même provisoire.
Avec ce film, le réalisateur Bob Rafelson en profite pour provoquer une Amérique prude : on y voit Jessica Lange, sous l’emprise d’un séducteur Jack Nicholson, l’un de ses grands rôles. Les parties de jambes en l’air entre Lange et Nicholson constituent un sommet de l’érotisme au cinéma.
« On pardonnera facilement à Franck (Jack Nicholson) ses égarements car le pauvre est certainement tombé, dans cette station essence paumée au fin fond de la Californie, sur une des actrices les plus torrides que le cinéma nous ait donnée. Jessica Lange irradie littéralement chacune des scènes où elle apparait et si Jack se consume à sa vue, il n'est pas le seul. Elle tient parfaitement sa place dans la grande famille des femmes fatales que le film noir américain a inventée. Mais là où Barbara Stanwyck dans Assurance sur la mort campe une garce vénéneuse, Jessica Lange offre une candeur, un rayonnement juvénile qui fait qu'il est difficile de lui reprocher jusqu'au meurtre le plus sordide. »
Deux énormes acteurs, Nicholson égal à lui-même et Lange une révélation.
Icône
Comment Jessica Lange a acquis son panache légendaire
Deux oscars, trois Emmy Awards, cinq Golden Globes, un Tony Award et un SAG : la liste de récompenses de l'actrice est longue comme le bras. Aujourd'hui, après 41 ans de carrière, elle est reconnue pour son « chien » autant que pour ses talents d'actrice.
Publié leJEUDI, 20 AVRIL 2017
parAlexane Pelissou
Le dimanche après-midi le gris étant au rendez-vous, je pioche dans ma bibliothèque de DVD où je trouve Music Box de Costa-Gavras1989 et en consultant la pochette je découvre que le rôle d’Ann Talbot, l’avocate, la fille du monstre, est Jessica Lange.
J’enfourne immédiatement, sous le regard toujours intrigué du chat, le disque dans le lecteur. J’ai déjà vu le film, je connais donc l’épilogue, mais je le suis avec la même passion que lorsque je l’avais vu sur grand écran.
Télérama critique par Pierre Murat
Et si ça vous arrivait à vous ?
Et si vous découvriez que votre père, votre vieux père si gentil, a — peut-être — été un criminel nazi ?
L’un des plus beaux films de Costa-Gavras (Ours d’or au festival de Berlin 1990), parce que la thèse (la mémoire, la faute) se fond dans une intrigue romanesque subtile. Et aussi parce que l’héroïne qui mène l’enquête sur l’innocence ou la culpabilité du père est interprétée par Jessica Lange. Dont chaque mouvement, chaque regard, chaque intonation reflètent le doute, l’angoisse et la honte du doute et, donc, l’écroulement des certitudes. Costa-Gavras mélange le romanesque et le politique avec une maestria qui lui a, parfois, manqué.
On sait moins que, en fait, de très nombreux criminels de guerre (ils sont estimés à dix mille) se réfugièrent tout simplement aux Etats-Unis. Beaucoup d’entre eux (surtout ceux qui étaient originaires des pays baltes, d’Ukraine et de Biélorussie) collaborèrent, dès le début de la guerre froide, avec les services de renseignement américains : ils purent, en récompense, facilement s’installer aux Etats-Unis et y couler une forte paisible existence, dans l’oubli.
Parfois cependant, par les hasards de la justice, un dossier remonte à la surface de l’obscur océan des archives. Et celui qui pensait ne plus avoir à rendre des comptes se retrouve brutalement confronté au cauchemar de son propre passé. Un passé gravé dans la mémoire, ineffaçable, inoubliable comme la petite mélodie, douce et lancinante, d’une ancienne boîte à musique.
Tel est le thème de Music Box, le nouveau film de Costa-Gavras. Un thriller poignant, réalisé aux Etats-Unis et qui raconte, avec une formidable virtuosité narrative, l’histoire d’un émigré hongrois bien tranquille (remarquablement interprété par Armin Mueller-Stahl), accusé, quarante ans après, d’avoir été un tortionnaire fasciste, membre des Croix fléchées, collaborateur des nazis et assassin de juifs (plus de cinq cent mille juifs hongrois furent exterminés pendant la guerre). Il nie et demande à sa fille, brillante avocate (Jessica Lange), de le défendre, de prouver qu’on le confond avec un autre, qu’il est victime d’une machination.
Cas de conscience Dans " Music box ", de Costa-Gavras, Jessica Lange, avocate découvre les fautes pour lesquelles il ne peut y avoir prescription
Le Monde publié le 28 février 1990
Après le passage de ce film au Festival de Berlin et l'ours d'or qu'il y a reçu, après les commentaires qu'il a déjà suscités, on ne peut ignorer le sujet qu'il traite ou, plutôt, la situation qui sert de base au scénario : en 1989, à Chicago, Michael Laszlo, homme d'une bonne soixantaine d'années, hongrois émigré depuis quarante-cinq ans (Armin Mueller Stahl) est informé par le bureau des enquêtes spéciales que le gouvernement hongrois demande son extradition ; il est poursuivi comme tortionnaire au service des nazis, pour crimes de guerre. Michael Laszlo doit comparaitre devant la justice américaine ; il risque de perdre sa citoyenneté et d'être renvoyé en Hongrie. Sa fille, Ann Talbot (Jessica Lange), brillante avocate, décide d'assurer sa défense. Elle n'a aucun doute sur son innocence. Née aux Etats-Unis, elle ignore bien des choses sur le pays natal de son père.
En 1920, après avoir maté une révolution, l'amiral Horthy avait été nommé régent de Hongrie par l'Assemblée nationale. Onze ans plus tard, il gouvernait en dictateur. Après s'être rapprochée de l'Italie fasciste, puis de l'Allemagne nazie (surtout après l'Anschluss, qui lui valut des avantages territoriaux), la Hongrie entra en guerre aux côtés des nazis, en 1941. En mars 1944, Hitler fit occuper le pays qui, voyant la guerre perdue, cherchait un rapprochement avec les alliés. Horthy fut destitué et remplacé par Ferenc Szalasi, fondateur du sinistre parti pro-nazi des Croix-Fléchées, qui fit déporter et massacrer les juifs hongrois, et intensifia la guerre. Szalasi s'enfuit après la défaite allemande et la libération de la Hongrie par les Soviétiques. Il fut retrouvé, condamné à mort et exécuté en 1946.
Vérité historique
Ainsi, en 1944-1945, la Hongrie n'était-elle pas une nation innocente. Parmi les nombreuses " personnes déplacées " fuyant les troupes soviétiques et demandant l'assistance des alliés - ce fut vrai, d'ailleurs, pour toute l'Europe de l'Est, - se glissèrent des fascistes et des criminels de guerre. Les autorités américaines qui, à mesure que se précisait la " guerre froide ", avaient besoin de collaborateurs anticommunistes, ne furent pas très regardantes pour accorder les visas d'immigration.
Cette vérité historique, il faut la rappeler pour parler de Music-Box. Elle sous-tend le scénario de Joe Eszterhas, se révèle dans certains détails au cours du procès et déplace le suspense.
On ne se demande pas : Michael Laszlo est-il innocent ou coupable ?
Mais : comment Ann Talbot, citoyenne américaine, placée du côté de la loi, mère d'un petit garçon qui doit être préservé du mal, va-t-elle réagir lorsque la vérité – qui ne sort pas d'un puits au terme d'une troublante enquête – deviendra, pour elle, irréfutable ?
Armin Mueller-Stahl interprète avec une tranquille assurance le bon Américain qu'est devenu Laszlo, ouvrier, veuf et père de famille exemplaire (deux enfants qui ont chacun sa place dans la hiérarchie sociale, le fils ayant moins bien réussi) soudain poursuivi par un agent implacable, Jack Burke (Frederic Forrest excellent) lequel ne peut tout de même pas être soupçonné de participer, en 1989, à une machination communiste. Face à sa fille, aux juges, aux jurés, aux spectateurs du procès – et du film – Armin Mueller-Stahl est un bloc, un rocher. Cheveux blancs, yeux d'un bleu métallique qui n'expriment rien, phrases tranchantes du genre " Je n'ai pas fait cela ", " Ce n'était pas moi ", il donne froid dans le dos à cause de sa dualité devinée derrière le bon Américain qu'il est devenu.
La mise en scène cinématographique du procès est très forte : les dépositions des témoins passionnent jusque dans l'horreur et font basculer, non pas l'accusé, mais l'avocate, ébranlée à la fois dans son amour filial et dans l'idée qu'elle a, par nature, pourrait-on dire, de la démocratie américaine. Ce qui a été enfoui dans les " accidents de l'histoire" et les bonnes consciences remonte à la surface avec un remugle de charnier, d'horreurs pour lesquelles il ne peut y avoir prescription.
Un grand peintre psychologique
On voit toujours, avec raison, en Costa-Gavras, un cinéaste politique qui, depuis Z, s'est attaqué à tous les maux engendrés par les systèmes totalitaires, les diplomaties militaires et les phénomènes pervers de société. Mais Costa-Gavras est, aussi, un grand peintre psychologique dont le style classique, direct, sec parfois et toujours efficace, part des faits pour traduire les conflits intérieurs, les bouleversements et les choix de personnages amenés à remettre en question une certaine idée de l'ordre et de la morale.
Comme Jack Lemmon dans Missing, Jill Clayburgh dans Hannak, et Debra Winger dans la Main droite du diable, Jessica Lange est un personnage placé en face d'un débat, d'un problème individuel, soudain extrait, comme une noix de sa coque, de l'espace-temps historique. En avocate américaine "clean", peu à peu forcée d'imaginer et d'admettre des images de supplices, de meurtres et d'extermination – c'est comme un procès de Nuremberg dans sa tête – Jessica Lange casse son image d'actrice irréprochable, exprime la douleur et la détermination d'une femme qui ne se remettra jamais d'un traumatisme reçu, un jour, sur les bords du Danube et le pont des supplices de 1944. Ce voyage en Hongrie donne moins la solution d'une énigme que le déclic, tragique, d'un cas de conscience. Mais Costa-Gavras n'est-il pas le plus hollywoodien des cinéastes français ?
La Claire en question est Claire Touzard (chronique du matin) – j’en connais un qui a dû se faire des cheveux à la lecture de mon titre, le pauvre – la journaliste virée salement du magazine Grazia où j’ai découvert cette information capitale.
Mon vieux pote Jacques Séguéla, que j’ai croisé du côté de Perpignan au temps où il voulait racheter l’USAP et que je m’échinais sur la crise des VDN – ça c’est pour mon vieil addict Bof devenu Pierre – dirait « Si t’as pas ta paire de Birkinstock-Hermès à moins de 35 ans, c’est que t’as raté ta vie… »
Tout ça c'est New-York, l'idée vient du collectif MSCHF, un groupe artistique américain fondé en 2016 et basé à Brooklyn, réputé pour passionner les foules avec des projets mode un peu fous comme la «Jesus shoe», une paire de Nike aux semelles remplies d'eau bénite... vendue en seulement une minute ou une collection de tee-shirts baptisée L’impossible collaboration, qui a dévoilé une version très personnelle des sandales iconiques "Arizona" de Birkenstock, fabriquée à partir de luxueux sacs Birkin de la marque française Hermès.
Le collectif a dépensé 122.500 dollars en sacs, transformés en matière première, pour pouvoir mettre au point son projet, sans compter les semelles en liège de la griffe allemande. Et s'est lancé dans un travail de déconstruction du Birkin pour mettre au point sa claquette. «Le simple fait de découper un sac Birkin a effrayé tant de gens», a déclaré Lukas Bentel, directeur créatif de la MSCHF à CNN.
Les 2 marques n’ont pas donné leur accord pour ce genre de création comme le rapporte le New York Times.
Déclinées en trois couleurs, et disponible uniquement en édition limitée, ces claquettes "Birkinstock" d'un autre genre sont vendues entre 34.000 à 76.000 dollars selon le modèle. Le prix de chaque varie en fonction du sac utilisé pour fabriquer la pièce (cuir grainé noir ou blanc et cuir vernis bordeaux.
Pourquoi L'association Birkenstock-Chaussettes Est Un Combo Mode Au Sommet ?
13 août 2020
Par Chloé Maurin
Combo mode polémique qui faisait jadis frissonner d'effroi la fashion police, l'association des Birkenstock-chaussettes revient dans les bonnes grâces des filles stylées et se veut tendance ultime de la rentrée.
La recette de ce succès aux origines stylistiques douteuses ?
Un confort indéniable, une allure des plus casual et une ode à la "mode moche" : longtemps considérées comme l'apanage des touristes en short cargo beige et affublées du terme "ugly shoes", les sandales allemandes Birkenstocks - au même titre que le bob ou la banane - se sont vues récemment devenir le nouveau cool.
Et le toc au summum de la tendance pour les porter reste encore de les enfiler par-dessus des grosses chaussettes tricotées... Oui oui, nous parlons bien de cette vision qui nous a pourtant donné moultes sueurs froides dans le passé. Mais la mode est un éternel recommencement (et surtout un vaste terrain d'expérimentation où les Birkenstocks et les chaussettes peuvent finalement se retrouver pour le plus grand plaisir de nos pieds).
Dans ma dernière moisson de livres, au milieu des romans noirs ou blancs le « Sans Alcool » de Claire Touzard me provoquait, il faisait tache, en effet la photo sur le bandeau de son livre de cette journaliste, tout de blanc vêtue, n’a rien à voir avec celle d’une pochtronne abîmée par 22 ans de bitures et autres addictions. Dans l’une des interviewes qui suit elle s’en explique.
Depuis le témoignage d’Olivier Ameisen je suis attentif à celles et ceux qui sont tombés dans l’alcoolisme.
3 novembre 2008
« Le Dernier Verre » du Dr Olivier Ameisen : un témoignage qui dérange… ICI
« Je suis hanté depuis toujours par un sentiment angoissant d’inadéquation, d’imposture. Alors que je dégage – selon ce qu’on me dit – une impression de force et d’assurance et même, pour beaucoup, de charisme, je me sens en totale inadéquation avec cette image. Pour moi, cette personne dont le CV épate tout le monde n’a rien à voir avec la personne que je suis réellement. Je vis dans la crainte d’être découvert. Un jour, forcément, quelqu’un comprendra que tout ce que j’entreprends, tous mes succès ne sont qu’une escroquerie, et le château de cartes s’écroulera en quelques secondes. » Là est la racine de sa maladie. Ce livre vous devez le lire. Je ne vais donc pas vous le résumer mais vous confier, dans l’ordre chronologique, des passages que j’ai soulignés lors de ma lecture. »
9 janvier 2012
Portrait d’Olivier Ameisen dans Libération « Arrêter l’alcool, ce n’est rien. Découvrir la vie, c’est extraordinaire»
« Aujourd’hui, il se dit heureux comme jamais. «Arrêter l’alcool, ce n’est rien. Découvrir la vie, c’est extraordinaire», confie ce fana de marches en montagne. «Sans ma souffrance, je n’aurais jamais connu le bonheur. Je croyais poésie et souffrance indissociables et ne pouvais m’empêcher de pleurer en entendant Rachmaninov ou Barbara, en lisant Eluard ou Tolstoï.» Il ne pleure plus, puisqu’il ne boit plus. »
Et puis cette fois-ci c’est une femme qui témoigne, dans notre pays du soi-disant bien boire, les hommes sont en première ligne, affichant avec suffisance leur belle descente – combien ai-je côtoyé de soi-disant amateurs qui n’étaient en fin de compte que des pochtrons ? Beaucoup ! Et de très connus – alors que les femmes doivent cacher leur ivrognerie, « une femme saoule ce n’est pas beau » tranchent les gens bien comme il faut.
Baby-boomer, né dans un des départements les plus alcoolisé de France, la Vendée, à la Mothe-Achard, avec ses 60 points de buvaison pour 1300 habitants, j’en ai vu défiler des bourrés dans la cuisine familiale, beaucoup allait se désintoxiquer « aux fous » disait-on, l’hôpital psychiatrique de la Grimaudière. Ma distance avec l’alcoolisation y trouve son origine.
Claire Touzard pourrait être ma fille, j’aurai bientôt 73 ans, j’ai fumé un temps des Boyard maïs, puis des roulées, des biddies, un temps des Puros, le tabac était un excellent moyen pour se concentrer sur l’écriture, j’ai cessé un beau jour, et mon séjour en pneumologie à Cochin suite à mon accident de vélo, m’a fait toucher le calvaire des fumeurs. J’ai commencé à boire fort tard, à mon arrivée à Paris en 1976, les vins d’alors ne me plaisaient guère, j’en buvais peu et dans les lieux sociaux je laissais mon verre plein. Et puis, sur le tard j’ai découvert les vins nature au Lapin Blanc lieu improbable sur les hauts de Ménilmontant, j’y ai trouvé le plaisir alors, lorsque j’en bois, je ne déguste pas, j’en bois à satiété. Jeûner, ne pas en boire ne me pose aucun souci, je ne suis pas dépendant, ma seul addiction c’est la caféine.
Pour un blog qui affiche Vin&Cie aborder l’ivrognerie est déjà une provocation pour les tenants stupides du vin n’est pas un alcool comme les autres. Mais j’affiche aussi que c’est un Espace de liberté, alors l’autoportrait de Claire Touzard, fort bien écrit, y a sa place, à chacune et chacun de se faire son opinion même si ça déplaît à Saverot le rédac-chef de la RVF.
Un clin d’œil provocateur à l’attention de ceux, les frustrés qui se reconnaîtront, qui me reprochent de ne fréquenter que des filles :
Les femmes qui pensent sont dangereuses Stefan Bollmann GRÜND (26/09/2013)
L'autoportrait de François de La Rochefoucauld
Je suis d’une taille médiocre, libre et bien proportionnée. J’ai le teint brun mais assez uni, le front élevé et d’une raisonnable grandeur, les yeux noirs, petits et enfoncés, et les sourcils noirs et épais, mais bien tournés. Je serais fort empêché à dire de quelle sorte j’ai le nez fait, car il n’est ni camus ni aquilin, ni gros, ni pointu, au moins à ce que je crois. Tout ce que je sais, c’est qu’il est plutôt grand que petit, et qu’il descend un peu trop bas. J’ai la bouche grande, et les lèvres assez rouges d’ordinaire, et ni bien ni mal taillées. J’ai les dents blanches, et passablement bien rangées. On m’a dit autrefois que j’avais un peu trop de menton : je viens de me tâter et de me regarder dans le miroir pour savoir ce qui en est, et je ne sais pas trop bien qu’en juger. Pour le tour du visage, je l’ai ou carré ou en ovale ; lequel des deux, il me serait fort difficile de le dire. J’ai les cheveux noirs, naturellement frisés, et avec cela assez épais et assez longs pour pouvoir prétendre en belle tête. J’ai quelque chose de chagrin et de fier dans la mine ; cela fait croire à la plupart des gens que je suis méprisant, quoique je ne le sois point du tout. J’ai l’action fort aisée, et même un peu trop, et jusques à faire beaucoup de gestes en parlant. Voilà naïvement comme je pense que je suis fait au-dehors, et l’on trouvera, je crois, que ce que je pense de moi là-dessus n’est pas fort éloigné de ce qui en est. J’en userai avec la même fidélité dans ce qui me reste à faire de mon portrait ; car je me suis assez étudié pour me bien connaître, et je ne manque ni d’assurance pour dire librement ce que je puis avoir de bonnes qualités, ni de sincérité pour avouer franchement ce que j’ai de défauts.
Extrait du Recueil des portraits et éloges écrit en 1659.
Autoportrait donc, en relation avec autobiographie, confrontation de son image telle qu’on la voit avec celle du regard des autres.
EXTRAITS
NDLR :
Chère Claire,
Je n’ai jamais rien cherché dans le vin, je bois, de temps en temps, que des vins nu aujourd’hui, jamais seul, mais avec mon amie Claire caviste, mon absence d’addictions ne doit rien à un interdit social, moral, religieux, et j’aime danser, faire la fête, le bien-manger, mais tout bêtement à mon souci de ne jamais me retrouver privé de ma liberté, d’être contraint, enserré, tout comme le surendettement qui vous entraîne dans une fuite en avant. L’alcoolisme est une maladie et, comme Olivier Ameisen, je pense qu’il faut en traiter les causes, dont l’une d’elle est le craving. Le flacon, ou la dose, la clope, ne sont en rien responsables de l’addiction, même si je conteste le discours imbécile : le vin n’est pas de l’alcool et pire le vin est bon pour la santé.Je roule vers 73 balais, donc j’eus 20 ans en 68, nous y avons tenus des discours en béton, nous étions un peu cons, aujourd’hui on nous taxe d’être la cause de toutes les dérives que votre génération a connue, et pourtant la cause des femmes pesait aussi très lourd dans nos revendications. J’ai eu la chance de croiser, puis de travailler avec Michel Rocard, j’ai donc eu une belle vie, de beaux petits enfants, et je vous souhaite, sur le chemin difficile du sevrage, à vous aussi, une belle vie à la tête d’une petite entreprise que j’ai connue en son temps : élever et aimer son enfant.
Mais l’anxiété sociale, la timidité font partie des raisons qui me poussent à boire… page 109
Moi qui avait si peur du jugement des autres, j’avais livré mon autre visage : l’alcoolique vulnérable, et non la guerrière bravache (…) Je me suis déshabillée, j’ai enlevé les couches ; les belles pompes, la veste chic, le brushing, jusqu’à ce que l’on voit l’os, les sédiments. J’ai été à poil… page 111
C’est plutôt la qualité de l’ivresse que je jugeais : certains vins nature la rendaient douce et sereine, n’arrachais pas le crane le lendemain. Certains bordeaux étaient comme de petits cercueils érotiques, leur chaleur m’assourdissait, avant de me faire vriller tout à fait par leur lourdeur… page 113
ll y a un déchirement vif, entre cet imaginaire idyllique et exaltant que transporte l’alcool et cette arme assassine, chaotique et sanguine qu’il représente aujourd’hui pour moi. J’ai du mal à rompre avec le vin, comme j’ai du mal à me séparer d’un amour toxique. Comme avec les pervers, les sales types : on s’accroche toujours à l’illusion du plus beau, du plus grandiose, là où est en vérité sombre lorsqu’on a le bon filtre… page 115
la vérité est que boire mène toujours et irrémédiablement à un seul état : l’ivresse. Cela procure, certes un plaisir considérable, parfois quasi sexuel, mais reste une sensation relativement immédiate qui n’apporte pas d’élévation de l’esprit.
Il n’est en rien un art. Ni une philosophie. Il ne permet pas d’accéder à d’autres portes de compréhension du monde.
Il bourre la gueule. Point barre… page 116
J’ai toujours eu un caractère sensible et anxieux : l’alcool, comme la coke, et même le shit ou la weed, ont des effets toxiques et immédiats sur mon âme que je métamorphose sous leurs effets. Paradoxalement, ma sensibilité et mon anxiété sont les raisons profondes de mes addictions. Il s’agit là d’une association de malfaiteurs : jamais l’alcool ou la drogue ne seront pour moi des effets bénéfiques. Je dois me faire une raison… page 119
Existe-t-il des personnes qui boivent juste pour le plaisir serein, pour l’orgasme gustatif ? Cela me paraît impensable, puisqu’on ne peut dissocier la saveur ou l’usage du vin, de l’ivresse, et que dans la quête de l’ivresse, il y a une recherche d’évasion qui prouve le désamour du moment présent. J’ai la conviction que si l’on s’essaie à ces produits, c’est qu’inconsciemment on cherche tous à soigner un mal-être inconscient… page 121
Nous gueulions sur le système, mais nous n’en imaginions aucun autre. Nous ne créions aucune idéologie moderne. Notre époque a été particulièrement nihiliste et dépolitisée, et les artistes, intellectuels du moment, occupaient le terrain, noctambule à nos côtés… page 162
À la campagne, comme à la ville, l’alcool permet de tabasser la solitude, l’ennui, les contrariétés financières : il permet de tenir physiquement dans un ciel crevassé, avec des jobs parfois trop violents et sous-payés.
En Bretagne, comme dans beaucoup de régions en France, boire est incontournable. L’alcool est le psy inexistant, le Lacan des âmes torturées du village. Les aînés ne lésinent pas sur la bouteille. On vous y met le doigt dedans dès l’enfance… page 166
Tant que l’abstinence s’effile, plus que je ne l’aurais imaginé aux prémisses, je comprends que la dépendance naît d’un faisceau d’éléments, d’époques, comme des bouts de puzzle qui s’accordent au fur et à mesure du temps… page 194
Claire Touzard : « Arrêter de boire, c’est ça la vraie rébellion ! »
À 37 ans, après deux décennies de consommation excessive, Claire Touzard a décidé d’en finir avec l’alcool. Cette journaliste, qui a des attaches à Brest et Plouescat (29), savoure aujourd’hui une année de sobriété qu’elle décrit dans un livre confession, « Sans alcool », en forme de journal d’un sevrage.
« Beaucoup de femmes, comme moi, s’emparent de l’alcool pour son supposé rôle émancipateur. C’est évidemment un leurre », confie la journaliste Claire Touzard, auteur du livre témoignage « Sans alcool » (Photo Alexandre Tabaste)
Publié le 21 janvier 2021
Votre livre s’achève à la fin de l’été 2020. Où en êtes-vous de votre sevrage aujourd’hui ?
Je n’ai pas bu une goutte d’alcool depuis et puis je suis devenue maman à Noël ! J’ai le sentiment - même si je touche du bois - que le plus dur est vraiment derrière moi. Je ne pense plus du tout à boire de l’alcool. Un thérapeute m’a dit un jour qu’il était parfois possible de revenir à une consommation raisonnable, mais je n’en ferai rien : vu tout ce que j’ai gagné en arrêtant, c’est non.
Quel a été le déclic ?
J’ai eu envie que ma vie change. Je me rendais bien compte que j’allais trop loin. À l’époque, j’étais célibataire, je sortais, mais il m’arrivait aussi de boire seule, chez moi. Les jours « sans » étaient devenus très rares. Et puis, j’ai rencontré quelqu’un. Et la première fois où je me suis retrouvée ivre devant lui a agi comme un déclic : je devais arrêter.
Pourtant, votre physique ne disait rien de ces excès. Vous « présentiez bien », à l’opposé du cliché de la « pochtronne » négligée…
Oui, je remercie la génétique, mais il est vrai que j’ai un physique athlétique, une peau qui ne trahit pas mes excès. Au point d’ailleurs qu’après une interview en vidéo, des gens m’ont dit que ce que je racontais de ma consommation ne pouvait pas être vrai, que j’étais trop « fraîche » pour sortir de 22 ans d’alcool. Je pense juste que je me suis arrêtée à temps. Si j’ai pu cacher mon alcoolisme, c’est parce que je vivais seule, que mon boulot me faisait souvent voyager à l’étranger. Cela ne m’empêchait pas d’avoir honte de passer chez le caviste acheter une bouteille, en prétextant un dîner entre amis…
Beaucoup de gens pensent que l’alcool les inspire. Moi, je n’ai pas l’impression que ça rend intelligent. Tout ce que j’ai écrit bourrée, c’était très mauvais !
Vous dites que l’alcool vous aidait à échapper à une féminité un peu encombrante. Qu’est-ce à dire ?
J’ai toujours eu du mal avec la féminité. Pour moi, l’alcool servait d’arme pour casser les codes conventionnels de la féminité : j’avais l’impression que je m’émancipais en buvant trop, en buvant comme un mec. L’alcool, pensais-je, me rendait moins lisse, plus puissante. Beaucoup de femmes, comme moi, s’emparent de l’alcool pour son supposé rôle émancipateur. C’est évidemment un leurre.
Vous pensiez être plus forte sous alcool, alors que l’ivresse rend vulnérable, particulièrement quand on est une jeune femme…
Oui, je revois le film de tout ce que j’ai fait sous alcool pendant toutes ces années… Et tous ces lendemains où l’on réalise ce qu’il s’est passé la veille, ce regard de dégoût que l’on pose alors sur soi. Beaucoup de gens pensent que l’alcool les inspire. Moi, je n’ai pas l’impression que ça rend intelligent. Tout ce que j’ai écrit bourrée, c’était très mauvais !
Quels bénéfices retirez-vous après un an de sobriété ?
J’ai meilleure mine, j’ai perdu un peu de poids, mais surtout je suis en forme. Avant, j’étais en gueule de bois ou a minima fatiguée par la consommation de la veille, un jour sur deux. Et ça me rendait irascible. Beaucoup de mes angoisses ont disparu, aussi. Quand on boit, on pense que l’alcool est un bon moyen de déstresser, de décompresser. En fait, ça ne fait que mettre de l’acide sur nos plaies.
Les gens qui ne boivent pas d’alcool sont toujours les culs-bénis, les chiants. Dans l’imaginaire collectif, les bons vivants, les sympas, les drôles, les cools sont ceux qui boivent… C’est ce que je croyais aussi
Vous racontez que certains de vos proches ont été étonnés de votre annonce. La sobriété est parfois mal vue…
Oui, car quand on annonce qu’on arrête de boire, on tend un miroir à l’autre. On l’oblige à regarder en face sa propre consommation. Et puis, en France, les gens qui ne boivent pas d’alcool sont toujours les culs-bénis, les chiants. Dans l’imaginaire collectif, les bons vivants, les sympas, les drôles, les cools sont ceux qui boivent… C’est ce que je croyais aussi.
En fait, la sobriété, dites-vous, est bien plus subversive qu’on ne le pense.
Oui, arrêter de boire, c’est ça la vraie rébellion ! L’abrutissement, ce n’est pas subversif. Arrêter l’alcool, c’est vivre sous une forme plus pure. Je me redécouvre depuis un an. J’ai repris le pouvoir sur moi-même. Je suis connectée à mes émotions. L’alcool prenait trop de place, générait tant de honte, d’oublis, de fatigue et de nervosité… Vraiment, la liberté, c’est de ne plus boire.
Comment avez-vous géré les contrariétés de la vie sans alcool ?
Même quand j’ai eu des coups durs, je n’ai pas pensé à boire de vin. Vous savez, quand on boit, on pense qu’on a besoin de l’alcool comme d’un médicament. Mais en fait, aujourd’hui je me rends compte qu’affronter le réel, ce n’est pas plus dur que de le fuir comme je le faisais avant. En réalité, l’alcool, quand on ne va pas fort, ajoute au drame. C’est le plus mauvais des pansements. Aujourd’hui, ma vie est plus tournée vers la nature : son contact est devenu un besoin à travers la contemplation, la marche. Je sais qu’on peut aller se balader avec des amis plutôt que de prendre l’apéro, et c’est sympa. En plus, sans alcool, on a l’esprit plus aiguisé : les blagues sont meilleures ! La parole, l’écriture aident beaucoup aussi.
Née à Paris, vous avez ensuite grandi à Brest puis à Plouescat (29). Quelles sont vos attaches avec la Bretagne aujourd’hui ?
J’y passe encore beaucoup de temps. Une partie de mon livre a d’ailleurs été écrite depuis Plouescat, où vit ma famille. Je ne reste jamais très longtemps sans aller me balader baie du Kernic, dont j’aime par-dessus tout la lumière en hiver.
Les Bretons sont réputés pour « lever le coude ». Pensez-vous que cette réputation soit fondée ?
Ce qui est sûr, c’est qu’ils en rient eux-mêmes ! Bien sûr que les Bretons sont un peuple qui aime réunir sa tribu, qui apprécie la convivialité : l’alcool va avec. Mais est-ce bien différent ailleurs ? Le Pastis des Marseillais sert aussi à ça !
PORTRAIT. Claire Touzard, ancienne alcoolique : « L’alcool m’aidait à avoir l’air cool et rebelle »
Originaire de Morlaix, Claire Touzard s’est fait une place dans les milieux branchés parisiens. Elle révèle dans un livre ce que tout le monde, autour d’elle, avait déjà deviné : son alcoolisme.
Claire Touzard, journaliste, a cessé de boire le 31 décembre 2019 : « Ça faisait longtemps que je savais qu’il y avait un problème »
| DANIEL FOURAY, Ouest-France Texte : Thierry RICHARD.Photo : Daniel FOURAY. Publié le 26/01/2021
Une longue chevelure noire et épaisse, des yeux clairs, une peau diaphane, une silhouette athlétique… À bientôt 40 ans, Claire Touzard ne passe pas inaperçue. « Je présente bien », écrit-elle. On peine à croire qu’elle a pu être cette « pochtronne » qu’elle évoque dans son livre, sans rien cacher de ses frasques. « Vous ne pourriez le deviner, j’avance masquée », écrit-elle encore.
Claire Touzard a tombé le masque. Elle révèle aujourd’hui ce que tout le monde, dans son entourage, savait déjà. Elle est alcoolique. Ou plutôt « était ». Elle a arrêté l’alcool le 31 décembre 2019, après une énième soirée de beuverie, quand elle a vu dans le regard de son nouvel amoureux l’image de ce qu’elle était devenue, « la beurrée, la barrique ».
« Je buvais seule, de plus en plus »
Un an plus tard, elle raconte cette nuit d’ivresse dans le salon de son appartement parisien où elle vient d’emménager avec Alexandre. « Quand j’ai vu ses yeux sur moi, ce soir-là, je me suis dit : « Es-tu prête à perdre cette personne ? » J’avais foutu en l’air tellement d’amitiés à cause de l’alcool. Il était hors de question de le perdre lui. Il y a eu un déclic. Mais ça faisait longtemps que je savais qu’il y avait un problème. Je buvais seule, de plus en plus. »
Il faut se méfier des apparences. À l’époque, Claire Touzard est une journaliste en vue, rédactrice en chef d’un magazine branché, Grazia Hommes. Après une formation en journalisme à Rennes, elle a enchaîné les jobs à France Inter, Canal +, Paris Première, Libération, GQ… Un milieu cool et intello où l’on a le sens de la fête. Où l’on assène des vérités qu’on croit géniales en sirotant des grands crus.
Alcoolisme ? Sûrement pas. Éthylisme mondain, au pire. Rien à voir avec « ce type sans dents et sans emploi, qui carbure au pastis dès 10 h du matin au PMU ». Vraiment ? Un peu de lucidité : « Nous buvons pour les mêmes raisons et les dégâts physiques sont similaires. Le vin n’est ni plus gai ni moins dangereux parce qu’il est mieux sapé, plus cher, dans des meilleurs verres. »
Claire Touzard a grandi en Bretagne, près de Morlaix, dans le Finistère. C’est là-bas qu’elle a « appris » à boire sans modération, à 16 ans. « À l’adolescence, les amitiés se nouent très vite autour de l’alcool. Au lycée, on sortait beaucoup, on buvait énormément, jusqu’à se rouler par terre. C’était une sorte de concours de l’excès. Pour sortir de l’ennui peut-être. »
« En France, tout le monde boit »
Elle a compris, depuis, que l’alcool n’était pour elle qu’une sorte d’élixir d’immunité dans lequel elle croyait pouvoir dissoudre son mal-être. « Quand on est ado, l’alcool fait partie des armes qu’on a à sa disposition pour avoir l’air un peu plus fort, plus audacieux. Je suis très timide, l’alcool m’a beaucoup aidée socialement, il m’aidait à avoir l’air cool et rebelle. »
La fêtarde invétérée qu’elle est alors se trouve des excuses pour continuer à se mettre minable. « Je confondais l’alcool avec l’émancipation. » Elle se raconte des histoires en pensant que boire est un « geste politique, un pied de nez au statut de femme trop lisse que l’on m’obligeait à tenir ». Balivernes, évidemment. L’alcool, constate-t-elle, ne fait que renforcer la fragilité physique des femmes et la domination des hommes.
Mais pourquoi se priver d’un petit remontant quand la société tout entière nous y encourage ? « En France, tout le monde boit, c’est une norme sociale. » Pire : on pardonnerait beaucoup aux gens bourrés. « L’ivresse n’est pas un défaut, c’est une excuse nationale au manque de civilité. »
La faute aux lobbies du vin. Mais aussi à notre héritage culturel. « La France, c’est Gainsbourg, La Grande bouffe. Nous sommes une patrie épicurienne tournée vers les plaisirs de la table. Refuser un verre, c’est vu comme un rejet de cette culture. »
On peut passer une bonne soirée sans alcool
Claire Touzard l’a compris quand elle est sortie des brumes de l’alcool. Pour y voir clair, il lui a fallu la compagnie de cet homme, Alexandre, lui-même ancien alcoolique. Il lui a montré qu’on peut avoir la sobriété heureuse, que l’on peut être cool, moderne et drôle sans la boisson. Quand elle a arrêté de boire, Claire Touzard craignait de « devenir chiante », d’être exclue de la fête. Tout le contraire. « Je n’ai jamais été aussi drôle que depuis que je ne bois plus. »
Dans son appartement, il n’y a plus une seule goutte d’alcool. Quand les copains déboulent à l’heure de l’apéro, on trinque au kombucha, un thé fermenté. « Je n’achète pas d’alcool, mais je ne leur interdis pas de boire s’ils veulent venir avec une bouteille. En général, ils s’en passent. Ils voient qu’on peut passer une bonne soirée sans alcool. »
Claire Touzard a fait une pause dans sa vie. Elle a été licenciée sans ménagement du dernier magazine où elle travaillait, preuve que le sens de la fête ne mène pas bien loin. Aujourd’hui, elle élève son bébé. Et s’offre de grandes balades en forêt ou en bord de mer avec ses copines. « Avant, quand on se retrouvait, c’était pour prendre l’apéro. »
« A 20 ans, j’ai pris l’alcool comme une arme de puissance », raconte Claire Touzard
« 20 MINUTES »
AVEC Claire Touzard, journaliste et écrivaine de 38 ans, a arrêté de boire le 1er janvier 2020. Un an après, elle publie « Sans alcool » (Ed. Flammarion), un livre en forme de journal de sa sobriété
Armelle Le Goff
Publié le 22/01/21
Chaque semaine, 20 Minutes propose à une personnalité de commenter un phénomène de société dans son rendez-vous « 20 Minutes avec… ».
Ce vendredi, Claire Touzard, journaliste et écrivaine de 38 ans, autrice de « Sans alcool » (Ed. Flammarion) revient sur sa décision d’arrêter de boire et son rapport à la sobriété.
Remplir un vide. S’extraire du monde. Pour ces raisons et pendant longtemps Claire Touzard s’est alcoolisée avec l’objectif de chercher une liberté qu’elle considère aujourd’hui comme une illusion qui l’a abîmée. C’est avec la décision de sa sobriété que démarre son journal intitulé Sans alcool (Ed. Flammarion), qui explore son rapport à l’alcool comme une norme sociale avec laquelle elle a grandi puis comme une norme de transgression en tant que femme indépendante. Un cheminement passionnant qui lui permet d’aborder des questions qui le sont rarement et de parvenir à cette conclusion : être sobre peut aussi être subversif.
Le mois de janvier est marqué par la possibilité de faire le « Dry january ». Ce genre d’événements, pour vous, c’est de la communication ou pensez-vous que cela peut aider à faire le point sur sa consommation d’alcool ?
J’ai toujours été en faveur du dry january parce que cela permet de questionner notre consommation d’alcool. Mais personnellement, je ne l’ai jamais fait. Avant d’arrêter définitivement, je n’ai jamais réussi à arrêter. Je n’en étais pas capable, je buvais tous les jours ou quasi et depuis longtemps. Je suis issue d’une famille où l’alcool est très présent, très festif. Mais petit à petit et pour un faisceau de raisons je me suis auto-intoxiquée. J’avais une consommation qui était bien au-delà des seuils de l’OMS [deux verres par jour dont deux jours sans]. Pour autant, arrêter n’a pas été compliqué physiquement, mais psychiquement. L’addiction était surtout dans ma tête.
Vous expliquez qu’en buvant, vous aviez le sentiment de devenir une super héroïne, un peu comme une héroïne de série ?
Quand on est femme et que l’on boit, on est moins présentable, moins lisse et moins docile que ce que l’on attend de nous. Je pense que beaucoup de femmes, en tout cas, je l’ai observé autour de moi, s’alcoolisent pour cette raison-là. Pour casser l’image attendue qu’on a de la femme. A 20 ans, j’ai pris l’alcool comme une arme de puissance. Sans doute que dans mon esprit, de façon inconsciente, l’alcool était associé au masculin. Plus tard, je me suis rendu compte que je n’étais pas la seule. Les personnages de série cool boivent, boivent trop et leur force et leur indépendance sont associées à l’alcool. Mais cette image de l’émancipation associée à l’alcool est évidemment fausse. L’alcool est une arme très ambiguë. L’alcool désinhibe, certes, donne un sentiment de puissance, mais, en réalité, les lendemains sont durs. En buvant, on cherche à mettre un filtre entre nous et la réalité, on cherche à transcender le quotidien. Mais la réalité nous rattrape toujours et, entre-temps, on s’est bien abîmé.
Vous écrivez que votre alcoolisme avait à voir avec un refus de votre genre, c’est-à-dire ?
Jeune, j’étais androgyne et sportive. Et j’avais du mal avec le fait d’être une femme. J’ai été anorexique et l’alcool a suivi pour me maltraiter un peu plus. J’ai découvert en rencontrant Fatma Bouvet de la Maisonneuve, qui est psychiatre et addictologue à l’hôpital Sainte-Anne, que c’est un parcours fréquent. En tant que femme, on est soumise à beaucoup d’injonctions et l’alcool permet soit d’exprimer notre colère, soit de nous éteindre. Cela permet de s’énerver entre nous pour des sujets dont on ne parle pas publiquement. Comme un pansement.
Comment avez-vous mis le doigt sur votre problème d’alcool ?
Je crois que j’ai toujours eu conscience de la place trop importante qu’occupait l’alcool dans ma vie. Mais le déclic a été de voir le regard de mon conjoint sur moi quand j’étais bourrée, lors d’une fête en Bretagne le 31 décembre 2019. Je comprends alors que je suis sur le point de le décevoir et peut-être de le perdre. Or, en 20 ans, l’alcool s’était trop souvent imposé dans mon rapport à l’autre, à l’amour, à la féminité. Et lui était tellement important, je me suis dit cette fois-ci ce n’est pas possible. Le lendemain, j’ai décidé d’arrêter l’alcool.
Qu’est-ce qui change avec la sobriété ?
Arrêter l’alcool c’est repenser son rapport à l’autre. En étant alcoolisé on montre une partie de soi qui n’est pas soi, en ce qui me concerne en tout cas. Avec l’alcool, j’étais dans une sorte de fuite par rapport à mon genre et à ce que je suis vraiment. Donc, en arrêtant l’alcool, il faut remettre les choses en place avec les autres. Avec les images du passé, les violences et les ruptures que cela a pu engendrer, qui reviennent aussi. Mais une fois que l’on a passé ce cap, c’est très fluide. Et les relations avec les autres n’en sont que meilleures. Cela permet d’avouer qu’on est bien avec quelqu’un comme on est vraiment.
Néanmoins, vous racontez qu’annoncer à votre entourage que vous arrêtiez l’alcool n’a pas toujours été bien reçu…
Quand on arrête l’alcool, on tend un miroir à l’autre sur sa propre consommation. Et souvent cela fait mal. On est dérangeant parce qu’on devient spectateur de l’ivresse des autres. Cela nécessite beaucoup de dialogues avec ses proches. Car individuellement notre consommation d’alcool est finalement quelque chose que l’on questionne peu.
L’alcool, dites-vous, est une sorte de norme, associé au fait de bien vivre.
Le cool c’est l’alcool. On ne nous laisse pas le choix. Et, en ce sens, c’est une norme. On est soumis à une obligation inconsciente de boire pour appartenir au groupe, pour faire partie de la fête. Mais ce n’est pas si festif de boire et pas si drôle non plus. Il y a vraiment une croyance populaire à remettre en question et un héritage culturel, qui va des écrivains à Gainsbourg.
La sobriété, c’est un autre rapport au monde ?
On est dans une telle période de questionnements sur le monde d’après, collectivement, individuellement… La sobriété est une valeur qui tant sur le plan de la consommation que sur le plan économique me paraît intéressante. C’est s’autoriser à être éveillé par rapport à nous-même et au monde qui nous entoure. Mais il nous manque des exemples de gens qui parlent de sobriété de façon positive. Honnêtement, j’avais des visions assez négatives des gens qui arrêtent de boire. Aujourd’hui, je trouve la sobriété assez subversive. Mais c’est parce que j’ai trouvé des exemples inspirants chez les Alcooliques anonymes, mais surtout auprès de mon conjoint, qui a lui-même a arrêté de boire. Cela donne l’élan nécessaire.
A la fin de votre livre, qui est un journal de votre sobriété, vous évoquez la possibilité de reprendre l’alcool avec parcimonie, est-ce toujours le cas ?
Non, plus maintenant, je n’ai plus envie de partir en arrière. L’alcool ne me manque pas
Le décryptage de Claire : Couche-t-on avec un métier ?
29 février 2016
Par Claire Touzard
Claire Touzard est journaliste à Grazia. Toutes les semaines, elle décrypte une question de société.
"Non mais, moi, une relation avec un photographe, no way." J'entendais cela dans une galerie. Un garçon accoudé, en bomber bleu, observait une de mes amies. Mais depuis l'énonciation de sa profession, elle préférait lui tourner le dos. Ce qui, en même temps, la positionnait face au champagne - rien n'est jamais perdu. "Le photographe, mauvais plan : il est obnubilé par son métier, il va chercher en toi cette image qui n'existera jamais." Je me demandais dans quelle mesure nous n'étions pas conditionnés par le CV. "Dis-moi quel est ton job, je te dirais comment tu baises", lâche mon amie. Peut-être que la crise a accentué cette vision-là. A force de mettre notre travail au coeur de notre vie, de se battre pour un CDD, il est devenu la grande définition par excellence. On est pieds et poings liés à lui, via les portables, les mails, les Instagram et les Facebook. On y est connecté à chaque instant : il est nous. Le job devient un élément de caractère. On ne dit plus "il est sensible" ou "il est colérique" mais "il est DJ". Quitte à en devenir un label qui se scotche sur l'ensemble de votre vie.
Ainsi je me souviens d'un ex-petit ami, extrêmement passif agressif, qui avait lâché cette belle phrase : "Ça ne m'étonne pas que vous, les journalistes, vous n'ayez pas de mecs, vous ouvrez tout le temps votre gueule." Journaliste : il s'agissait visiblement d'un label approuvé. Exploratrice, spirituelle, mais chieuse et mauvaise à marier. "Grand reporter de l'amour foireux, c'est un peu moi, tu me diras", me lance mon amie, qui exerce ce même travail intellectuel précaire. Sans doute aussi que nous passons tant de temps dans nos emplois que nous ne voyons plus les barrières entre ce qui est nous et ce qui est un nous formaté pour cette profession-là. Les réseaux sociaux mêlent les deux, grands shakers flous de nos différentes vies. Nous devenons des professionnelles de l'intime, et à l'inverse, le travail embrasse de plus en plus d'affect car il est fragile, il faut s'y arrimer plus que tout. On a lâché le mec en bomber bleu pour aller écouter Young Girls, des Sparks, chez une amie, en se demandant ce qui nous définissait au juste, loin de ce que l'on fait 90 % du temps. Un morceau aimé communément, une phrase qui nous ressemble, un refrain des Sparks. Qui sait.
Infos
Rédactrice en chef presse et TV. Reporter et réalisatrice.
Rédactrice en chef du magazine Grazia Hommes. Reporter, chroniqueuse, pour le magazine Grazia.
Anciennement rédactrice en chef de l’émission La Mode La Mode La Mode (Paris Première) et réalisatrice pour diverses émissions sur Canal +, Paris Première ou France 2.
Expérience
Flammarion Écrivain janv. 2020
Durée d’emploi 1 an 2 mois
Freelance: GQ, Les Echos, Air France, Rika Magazine
Dates d’emploi avr. 2019
Durée d’emploi 1 an 11 mois
Mondadori France
Durée totale 6 ans
Poste Rédactrice en chef Grazia Hommes
Dates d’emploi sept. 2016 – avr. 2019
Durée d’emploi 2 ans 8 mois
Poste Reporter et chroniqueuse société pour Grazia. Rédactrice en chef de l'appli "Grazia Daily" Cannes.
Dates d’emploi 2013 – avr. 2019
Durée d’emploi 6 ans
Paris Première
Rédactrice en chef de La Mode La Mode La Mode sur Paris Première
Dates d’emploi sept. 2012 – sept. 2013
Durée d’emploi 1 an 1 mois
Emission Avant-Première / France 2
Reporter et réalisatrice pour l'émission culture "Avant-Premières" sur France 2.
Dates d’emploi 2011 – 2012
Durée d’emploi 1 an
Libération Médias
Reporter pour Libération, Libération Next, Double Magazine, Technikart, GQ.
Dates d’emploi 2007 – 2012
Durée d’emploi 5 ans
Paris Première
Réalisatrice de sujets mode pour La Mode La Mode La Mode sur Paris Première.
Dates d’emploi janv. 2008 – janv. 2010
Durée d’emploi 2 ans 1 mois
Radio France
Chroniqueuse pour Le Mouv'.
Dates d’emploi 2010
Durée d’emploi moins d’un an
Emission Culturelle Ça Balance à Paris / Paris Première
Journaliste et réalisatrice pour "Ça balance à Paris" sur Paris Première.
Dates d’emploi 2008 – 2010
Durée d’emploi 2 ans
France Télévisions
Chroniqueuse télé en plateau et réalisatrice de sujets musique pour France 4.
Dates d’emploi 2007 – 2010
Durée d’emploi 3 ans
Louise contre-attaque... Les Francofolies 2011
Réalisatrice pour Culture Pub.
Dates d’emploi 2008 – 2009
Durée d’emploi 1 an
CANAL+
Réalisatrice société pour "Tentations 07" sur Canal +.
Dates d’emploi 2007
Durée d’emploi moins d’un an
Radio France
Assistante à la rédaction sur l'émission culture quotidienne Charivari sur France Inter.
Dates d’emploi 2005 – 2006
Durée d’emploi 1 an
CANAL+
Documentaliste image pour Le Grand Journal, sur Canal +.
Rassurez-vous, il ne s’agit pas du Jacques à la pipe et au solex qui fut un jour censuré ICI
Il s’agit tout bêtement de nippes.
Longtemps le matin, au temps où je nichais dans les bois, j’empruntais la ligne 2 du métro pour me rendre à la station Victor Hugo. Cette ligne, qui part de Nation pour se terminer à la Porte Dauphine, est encore emblématique des groupes sociaux qui habitent Paris, oui il reste du populo du côté de Stalingrad, Barbès, Pigalle, Blanche, et à partir de Montceau on file vers les quartiers huppés.
La ligne est aérienne, près de deux kilomètres en viaduc, soit environ 20 % de sa longueur. Quatre stations sont aériennes, dont celle de Barbès-Rochechouart qui surplombait le navire-amiral du magasin TATI.
Vous me connaissez, j’aime les fripes alors j’y suis allé fouiner, c’était à la fin des années 90.
L’immeuble historique de l’enseigne, situé dans le quartier de Barbès, dans le 18e arrondissement de Paris, est en vente. La municipalité veut y installer des logements sociaux et des commerces.
Juliette Garnier nous résume La fin d’une saga
La fermeture du Tati Barbès signe la fin d’une saga qui a débutée en 1948. Un entrepreneur d’origine tunisienne, Jules Ouaki, ouvre un petit magasin de blanc, c’est-à-dire une boutique de linge de maison, rue Belhomme dans le même arrondissement. Son nom est celui de l’anagramme de Tita, surnom de sa grand-mère Esther.
L’ancien sous-marinier de la France libre vend des lots ; il rachète au comptant des invendus, puis se fournit dans le quartier du Sentier, pour proposer des vêtements bon marché. L’entrepreneur a grandi dans le quartier de la Goulette à Tunis. A Barbès, il reprend la formule de vente au déballage, comme dans un souk. Les vêtements sont présentés en vrac dans des « cuvettes », sortes de bacs où les clients affluent pour trouver la bonne affaire. La formule du « Tati, les plus bas prix » séduit.
Jules Ouaki et son cabas imprimé en Vichy rose, inventé en 1962. Scoop, Gérard Géry, Paris-Match.
M. Ouaki impose son logo au vichy rose d’abord au 4, boulevard Rochechouart, puis sur les magasins voisins, toujours du côté pair. Exigeant, celui qui disait avoir pour devise « Deux yeux pour acheter et un pour vendre » est réputé pour « étrangler ses fournisseurs », rapporte un ancien de ses cadres.
Photo Pierre Boussel, AFP.
Puis Tati s’expatrie place de la République, en 1975, et, rive gauche, rue de Rennes, au rez-de-chaussée de l’immeuble Félix Potin. Dans ce quartier proche de Montparnasse, l’enseigne rencontre un grand succès. Simone Veil y achète « ses cadeaux de Noël », assure Pierre Génichon, un ancien de la maison. Les étudiantes du Quartier latin s’y fournissent en collants mousse à 2 francs. « Il fallait employer des femmes de ménage pour ramasser les sacs Tati dont les bourgeoises se débarrassaient dans la rue », rapporte-t-il.
Tati Barbès demeure cependant le magasin le plus fréquenté. « En 1975, on y vendait 1,5 million de blouses d’écoliers », selon M. Génichon.
A la fin des années 1970, après avoir racheté « les hôtels de passe voisins », rapporte un autre cadre, l’entreprise exploite près de 100 mètres du boulevard Rochechouart. La famille Ouaki met la main aussi sur Le Louxor, un cinéma qu’il veut transformer en magasin.
La folie des grandeurs, les pertes se creusent
Tati devient ainsi le cœur du carrefour Barbès-Rochechouart. C’est aussi un écosystème. M. Ouaki soigne « ses employés », à en croire les anciens. Rue Belhomme, à l’arrière du magasin de Barbès, une cantine sert à déjeuner à tous les salariés et « une tarte et une boisson », à l’heure de la pause. Des colonies de vacances gratuites sont proposées à leurs enfants, « dans le Cantal ou les Pyrénées », rapporte M. Génichon.
Mais, Tati, c’était aussi la « misère sociale », juge aujourd’hui Karl Ghazi, représentant de la CGT commerce de Paris, qui rappelle les conditions de travail « horribles », la « vétusté » des locaux, les salaires « très bas » et le clientélisme envers ses employés non syndiqués ou proches de la direction. Malgré tout, sur Facebook, les 476 membres des « anciens de Tati » échangent souvenirs, photos et vidéos pour évoquer « ce foutoir joyeux ».
En 1982, Jules Ouaki décède des suites d’un cancer. Il n’a pas préparé sa succession. L’un de ses fils, Gregory, reprend les rênes. Il meurt un an plus tard, d’un accident. Les frères de Jules Ouaki reprennent le flambeau. Puis se déchirent. Sa veuve assure la relève.
Le 17 septembre 1986 se produit l’attentat de la rue de Rennes qui fait sept morts. La fréquentation des magasins Tati dévisse, même si dans la France des années 1980, l’enseigne discount continue de faire parler d’elle. C’est rue de Rennes, que l’équipe de Madonna achètera les culottes que la star américaine jettera à la foule lors de son concert au parc de Seaux, le 29 août 1987. Quant au point de vente de Barbès, il reste le meilleur de ses magasins : en 1987, il attire 35 millions de visiteurs dans l’année. C’est alors quatre à cinq fois plus que le Musée du Louvre.
En 1991, à 33 ans, Fabien Ouaki, l’un des cinq enfants du fondateur prend la suite de sa mère. Et, très vite, celui qui aime chanter du rock et élever des chevaux de courses prétend « faire passer Tati du cheap au chic ». Tati ouvre une enseigne d’optique, une agence de voyages, une bijouterie sous le nom de Tati Or, en 1994, rue de la Paix. L’enseigne s’installe aussi en province, à Marseille, en 1997 et à l’étranger (Suisse, Turquie, Liban) et exporte ses robes de mariée à New York, en 1998.
Folie des grandeurs. Les pertes se creusent.
L’enseigne se déploie encore en province, à marche forcée mais, en avril 2017, le groupe Eram jette l’éponge
En 1999, l’entrepreneur obtient une indemnité d’éviction de la compagnie d’assurances AGF, son bailleur, pour quitter son emplacement de la rue de Rennes et laisser la place à Zara. Mais c’est insuffisant pour remettre sur pied Tati. En 2001, les pertes atteignent 6 millions d’euros pour un chiffre d’affaires de l’ordre de 150 millions d’euros. Cinq de ses trente magasins sont fermés. En 2003, Tati dépose le bilan. Presque un an plus tard, l’enseigne est reprise par Vetura, une filiale du groupe familial Eram. La famille Ouaki sort des affaires.
L’enseigne se déploie encore en province, à marche forcée mais, en avril 2017, le groupe Eram jette l’éponge. Au terme de mois de négociations, Tati tombe dans l’escarcelle du groupe GiFi. Son fondateur, Philippe Ginestet, a l’appui des salariés. Pour l’emporter, il promet de ne pas procéder à des licenciements pendant deux ans et surtout de continuer à exploiter le magasin de Barbès auquel les salariés et les élus du personnel se disent tant attachés. Il n’en sera rien. Les travaux de rénovation n’ont pas été entrepris, souligne une élue syndicale.
Le roi du discount est déchu, dépassé, concurrencé aussi par Internet et « Wish », cette application qui vend des articles à bas prix, juge le gérant d’une boutique voisine. Et, à en croire un ancien cadre, le génie des Ouaki n’anime plus l’immeuble. « On entre par une petite porte et on ressort par la grande, celle de l’angle. C’est exactement l’inverse de ce qu’il faut faire. »
Tati vit des dernières heures chaotiques. Le magasin situé à Paris dans le quartier de Barbès (18e arrondissement), ultime point de vente à porter son enseigne, devait initialement fermer ses portes courant janvier. Le groupe GPG (GiFi), qui détient l’entreprise depuis 2017, a annoncé, le 7 juillet 2020, le transfert de dix-huit de ses magasins sous son enseigne de déstockage KLO et la fermeture définitive du magasin historique situé à l’angle des boulevards Barbès et Rochechouart.
Depuis, alors que la crise du Covid-19 ravage le commerce parisien, le groupe fondé par Philippe Ginestet, créateur de GiFi, a discrètement mené des négociations avec les trente-quatre salariés du magasin pour assurer leur reclassement, leur départ à la retraite ou leur licenciement. Ses représentants ont aussi rencontré les élus du 18e arrondissement pour évoquer le sort des employés et celui de l’immeuble haussmannien qui demeure en copropriété entre la famille héritière du fondateur Jules Ouaki et le groupe GPG.
Tous deux ont convenu d’un bail précaire, à titre gratuit, le temps de vendre les 6500 mètres carrés. Ils ont donné un mandat au spécialiste de la transaction immobilière BNP Paribas Realestate, début 2021, pour boucler la cession « au cours du deuxième trimestre de 2021 », selon une source proche de la famille Ouaki, qui refuse de dévoiler le montant attendu.
Mais la municipalité parisienne vient de s’inviter dans le dossier.
Ça c’est une autre histoire qui ne m’intéresse pas.
Fabien Ouaki et Tati. Une affaire de famille
Fabien Ouaki a dirigé le groupe sans la ferveur de son père.
Encore tout récemment, il disait qu'il rêvait de contrôler une centaine de magasins à l'enseigne rose Vichy, multipliant par quatre le nombre de ses commerces. Et envisageait d'ouvrir un restaurant boulevard Rochechouart, à Paris, dans les coursives de la maison de Barbès. Il caressait également l'idée d'ouvrir boutique sur les Grands Boulevards de la capitale. Las, Fabien Ouaki, 46 ans, PDG de Tati, n'ira manifestement pas au bout de ses ambitions : la situation financière de la maison l'a conduit, vendredi, à déposer le bilan du groupe familial (lire ci-contre).
Vrac.
La faute à ce patron atypique ?
Son père Jules, lui, avait la «gniaque». Tout juste débarqué de Tunisie en 1948, il ouvre son premier magasin de 50 mètres carrés au 22 boulevard Barbès. C'est là qu'il invente un concept révolutionnaire dans le commerce français : la fringue en vrac. Il achète des lots soldés qu'il paye cash, fait tourner ses stocks à toute allure et reconstitue l'atmosphère du bazar où les clients peuvent toucher une marchandise à tout petit prix. Des culottes et des collants à 1 franc, des savons et des casseroles, et dès la fin des années 60, des robes de mariée à moins de 500 francs. Les immigrés du XVIIIe de Paris sont les premiers à faire sa fortune. L'idée improbable est devenue un énorme succès qui permet à Jules Ouaki de s'installer en grand à Barbès, puis à République et jusqu'à la rue de Rennes à Paris. Le «cheap» devient branché et les bourgeoises s'en entichent : Azzedine Alaïa, le célébrissime couturier tunisien, a donné à la marque ses lettres de noblesse en lui dessinant une collection. Quand Jules Ouaki disparaît en 1982, Tati semble là pour l'éternité.
Mais il y a un hic : depuis le décès du fondateur, toute la famille se mêle des affaires du groupe. Les deux frères de Jules, ses cinq enfants et son gendre Hubert Assous copilotent l'entreprise dans un joyeux foutoir. Il n'y a pas vraiment de stratégie mais plutôt une sorte de «Soviet Ouaki». Le tout s'accompagne d'embrouilles familiales interminables sous l'oeil impitoyable de la gardienne du temple «Madame Eléonore». En 1991, c'est elle qui propulse le plus jeune des cinq enfants à la tête du petit empire, histoire de mettre de l'ordre. «J'ai pris la direction à la demande de maman», raconte Fabien Ouaki. «Il fallait protéger l'entreprise de nos bagarres familiales. Je me suis retrouvé en première ligne et je devais faire gaffe : ça tirait dans les couloirs.»
Bon fils. Las, de son propre aveu, Fabien, benjamin de la famille, n'était pas un manager. Mais il choisit d'être un bon fils. Pourtant, ses centres d'intérêt sont ailleurs : le rock d'abord, avec le groupe qu'il a formé. Ouaki flirte aussi avec le spiritualisme et accroche pour de bon au bouddhisme du dalaï-lama avec qui il cosigne en l'an 2000 un ouvrage intitulé La vie est à nous. Et puis il y a les chevaux de course, une écurie d'une vingtaine de pur-sang qu'il fait courir aux couleurs du dalaï-lama, orange et bordeaux.
Le PDG de Tati n'en passe pas moins les années 90 à tenter de moderniser la vieille maison. Passer de l'ère des carnets à souche des vendeuses (qui ont perduré longtemps après l'âge d'or des années 60-70) au temps des codes-barres, organiser la logistique et les achats, diversifier les activités commerciales vers la bijouterie (Tati Or), les bonbons (Tati Bonbons), les lunettes (Tati Optique), les voyages... il aura tout essayé. Y compris d'aller s'installer, en 1998, sur la Cinquième Avenue à New York. Un flop terrible.
Concurrence. Et Fabien Ouaki a beau faire, la lourdeur de Tati se révèle trop pesante. La réactivité du groupe est beaucoup trop lente : les Zara et autres H & M lui taillent des croupières à coups de nouvelles collections permanentes. Et des coûts de fabrication ultra bon marché : pendant que Ouaki se perd dans la joaillerie et la confiserie, les autres grandes enseignes de la distribution font fabriquer en Asie des dizaines de milliers de pièces de confection qu'ils revendent à des prix de plus en plus bas. Tati ne peut bientôt plus concurrencer les Auchan (enseigne Kiabi) et autres Vivarte (La Halle aux vêtements) : là où Ouaki passe commande pour 5 000 ou 7 000 pièces en Thaïlande ou en Chine, ses compétiteurs cassent le marché en commandant des lots de 30 000 à 40 000 pièces.
Et puis il y a l'argent, qui commence à manquer. En 1995, Fabien s'est endetté avec deux de ses frères Albert et Sylvain et sa soeur Esther, pour racheter à leur mère la totalité du capital de la marque. Fabien devient premier actionnaire avec 57 % du capital, les autres recevant 14 % chacun. Mais pour devenir propriétaires, ces quatre Ouaki-là se sont lourdement endettés : en l'an 2000, ils devaient rembourser l'équivalent de 200 millions d'ici 2006 à leurs créanciers.
Poker menteur. Quatre ans plus tard, Ouaki est fatigué. Disputes familiales, affaires de moins en moins florissantes : le patron, finalement, aimerait bien quitter le navire. Contre l'avis de ses frères et soeurs, il décide de donner un mandat de vente de Tati à la prestigieuse banque Lazard. Ce qui ne va pas vraiment arranger les négociations, qui ressemblent de plus en plus à une partie de poker menteur. Un jour, Ouaki affirme à qui veut l'entendre qu'il a reçu une «offre ridicule» de 300 millions de francs, un autre qu'il a refusé une proposition à 600 millions.
Que s'est-il passé ?
La famille s'est-elle opposée à la vente ?
Lui laissait entendre qu'il faisait monter les enchères entre les acheteurs potentiels, notamment les frères Grosman, propriétaires de Celio. Et que la notoriété de la marque et les emplacements immobiliers de Tati, surtout à Paris, valaient de l'or : «Tati, c'est plus d'un milliard de francs de chiffre d'affaires, plus de 30 magasins, 25 millions de clients et des sites inestimable, disait-il à l'époque. Tout cela vaut de l'argent.» Un avis que n'ont jamais partagé les banquiers du secteur : «Cette maison est un vrai foutoir», affirmait l'un d'entre eux. «Il faut attendre que le prix demandé par Ouaki baisse. Et encore, même pas cher, je ne suis pas certain que cette affaire vaille la peine.» En désespoir de cause, Fabien Ouaki a fini par retirer son mandat à la banque Lazard. Et s'est mis à chercher du cash seul. Quitte à vendre le magasin de la place de la République à Paris, voici deux ans. «A un très bon prix», dit-il. Avant, en 1998, il y avait eu la vente en or massif du Tati de la rue de Rennes.
Partage. A bout de souffle, Ouaki est allé chercher un spécialiste de la grande distribution en 2001 pour en faire son directeur général, partageant pour la première fois le pouvoir avec un étranger à la famille. Redresseur de la marque Jacadi, Christian Raillard voulait redonner à Tati son statut de bazar de centre-ville. Et d'ouvrir deux magasins dans Paris intra-muros Italie 2 et rue Réaumur pour donner le ton. Raté. Toujours à court d'argent, Fabien Ouaki a fini par vendre à la Mairie de Paris l'ancien cinéma Le Louxor, boulevard Barbès, pour 1,3 million d'euros. Ça n'aura pas suffi.
En ce temps de pandémie je pratique l’alternance blanc/noir, deux couleurs – qui ne sont pas des couleurs ICI – abhorrées : en effet le blanc fut la couleur du drapeau royal et le noir celle des pirates et des anarchistes.
Mon alternance à moi n’a rien d’idéologique ou de politique, elle est littéraire.
À propos d’alternance, il en est une que les urbains ignorent : celle des arbres fruitiers à pépins tels les pommiers, les poiriers ou les agrumes qui sont les plus sensibles à l'alternance. Les oliviers et certains pruniers sont aussi victimes de ce phénomène. Ces arbres donnent une belle récolte tous les deux ans, la récolte intermédiaire étant moindre ou quasi-inexistante.
Bref, comme le disait Pépin (ça devrait plaire à la mouche du coche), j’alterne mes lectures entre les polards, dit noirs, et les romans, dit blancs surtout chez Gallimard qui s’est octroyé une collection du même nom et où Marcel Duhamel a créé la couverture très sobre et typographique de la Série Noire. Parfois, je pratique l’alternance à l’intérieur d’un même jour en lisant du blanc le matin et du noir le soir.
Bref, comme le redirait Pépin, mes choix dans le blanc comme dans le noir se portent surtout vers des auteurs non gaulois, étasuniens, italiens, espagnols, anglais, allemands, ex-pays de l’Est, etc. Les jeunes plumitifs français de romans noirs n’arrivent pas à la cheville des anciens, quant aux blancs c’est pire.
Bref, comme oserait le re-re-dire Pépin, au risque que le coq chantât trois fois, attendu que les plumitifs redresseurs de torts de Téléramaque j’engraisse de mon abonnement depuis des siècles et des siècles, viennent de commettre le 12/02/21 un article au titre très Télérama sous la plume de Christine FerniotICI :
Attendu que je douille pour mon abonnement je le partage avec vous, même si je ne pense pas que la question de la porosité entre le polar et la littérature classique soit essentielle, si j’ai du courage je chroniquerai sur une nouvelle tendance des polars franchouillards : l’abus de références historiques très Wikipédia.
Romans noirs absorbés dans des collections généralistes, auteurs qui délaissent le polar au profit de la littérature “blanche”, porosité grandissante dans les codes et thèmes abordés par le roman policier et la fiction traditionnelle…
Le polar est-il toujours un (mauvais) genre à part ?
En 1986, le romancier et essayiste Michel Lebrun écrivait dans son encyclopédie L’Année du polar : « D’ici dix ans, tous les romans seront policiers. » Ce parrain du polar appréciait les formules à l’emporte-pièce, reconnaissant – déjà – que « les frontières séparant le roman noir et la littérature blanche se fendillent… » au profit du genre « noir ». Mais voilà qu’à présent il semble que la balance penche de l’autre côté, et que le polar soit en train de perdre son statut, enviable, de mauvais genre.
Cela commence par les couvertures, comme le décrit Oliver Gallmeister, patron des éditions du même nom – qui publient, entre autres, Craig Johnson, William Boyle ou David Vann : « Pour moi, le polar, c’est de la littérature, alors pourquoi faire une collection à part estampillée polar ? Depuis trois ans, j’ai une seule collection de romans, et une autre de livres en poche, sans distinction de genre. Le terme polar devrait disparaître et le noir n’est plus un sujet. »
Oliver Gallmeister : «Pour moi, le polar, c’est de la littérature, alors pourquoi faire une collection à part estampillée polar ? »
Oliver Gallmeister ne déteste certes pas la provocation, ni dans le domaine de la littérature, ni dans celui du marketing. Mais il représente une tendance, confirmée par un de ses confrères, Pierre Fourniaud, patron des éditions La Manufacture de livres, qui firent notamment connaître Franck Bouysse (Prix des libraires 2019 pour Né d’aucune femme) : « Je culpabilise un peu, car j’ai monté ma maison grâce au polar, face auquel les lecteurs, critiques et animateurs de festivals se révèlent moins hermétiques que pour la littérature dite blanche. Ces lecteurs-là sont passionnés et moins sectaires. Mais pour la suite, le lectorat s’obtient plus largement en littérature blanche. » Pierre Fourniaud a donc, lui aussi, délaissé ses couvertures emblématiques pour lecteurs de polar et, comme Oliver Gallmeister, souhaite que les libraires placent ses romans sur les tables de littérature générale.
Outre ce positionnement commercial, qui touche donc au premier regard, il faut aller voir du côté des auteurs. Là non plus, le voyage d’une couleur à l’autre n’est pas nouveau. Dans les années 1980-1990, Daniel Pennac et Tonino Benacquista quittent la Série Noire pour se glisser dans la Blanche de Gallimard. Plus récemment, Pierre Lemaitre chez Albin Michel et Nicolas Mathieu chez Actes Sud passent du côté « blanc ». Ces écrivains ont des univers bien à eux et ne les abandonnent pas à la faveur de ce mouvement, mais le changement de couverture leur permet d’être inscrits sur les listes de prix littéraires – jusqu’à obtenir le Goncourt, Pierre Lemaitre en 2013 et Nicolas Mathieu en 2018.
“Lorsque Sandrine Collette était labellisée polar, elle n’avait pas autant de lecteurs qu’aujourd’hui.” Véronique Cardi, directrice des éditions Lattès
Sandrine Collette est un autre exemple symptomatique de cette migration. La romancière fait ses débuts en 2013 chez Denoël, dans la collection Sueurs Froides, avec Des nœuds d’acier, un huis clos dans une ferme isolée, entre captivité, violence et vengeance. Elle obtient coup sur coup le Grand Prix de littérature policière et le Trophée 813 du meilleur roman francophone. Deux récompenses reconnues et estampillées polar. Au fil des livres, l’autrice ploie sous les récompenses polar (prix Quais du polar, Landerneau du polar, Sang d’encre…). Jusqu’en 2020 où Sandrine Collette est publiée chez Lattès, en littérature générale, pour Et toujours les forêts, suivi en 2021 par Ces orages-là. Véronique Cardi, qui dirige les éditions Lattès, est la première à dire que Sandrine Collette traite toujours les mêmes thèmes et motifs, et que la frontière est floue. « Mais lorsque Sandrine Collette était labellisée polar, elle n’avait pas autant de lecteurs qu’aujourd’hui », ajoute-t-elle. Pour l’éditrice, le polar permet de faire émerger des œuvres intéressantes qui feront leurs œufs ailleurs.
Destinée aux inconditionnels du polar, la couverture de la Série Noire est «comme une balise », note Stéfanie Delestré, patronne de la collection.
Le polar en serait-il alors réduit à ouvrir la voie à la fiction généraliste, à labourer le terrain pour les autres ? C’est oublier trop vite le succès du noir et ses « tonalités parallèles », comme le souligne Marie-Caroline Aubert, responsable du domaine étranger à la Série Noire : « Chez nous, ce qui marche le mieux, ce sont des auteurs comme Jo Nesbo, Deon Meyer, Jorn Horst, Dror Mishani et Dolores Redondo. Du pur polar. C’est simple, il ne faut pas mélanger le contenu et le contenant, ne pas brouiller les emballages. » Stéfanie Delestré, patronne de la Série Noire, insiste quant à elle sur la « promesse faite au lecteur ». La couverture de la Série Noire est, note-t-elle, « comme une balise » et les lecteurs inconditionnels savent où ils vont et ce qu’ils attendent : « Il faut continuer les collections, les reconnaître dès la couverture. En Série Noire, ce qui se vend bien, c’est un polar qui respecte les codes. La charte graphique décide pour le lecteur qui achète une Série Noire les yeux fermés. Quand Marcel Duhamel crée la couverture très sobre et typographique de la Série Noire, à une époque où la mode est aux photos de femmes dénudées, tout le monde lui dit qu’il a tort, et c’est lui qui a raison en proposant des points de repère. »
Même conviction chez Natalie Beunat, éditrice de Points/Policier (au Seuil), qui voit dans ce « mauvais genre » une dimension politique et idéologique : « Dans l’histoire du genre, il faut noter l’arrivée d’auteurs comme Dashiell Hammett (1894-1961) ou Raymond Chandler (1888-1959), qui font la révolution avec leurs romans noirs subversifs, mettant en cause la société. Déjà, à cette époque, on dit à Chandler : vous écrivez tellement bien que vous devriez écrire un “vrai” livre. Et lui de répondre :il y a deux sortes de livres, les bons et les mauvais ! » Pour Natalie Beunat, « le polar est un mauvais genre car il s’empare du roman social, il réfléchit sur ce qu’est la quête absurde de l’argent et du pouvoir. Le roman noir aujourd’hui, c’est le roman politique ».
“Tant que le crime ne disparaîtra pas, le polar ne pourra pas mourir.” Jeanne Guyon, éditrice chez Rivages/Noir
La grande différence, c’est le code ! Pas d’infériorité ou de supériorité entre littératures noire et blanche, mais dans le cas de la première, le respect de l’enquête, de la quête, de la résolution d’un crime, qui peut être politique, social, familial. Jeanne Guyon, éditrice chez Rivages/Noir, rappelle que le crime est au centre du polar : « Tant qu’il y aura crime et point de vue moral, il y aura polar. Tant que le crime ne disparaîtra pas, le polar ne pourra pas mourir. » Citant Jean-Patrick Manchette, elle rappelle la colère de l’écrivain lorsque son roman Fatale (1977) avait été édité hors collection noire : « Ça dépolardisait son livre et il répétait en l’occurrence que la ratatouille des labels était inepte. »
En fait, le polar, quelle que soit l’époque, est en embuscade. Tantôt il remplace le roman social qui semble prendre ses distances, tantôt il nous révèle des situations dramatiques, politiques, historiques, par le biais du délit, maître mot dans la fiction noire. « C’est le reste de la littérature qui se sert du polar », insiste Jeanne Guyon. Mais contrairement au roman « blanc », il respecte les codes et les contraintes. Hervé Le Corre, dans son dernier roman, Traverser la nuit, en est l’exemple évident. Un flic, une femme battue, un tueur en série, un crime à résoudre, une enquête dans la ville. « Oui, je travaille sur les codes, je laboure les clichés… Je les crois encore pertinents pour décrire des tragédies intimistes », explique le romancier. Le roman noir doit avoir de l’ambition pour que la qualification s’applique de manière valorisante : « Ça étendra le domaine de la lutte », dit-il encore. « Le polar doit garder son statut d’empêcheur de tourner en rond », reprend Natalie Beunat. Les lecteurs ne s’y trompent pas, puisque un roman vendu sur quatre est un polar.
Hormis les affres du fameux « Bordeaux-bashing », il se passe toujours quelque chose du côté des vins de Bordeaux, le feuilleton judiciaire du fameux classement des GCC de Saint-Émilion vient d’ajouter un nouvel épisode, à la veille d’un nouveau classement en 2022, 9 ans après les premières escarmouches le Conseil d’État, dans une décision du 12 février 2021 : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS :
Article 2 : L’arrêt du 12 avril 2019 de la cour administrative de Bordeaux est annulé.
Article 3 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Bordeaux.
Contesté depuis 2012
Le classement de Saint-Émilion renvoyé devant la justice administrative
Lundi 15 février 2021 par Alexandre Abellan
« En jugeant que leurs conclusions dirigées contre le refus de classement qui leur avait été opposé étaient tardives, sans rechercher à quelle date la décision du 5 septembre 2012 leur avait été, le cas échéant, notifiée, la cour a commis une erreur de droit » juge le Conseil d'État, rouvrant le volet administratif du classement de Saint-Émilion.
[…]
Si le classement de Saint-Émilion va connaître de nouveaux développements administratifs, un volet pénal va s’ouvrir dans moins d’un mois à Bordeaux pour prise illégale d’intérêt (visant deux propriétaires de crus classés siégeant à l’INAO : Hubert de Boüard et Philippe Castéja). « On a démontré qu’on pouvait aller jusqu’au bout, on fera pareil dans la procédure pénale dont le premier acte s’ouvrira le 8 mars prochain devant le tribunal correctionnel de Bordeaux » annonce Éric Morain. Sur ce dossier, l’avocat parisien fourbit déjà ses arguments en soulevant « une incongruité : l’INAO, si prompt à intervenir au moindre procès mineur contre un vigneron supposé hors les clous, est aux abonnés absents, cela interroge. Ou bien il ignorait tout de ce qui se tramait en coulisses et pourquoi alors n’est-il pas présent dans ces procédures ? Ou bien il le savait et alors… »
Si l’édition 2012 ne sort pas des prétoires, une commission de l’INAO prépare par ailleurs le prochain classement 2022. Qui suscite déjà les craintes et critiques de Pierre Carle : « pour le classement de 2022, j'exige que l'INAO revienne à son unique mission qui est la défense des terroirs qui se révèlent par la dégustation des vins. C'est le principe fondateur des appellations d'origine contrôlées en 1935. Payer des architectes célèbres et dépenser des millions en publicités n'améliore pas les vins. » Retour à la case administrative en attendant.
Jean-Marie Aurand préside le classement de Saint-Émilion 2022
Mercredi 22 juillet 2020 par Alexandre Abellan
Malgré le confinement et la pandémie de coronavirus, le calendrier administratif pour le classement de Saint-Émilion est respecté.
Malgré le confinement et la pandémie de coronavirus, le calendrier administratif pour le classement de Saint-Émilion est respecté.
Rompu à la diplomatie internationale, l’ancien directeur de l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin prend en charge la commission de l’INAO, qui va devoir utiliser tout son doigté pour faire aboutir sereinement la procédure de classement.
Des grands crus à classer et à ne pas clacher davantage, c’est le mandat confié à Jean-Marie Aurand avec la présidence de la commission du classement Saint-Émilion. Nommé ce 17 juin par le comité national des appellations d'origine viticoles de l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO), le haut-fonctionnaire ne souhaite pas commenter sa nomination. Il faut reconnaître que le sujet est particulièrement sensible sur la rive droite de Bordeaux, cette réouverture décennale faisant face à de nombreux défis (cliquer ici pour en savoir plus).
Définie par le règlement publié ce 16 mai au Journal Officiel, la commission de classement des crus classés de l'appellation Saint-Émilion grand cru réunit sept membres « choisis en fonction de leur compétence, sont soit des membres du comité national, soit des personnalités extérieures à ce comité » (ce qui est le cas de Jean-Marie Aurand) et doit « organiser les travaux liés au classement [afin] de proposer [d’ici un an] la liste des "grands crus classés" et des "premiers grands crus classés" en vue de son approbation ». Externalisé, le suivi du classement de 2022 se déroule en dehors du Conseil des Vins de Saint-Émilion.
Dans les pas de Robert Tinlot
Avec un profil d’expert de la filière viticole française et de diplomate international, Jean-Marie Aurand n’est pas sans rappeler le parcours du président de la précédente commission de classement, celle de 2012, le défunt Robert Tinlot*. Ingénieur général des Ponts, des Eaux et des Forêts, Jean-Marie Aurand a dirigé de 2014 à 2018 l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin (OIV), après avoir occupé une succession de postes à responsabilités au Ministère de l'Agriculture (négociant la politique agricole commune, étant tutelle de l’INAO et l’ONIVINS, participant à la réforme de l’Organisation Commune du Marché Vitivinicole, l’OCM vin…). Originaire de Lozère, Jean-Marie Aurand avait pris à son départ de l’OIV la direction par intérim de l’Office National des Forêts (ONF).
Disparu en 2017, Robert Tinlot avait également œuvré au sein des services vins du ministère de l’Agriculture, puis de la répression des Fraudes, avant de diriger l’OIV (1985-1996). Bourguignon, le juriste a présidé la chaire Unesco Culture et Tradition du Vin de l’Université de Bourgogne. Ainsi que l’Académie Amorim, présidence que Jean-Marie Aurand a d’ailleurs prise en 2018, les inscrivant dans une certaine forme de passage de relais.
* : Les six autres personnalités étaient « messieurs Bronzo, Faure-Brac, Vinet, Brugnon, Drouhin et Guigal ». Sont nommés pour la commission de classement « Jean-Marie Aurand, Philippe Brisebarre, Michel Bronzom, Philippe Costem, Yves Dietrich, François-Régis de Fougeroux et Cyril Payon ».
CONSEIL D'ETAT statuant au contentieux
N° 431615
__________
SARL ANDRÉ GIRAUD ET LE GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE (GFA) GIRAUD BELIVIER
__________
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
Mme Rose-Marie Abel Rapporteur
__________
Mme Marie-Gabrielle Merloz Rapporteur public
__________
Séance du 29 janvier 2021Décision du 12 février 2021__________
(Section du contentieux, 3ème et 8ème chambres réunies)
Sur le rapport de la 3ème chambre de la Section du contentieux
Vu la procédure suivante :
La société à responsabilité limitée (SARL) André Giraud et le groupement foncier agricole (GFA) Giraud Belivier ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d’annuler l’arrêté interministériel du 29 octobre 2012 portant homologation du classement des crus de l’appellation d’origine contrôlée « Saint-Emilion Grand Cru », d’annuler cet arrêté en tant que le Château-la-Tour-Pin-Figeac ne figure pas dans la liste établissant le classement des crus de cette appellation et d’ordonner à l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) ou à l’Etat de produire différences pièces et échantillons relatifs à l’organisation et au déroulement des opérations de classement.
Par un jugement n° 1300008 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes.
Par un arrêt n° 16BX00706 du 12 avril 2019, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté l’appel formé par la société André Giraud et le GFA Giraud Belivier contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 12 juin et le 12 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société André Giraud et le GFA Giraud Belivier demandent au Conseil d’État :
1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre à la charge de l’État la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
…………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le décret n° 2011-1779 du 5 décembre 2011 ;
- l’arrêté du 6 juin 2011 relatif au règlement concernant le classement des « premiers grands crus classés » et des « grands crus classés » de l’appellation d’origine contrôlée « Saint-Emilion grand cru » ;
- le code de justice administrative et de décret n°2020-1406 du
18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Rose-Marie Abel, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société André Giraud et du GFA Giraud Belivier, à la SARL Didier, Pinet, avocat de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO) et à la SCP de Nervo, Poupet, avocat du Conseil des vins de Saint-Emilion (CVSE) ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 29 janvier 2021, présentée par le Conseil des vins de Saint-Emilion ;
Considérant ce qui suit :
Le Conseil des vins de Saint-Emilion a intérêt au maintien de la décision attaquée. Son intervention, régulièrement présentée, est, dès lors, recevable.
2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société André Giraud, gérant de l’exploitation Château La Tour du Pin Figeac, et le GFA Giraud Belivier, propriétaire de cette exploitation, ont déposé auprès de l’INAO un dossier de candidature afin de bénéficier de la mention « grand cru classé » de l’appellation d’origine contrôlée « Saint-Emilion grand cru ». A l’issue d’un premier examen de leur candidature par la commission de classement des crus classés de l’appellation, l’INAO les a informés le 7 juin 2012 que celle-ci n’avait pas été retenue. La société André Giraud et le GFA Giraud Belivier ont sollicité le 20 juin 2012 un nouvel examen de leur dossier. A l’issue de ce second examen, la commission de classement a de nouveau écarté leur candidature et a proposé, le 5 septembre 2012, au comité national de l’INAO une liste de soixante-quatre crus admis à la mention « grand cru classé », sur laquelle ne figurait pas Château La Tour du Pin Figeac. Après son approbation par le comité national de l’INAO, cette liste a été homologuée par un arrêté du 29 octobre 2012 du ministre de l’agriculture et de l’alimentation et du ministre de l’économie et des finances. La société André Giraud et le GFA Giraud Belivier ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d’annuler cet arrêté et d’ordonner à l’INAO ou à l’Etat de produire différentes pièces et échantillons relatifs à l’organisation et au déroulement des opérations de classement. Par un jugement du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande. La société André Giraud et le GFA Giraud Belivier se pourvoient en cassation contre l’arrêt du 12 avril 2019 de la cour administrative d’appel de Bordeaux qui a rejeté l’appel qu’ils ont formé contre ce jugement.
3. Aux termes de l’article XII du cahier des charges annexé au du décret du 5 décembre 2011 relatif à l'appellation d'origine contrôlée « Saint-Emilion grand cru » : « L’utilisation des mentions « grand cru classé » ou « premier grand cru classé » est réservée aux exploitations viticoles ayant fait l’objet d’un classement officiel homologué par arrêté conjoint du ministre de l’agriculture et du ministre chargé de la consommation, sur proposition de l’Institut national de l’origine et de la qualité (…) ». Aux termes de l’article 2 de l’arrêté du 6 juin 2011 relatif au règlement concernant le classement des « premiers grands crus classés » et des « grands crus classés » de l’appellation d’origine contrôlée « Saint-Emilion grand cru » : « Une commission de sept membres dite « commission de classement des crus classés de l'appellation Saint-Emilion grand cru » est nommée par le comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), ou par délégation par sa commission permanente. Les membres composant cette commission sont soit des membres du comité national, soit des personnalités extérieures choisies en fonction de leur compétence. Cette commission est chargée d'organiser les travaux liés au classement et de proposer au comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie la liste des grands crus classés et des premiers grands crus classés en vue de son approbation par ledit comité, et avant homologation par arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture et de la consommation (…) ». Aux termes de l’article 6 du même arrêté : « Les critères et pondérations retenus par la commission pour fixer la note des candidats sont les suivants : (…) Pour la mention « grand cru classé » : 1. Niveau de qualité et constance des vins appréciés par dégustation des échantillons (50 % de la note finale) ; 2. Notoriété appréciée au regard de la valorisation nationale ou internationale du vin de l'exploitation, de la mise en valeur du site, de la promotion et des modes de distribution (20 % de la note finale) ; 3. Caractérisation de l'exploitation appréciée à partir de l'assiette foncière, de l'homogénéité de ou des entités culturales et de l'analyse topographique et géo-pédologique (20 % de la note finale) ; 4. Conduite de l'exploitation tant sur le plan viticole que sur celui de l'œnologie appréciée en tenant compte de l'encépagement, de la structuration et de la conduite du vignoble, de la traçabilité parcellaire en vinification et des conditions de vinification et d'élevage (10 % de la note finale) ; Tout candidat dont la note finale est supérieure ou égale à 14 sur 20 est proposé au classement « grand cru classé (…) ». Aux termes de l’article 7 du même arrêté : « Les propositions de la commission de classement visée à l'article 2 sont adressées aux candidats par les services de l'INAO. Les candidats disposent d'un délai de quinze jours à compter de la notification pour solliciter un nouvel examen de leur dossier, sans toutefois que les vins ne soient dégustés une nouvelle fois. Ils peuvent, à leur demande, être entendus par la commission. / La commission de classement statue dans un délai de quarante-cinq jours à compter de la réception de la demande de réexamen. / Les propositions finales de la commission de classement sont soumises au comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées, et des eaux-de-vie, en vue de leur approbation. / La liste des grands crus classés et des premiers grands crus classés approuvée par ledit comité est transmise aux ministres chargés de l'agriculture et de la consommation en vue de son homologation par arrêté ». Il résulte de ces dispositions que les décisions relatives aux demandes de classement, qui sont des décisions individuelles, sont prises par la commission, le cas échéant après réexamen, lorsqu’il n’est pas fait droit aux demandes des candidats, et par l’arrêté du ministre de l’agriculture et du ministre chargé de la consommation homologuant la liste définitive approuvée par le comité national des appellations d'origine relatives aux vins et aux boissons alcoolisées et des eaux-de-vie de l’INAO, pour les candidats retenus. Le délai de recours contre ces décisions court, pour un demandeur qui conteste la décision rejetant sa candidature, à compter de la notification de la décision de la commission et, pour les tiers qui contestent des décisions de classement, à compter de la publication de l’arrêté d’homologation.
4. Pour faire droit aux fins de non-recevoir soulevées devant elle par l’INAO, la cour a jugé, d’une part, que les conclusions présentées par les requérants dans leur requête introductive d’instance enregistrée le 3 janvier 2013 au greffe du le tribunal administratif de Bordeaux tendant à l’annulation de l’arrêté du 29 octobre 2012 étaient irrecevables, dès lors que cet arrêté ne comprenait que les décisions individuelles figurant sur la liste homologuée des crus classés de l’appellation d’origine contrôle « Saint-Emilion grand cru », contre lesquelles ils ne justifiaient d’aucun intérêt à agir et, d’autre part, que leurs conclusions, présentées devant le même tribunal administratif dans un mémoire du 12 juin 2014, tendant à l’annulation de l’arrêté du 29 octobre 2012 en tant que le Château La Tour du Pin Figeac ne figurait pas dans le classement homologué des crus de l’appellation d’origine contrôlée « Saint-Emilion grand cru » étaient tardives, dès lors qu’elles étaient distinctes de leurs conclusions initiales et avaient été présentées plus de deux mois après la publication de cet arrêté.
5. Toutefois, il ressort des pièces de la procédure devant la cour que, eu égard aux moyens qu’ils soulevaient dans leur requête du 3 janvier 2013, les requérants devaient être regardés comme contestant, d’une part, le refus de retenir leur candidature, leurs conclusions sur ce point devant être regardées comme dirigées contre la décision de la commission du 5 septembre 2012, et comme contestant, d’autre part, les décisions de classement figurant dans l’arrêté du 29 octobre 2021.
6. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu’en jugeant que leurs conclusions dirigées contre le refus de classement qui leur avait été opposé étaient tardives, sans rechercher à quelle date la décision du 5 septembre 2012 leur avait été, le cas échéant, notifiée, la cour a commis une erreur de droit.
7. En second lieu, la société André Giraud et le GFA Giraud Belivier sont également fondés à soutenir que la cour a commis une erreur de droit en jugeant qu’ils n’avaient pas d’intérêt leur donnant qualité à agir contre les décisions individuelles figurant dans l’arrêté du 29 octobre 2012.
8. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leur pourvoi, que la société André Giraud et le GFA Giraud Belivier sont fondés à demander l’annulation de l’arrêt attaqué.
9. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat ni de l’INAO la somme que demandent la société André Giraud et le GFA Giraud Belivier au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L’intervention du Conseil des vins de Saint-Emilion est admise.
Article 2 : L’arrêt du 12 avril 2019 de la cour administrative de Bordeaux est annulé. Article 3 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Bordeaux.
Article 4 : Les conclusions présentées par la société André Giraud et le GFA Giraud Belivier au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SARL André Giraud, au groupement foncier agricole (GFA) Giraud Belivier, au ministre de l’agriculture et de l’alimentation et au ministre de l’économie, des finances et de la relance, à l’Institut national de l’origine et de la qualité et au Conseil des vins de Saint-Emilion.
Attendu que Donald Trump se tapait des burgers McDonald en sifflant du Coca-Light
1- Trump a accueilli les joueurs de l'équipe de football des Clemson Tigers autour d'une table de pizzas et hamburgers.
« Nous avons commandé du fast-food américain et c'est moi qui paye. […] Beaucoup de hamburgers, de pizzas, je pense qu'ils vont préférer ça à tout ce que nous aurions pu leur offrir »
McDonald, Wendy's, Burger King etc. « Je les aime tous, que des bonnes choses, de la super nourriture américaine », s'est gargarisé Donald Trump devant les 300 hamburgers et pizzas
2- Attendu que « Le président Biden a retiré le bouton à Coca Light, explique le journaliste Tom Newton Dunn sur Twitter. Lorsque Tim Shipman (un autre journaliste, NDLR) et moi avons interviewé Donald Trump en 2019, nous avons été fascinés par l’utilité de ce petit bouton rouge. Finalement, Trump a appuyé dessus, et un majordome a rapidement amené un Coca Light sur un plateau d’argent. Le bouton n’est plus là. » Selon le New-York Times, le milliardaire en buvait une douzaine par jour.
Mon Mac à moi, si je peux m’exprimer ainsi, c’est le diminutif de macaroni, et c’est le Courrier International qui m’a mis la puce à l’oreille :
Certaines associations de goût sont typiquement américaines : le beurre de cacahuète et la confiture ; la tarte aux pommes et la glace à la vanille ; le pumpkin spice [l’équivalent de notre quatre-épices], qui va à peu près avec tout. Et les macaronis et le fromage, le fameux mac and cheese, qui incarne deux grandes tendances de la cuisine américaine : le joyeux pillage des plats venus d’ailleurs et l’industrialisation de la gastronomie pour gagner plus de temps et d’argent.
Certains disent que ce sont des bergers suisses qui l’ont inventé au XIXe siècle. Les pâtes ne pèsent pas lourd et se conservent longtemps – deux qualités idéales pour arpenter les Alpes –, et les bergers pouvaient faire eux-mêmes leur fromage. D’autres affirment que cette association remonte au XIVe siècle en Italie, puisqu’un ouvrage intitulé Liber de coquina (tout simplement “Livre de cuisine”) présentait un plat appelé makerouns, à base de pâtes, de fromage et de beurre.
Dès 1769, dans l’ouvrage The Experienced English Housekeeper, écrit par l’Anglaise Elizabeth Raffald, on trouve quand même ce qui pourrait être l’une des premières recettes de gratin de macaronis au fromage: il s’agit de faire cuire des pâtes, puis de les mettre dans une casserole avec de la «bonne crème, un morceau de beurre roulé dans la farine». Le tout sera versé dans un plat et recouvert de parmesan… D’après la légende, le président américain Thomas Jefferson aurait découvert les riches plats de pâtes au fromage en Europe, avant de les introduire à la Maison-Blanche en 1802.
Aujourd’hui, Kraft a même un site web dédié à ce produit phare, avec deux slogans évocateurs: «La partie de la vie de parent qu’il est impossible de rater». Ou: «Ils vont se rappeler combien ils vous aiment au moment du dîner». Autrement dit, vous ne louperez jamais la préparation d’un mac and cheese Kraft, un dîner qui plus est «sans conservateurs, arômes et colorants artificiels»… Ce qui n’empêche pas la liste d’ingrédients d’être longue comme un bras.
«Je dois avouer que j’ai beaucoup mangé de mac and cheese Kraft. Mais, d’une part j’étais une enfant très difficile, et d’autre part c’était l’époque où l’efficacité et la rapidité primaient sur tout. Si cela pouvait être fait au micro-onde, pourquoi faire des préparations plus chronophages? L’approche en cuisine a beaucoup changé, et l’obésité est devenu un vrai sujet préoccupant», raconte Lindsey Tramuta.
Traditionnellement, le «vrai» mac and cheese fait maison est servi sur les tables de Thanksgiving, et notamment dans le sud des États-Unis. Et peut-être, de plus en plus dans les familles à la recherche du bien manger? «Pour beaucoup de parents qui travaillent et ont des enfants, j’imagine que le Kraft mac and cheese reste un choix incontournable, car cela se prépare vite. Parmi les gens de ma génération, nous étions nombreux à le consommer. Mais une fois que nous avons goûté le VRAI –fait maison, avec du bon fromage– c’est difficile de retourner vers l’industriel!, poursuit la journaliste américaine. Je ne peux et ne veux pas généraliser, mais la mouvance autour du 100% fait maison/ slow food doit avoir un impact sur les familles d’aujourd’hui… Et peut-être que cela les motive à préparer le mac and cheese maison (ce qui n’est ni compliqué, ni très long).» ICI
Macaroni au fromage: Un plat provenant de la classe ouvrière et destiné aux invités
Caroline Lévesque 7 mars 2016
Longtemps considéré comme un symbole de la classe populaire au Québec, le macaroni au fromage s’est raffiné et est devenu un plat important au Québec.
À l’occasion de la Semaine du Mac and Cheese, jusqu’au 13 mars, le célèbre plat de pâtes et fromage sera honoré dans des restaurants de Montréal, de Québec et de Toronto.
Les origines de ce mets remontent au milieu du XIXe siècle. À la base, il était un met spécial, qu’on offrait à la visite, peu après l’importation des pâtes macaronis par les Italiens.
Ce sont les ouvriers québécois qui travaillaient avec les immigrants italiens dans la construction des chemins de fer du pays qui ont intégré les macaronis dans leur cuisine, vers 1860.
«Les Québécois ont gouté à cela, ont demandé aux Italiens de leur en vendre, et ont amené cela dans les maisons, indique Michel Lambert, chef et historien, qui a écrit les cinq imposants volumes «Histoire de la cuisine familiale du Québec». C’est comme cela que ça s’est installé partout au Québec, avant même d’arriver à Montréal [les chemins de fer étant principalement construits en milieu rural].»
Au pays du vin, gloire nationale dont les escadrilles naguères volaient en Rafale à l’exportation le vieux Monde de Beuve-Méry, qui se la joue jeune, le torpille en le qualifiant d’alcool comme une vulgaire boisson spiritueuse.
Ces gens-là, la nouvelle gouvernance du journal pudibonde, brosse les bien-pensants dans le sens du poil pour les draguer dans ses filets. Faut pas fâcher !
Bien sûr je ne suis pas de ceux qui vivent dans le déni, le vin contient de l’alcool, le degré est inscrit sur l’étiquette depuis toujours : au temps du gros rouge cher à Roland Barthes le populo se lichait du 12 ou du 13° en bouteille étoilée, savant mélange de « bibine » du Midi avec de la couleur venue de l’Oranie puis de l’Italie.
De plus je ne suis pas totalement con je sais lire les chiffres de nos exportations où le Cognac occupe une place de choix.
Bref, la rigueur journalistique, qui n’est plus à l’ordre du jour au Monde, dont je suis un vieil abonné, exigerait que l’on titre : Vins&spiritueux deux milliards d’euros d’exportation se sont évaporés en 2020.
Faudra tout de même que les jeunes louloutes et loulous du Monde assument tout à la fois l’héritage de leur journal, celui qui entretint dans son sein l’ignoble chroniqueur gastromique Robert J Courtine dit La ReynièreICIl’appel des 77 salauds et salopesICI et avec leurs consœurs et confrères de Télérama qu’ils cessent de nous faire la morale, ce n’est pas leur job.
Cerise sur le gâteau l’article de Laurence Girard en complément de l’analyse sur la dégringolade de l’alcool français à l’exportation nous avons droit au bulletin de santé du groupe Pernod-Ricard qui certes vend et exporte du cognac Martell et du champagne Mumm et Perrier-Jouet, mais se fait des couilles en or avec le whisky et le gin qui sont, comme chacun le sait des produits typiquement gaulois, alors que les pastis de son patronyme ne sont pas au mieux de leur forme.
Retour à la croissance attendu en 2021 par Pernod Ricard
« Nous nous attendons à une croissance interne sur l’année pleine », affirme Alexandre Ricard, PDG de Pernod Ricard, à l’occasion de la publication de ses résultats semestriels, jeudi 11 février. Déjà sur le second semestre de 2020, ses activités ont renoué avec la croissance en Chine (+ 13 %), sont restées solides aux Etats-Unis (+ 5 %) et ont retrouvé des couleurs en Inde. A contrario, le Covid-19, contraignant bars et restaurants à la fermeture, a fait reculer les ventes de 5 % en Europe. Surtout, avec un transport aérien en berne, le chiffre d’affaires des boutiques d’aéroports s’effondre de 57 %. Globalement, le deuxième groupe de spiritueux mondial affiche un chiffre d’affaires de 4,985 milliards d’euros, en décroissance interne de 3,9 % et de 8,9 % en tenant compte des effets de change négatifs. Le résultat opérationnel recule, lui, de 2,4 %
J’attends avec impatience le communiqué cinglant de Vin&Société, l’article saignant de Jacques Dupont dans le Point hebdo de référence de Mélenchon, il le qualifie d’égout, la réaction outrée de Julien Denormandie l’ectoplasmique ministre de l’Agriculture, le communiqué alambiqué du guide de la profession Jérôme Despey, les pleurs du bordeaux-bashing, le démenti de l’Union des œnologues : le vin n’est pas un alcool…
« La part des anges. » C’est le terme employé dans les caves charentaises pour évoquer l’inéluctable évaporation des précieuses eaux-de-vie en cours de vieillissement. Il pourrait, cette fois, illustrer le bilan des exportations françaises d’alcool en 2020. Elles ont, en effet, subi un brusque phénomène d’évaporation. Selon les chiffres publiés, jeudi 11 février, par la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux de France (FEVS), près de 2 milliards d’euros sont partis en fumée. Le montant global des ventes de bouteilles hors des frontières a reflué de 13,9 %, à 12,1 milliards d’euros. Mais même moins fringant, ce secteur reste le deuxième contributeur à la balance commerciale française, avec un excédent de 11 milliards d’euros.
Début 2020, alors que la FEVS présentait des chiffres 2019 mirobolants – les flux de cognac, champagne et vin dépassant une nouvelle fois des niveaux historiquement hauts –, elle avait déjà alerté. Les nuages commençaient à s’amonceler. Les taxes Trump frappaient les vins français à leur entrée sur le territoire américain depuis octobre 2019. Et le coronavirus avait fait son apparition en Chine. Des événements qui ont profondément bousculé la filière tout au long de l’année.
« En 2020, nos entreprises ont affronté un environnement particulièrement complexe. D’abord, du fait du conflit commercial avec les Etats-Unis, sans solution à ce jour. Puis est apparue la pandémie de Covid-19, dont les effets se sont propagés progressivement sur tous les continents », explique César Giron, président de la FEVS.
« Une baisse en trois tiers entre l’Asie, l’Europe et les Etats-Unis »
La crise sanitaire a surgi en Chine avant le Nouvel An lunaire, temps fort de la consommation. L’annulation des festivités a fait plonger les ventes des précieux flacons de cognac dans l’empire du Milieu. La mise sur pause des transports aériens a fortement réduit les achats en duty free. Les marchés de Hongkong et de Singapour en ont été affectés. Résultat, les exportations de vin et spiritueux vers la Chine ont baissé de 15,2 %, à 809 millions d’euros. En englobant Hongkong et Singapour, le retrait atteint 19,4 %, à 1,9 milliard d’euros.
La pandémie de Covid-19 a ensuite gagné l’Europe et l’Amérique, avec son lot de confinements, de fermetures de bars, de restaurants et de discothèques, et d’annulations d’événements. De quoi limiter le flot des commandes. « Globalement, la baisse des exportations se répartit assez équitablement en trois tiers, entre l’Asie, l’Europe et les Etats-Unis », estime M. Giron.
Dans ces moments où l’esprit n’était pas à la fête – même si, dès que le déconfinement le permettait, les bouchons sautaient à nouveau –, le champagne a souffert. Les exportations mondiales du vin à bulles sont en retrait de 20 %, à 2,46 milliards d’euros. Le reflux est quasi identique pour le cognac, à − 21 %, pour un montant de 2,73 milliards d’euros. Quant aux vins dits « tranquilles », c’est-à-dire sans bulles, qu’ils soient de Bordeaux, de Bourgogne, du Beaujolais ou de la vallée du Rhône, ils forment toujours le plus gros bataillon des exportations. Ils ont totalisé des ventes hors des frontières à 5,4 milliards d’euros, en repli de 7,1 %.
Une facture qui s’est alourdie en janvier
C’est cette filière viticole qui a été mise en joue par Donald Trump, lorsqu’il a souhaité lancer des représailles dans le conflit Airbus-Boeing qui oppose l’Europe et les Etats-Unis. Depuis octobre 2019, une surtaxe de 25 % sur les bouteilles titrant moins de 14,5° freine les efforts des exportateurs français. « Sur 1,2 milliard d’euros de vins “tranquilles” exportés vers les Etats-Unis en 2018, la filière a perdu 580 millions d’euros sur les ventes de vin en bouteille, mais a compensé à hauteur de 254 millions d’euros avec la vente en vrac non taxée, donc la perte se chiffre à 386 millions d’euros en 2020 », estime M. Giron. Sachant que 57 millions d’euros s’étaient déjà envolés au dernier trimestre 2019.
La facture s’est encore alourdie depuis janvier. Juste avant de quitter la Maison Blanche, M. Trump a lancé une nouvelle salve, étendant la sanction tarifaire au vin en vrac, aux rouges titrant plus de 14,5°, mais aussi aux eaux-de-vie, donc au cognac.
Diverses aides
Depuis fin 2019, la filière viticole demande un fonds de compensation, se disant victime d’un conflit qui la dépasse. Pour l’instant sans succès. Elle a aussi bataillé pour obtenir un plan de soutien afin de faire face à la crise sanitaire qui touche aussi ses activités en France, avec la fermeture des bars et restaurants.
Finalement, elle a décroché une enveloppe de 211 millions d’euros pour distiller et transformer en alcool blanc ou pharmaceutique 2,6 millions d’hectolitres de vin invendu. Le Languedoc-Roussillon s’est délesté de 1 million d’hectolitres.
Une autre enveloppe de 50 millions d’euros finance une aide au stockage des vins maintenus en cave. « Ces mesures ont permis de gérer les volumes. Les prix n’ont pas dévissé », estime Jean-Marie Fabre, président des Vignerons indépendants. Ce dernier se félicite aussi de la décision prise pour 2021 d’exonérer les acteurs de la filière viticole des charges patronales au prorata de leur activité, et de les faire bénéficier du fonds de solidarité dès 50 % de perte de chiffre d’affaires mensuelle. « Sur l’ensemble de l’année 2020, [celle] des Vignerons indépendants est estimée entre 15 % et 30 % », affirme M. Fabre.
Tous les espoirs des viticulteurs reposent désormais sur la reprise des discussions entre l’Europe et la nouvelle administration Biden, en vue de négocier un cessez-le-feu et la levée des taxes.
René Massuyeau : le second joueur debout à partir de la gauche en regardant la photo
Cette chronique ne va intéresser pas grand monde mais étant le seul maître à bord je la publie. Dans la nuit de mercredi à jeudi, un nom s’est inséré dans ma mémoire : René Massuyeau, et il ne m’a pas quitté.
La Vaillante Mothaise des années 50 ICI , la mienne c'était les années 60
Le fondateur, René Denis
À ce dernier, le club doit toutes ses fondations : René Denis le pharmacien, installé au bout de l'avenue Napoléon-Bonaparte dès 1947, dirigeant de la première heure du basket mothais, entraîneur, joueur au centre ou à l'avant, « il sera l'homme fort jusqu'à la fin des années 1980. Les équipes masculines évolueront en Ligue Poitou, puis Atlantique », commente Jérôme. Aujourd'hui disparu, on se souvient de sa haute silhouette pointant à un mètre 92, un dévouement infatigable à son club, toujours défiant l'impossible, « il allait chercher les jeunes devant la pharmacie pour les recruter ! », sourit Jacques Bernard.
René était grand, 1m95, un peu gauche, gentil, ses parents habitaient dans une impasse près du magasin du cordonnier, dont j’ai oublié le nom. Il était un peu plus jeune que moi, je jouais au basket à la Vaillante Mothaise, club de patronage – c’est-à-dire des curés – nous ne nous étions pas croisés à l’école car lui fréquentait l’école laïque. Bien évidemment, eu égard à sa haute taille, je me mis en quête de le faire jouer au basket, ce qu’il accepta. Nous passâmes de longs moments sous les panneaux pour qu’il assimile les rudiments du dribble, pas simple pour un grand, et surtout le positionnement dans la raquette, aussi bien en défense qu’en attaque, le rôle du pivot. Bref, mes souvenirs restent flous pour la suite de la carrière de René, je crois que par l’entremise du père Denis le pharmacien qui présidait le club, il fut envoyé en stage et entama une carrière de basketteur, il joua je crois à l’étendard de Brest puis, tout naturellement rejoignis le grand club vendéen : l’ESM Challans.
Ses différents noms
1936-1987 : Étoile sportive du Marais Basket Challans (ESM Challans)
1987-1988 : Challans Basket Club Vendée (Challans BCV)
« Depuis 1963, Challans a écrit de belles pages du basket. Moi qui ne suis pas Challandais, ni même Vendéen, je suis admiratif de ce club complètement atypique dans l'horizon hexagonal. Avec ses plongées vertigineuses, ses montées au courage, son public extraordinaire, ce club a su devenir une place forte du basket. Ce n'est pas seulement moi qui le dis, mais Gérard Bosc, un orfèvre en la matière. A partir des articles de journaux de ces cinquante ans que j'ai réécrits, j'ai recollé dans le détail cette aventure hors du commun. J'ai découvert la vie de ce basket et, loin de vouloir rallumer la querelle des Anciens et des Modernes ou de cultiver pour elle-même la nostalgie, je souhaite faire partager cela avec ceux qui le veulent. Rien de plus. A l'occasion de quelques affiches (Monaco, Bordeaux et d'autres encore) je raviverai le souvenir de ceux qui l'auront vécu et ferai connaître à ceux qui en ont envie ces instantanés qui font l'écume du jour d'un club de basket. Liront ceux qui les souhaitent et pour ceux qui s'en branlent, eh bien ils ne le feront pas. Ce n'est pas grave du tout. Il y a de la place pour que tout le monde puisse trouver son compte. »
Aujourd’hui, si Dieu lui a prêté vie, René devrait être septuagénaire, je l’espère…
Oui ce matin je me souviens de l’AS Denain-Voltaire
Du mythique Jean Degros
C’était au temps où à la Vaillante Mothaise je jouais au basket-ball
« Au nord c'était les corons
La terre c'était le charbon
Le ciel c'était l'horizon
Les hommes des mineurs de fond »
Hier au Palais Bourbon c’était une autre chanson
Basket-ball. N1M : Challans doit enchaîner à Angers pour continuer de se rassurer ICI
Après un beau succès à Tarbes, et la fin d’une série de trois défaites, le VCB veut continuer à regarder vers le haut en signant un sixième succès cette saison lors de son déplacement à Angers, mardi 9 février (20 h).
Ma chronique du 4 juillet 2010 ICI du commençait ainsi « Il est né, le 17 décembre 1931, à Colombières-sur-Orb dans l’Hérault, dans une famille de viticulteurs, tout ce que touche Jean-Claude Carrière : littérature, cinéma, théâtre, se transforme en « trésor ».
Il est mort lundi 8 février, à l’âge de 89 ans.
Jean-Claude Carrière en 2014 PHILIPPE MATSAS OPALE / LEEMAGE
Jean-Claude Carrière, scénariste et écrivain, est mort à l’âge de 89 ans
Le grand complice de Luis Buñuel a mis sa plume féconde au service des plus grands réalisateurs et metteurs en scène. Ce conteur né, passionné par les religions, est mort lundi 8 février.
Il se définissait comme un « encyclopédiste au temps des frères Lumière ». Le scénariste, dramaturge et écrivain Jean-Claude Carrière est mort lundi 8 février à l’âge de 89 ans, a annoncé sa famille à l’Agence France-Presse (AFP).
Né le 17 septembre 1931 à Colombières-sur-Orb dans l’Hérault, dans une famille de viticulteurs habitant une ferme sans eau courante, un milieu sans livres et sans images (il a raconté son enfance dans Le Vin bourru, Plon 2000), ce futur Arcimboldo des bibliothèques, d’instinct touche-à-tout du savoir, parle occitan jusqu’à 13 ans. Puis ses parents prennent la gérance d’un café à Montreuil-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), tandis que, boursier, il poursuit des études au lycée Voltaire, puis au lycée Lakanal de Sceaux (Hauts-de-Seine),, et à l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud, d’où il sort titulaire de maîtrises de lettres et d’histoire.
Conteur né, pédagogue surdoué, passeur éclectique, Jean-Claude Carrière aura passé sa vie à rencontrer, explorer, communiquer, partager, rendre ce qu’il a reçu, griot des temps modernes mi-enchanteur mi-iconoclaste doté d’un sens inné de la clarté, voué à « pouvoir tout dire à tout le monde ».
Sollicité pour se présenter à l’Académie française, et dans d’autres glorieuses institutions, il a toujours décliné ces invitations, fidèle à son refus de ce type de notoriété.
Vivre de sa plume
Le rire fut l’une des boussoles de cet homme qui refoulait l’esprit de sérieux et ne voulait « rien de pontifiant ». Après avoir publié un premier roman en 1957, Lézard (l’histoire d’un fainéant), ainsi que quelques romans d’épouvante sous le pseudonyme de Benoît Becker, il fait la connaissance de Jacques Tati, pour lequel il doit écrire une novélisation des Vacances de Monsieur Hulot, puis de Mon oncle.
Griot des temps modernes mi-enchanteur, mi-iconoclaste, il est doté d’un sens inné de la clarté, voué à « pouvoir tout dire à tout le monde »
Devenu acolyte de Pierre Etaix, il cosigne le scénario de ses films, du Soupirant (1963) au Grand Amour (1969), complice de l’ex-assistant de Tati au point de faire le perchman, l’accessoiriste… Auteur de sketchs pour la télévision, plume et histrion des chansonniers Jacques Grello et Robert Rocca, et auteur du commentaire d’un documentaire sur le biologiste Jean Rostand et la vie sexuelle des animaux (Le Bestiaire d’amour, de Gérald Calderon, 1963), il a décidé de vivre de sa plume.
Le surréalisme est son dada. L’une de ses grandes complicités aura été celle qu’il entretint avec Luis Buñuel, qui cherchait un scénariste pour adapter Le Journal d’une femme de chambre, d’après Octave Mirbeau (1964). Les deux hommes ne se sépareront plus, jusqu’à Cet Obscur objet du désir (1977), cultivant dix-neuf ans une complicité d’irrévérences, amoureux des blagues, des délires de l’imaginaire, de l’irruption de l’irrationnel, de l’irrévérence et des récits bousculant la dramaturgie traditionnelle.
Très courtisé
Signant des scripts pour Louis Malle (Viva Maria en1965, Milou en mai en 1990), Jacques Deray (La Piscine en 1969, Un homme est mort en 1972), Jean-Claude Carrière devient un scénariste très courtisé.
Levé très tôt après sept heures de sommeil, il travaille le matin, écrivant debout sur une écritoire, à la main, comme un scribe ; lorsqu’il lit son travail à ses commanditaires, il joue tous les rôles, sans doute attiré par le métier d’acteur, qu’il pratiqua très épisodiquement, dans de brèves figurations ou lorsqu’il interprète lui-même le personnage principal de L’Alliance, de Christian de Chalonge, d’après son propre roman, la production manquant d’argent pour se payer un acteur connu (1971). Ou s’illustrant dans un long plan de six minutes dans Copie conforme, d’Abbas Kiarostami (2010).
Depuis qu’il avait découvert le théâtre à 16 ans, s’était abonné à la Comédie-Française et au Théâtre Marigny dirigé par Jean-Louis Barrault, Jean-Claude Carrière est un passionné des planches. Il écrit des pièces, parfois hantées par l’absurde, de L’Aide-mémoire joué par Delphine Seyrig en 1968 (énorme succès), à L’Audition en 2010, en passant par La Controverse de Valladolid en 1999, évocation d’un procès du XVIe siècle, opposant un moine dominicain (Las Casas) et un philosophe (Sepulveda) sur la façon de considérer (ou pas) les Indiens d’Amérique comme une race inférieure à coloniser.
Sans oublier ses adaptations, celle d’Harold et Maude, de Colin Higgins, qui sera jouée tour à tour par Madeleine Renaud, Denise Grey et Danielle Darrieux, ni toutes celles qu’il signa pour Peter Brook durant vingt-cinq ans, dont Timon d’Athènes, de Shakespeare (1974), La Conférence des oiseaux, du Persan Farid Al-Din Attar (1978), La Tragédie de Carmen, d’après Mérimée et Bizet (1983) et Le Mahabharata, longue fresque épique tirée de la mythologie hindoue (« La plus haute montagne que j’aie jamais gravie, pleine de merveilles, de découragements et de pièges »). Un travail de titan, qui fut décliné aussi en film.
Une fascination pour les religions, et surtout pour le bouddhisme, conduit cet athée à signer un livre d’entretiens pointus avec le dalaï-lama (La Force du bouddhisme, éd. Robert Laffont, 1994).
C’est dans le cinéma que sa plume fut la plus féconde
Tout Jean-Claude Carrière est dans cette fausse désinvolture avec laquelle il aborde tant de disciplines, sans avoir l’air d’y toucher mais en prouvant sa compétence, comme lorsque à l’époque où il passait son bac, il militait dans un ciné-club universitaire en tant que « délégué à la propagande » (c’est-à-dire en distribuant des tracts boulevard Saint-Michel). Carrière fit toute sa vie de la propagande éclairée.
Il dessine – son Dictionnaire amoureux de l’Inde est illustré par ses propres croquis (Plon, 2001) –, il affiche des passions impures (le bizarre, l’érotisme, la recension des perles de la bêtise et des « petits mots inconvenants »), il écrit des chansons (pour des films, pour Delphine Seyrig, pour Juliette Gréco, Brigitte Bardot, Jeanne Moreau, Hanna Schygulla), il décortique Einstein, interroge deux astrophysiciens sur la relativité, la mécanique quantique et les quarks (Conversations sur l’invisible, avec Jean Audouze et Michel Cassé, Belfont, 1988), il philosophe sur la mort (La Vallée du néant, éd. Odile Jacob, 2018).
Forman, Godard, Haneke…
Mais c’est dans le cinéma que sa plume fut la plus féconde. La liste des cinéastes pour lesquels il a écrit est impressionnante. Outre les susnommés, on y trouve Milos Forman (Taking off, 1971), Marco Ferreri (Liza, 1972), Jean-Luc Godard (Sauve qui peut (la vie), 1980, et Passion, 1982), Carlos Saura (Antonieta, 1982), Nagisa Oshima (Max mon amour, 1985), Michael Haneke (Le Ruban blanc, 2009).
Pour illustrer son goût de l’histoire, citons Le Retour de Martin Guerre, de Daniel Vigne (1982), Danton, d’Andrzej Wajda (1983), Les Fantômes de Goya, de Milos Forman (2007). Pour illustrer son goût de la littérature, des adaptations en nombre :Belle de jour, d’après Joseph Kessel (Buñuel, 1967), La Chair de l’orchidée, d’après J. H. Chase (Chéreau, 1975), Le Tambour, d’après Gunter Grass (Schlöndorff, 1979), Un amour de Swann, d’après Marcel Proust (Schlöndorff, 1984),L’Insoutenable légèreté de l’être, d’après Milan Kundera (Philip Kaufman 1988), Valmont, d’après Choderlos de Laclos (Forman, 1989), Cyrano de Bergerac, d’après Edmond Rostand (Rappeneau, 1990), Le Roi des aulnes, d’après Michel Tournier (Schlöndorff, 1996), Le Père Goriot, d’après Balzac, pour la télévision (Jean-Daniel Verhaeghe, 2004).
L’une des lignes directrices de cette… carrière aura été d’initier le public occidental à des cultures qu’il connaissait mal
Adepte du yoga, jamais pris en déficit de vivacité et de curiosité, Jean-Claude Carrière signait encore en 2015 le scénario d’un film sentimental de Philippe Garrel (L’Ombre des femmes), et en 2018, celui d’un film tonique de Louis Garrel (L’Homme fidèle).
Trois fois nominé à l’Oscar (pour des films de Luis Buñuel et de Philip Kaufman), célébré par un Oscar d’honneur en 2015, récompensé par un César pour le scénario du Retour de Martin Guerre en 1983 et, en 1969, par un Prix spécial du jury court-métrage au Festival de Cannes pour La Pince à ongles, dont il était l’autoréalisateur (histoire cocasse de la disparition de cet objet capricieux dans une chambre d’hôtel), par un Molière pour l’adaptation de La Tempête de Shakespeare en 1991, celui qui se félicitait d’être resté un « esprit libre » cumula en 2014 un Prix Henri-Langlois et le Grand Prix de la SACD. Il avait par ailleurs participé à la création de la Quinzaine des réalisateurs de Cannes en 1969, et de la Fémis en 1986.
L’une des lignes directrices de cette… carrière aura été d’initier le public occidental à des cultures qu’il connaissait mal. Le testament de ce sage est peut-être dans ces lignes qu’il signa en 2011, dans L’Esprit libre (Entretiens avec Bernard Cohn, éd. Ecriture, 2011) : « Quand un auteur a eu la chance, comme moi, d’être né avec un certain talent (une certaine “disposition”, si on préfère, ou un “goût”), une santé solide, quand il a gagné, avec son seul travail, de quoi vivre, s’il continue à ne penser qu’à lui-même, à alimenter son compte en banque, à passer une autre couche d’or sur sa toute petite statue, il est foutu. Il finira dans la solitude et la dépression. (…) Quand je rencontre un “autre”, un différent, et même un opposé, voire un ennemi, je ne songe jamais à le ramener à moi, à l’apprécier, à le juger selon mes critères. Au contraire : j’essaie de trouver en lui ce qu’il y a d’intéressant, de rare, de surprenant, de beau. » Et de citer le Bouddha : « Ton ennemi est ton meilleur gourou. »
Jean-Claude Carrière en quelques dates
Né le 17 septembre 1931 : à Colombières-sur-Orb dans l’Hérault
Jean-Claude Carrière : mort d’un homme aux multiples talents ICI
Pierre Lepape
Publié le 08/02/
Écrivain, scénariste pour Luis Buñuel, Louis Malle ou Milos Forman, ou encore acteur pour Jacques Deray et Abbas Kiarostami, Jean-Claude Carrière s’épanouissait avant tout dans les œuvres collectives. Il est mort ce lundi 8 février, à l’âge de 89 ans.
Il savait tout faire et il le faisait bien: avec enthousiasme, avec intelligence. Le site de laBibliothèque nationale de France (BNF), qui recense les œuvres des auteurs, consacre cinq cent quatre-vingt-cinq entrées à Jean-Claude Carrière. Encore ne compte-t-il pas les apparitions de Carrière comme acteur, quand il se plaisait à apporter sa haute silhouette un peu massive et son accent rocailleux aux films de Luis Buñuel, de Philippe de Broca ou de Carlos Saura.
Dans la liste interminable de ses œuvres, pour le livre, la scène, les écrans, le disque, la plus belle part est donnée à la collaboration, au travail collectif. Jean-Claude Carrière était un homme généreux: il ne s’épanouissait totalement qu’en se frottant aux talents créatifs des autres. DansLe Vin bourru (2000), l’autobiographie de sa jeunesse, où il raconte son enfance de fils de viticulteurs, né en 1931 à Colombières-sur-Orb, un village proche de Béziers, il explique cette attirance par l’enchantement où le plongeaient les conteurs lors des soirées familiales: des auteurs qui inventent des histoires à partir d’histoires plus anciennes et qui invitent ceux qui les écoutent à se faire conteurs à leur tour. Les maillons d’une chaîne féerique…
Faire l’écrivain
Normalien, licencié de lettres, le jeune Carrière va donc très vite quitter le sillon universitaire, moins pour «faire l’écrivain» que pour donner à entendre des voix inconnues. Il a 26 ans, son premier livre s’intituleLézard (1957) et il est pour l’essentiel composé des récits entendus dans le bistrot que ses parents ont ouvert à Montreuil-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), quelques années auparavant. L’entreprise est assez réussie pour que Pierre Desgraupes invite son auteur sur le plateau de Lectures pour tous. L’humour et la verve du jeune Carrière y font merveille. Au point de séduire immédiatement deux maîtres du cinéma comique français, Pierre Étaix et Jacques Tati.
Avec Étaix, c’est un coup de foudre amical. Les deux hommes, qu’une commune passion pour le dessin et le comique visuel réunit, réalisent ensemble deux courts métrages, Rupture et Heureux Anniversaire, cependant que Carrière écrit les scénarios des chefs-d’œuvre d’Étaix:Le Soupirant (1963), Yoyo (1965), Tant qu’on a la santé (1966) et Le Grand Amour (1969). Pierre Étaix, qui avait été l’assistant de Tati pour Mon oncle (et le dessinateur de l’affiche), présente Jean-Claude Carrière au grand Jacques, lequel lui propose un défi: transformer en romanLes Vacances de M. Hulot et Mon oncle. Les deux livres paraissent en 1958 – avec des dessins de Pierre Étaix, évidemment.
Entre-temps, Carrière, toujours avide de terres à découvrir, s’était lancé, sous le pseudonyme de Benoît Becker, dans l’exploration du roman gothique et populaire, fabriquant pour la collection Fleuve noir une demi-douzaine de variations autour de Frankenstein puis, par goût des contrastes sans doute, il avait donné ses soins et son érudition de lecteur à une anthologie des plus belles lettres d’amour (1962), laquelle était suivie quelques mois plus tard par une anthologie de l’Humour 1900 (1963).
En 1963, la rencontre avec Luis Buñuel va élargir encore la palette de Jean-Claude Carrière. Le réalisateur espagnol, qui revient en France, où il n’a plus tourné depuis L’Âge d’or, en 1930, va trouver chez le scénariste français un véritable complice en invention, en imagination narrative et en dénonciation des mœurs bourgeoises. Cela commence en fanfare avec Le Journal d’une femme de chambre (1964), d’après Octave Mirbeau, cela se poursuit avec Belle de jour (1967), La Voie lactée (1969), Le Charme discret de la bourgeoisie (1972), Le Fantôme de la liberté (1974) et Cet obscur objet du désir (1977), la période la plus féconde, sans doute, de la filmographie du cinéaste espagnol.
Buñuel ouvre aussi à son ami les portes d’un nouveau monde, celui de la culture espagnole et latino-américaine. Carrière va s’y engouffrer avec la curiosité enthousiaste, le sens de la dramaturgie, l’exigence de réflexion critique et le goût raffiné des mots et des savoirs qui sont ses marques de fabrique. Cela donnera aussi bien le scénario de Viva María ! (1965), de Louis Malle, celui des Fantômes de Goya (2007), de Milos Forman, que la traduction du Clou brûlant, de José Bergamín, l’écriture pour le théâtre puis pour la télévision de La Controverse de Valladolid (1992),ou encore le magnifique Dictionnaire amoureux du Mexique (2009), dans lequel Carrière déclare son amour pour les contrastes violents de «cette terre de la douceur de vivre et de la mort si proche».
La découverte de l’Inde
Trop gourmand de savoirs et de sensations pour être l’homme d’une seule passion, Jean-Claude Carrière a publié aussi, en 2001, un autre dictionnaire amoureux consacré à l’Inde. C’est une femme, cette fois, qui lui a servi d’initiatrice: son épouse, Nahal Tajadod, écrivaine et poétesse iranienne. La découverte de l’Orient, de l’Inde et des civilisations asiatiques agit sur la pensée et sur l’imagination de Carrière comme un magnifique défi. Ses certitudes mentales basculent, son humanité s’élargit.
En 1982, il propose à Peter Brook une adaptation scénique du Mahabharata, l’immense poème épique de l’Inde ancienne. L’auteur et le metteur en scène font ensemble plusieurs voyages en Inde, d’où ils rapporteront un long (neuf heures!), étrange et envoûtant spectacle qui sera l’événement du Festival d’Avignon en 1989. Dès 1978, Carrière avait déjà proposé une version de La Conférence des oiseaux, le grand poème soufi du XIIe siècle. Plus tard, ce seront des traductions des poèmes d’amour de Rûmi, en collaboration avec Nahal Tajadod.
Cette révélation de l’Orient entraîne aussi Jean-Claude Carrière à faire retour sur lui-même et à préciser les contours de sa propre identité d’auteur. Pendant trente ans, la diversité de ses talents et son appétit de conteur l’ont fait courir de film en film, de scène en scène, de livre en livre. Il a écrit des chansons pour Delphine Seyrig, il a adapté Shakespeare pour Jean-Louis Barrault, Carmen pour Peter Brook. Ses propres pièces ont été jouées sur les plus grandes scènes, souvent avec succès.
Godard, Chéreau, Schlöndorff, Rappeneau…
Au cinéma, à la télévision, il a multiplié les scénarios, les adaptations et les dialogues: avec Louis Malle(Le Voleur, Milou en mai), Jacques Deray (Borsalino, Un homme est mort, Un papillon sur l’épaule), Jean-Luc Godard (Sauve qui peut [la vie]), Patrice Chéreau (La Chair de l’orchidée), Volker Schlöndorff (Le Tambour, Un amour de Swann), Daniel Vigne (Le Retour de Martin Guerre), Jean-Paul Rappeneau (Cyrano de Bergerac) ou Andrzej Wajda (Danton). Il a servi Flaubert et Choderlos de Laclos, Balzac et Zweig, Dostoïevski et Kadaré, Françoise Sagan et Gaston Leroux. Mais où se trouve-t-il, lui, dans cette multitude d’apparitions?
Jean-Claude Carrière commence à se livrer, prudemment d’abord, et sous le couvert de recueils et d’anthologies, d’histoires racontées par d’autres, de morceaux choisis. Son Dictionnaire de la bêtise et des erreurs de jugement, paru en 1965 et composé de deux mille cinq cents extraits de textes sélectionnés avec Guy Bechtel, se double en 1999 d’un Dictionnaire des révélations historiques et contemporaines, contenant des paradoxes sociaux et politiques, des errata de l’Histoire, des inventions osées, des doutes, des secrets, des prédictions sur le passé comme sur l’avenir, avec des élucubrations, des silences, du faux, de l’entre-deux et, ici et là, quelques balivernes. Les résultats d’une fascination très flaubertienne pour les infinies capacités de l’humanité à fabriquer des erreurs et à y patauger avec délectation.
Sagesse et fragilité
Peu à peu, Jean-Claude Carrière consent à se montrer, dans sa recherche d’une certaine sagesse. Cela passe par la publication de poèmes (Chemin faisant, 1982) et, dans les années 1990-2000, par des conversations avec des savants et des philosophes:Conversations sur l’invisible et Regards sur le visible, avec Jean Audouze et Michel Cassé, Entretiens sur la fin des temps, avec Umberto Eco, Jean Delumeau et Stephen Jay Gould;Entretiens sur la multitude du monde, avec Thibault Damour.
Sans la moindre parcelle de dogmatisme, persuadé que tout son savoir est ourlé d’ignorance, conscient de sa fragilité – Fragilité est d’ailleurs le titre qu’il donne à un essai publié en 2006 –, Jean-Claude Carrière se retire doucement des combats d’un monde dominé par la divinité de l’argent (L’Argent, sa vie, sa mort, 2014). À la recherche d’une nouvelle utopie qui ne soit pas une nouvelle illusion, un nouveau pieux mensonge, le vieux conteur se fait philosophe pour interroger une espérance universelle : La Paix (2016), dont les flots de réfugiés semblent montrer qu’elle se confond de plus en plus avec la guerre. La soif de comprendre de Jean-Claude Carrière était inépuisable.
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