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16 septembre 2009 3 16 /09 /septembre /2009 00:00

Il est des jours où je mettrais des cierges – et Dieu sait si j’en ai vu brûler des cierges au temps où je balançais mon encensoir tel un essuie-glace pris de folie – pour que Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, revinsse sur terre pour étriller les Trissotin du vin qui, bien plus pédants que celui des Femmes Savantes, rabaissent le vin au rang des valeurs de placement d’un portefeuille boursier tout en le parant de mots boursouflés. Le Trissotin de Molière, le bien nommé triple sot, rappelons-le, était d’abord un piètre poète dévidant des préciosités ridicules. Ses vers regorgeaient d’adverbes de manière. Son goût conventionnel cherchait uniquement à flatter sur un sujet futile. Tout son art consistait à jeter de la poudre aux yeux, à éblouir les benêts et les snobs d’une pédante érudition.

 

Pour le prix d’un GCC, même à la baisse, je demande à celui qui, en je ne sais quelle magnifique intuition, a eu la bonne idée de « créer » Noé, de donner leur « bon de sortie », qu’ils soient en enfer ou au paradis, à Desproges et Coluche pour qu’ils viennent en renfort étriller à coups de moqueries bien senties nos Trissotin du vin. L’esprit de sérieux qui leur sied pour ne pas effaroucher les « bourgeois », petits, grands, bohèmes, de notre doulce France, les « nouveaux riches » des contrées barbares, les traders gonflés à coup de bonus sur produits toxiques, les nomenklaturistes gavés de fric au fumet incertain, réduit le vin à une valeur haussière ou baissière, le rabaisse au rang d’un tas de gros chiffres. Comme à mon ordinaire je pousse le bouchon au plus loin des prédateurs de vin. Que celui-ci, lorsqu’il est bien né, issu d’une vieille lignée ou une jeune pousse prometteuse, bien élevé ou provocateur, ait une valeur en soi est dans la nature des choses mais, pour autant, faire comme si le compte était toujours bon en euros, et nous prendre pour des zozos relève du théâtre de boulevard où le cocuage triomphe toujours.


Molière fut aussi un grand contempteur des Diafoirus de son époque. Que nous nous levions en masse pour faire barrage à leurs rejetons modernes qui ne savent que manier la peur et la trique j’en suis, bien évidemment d’accord, puisque sur cet espace de liberté je fus l’un des premiers à appeler à la résistance. Cependant, se complaire dans l’air du temps, consacrer des pages et des pages sur de savantes études, en appeler à des psychothérapeutes ou autres spécialistes des comportements, participe à l’effet mouton de Panurge chère à nos grands médias. Tous en même temps sur le sujet à la mode, thrombose, overdose, jusqu’au nouveau sujet qui attire le gogo coco. Plus intéressant, sur ces sujets de société, serait que les grands médias les traitassent au fil de l’actualité, sans les cantonner dans le ghetto des numéros spéciaux lus que par les déjà convaincus, en leur donnant la même surface rédactionnelle que les articles sanitairement correct. Ce serait du vrai journalisme et non du pur marketing dragueur de publicité.


Certains vont dire que je ne suis jamais content – je suis grassement payé pour ça – mais croyez-vous vraiment que le vin puisse retrouver une place de choix dans le cœur des Français si sa présentation ne se complaît que dans des considérations savantes et chiantes. Nos amis de l’estranger amoureux de la France, américains, tel Robert V Camuto dans son dernier livre « Un américain dans les vignes », ou nos proches voisins, italiens ou anglais, nous vannent gaillardement sur notre propension à geindre et à nous tirer des balles dans le pied. Le vin c’est un peu de douceur dans ce monde de brutes. Arrêtons de faire la gueule ! De gloser. Sourions nous sommes filmés !


Franchement, dans les pages dites « people » lorsque vous contemplez les photos des raouts de promotion, avec quelques « célébrités » tarifées, c’est d’un triste. Moi je n’ai rien contre les réceptions très prout-prout ma chère au château, costume Pingouin et autres joyeusetés, j’en ai un nombre incalculables au compteur, ni contre les intronisations avec bannières et robes incorporées, glou et glou, serment sur les mannes de l’appellation, là aussi je suis bardé de médailles et de diplômes, mais s’en tenir là ça sent l’empesage et la naphtaline... Dans ce genre de pinces-fesses les occasions de se bidonner et de décoconner sont aussi rares que les cheveux l’étaient sur le célèbre crâne du défunt Yul Brunner. Bien évidemment, si ça plaît à un certain public d’amateurs je ne vois aucune raison de les priver de ces réjouissances mais ne serait-il pas judicieux d’expérimenter auprès des nouveaux arrivants de nouvelles formes de fêtes – j’ai évité teuf pour ne pas défriser le Professeur –, des avec un soupçon de convivialité, sans tralala, sympa, en jeans et baskets...


Pour autant, faire la fête ne rime pas avec se bourrer la gueule. Les banquets avinés où une partie des convives pique du nez avant le dessert ne sont pas ma tasse de thé. Rester gai, garder jusqu’à la dernière ligne droite sa verve, et aussi sa capacité pour une autre mi-temps dans le mitan d’un lit où la rivière est profonde, laisse beaucoup de marge au bon vivant. Attention, comme vous le savez, je ne prône pas la modération mais une forme d’équilibre sur un fil où, libéré de ses habituelles entraves, chacun se laisse aller à prendre la vie du bon côté. Bien plus que la tarte à la crème : « accord mets-vins » ce qu’il nous faut promouvoir se sont les accordailles entre la fête et le vin. Dans un monde où chacun se replie sur sa tribu la table reste l’un des lieux privilégiés pour se retrouver.


Alors, pour une fois, passons à l’acte !


Bougeons-nous le cul !

 

Je m’adresse aux grands zinzins pompeurs de CVO : quand comprendront-ils qu’il leur faut faire cause commune pour mener auprès des « urbains » comme des ruraux des démarches conviviales dépourvues d’esprit de lucre. Le genre grand Pique-nique en ville où chacun amènerait son panier et où nos vignerons de toutes obédiences, régions, chapelles, porteraient quelques petites boutanches, profitant de l’occasion pour tailler des bavettes avec papa, maman, la bonne et moi.


Je radote !


Ça n’intéresse ni les « communicateurs », ni les vendeurs de campagnes nulle à chier, car ça ne fait pas tomber beaucoup de ronds dans les escarcelles.


Que de bonnes paroles ai-je entendu lors du lancement de l’Amicale du Bien Vivre dites des Bons Vivants, des promesses de soutien, paroles, paroles mais à l’arrivée queue de chique et eau de boudin...


Mais je suis têtu comme un âne corse alors dans ma toute petite crèmerie, sans moyen, pour que l’Amicale commence son petit bonhomme de chemin je lance à la cantonade, en tant que secrétaire-perpétuel autoproclamé de l’ABV : le jour du Vin. Qu’est-ce cette nouvelle engeance ?


Je m’explique : pour prendre le relais du vin de tous les jours qui pique du nez et plutôt que de céder à la mode des Journées de...tout et de rien, nous, les Bons Vivants, allons parsemer l’année de jour du Vin. Autant que nous le voudrons, là où nous le voudrons, comme nous le voudrons, simplement pour marquer le calendrier de flacons de toutes les couleurs.


Comment faire ?


Simple : proposez un jour, une heure, un lieu, là où vous habitez, vous me le transmettez, je diffuse sur mon blog et le réseau ABV et... nous verrons bien si ça mord... Dans l’hypothèse heureuse, où le jour du vin racinerait, je pourrais, dans la mesure de mes disponibilités et de mes moyens me joindre aux agapes des Bons Vivants...


Pour ma part, à Paris, avec mon petit groupe de jeunes « dégustateurs » nous pratiquons l’exercice... Nous pourrons élargir à d’autres Bons Vivants...


Qu’en pensez-vous ?


Bons Vivants réveillez-vous !


Passez à l’acte !


Après les vendanges levons nos verres !


Ainsi, Petits Poucet du Vin tout au long de l’année jetons les petits cailloux du jour du Vin dans les grolles des Ogres prohibitionnistes et, petit à petit, joyeusement, nous les ferons verser dans le fossé...


J'ai donc ouvert pour accueillir nos jour du Vin  une adresse blog www.lejourduvin.over-blog.com nous verrons comment la gérer collectivement pour animer notre Amicale qui roupille...


Amicalement vôtre...

 

à bientôt sur mes lignes...

 

  

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15 septembre 2009 2 15 /09 /septembre /2009 00:05

 

Dali était fou du chocolat Lanvin moi je le suis du vin d’Embres&Castelmaure lieu qui dispute à la gare de Perpignan  le privilège d’être le centre du monde. Savoir être fou, retrouver le goût des chemins de traverse, oser faire « l’éloge de la paresse » c’est redonner au vin son supplément d’âme, l’inscrire à nouveau dans l’imaginaire des gens. Dans le mien de petit vendéen cerné par les particules des de Baudry d’Asson, de Tinguy du Poët, Boux de Casson, de Larocque-Latour, Morrison de la Bassetière hobereaux châtelains « régnant » sur leurs terres, leurs métairies et leurs métayers : « bonjour notre maître » ces noms à rallonge m’ont toujours fascinés. Alors, au scrabble de ceux-ci, celui de Patrick de Hoÿm de Marien m’ébaffe, m’épatoufle, m’éberluque.

 

L’homme est un seigneur, de cette aristocratie qui force le respect car elle tire sa supériorité, non de privilèges, mais de son action. Dans la galaxie postsoviétique des présidents de la coopération audoise, avec son allure à la de Staël, P.H.M jette comme un trait de blanc de kaolin sur leur grisaille. L’homme cultive aussi une forme d’insolence, policée dans ses mots mais luxuriante, provocante, dans ses choix de taggueur pop’art. Osez, osez Joséphine chantait Bashung, dans le scepticisme du Languedoc, dans ce bout du monde des Corbières, Patrick de Hoÿm de Marien et son équipe, au lieu de s’abouser, se sont affanés, « du courage, du courage... » comme le chante la Grande Sophie avec ce qu’il faut de patience, d’intelligence  des choses et des gens, de ténacité pour nous offrir des couleurs pleines de bonheur.


Que des « grands », au long bec et au palais fin, sous la houlette de Michel Bettane, s’intéressassent enfin à l’un de ses vins, l’emblématique N°3, et lui décernassent, dans Terre de Vins www.terredevins.com, le titre envié de meilleur vin du Languedoc-Roussillon, n’a pas de quoi me surprendre mais me donne l’occasion, entre deux comportes de raisin mur, de demander des explications sur ce miracle corbierenc à  Patrick de Hoÿm de Marien, président de Castelmaure. Si c’était Stéphane Bern qui s’y était collé – il aime le vin ce garçon – sans aucun doute l’interview aurait débuté par : altesse...


 

 

1ière Question : Bonjour Président, mon petit doigt m’a dit que jeune homme, fringant et altier, vous adoriez la céréale et les gros tracteurs, comment avez-vous débarqué à Castelmaure ? Puis, une fois adopté, comment avez-vous fait pour convaincre vos pairs de ne pas faire comme tout le monde ?

 

Patrick de Hoÿm de Marien : Par amour. En venant, juste après les moissons de 1979, m'occuper des vignes de ma femme. J'avais un peu moins de 30 ans, j'étais né paysan, mais à l'autre bout de l'Aude, dans la Piège, à Marquein au milieu des collines de blé dur, des basse-cours et des élevages de cochons. Du coup, ici, en Corbières, j'étais un « étranger », il a fallu que je montre, que je prouve que je faisais réellement partie de la « race » de ceux qui cultivent la terre. Apparemment, j'ai réussi à me faire, sinon naturaliser, au moins adopter puisqu'en 87 les vignerons m'ont élu président de Castelmaure, une structure qui regroupe 60 adhérents répartis sur 360 hectares de vignes.


Parce que je suis un paysan et qu'un paysan aime vivre libre. Mes échecs en tant que céréalier et éleveur, enchaîné à un système productif qui m'obligeait à me battre sur le marché des génériques, m'ont fait comprendre que pour continuer à vivre debout, indépendant, il fallait d'abord élaborer des produits porteurs d'une identité. Rien de plus évident à Castelmaure où la géologie, le relief et le climat ne permettent guère d'envisager d'autre démarche.


Ma grande chance a été l'arrivée en 1983 de Bernard Pueyo, un jeune œnologue aussi perfectionniste que taiseux, qui, supervisé par son mentor Marc Dubernet, a fait basculer notre vieille coopé dans une autre ère. Très vite, les parcelles ont été informatisées, les méthodes culturales assainies, la machine à vendanger prohibée et les bénéfices retrouvés. Les vignerons eux aussi ont accepté de faire des sacrifices, d'investir en fait : ils en touchent aujourd'hui les dividendes.

 

2ième Question : Patrick de Hoÿm de Marien, dans cette belle région où beaucoup causent sur tout et son contraire alors qu’ils devraient se taire, même si ça les chagrinent un chouïa, depuis Castelmaure, comment lisez-vous l'évolution des vins du Sud ?

 

Patrick de Hoÿm de Marien : J'ai l'impression que l'on assiste de plus en plus à une répartition des rôles qui implique des métiers très différents les uns des autres. D'une part, la production industrielle, souvent concentrée dans la plaine, qui peut et qui doit à son échelle inventer des bouteilles de qualité, parfaitement adaptées au marché aussi bien dans la forme que dans le fond ; mais il s'agira de raisins vendangés à la machine, irrigués souvent et dotés de puissants outils marketing. D'autre part, le vin artisanal, produit par des « petits » comme nous, par des gens qui n'ont d'autre choix, d'autre avenir que de s'appuyer sur les qualités propres de leurs terroirs et donc de raisonner grand cru. Ces deux métiers doivent évidemment vivre en bonne intelligence, comme dans tant d'autres régions viticoles prestigieuses de France ou d'ailleurs. À cet égard, il serait intéressant que le Languedoc et le Roussillon s'ouvrent davantage au Monde afin que chacun, et pas seulement quelques initiés, se rendant compte que le vin bouge ! Le vin a aussi soif de culture, d'audace et d'ouverture d'esprit, c'est peut-être à ce niveau-là que nous pouvons progresser. À titre d'exemple, l'inauguration de notre nouvelle cave conçue par Lacaton & Vassal (NDLR: Grand Prix National d'Architecture 2008) a tout juste suscité ici la curiosité d'un ou deux conseillers généraux…

 

3ième Question : Président, parlons du lauréat, de ce N°3, comment avez-vous fait la différence avec cette cuvée ? Fier d’être N°1 cher Patrick de Hoÿm de Marien ? Moi, qui ai tant bourlingué dans ce pays, comme notre Université le fait pour ses doctorants les plus méritants, je vous accorde la mention Très Honorable avec mes chaudes et sincères félicitations.

 

Patrick de Hoÿm de Marien: D'abord, tout simplement, en exprimant par une sélection de sélections un terroir particulier, à cheval sur le calcaire et le schiste, un terroir d'altitude sur lequel nous avons, grâce au travail de Bernard Pueyo et de tous les vignerons, des dizaines d'années de recul et donc de connaissances. Je crois que c'est vraiment là que se fait la différence, sur le terroir, car, finalement, nous ne sommes qu'une petite « coopé » des Corbières : nous n'avons ni les moyens, ni l'ambition, ni même le désir d'élaborer un vin de garage, trié grain par grain, épépiné à la plume d'oie et limité à 300 bouteilles ; cette cuvée, en 2007, cela représente 20000 bouteilles ! Notre vocation demeure de rester fidèle à une histoire, à une « culture d'entreprise » comme on dit aujourd'hui, paysanne, saine et indépendante.


Cela étant, le n°3, depuis onze ans, a aussi été l'occasion d'ouvrir de nouveaux horizons et de découvrir de nouvelles façons de travailler. La rencontre avec Michel Tardieu, qui nous conseille depuis 1998 sur ce vin, nous a permis d'intégrer des gestes œnologiques plus « haut de gamme », des gestes que jadis on n'aurait jamais appliqués à un corbières ; avec lui, nous nous sommes décomplexés et nous nous sommes mis à traiter notre terroir à l'égal de Châteauneuf-du-Pape, du Priorat ou de la Côte-Rôtie. Et puis, en partant avec notre compagnon de route Vincent Pousson de cette étiquette qu'il a créée en 98, et qui avait tant fait jaser à l'époque, de refondre, de singulariser notre gamme et de lui donner l'énergie et les couleurs qu'elle a aujourd'hui.


Le classement établi par Michel Bettane et Terre de Vins nous fait évidemment très chaud au cœur : le n°3 qui devient numéro un du Languedoc-Roussillon le temps d'une dégustation, c'est la récompense d'un travail d'équipe, d'une œuvre collective – plus dans une optique rugby que kolkhoze… Il est aussi l'occasion de se sentir moins seul, de voir dans toutes les belles bouteilles avec lesquelles nous avons concouru l'expression d'une envie commune, l'envie que le Languedoc-Roussillon prenne enfin conscience, loin du conservatisme et du défaitisme, des atouts extraordinaires que lui a offert la Nature.

 

Note du rédacteur : je trouve que le « parlé » de Vigàta, ce vocabulaire des « peineux » siciliens va bien à mes amis d’Embres&Castelmaure : alors s’ébaffer, s’épatoufler, s’éberluquer, s’abouser, affaner... ça parle mieux que les mots français tout appointuchés (ça c’est du patois vendéen)...


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14 septembre 2009 1 14 /09 /septembre /2009 00:01

 

C'est le temps des vendanges et si je voulais me la péter grave je causerais riche dans le style : le raisin ayant atteint sa maturité phénolique... étant mûr et sain... et patati et patatin...  Mais comme je ne suis qu'un pisse-copie je vous offre ce matin quelques oeuvres (désolé pour hier d'avoir encombré votre messagerie avec 3 avis, ce n'était qu'une petite folie de mon hébergeur et non ma volonté que vous lisiez ma prose du dimanche. La veille l'adresse de la chronique n'était pas valide, dans ce cas il faut cliquer sur www.berthomeau.com pour avoir accès à mes écrits) :

1- Une gouache d'André Derain pour la plaquette "Le génie du Vin" * des établissements Nicolas en 1972.

 

Chanaan, Terre de la Promesse.
Vendange de miracle,
Grappe géante que deux hommes
Peuvent à peine suffire
à porter au pressoir.
Telle sans doute que celles
dont l’image emplissait les yeux
des compagnons desséchés de Moïse
dans leur voyage à travers la longue soif.

Texte de Thierry Maulnier de l'Académie Française

* 300 exemplaires de cette édition numérotés de 1 à 300, ont été réservés aux acquéreurs des prestigieuses bouteilles offertes au Comité pour la Sauvegarde de Venise par les établissements Nicolas à l'occasion du Cent cinquantenaire de leur fondation.

Mécène en ce temps là Nicolas...


2° Un dessin original de Ronald Searle publié dans Something in the Cellar :

 3° Une petite photo prise dans une brocante :

4° Une photo de Janine Niepce dans les Vendanges texte de Bernard Clavel chez hoëbeke

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13 septembre 2009 7 13 /09 /septembre /2009 08:15

« Verba volent, scripta manent… » la parole de l’archange contre celle du président Pompe ne pesait pas lourd alors que ses propres écrits l’accablaient : comment pouvait-il nier sa démarche à l’ambassade des USA, sa lettre au Premier Secrétaire du PCUS, le bonnasse  Khrouchtchev avec sa godasse de l'ONU, alors que nous le tenions par la peau des couilles car, bien évidemment, nous avions laissé filtrer auprès de certains journalistes que nous avions les preuves de ce que le Président avançait. Entre services secrets alliés ou même adversaires, se donner un coup de main en de telles circonstances relevait de la pure solidarité et de l’espérance d’un retour le moment opportun. Nos collègues du SDEC nous avaient donc fourni le matériel ad hoc. D’ailleurs, dans son livre « L’Etat piégé » notre homme se contente de contester la véracité du lien entre sa nouvelle démarche à propos de la mort de Kennedy, sur tout le reste il observe un silence total. En effet, le 21 septembre, à sa sortie de chez le juge Galmiche saisi de l’affaire, flanqué de Me Floriot son défenseur, Alain Fernbach de Radio-Luxembourg lui tend son micro « Le chef de l’Etat, au début de sa conférence de presse vient de dire que vous aviez prévu l’assassinat du président Kennedy en 1963. Est-ce vrai ? Est-il exact aussi que vous ayez demandé une autorisation de port d’armes ? » Sa mise au point, le lendemain au Georges V, devant une cinquantaine de journalistes ne convainquit personne, sauf lui.

Nous avions réussi notre coup, l’archange même s’il secoua très fort les haubans de la République Pompidolienne venait de recevoir la première banderille qui, ajouter à d’autres, le ferait se dégonfler. J’anticipe mais ma participation, plus qu’active, à l’élaboration du contenu de la contre-attaque présidentielle me valut une aura toute particulière dans le marigot des officines. Sans vouloir rouler des mécaniques j’étais devenu pour eux « l’homme du Président », celui qui avait su se montrer bien plus machiavélique que ce pauvre dénonciateur qui cachait ses messages sous des arbres, dans la forêt de Fontainebleau pour le premier. Il n’était pas de taille ce boy-scout qui se prenait pour un génie de la finance, nous allions le bouffer tout cru. Cependant, je dois à la vérité que cette « célébrité » me précipitera, quelques années plus tard, dans une fuite peu glorieuse. J’anticipe encore mais, en ce mois de septembre 1972, en chaussant des bottes, trop grandes pour ma petite personne, je m’engageais sur une terra incognita : celle des grands prédateurs du monde économique et financier où j’allais vivre des moments rares tout en me mettant en permanence en danger. Chloé, de retour pour un temps de son escapade transalpine, me prévint : « tu es trop seul, trop coupé de tout ce monde interlope, ton équipe est sympathique mais sans envergure, alors prend garde à toi, au premier faux-pas au mieux ils te casseront, au pire ils te tueront… » J’avais ri. Elle m’avait dit « je tiens à toi ». J’avais répondu « moi aussi je tiens à moi… » Elle me rétorqua« je n’en suis pas si sûr… »

Le premier appeau que je mis entre les blanches mains de l’Archange fut le rapport de l’Ingénieur Général de la Construction Leguern sur la catastrophe de Tignes-Val d’Isère due à des avalanches ayant détruit des immeubles et fait de nombreuses victimes. Pour que ce cher homme soit persuadé que ce dossier lui tombait dessus par le plus heureux des hasards nous avions chiadé la mise en scène : une chemise bien jaunie astucieusement glissée dans une pile de dossiers sur le bureau d’une des secrétaires du service du courrier parlementaire. L’archange fouineur adorait fureter, à l’heure du déjeuner, ce lieu était pour lui une mine recelant une extraordinaire diversité de cas bien gratinés. Dès qu’il eut les 50 feuillets du rapport Leguern entre les mains, nous sentîmes comme une lueur d’euphorie s’inscrire sur son visage de clerc de notaire bouffeur de salade. Mon choix était judicieux car les pièces accumulées par le haut-fonctionnaire étaient accablantes : ainsi sous la référence 1 G 70 22 du 10 novembre 1970 était mentionné que « 1044 logements, 704 lits, 514 chambres d’hôtel et 41 constructions à usages divers » avaient été autorisés dans les zones exposées à des risques d’avalanche. Tout ça ne datait pas d’hier : les permis de construire, avec avis favorable ou pas d’avis du maire, dans des zones dangereuses s’accumulaient, ainsi que quelques victimes par ci par là. Pas de quoi émouvoir les bétonneurs des neiges mais vraiment tout ce qu’il fallait pour mettre notre archange dans un état de lévitation proche de l’extase. Le « pigeon » était vraiment ferré restait à entretenir son appétit pour les affaires qui puaient.

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12 septembre 2009 6 12 /09 /septembre /2009 00:10

Pour moi les vacances se terminent mais pour garder leur goût rien ne vaut une petite tranche d'humour leste et, comme Andréa Camilleri est grand expert en la matière ce matin, dans le cadre de mon feuilleton coquin de l’été, je vous en offre une très savoureuse découpée dans l’opus « Privé de Titre » publié en livre de poche n°31330.

 

« Il descend, ce grand galavard, oui ou merde ? » se demande Nino Impallomèni qui ne tient plus en place.


Fils de maître Calogero Impallomèni, un ténor du barreau, et de la marquise Angiolina Tesauro, Nino est d’une famille de haut fessier : c’est un jeune homme de bientôt vingt ans, grand et mince comme un bâton de rogations. Il fait son droit à l’Université de Palerme.


Pour l’heure il a collé son oreille gauche contre la porte d’entrée de son appartement, guettant le moment où il entendra les pas de monsieur Burruano, descendant l’escalier de l’étage supérieur. À huit heures pétantes, chaque soir que le bon Dieu faisait, monsieur Calogero Burruano sortait de chez lui en tacquant si fort la porte de l’immeuble que les vitres tremblaient jusqu’au troisième étage, et il allait jouer aux cartes au club « Foi et Progrès » dont il ne ressortait pas avant minuit, laissant seule à la maison son épouse Adelina, une fenotte d’à peine quarante ans.


Madame Adelina s’était installée trois mois auparavant dans cet appartement du troisième et dernier étage avec son mari, et il ne lui avait guère fallu de temps pour tomber le nez sur Nino, tout frais «émoulu de ses études palermitaines, et comprendre alors sans qu’on le lui explique longtemps, la façon d’utiliser ces soirées que son mari passait à son club.


Nino Impallomèni et mame Adelina Pircoco, épouse Burruano, s’étaient accordés au premier regard, sans avoir rien besoin de dire.


Dans le quart d’heure qui suivit leur rencontre (le temps strictement nécessaire à Nino pour laver la bête), le jeunot grimpait l’escalier vers le troisième étage. Il s’apprêtait à chapoter à la porte quand il s’aperçut qu’elle était entrouverte. Il entra et la referma derrière lui. L’appartement était plongé dans l’obscurité, sauf une lumière provenant de la dernière porte à droite dans le couloir. Il s’y dirigea prudemment. Dans la chambre conjugale, la dame était déjà à plat de lit, le drap pudiquement remonté jusqu’aux yeux.


« Tâche voir de pas me faire mal, je suis une petite nature. »


Au cours des deux heures qui suivirent, Nino Impallomèni acquit la conviction que la petite nature, dans le cas présent, c’était plutôt lui. Quand, à la troisième reprise, mama Adelina lui avait tendrement demandé à l’oreille s’il pouvait remettre l’ouvrage sur le métier, Nino avait sauté du lit en déclarant avoir oublié un rendez-vous important.


Ce soir du 24 avril, monsieur Burruano se décida enfin à descendre l’escalier pour aller voir ailleurs s’il y était. Il était huit heures dix et Nino devait retrouver Titazio et Lillino au plus tard à huit heures et quart. Tant pis, ils attendraient. En deux temps trois mouvements, Nino se retrouva dans la chambre de mama Adelina, se défubla de sa veste en un tournemain, déboutonna son pantalon qu’il envoya valser d’un coup de pied. Le pantalon atterrit contre le mur, avec un bruit métallique, en partie étouffé par le tissu.


« Qu’as-tu donc dans ta poche ? s’enquit la dame.


-         Mon révolver » répondit le jeune homme en entrant dans le lit avec ses chaussures. ET il ajouta : « Ce soir, j’ai un quart d’heure tout compris.


-         Et moi, mes affaires, stipula la dame, pivoine.


-         Il y a un remède à tout » rebriqua Nino.


Il l’étendit sur le ventre, posa sa main sur sa bouche pour empêcher que l’immanquable quinchée ne s’entende de la rue, et de l’autre baissa sa petite culotte doublée d’un linge.


« Ah ! » laconisa la dame quand elle sentit l’effraction.


Elle n’avait pas crié, et son ah ! disait plus la satisfaction que la douleur. »

 

À lire absolument cette histoire du « seul et unique martyr fasciste de toute la Sicile » qui se déroule juste avant l’avènement du fascisme. Un vrai bijou plein de verve, d’humour, de pertinence sur l’éternelle manipulation de la vérité par les régimes autoritaires.

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11 septembre 2009 5 11 /09 /septembre /2009 00:02

« Qui n’en a pas goûté ne connaît pas l’île » affirme Émile Bergerat dans son livre Souvenirs d’un enfant de Paris 1887. Le brocciu ou encore broccio est une « friandise » qui se consomme tout au long de son vieillissement. Frais, il se prête à toutes les fantaisies, nature ou agrémenté de sucre, d’eau-de-vie, de fruit ou de confiture sur une belle tranche de pain. Avec l’âge, il s’affermit et son goût s’affirme, et alors le brocciu s’allie avec tous les moments du repas, chaud, froid, frit : entrées, légumes, pâtes, poissons, viandes, œufs et, bien sûr, desserts.

 

Art venu du fond des âges, l’élaboration du brocciu par les bergers, tour de main précis et délicat, relève d’une forme de magie où, avec le même corps de règles, chaque produit est unique. . Indifféremment confectionné à partir de lait de chèvre ou de brebis, le brocciu se trouve sur les marchés lors de la période de lactation des chèvres et des brebis (de septembre à juillet). Son goût évolue en fonction des conditions d’alimentation des animaux. Pour les puristes, le brocciu confectionné avec du lactosérum de chèvre et de lait de brebis est le meilleur.

 

Dans Bergers Corses, Georges Ravis Gordiani, décrit avec la précision de l’ethnologue la confection du brocciu par les bergers du Niolu.

 

« Il reste à faire le brocciu avec le petit-lait recueilli soit avant la mise en fattoghje (fromage de chèvre), soit à la suite de l’égouttage des fromages. On fait chauffer ce petit-lait dans un chaudron de cuivre étamé – paghjolu – ; le feu est ici la grande affaire. Il y faut un bois sec, non résineux (hêtre, chêne, aulne), en aucun cas le pin qui donnerait une flemme trop vive et ferait « attacher » le brocciu au fond du chaudron. Quand le petit-lait atteint la température de 30° environ, le berger avec un ballet de bruyère, enlève la scurza, sorte de dépôt qui se forme au fond du paghjolu. Quand le petit-lait atteint une chaleur suffisante (environ 60°), que le berger apprécie à la main, on y jette le lait entier (u purriciu) qu’on a réservé à cet usage, et un peu de sel, et on règle le feu de telle manière que les flammes ne touchent plus le fond du chaudron. À cette phase de l’opération, la réussite dépend de la surveillance constante du feu et du mélange que le berger tourne lentement avec un bâton pour assurer la fusion du lait entier et du petit-lait. C’est à partir de ce mélange que se fait la coagulation de la caséine du purriciu qui monte à la surface en emprisonnant toutes les matières grasses résiduelles du petit-lait. Elle forme alors une sorte de masse blanchâtre et tendre. On dit que le brocciu vene (vient). Quand, quelques instants plus tard, il s’ouvre laissant voir le jaune du petit lait, il faut enlever sans tarder le chaudron du feu. On doit alors « essuyer » (asciuvà) la surface du brocciu, lui enlever son écume et les impuretés (cendres, poussières) que la proximité du feu y a fait voler. Le berger le fait délicatement, avec une cuillère, jusqu’à ce que la masse du brocciu, à la fois compacte et souple, soit parfaitement blanche. Alors seulement il le ramasse avec une écumoire en fer (a paletta) et le dépose délicatement dans des moules en jonc. Comme le fromage, il redouble (appicia) les brocci. Au Niolu, un brocciu pèse rarement moins de 2,5 kg. »

 

Bien sûr le problème du brocciu c’est qu’il est bien difficile de s’en procurer hors de l’Île de Beauté mais, si vous avez un bon fromager, ce n’est pas totalement mission impossible de lui demander d’en « importer » du Niolu. Bref, la recette qui suit est pour moi un de ces plaisirs d’été dont je souhaite vous faire profiter. Elle est simple ( la cuisine au brocciu Marie-Claire Biancarelli édtions Albiana www.albiana.fr ) Des tomates mûres, de l’ail, du basilic, des spaghettis n°7 et bien sûr du brocciu.

 

Dans un saladier vous découpez vos tomates en cubes, vous y ajoutez l’ail coupé en lamelles et le basilic cisaillé grossièrement. Versez sur la préparation de l’huile d’olive. Mélangez et laissez reposer.

 

Dans un plat creux coupez le brocciu en cubes moyens.

 

Pour les spaghettis : cuisson al dente puis égouttage et arrosage à l’eau froide.

 

Ajoutez-les au mélange tomates-ail-basilic-huile d’olive.

 

Versez le tout dans le plat creux et opérez le mélange avec le brocciu.


 

Du côté liquide, pour accompagner vos spaghettis je vous recommande un Clos Capitoro rosé 2008. C’est un AOC Ajaccio doublement décoré : 2 médailles d’or en 2009 au Concours Général Agricole et au Concours de Mâcon. Belle bouteille ventrue. Rose intense. Vin vif et joyeux qui s’avère un merveilleux compagnon des spaghettis au brocciu. 7 euros 50 chez Sagone Primeurs. www.clos-capitoro.com

 

 

Bon appétit ! Je ne résiste pas au plaisir d’accompagner ma recette d’un pan sur le bec à l’attention de Jean-Guy Poletti directeur de la rédaction de Corsica qui « allume » le CIVC (interprofession des vins corses) pour son bulletin de victoire à propos de l’affaire dites du rosé pur et fait sienne la déclaration de François Alfonsi qui parle de « bal des faux-culs », pour lui signaler qu’en matière d’information approximative, dont il accuse les professionels, son hebdomadaire, comme bien d’autres, est très performant. dans ce domaine. En effet, nulle trace dans Corsica de l’info soulignant que le fameux coupage rouge-blanc n’était qu’une extension aux vins sans Indication Géographique d’un droit dont disposent toutes les AOC, celles de Corse comprises. Que seuls les seigneurs de Champagne en profitassent est une autre histoire... dont je vous ai abreuvé lire Astérix chez les Provençaux du chef Koupepamonrosé http://www.berthomeau.com/article-33621172.html  ...
 

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10 septembre 2009 4 10 /09 /septembre /2009 00:09

 

De nos jours chahutés, où les chapelles se toisent, où les anathèmes tombent drus, où les noms d’oiseaux volent bas, chez les œnophiles éclairés, en société, dans les étages élevés ou au ras des pâquerettes, dans les beaux quartiers mais aussi au fin fond des bistrots branchés ou de quartier, à propos des guides divers et variés, des spécial Vins, pour tout et rien, il est de bon ton d’avoir du terroir plein la bouche.


Terroir, mot intraduisible en une autre langue que notre belle langue le français, qui permet aux éminents commentateurs d’aller y puiser de la minéralité ou d’affirmer qu’il est le jardin de Gethsémani où la vigne doit entreprendre son chemin de croix, souffrir, saigner pour aller à l’essentiel ou encore d’abreuver les malheureux consommateurs, en général ignares, de termes géologiques barbares sur les contre-étiquettes.


Bref, le terroir c’est tendance. Nous lui devons le respect dû aux Anciens. Le vénérer. Le chérir. L’aduler. N’en tirer que la quintessence en laissant aux Nouveaux Barbares le soin de complanter leurs vignes dans une terre vile, assoiffée, livrée à des hordes de va-nu-pieds, pour en faire pisser des flots colorés. Le terroir c’est notre côté black béret revisité par les nouveaux adeptes du naturel chers au cœur de Michel Bettane. C’est la plus belle illustration du concept français d’exception culturelle, fil d’Ariane d’un Mitterrand à l’autre. C’est le retour en grâce des vers de terre de mon grand-père, de Nénette sa jument, de la décavaillonneuse... Le Terroir c’est l’enracinement profond en ces temps de mondialisation.

Ne voyez pas dans mes propos matinaux une once d’ironie mais plutôt une volonté d’apporter un soupçon de rationnel dans le lyrisme ambiant. En effet, le terroir c’est l’origine, le lieu de résidence permanent de la vigne qui a des papiers puisque c’est une AOC ou une AOP, à la rigueur une IGP même si ça contrace le Professeur. Alors, comme des esprits mal embouchés ont imposé à nos belles AOC, que le monde nous envie, une dégustation une fois le vin fait, avec l’idée d’y trouver de la typicité locale, je trouve qu’il serait plus logique d’imposer, avant toute chose, une dégustation du terroir.


Là vous vous dites, mezzo voce, que je detrancane (que je n’ai pas toute ma tête) Détrompez-vous, je suis plus sérieux qu’un Pape et je vais vous en faire la démonstration.

  

Mon projet, n'ayons pas peur des mots, révolutionnaire, que je vais soumettre à « Sans Interdit » http://www.berthomeau.com/article-1582091.html  le Think tank, que le monde entier nous envie, qui roupillait un peu ces derniers temps mais qui va reprendre le collier à la rentrée, repose sur les travaux empiriques de Gnazio Manisco, l’un des plus grands spécialistes du Terroir du Grand Sud. Sans plus attendre je vous livre le fond de sa pensée aussi profonde qu’un terroir de Grand Cru Classé.

 

« Or la terre était bonne, Gnazio l’avait goûtée, toise par toise, avec sa fiasque de vin. Il se baissait à chaque pas, prenait entre pouce et index une pincée de terre qu’il posait sur sa langue et dégustait. Il fallait qu’elle ne soit ni trop amère ni trop salée, ni trop douce ni trop aigre, ni trop sèche ni trop humide.

« La saveur des terres bonnes et fines / est celle des natures féminines », avait-il entendu dire au bonhomme Japico, du temps où il était ouvrier agricole. Ensuite, il se rinçait la bouche d’une gorgée de vin, avançait d’un pas et se baissait pour en prendre une nouvelle pincée. »

 

La méthode est donc d’une simplicité biblique. Reste à former les dégustateurs de terroir. Ce ne devrait pas être plus malaisé qu’actuellement de formater ceux dont de beaux esprits nous disent qu’ils sont capables de déceler d’un seul coup de langue, les yeux fermés, la typicité d’un Pouilly Fuissé. Mes amis du CAC de l’INAO devraient trouver là du grain à moudre.  Certains n’objecteront que le terroir de référence de Gnazio Manisco, du côté de Vigàta, en Sicile, même si l’on y produit du vin et de l’huile d’olive, ne peut être un modèle pour l’inégalable TERROIR de la France du vin. Je serais tout prêt à en convenir le jour où les défenseurs de la typicité m’auront démontré la pertinence de leur bouzin. D’autres, les « naturistes » vont m’accuser de mettre en danger la santé des dégustateurs en leur faisant laper des trucs pas très chrétiens épandus sur le dit terroir. Là, comme je suis un coquin, je me dis que ce serait peut-être un bon moyen pour revenir à des pratiques un peu plus respectueuses du dit Terroir.


Bon, j’arrête de décoconner mais avouez, chers lecteurs, que ce serait un beau et magnifique spectacle que de voir, en plein cagnard, sur les coteaux, des experts des commissions de l’INAO se baisser pour prendre une pincée de terroir, de le goûter, de prendre des notes sur un petit carnet prévu à cet effet par l’ODG, puis s’envoyer une gorgée de vin pour de rincer le palais. 


D’ailleurs, comme je suis malicieux, il serait peut-être judicieux de coupler les 2 dégustations. À mon avis les résultats de la première en seraient sûrement améliorés. Le seul souci, afin d’éviter de tomber en fin de journée sous les foudres de la maréchaussée, serait de ramener en autocar à leur hôtel nos dégustateurs de terroir. Un truc que les ODG devraient pouvoir facilement organiser, ça occuperait le directeur.


Enfin, imaginez combien de sommes, d’articles, de guides pourraient être écrits sur les dégustations comparatives entre les différents terroirs ; de Pomerol et de Lalande-de-Pomerol par exemple.


L'idée est lancée à tous les vents. Que deviendra-t-elle ? Je ne sais. Peut-être me vaudra-t-elle d'entrer dans l'Histoire de nos beaux terroirs au même titre que Capus ? Où, ironie à la française, face au dédain de mes pairs les barbares du Nouveau Monde vont se précipiter sur elle pour nous refaire le coup du jugement de Paris. Bref, j'attends avec impatience l'interview de la RVF, la reconnaissance éternelle des vignerons de Sève, une note en bas de page dans le prochain livre du Professeur, un article pour moi tout seul dans le Spécial Vins 2010 du POINT, une place de PQ au Comité National Vins&Eaux-de-vie de l'INAO, Q...
La Gloire enfin !

à bientôt sur mes lignes... 


Vocabulaire sicilien puisé dans le dernier bijou d’Andrea Camilleri : Marruza Musumeci chez Fayard dont je vous causerai un de ces 4 et, bien sûr, Gnazio Manisco en est le principal protagoniste.

Detrancaner : ne plus avoir toute sa tête

Contracer : contrarier

Décoconner : déconner

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9 septembre 2009 3 09 /09 /septembre /2009 13:36

 Tchoo, qui est un fin connaisseur du microcosme bordelais, à raison, les prix canons des Bordeaux proposés par la GD en ces foires aux vins « d’automne » ne sont pas forcément synonymes de « daube » mais reflètent plutôt l’état de désarroi de la viticulture girondine qui est en train de découvrir, à l’instar du Grand Sud, les « collectifs ». Désolé Emmanuel, je ne vais pas monter en ligne pour les viticulteurs qui s’organisent du côté de Castillon-la-Bataille http://francois.caussin.free.fr/cdvia/ , non que je me désintéressasse de leur sort mais parce que, comme je l’ai expliqué hier, je ne suis plus preneur de ces combats où je n’ai que des coups à prendre. D’ailleurs, où étaient-ils au temps où je montais en première ligne ? S’ils veulent s’exprimer, expliquer le pourquoi de leur action, ma porte est ouverte.

Donc, comme le montre le bandeau ci-dessous, la course au moins cher du moins cher est ouverte : un Bordeaux 2007 Château Roulière du Closet à 2,20 euros accompagné dans le peloton d’un Bordeaux 2005 Château Portillon, médaille de bronze au concours général de Paris 2006, à 2,90 euros ; d’un Bordeaux 2006 Château de Reguignon, médaille d’or au concours de Bordeaux 2007  à 3,50 euros ; d’un Bordeaux 2008 château Joumes-Fillon à 3,80 euros ; d’un Bordeaux 2005, château Tour Chapoux, médaille d’or au concours de Bordeaux 2007, à 4,70 euros. Vive les petits châteaux ! Et dire que le Mouton-Cadet chalute entre 7 et 10 euros (le Professeur face à un tel crime au bon goût est dans tous ses états).


Bref, avant d’aller tirer des bords en compagnie des barracudas et des sars – qui ne dînent pas à l’huile, désolé ! – je me devais de vous livrer cette chaude actualité accompagnée, non d’une bouteille « gratuite » - j'adore ce concept qui permet d'afficher un prix de la bouteille qui n'est pas le bon, mais les français ne doivent plus savoir faire des divisions -, mais d’un petit cadeau de Cabu. J'ai un faible pour Jean-Louis Borloo, sans aucun doute le seul Ministre de la Ve République qui aurait endossé avec bonheur le costume de Ministre des Vignerons...

 

À bientôt sur mes lignes...

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9 septembre 2009 3 09 /09 /septembre /2009 00:06

 

Avant d'entamer cette chronique je vous dois une explication sur mon "exil". Ce n'est ni une démission - je ne suis guère chevènementiste - ni un faux-départ pour que le choeur de mes amis me retienne, non ce  n'est qu'un retrait de tout ce qui rime avec ce qui a fait mes riches heures de ces dix dernières années. Pour tout vous avouer j'en ai un peu marre que certains me disent face à la situation actuelle que j'avais raison et plus encore, ça me gonfle que quelques fausses gloires ramènent leur science sur cette même situation alors qu'elles sont, depuis toujours, en dehors de la plaque.
Je continue donc mes chroniques mais je ne m'échaufferai plus les sangs sur les débats redondants des spécialistes du sur-place ou de l'adoration des vieilles lunes.
Ce blog est né de ma placardisation liée à ma liberté de pensée. Je garde celle-ci pleine et entière mais je l'exercerai à bon escient sans me précipiter tête baissée dans les combats perdus d'avance. Je le regrette un peu mais qui puis-je ? Plus grand chose, alors ce n'est pas de la résignation mais du réalisme. Allez, passons aux choses sérieuses...


Pour les grands amateurs, les lecteurs du POINT par exemple, foire aux vins rime avec GCC de Bordeaux « dont les prix s’étaient affolés depuis le millésime 2005, chutent. Gentiment pour certains : essentiellement ceux qui n’avaient pas trop augmenté. Brutalement chez d’autres : ceux dont le prix ne correspondaient pas vraiment à la réalité du marché dans la durée... ». Permettez-moi un commentaire : Dieu qu’il est facile de se référer à la réalité du marché à postériori. Donc tout pour Bordeaux dans la GD et, comme le fait remarquer avec pertinence Jacques Dupont « pour les crus et les cuvées rares du Rhône, de Bourgogne, de Loire ou du Languedoc, passez chez votre caviste. » ou à Monoprix
http://www.berthomeau.com/article-35644400.html

Pour moi, qui prend un malin plaisir à ne rien faire comme tout le monde, je délaisse ce matin les offres du « génial » inventeur des foires aux vins (dixit Leclerc soi-même), du Mammouth endormi et autres grandes surfaces pour me replier sur les modestes magasins SPAR et leur logo gentiment désuet : son petit sapin roi des forêts. Oui je sais, les analystes patentés de la GD vont m’objecter que le réseau SPAR  « avec 16 000 points de vente dans 30 pays sur les 5 continents, SPAR est le leader mondial du commerce de proximité. Premier réseau de franchise français d'alimentation générale de proximité. » et qu’il est en France adossé au Groupe Casino (pour l’intendance voir www.spar.fr )

D’accord mais leur slogan « Faites le plein chez votre voisin » va comme un gant à la notion de « foire aux vins » et, cerise sur le gâteau, c’est en Corse que la branche supermarché y est la plus fournie. En plus, je l’avoue sans fausse honte, leur offre amène de l’eau à mon moulin sur la réalité du marché du vin de monsieur&madame tout le monde dans notre belle patrie du vin que le Monde nous envie. Ça vole bas au ras de l’euro. C’est vraiment du rase moquette loin des folies bordelaises même si elles dévissent. Mais nos grands commentateurs de foires aux vins ne s'intéressent guère au panier de la ménagère.

 

Ici sur les 23 Bordeaux (sur 67 vins présentés) :

-          5 sont dans la fourchette : 2,5/3,5 euros

-          4 sont dans la fourchette : 3,5/4,5 euros

-          4 sont dans la fourchette : 4,5/6,50 euros

-          4 sont dans la fourchette : 6,50/9,50 euros

-          7 sont à plus de 9,90 euros

1 coup de cœur au ras du prix d’appel : 2,95 pour un Bordeaux rouge 2007 château Tour de Baillou

1 coup de cœur à 6,95 euros pour un St Emilion Château Petit Sicard 2007

1 coup de cœur à 9,80 euros pour un St Estèphe Château Laffitte-Carcasset 2006

A noter que l’offre Bordeaux couvre tout  le spectre des prix de cette mini foire aux vins de 2,50 euros pour un Bordeaux 2007 château Perreau à un St Julien 2007 à 12,50 euros.

Du côté des blancs : l’Entre-deux-Mers 2007 château Bellevue  Chollet est à 3,10 euros et 2  liquoreux : 1 Ste Croix-du-Mont château Le Pin Sacriste 2007 à 5,95 euros et un Sauternes château Grand Mayne 2004 à 8,50 euros.

Toutes les offres Bordeaux sont des châteaux le slogan du CIVB est donc pertinent...


Du côté de la LOIRE les 8 vins proposés sont au-dessous de 4,50 euros

2 coups de cœur : 1 Saumur-Champigny 2007 Domaine des Closiers à 4,25 euros et 1 Muscadt Sèvre&Maine sur lie L’Aubinière à 3,50 euros.

1Rosé d’Anjou 2008 Domaine des Trahan à 2,95 euros et 1 Cabernet d’Anjou 2008 Tonnerre des Vignes 3,25 euros.

 

Bourgogne-Beaujolais 11 vins (dont 3 blancs) se situe dans l’axe médian de l’offre 4,50/7,50 euros.

Sauf pour le coup de cœur en rouge 1 beaujolais-Villages château de Lacarelle 2007 à 3,90 euros

En blanc, le coup de cœur 1 Chablis Lucienne Michel Tasteviné 2007 à 7,50 euros

Outre le coup de cœur le beaujolais est aussi représenté par 1 Morgon Les Charmes 2007 médaille d’or au concours de Macon à 5,30 euros

1 Bourgogne Blanc 2007 est étiqueté Chardonnay (ça ne va pas faire plaisir au Professeur) Vignoble Eypert 4,95 euros.

 

La Vallée du Rhône avec ses 11 vins est très présente sous la barre des 4,50 euros : 6 vins, puis elle couvre ensuite la plage 5,50 à 8,50 euros et décroche la timbale du vin le plus cher de l’offre : 13,95 euros pour un Chateauneuf-du-Pape 2005 Les Closiers.

1 coup de cœur Côtes du Rhône 2007 Domaine La Couquihado à 3,25 euros

1 coup de cœur Gigondas 2006 château la Bégude 6,90 euros

1 Côtes du Rhône 2008 prix d’appel à 2,50 euros Le Bois du Roy

1 Tavel 2008 Le Petit Péché à 5,60 euros.   

 

Provence Corse la portion congrue 3 vins mais avec un beau prix (au sens producteur j’entends) sauf pour le Côtes de Provence

1 coup de cœur Bandol rouge Domaine du Colombier 2006 à 7,50 euros

1 Côtes de Provence rosé 2008 Domaine de Pontfract à 3,60 euros

1 Porto-Vecchio Domaine de Torracia 2007 AB à 7,50 euros

 

Languedoc-Roussillon : la bérézina 2 vins

1 Corbières 2007 Château Les Ollieux à un prix canon 2,90 euros

1 Picpoul de Pinet 2008 Domaine Félines à 3,20 euros

 

Le Sud-Ouest : au bas du bas : 5 vins dont 4 dans la fourchette 2,50/3,50 euros

1 coup de cœur Cahors Rigal 2006 à 2,95 euros

1 Jurançon blanc doux Le Bon Roy Henry 2006 6,50 euros

 

L’Alsace : au-dessous du niveau de la mer 4 vins dont 3 tournent autour de 3,10 euros et 3,80 euros.

1 coup de cœur Riesling Edouard Leiber 2008 à 3,80 euros

1 Gewurztraminer 2008 Clos Sainte Odile à 5,25 euros

 

Voilà une image de l’offre française : rien que des AOC... Que faire Professeur ? Des vins de cépages !

34 vins à moins de 4,50 euros

15 vins entre 4,50 et 6,50 euros

10 vins entre 6,50 et 8,50 euros

8 tournants autour de 10 à 14 euros.

à propos de "foires aux vins" et de "Spécial Vins", celui de l'Express dans sa pochette-surprise en cellophane à 9,90 euros, prix de marchand de chaussures, un peu chéros ne trouvez-vous pas ? A ce prix-là le Barbier de l'Express pourrait nous offrir une boutanche de la foire aux vins de SPAR... Désolé ! Moi je n'ai pas acheté, trop cher !



à demain sur mes lignes... 

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8 septembre 2009 2 08 /09 /septembre /2009 00:09

Chers compatriotes,

 

Ma décision est prise : je pars !

Je quitte sans regret notre mère patrie qui, comme le Monde entier le sait, est la « patrie du vin ».

Je suis donc dorénavant un « exilé ».

Rassurez-vous je ne serai point un exilé fiscal car je continuerai de résider dans mon 9ième étage du 14ième arrondissement de Paris. Mon départ s’apparentera donc à une forme originale d’extraterritorialité : j’ai fait mon deuil des dix dernières années passées à seriner les mêmes âneries – sous ma plume d’amoureux des ânes c’est un péché d’orgueil – et je laisse aux esprits brillants, notre belle patrie du vin en porte de nombreux, le soin de vous abreuver de leurs hautes pensées sur l’avenir de notre secteur d’activité.

À l’âge de 10 ans, un matin devant mon bol de chocolat Poulain, j’ai déclaré à ma mère, qui rêvait que je sois curé, « maman je veux être journaliste ». La sainte femme m’a répondu « ce n’est pas un métier... » ; à 18 ans, en dansant un slow dans un bal de campagne, j’ai déclaré, toujours modeste, à celle qui allait devenir ma 1ière épouse, et qui s’inquiétait de mon avenir, « je serai Ministre » ; à 21 ans, avant d’entamer ma thèse de Doctorat, avec Yves Prats, le doyen de la Fac frère de Bruno, je lui faisais part de mon envie de devenir Professeur de Droit, sa réponse, fort pertinente, « vous allez vous ennuyer... » a fixé mon destin professionnel.

Maman avait tort, c’est d’être Ministre qui n’est pas un métier. Quand à être journaliste, à ma façon, avec Vin&Cie je suis revenu à mes premières amours. Pour ce qui est d’être professeur, avec un grand P, je l’ai fait 3 ans durant comme Professeur associé, à mi-temps, de l’Université de Nantes, et je me dis que si j’avais embrassé cette brillante sinécure, pour tromper l’ennui, j’aurais eu tout le temps d’écrire des livres.

Digressions pour aller à l’essentiel : pourquoi pars-je ?

Naturellement, sans regret, j’étais mûr et, avant d’être blet, couper le cordon s’imposait. Depuis quelques temps, comme je suis tombé tout petit dans la marmite de la chose publique, l’état de la maison rose m’attristait. Quel piteux spectacle ! Mais, philosophe, je me disais qu’il valait mieux en rire qu’en pleurer. Et puis, boum bada boum, la « Bécassine du Poitou-Charentes » a encore frappé. J’étais vert. Étrange état pour un type qui se dit mûr me direz-vous. En apparence oui mais très vite le coup de grâce est venu de là où je ne l’attendais point. D’un coup de POINT dans le plexus solaire qui m’a couvert le front d’une sainte colère. J’étais rouge. Et puis, je me suis rasséréné. À quoi bon ferrailler contre les bastilles, les chapelles, les fonds de commerce, les poses en tout genre. Sois un papy-boomer apaisé me suis-je dit.

Qu’avais-je lu ?

Je cite  « si on avait autorisé le mélange blanc-rouge, sans doute que nombre de producteurs de vrai rosé de Provence auraient du cesser leur activité et vendre en terrain à bâtir leur vignoble, contribuant ainsi au bétonnage systématique de la région. »

Royal ce texte, beau à l’image de ce on venu de nulle part, forme moderne de la main invisible, manipulatrice, semant sur son passage de la désolation et du béton. Presque du Perico ou du Chiquelin, j’en étais tout « affané ». J’en avais la « gargagnole nouée » et je me retenais de « chougner comme un veau. »

D’accord me direz-vous, pourquoi s’alarmer de ce brossage appuyé dans le sens du poil des organisations professionnelles, vous en avez vu d’autres « camarade », en pire. J’en conviens et ça ne justifiait pas que je me retirasse sous ma tente. C’est la suite qui m’a totalement escagassé.
Là, en lisant, je me suis dit mon gars replie tes gaules t’es vraiment pas à la hauteur. Tu barbotes petitement dans le quotidien. Tu patauges grave dans la réalité. Tu n’as pas encore compris que dans la « patrie du vin » pour donner le Cap vaut mieux, soit avoir du nez, soit être un ponte de l’Université. Comme je n'ai pas le bel appendice de l’un, ni la qualité de l’autre et que je n’ai même pas été capable d’être Ministre – c’est tout dire – je me suis dit à moi-même, à l’image de l’affreux Jojo à sa Liliane en 1977, du côté de Sainte-Lucie-de-Moriani, sur la Plaine Orientale, « Jacques fais les valises... ».

Qu’avais-je donc lu qui me mît dans un tel état ?

Rien de transcendant mais simplement le quotidien de ce que j’entends depuis 10 ans dans la bouche des adeptes des postures gauloises.

 

Question : « [...] les remèdes récemment proposés allaient dans l’autre sens (pour le poseur de question depuis la nuit des temps la puissance publique a toujours cherché à améliorer la qualité), « vin passe-partout » normalisé, industrialisé. La réussite du vin en France est majoritairement celle des artisans et des PME, est-ce que cela dérange ? »

 

Réponse : « La qualité de tous les vins de France de tous les vins de France et du monde s’est incontestablement améliorée grâce aux progrès de la viticulture et de l’œnologie, mais l’existence de nouveaux marchés encore assez peu connaisseurs et en forte croissance a entraîné le développement de vins technologiques sans défaut majeur, mais sans grâce. Certains négociants français ou étrangers mettent en vente des vins d’origine qui, du fait des assemblages multiples, sont dépourvus de complexité et, ce qui est le comble, d’ «originalité». Je ne comprends pas l’intérêt de la nouvelle appellation « vin de pays vignobles de France ». Laissons cela aux pays où, la terre et la main d’œuvre ne coûte rien, où l’irrigation est autorisée. Il y a de plus en plus d’amateurs éclairés dans le monde. Ceux-ci ne se satisfont pas des vins de cépage passe-partout. Ils veulent des vins nuancés, qui les conduisent à l’émotion. Efforçons-nous de les satisfaire, selon nos traditions toujours renouvelées. La segmentation du marché est bien plus rentable que la recherche des économies d’échelle. »

 

J’adore le « laissons cela aux pays... » ça sonne comme un ne nous commettons pas nous, Français, à l’élaboration de ces breuvages pour « non connaisseurs », les « pouffes » de Birmingham ex-buveuses de bière ou les jeunes accros de Coca virant au rosé light par exemple. Notre génie, qui seul sait faire dans la nuance, qui seul est capable de procurer de l’émotion aux amateurs éclairés, ne peut s’abaisser à de telles pratiques réservées aux Barbares qui font pisser la vigne à grand coup de flotte en bottant le cul à ceux qui la cultivent en guise de salaire. Qu’est-ce qu’on en a à péter de tous ces ignares aux palais grossiers ? Rien ! Mais là je m’échauffe pour rien. La messe est dite. Je m’occupe de mes vaches.

 

Cependant, avant de boucler mes valises, je me suis permis d’écrire 4 lettres que j’ai jetées, dans une bouteille bien sûr, à la mer :

-          la première, commune à Joseph Helfrich&Pierre Castel  qui, en substance, les exhorte à faire cesser le scandale de leurs assemblages « indignes » : « puisque maintenant la Marianne Fisher Böhl, vient de vous accorder le droit d’accoler le millésime et le cépage aux vins sans Indication Géographique – ce qu’une bande de « fossoyeurs » du vin à la française avaient proposé de réserver aux vins des Vignobles de France – j’espère que, pour faire plaisir au Professeur, vous allez emplir, votre JP Chenet pour l’un, et votre La Roche-Mazet pour l’autre, de vins venus d’ailleurs que de notre Grand Sud. Délocalisons ces breuvages sans qualité que diable ! 

-          la seconde à Dominique Granier, Président de la Safer Languedoc-Roussillon, viticulteur dans le Gard : « Cher Dominique,  dis-moi, pour faire plaisir au Professeur combien d’hectares va-t-il falloir arracher ? Puis, une fois l’opération faites, combien vaudra l’ex-terre viticole devenue de la friche ? Enfin, comme tu es Gardois, les bornes de la Compagnie du Bas-Rhône pourraient-elles aussi servir à faire de l’irrigation raisonnée des vignes sans Indication Géographique ?

-          la troisième à celles et ceux qui, comme moi, s’interrogent sur l’opportunité d’abandonner, pour le grand pays généraliste du vin que nous sommes et que nous avons toujours été, « à ces pays lointains qui... », ces vins dit technologiques, alors que nous sommes au cœur du plus grand marché de consommation ? Même si le petisme nous va bien au teint pourquoi diable la maison Pernod-Ricard ne sourcerait-elle pas des vins dans notre beau pays du vin ?

-          la quatrième à Louis Gallois, président d’EADS, à propos de la célèbre antienne entonnée aussi par le Professeur sur l’équivalent  de 130 Airbus pour l’export de nos vins et spiritueux. En effet, puisque, hormis les GCC de Bordeaux et la fine fleur de Bourgogne, de Châteauneuf et autres bijoux, le gros du solde positif depuis 25 ans est le fait du Cognac, du Champagne (des PME telles que LVMH, Pernod-Ricard, Rémy-Cointreau...), merci de me dire combien de Tonnes de raisins/hectare sont nécessaire dans ces prestigieuses appellations pour « élaborer » un Airbus A320 ? De plus, comme vous êtes Polytechnicien, vous seriez gentil de m’indiquer s’il y a plus d’emplois dans une bouteille de JP Chenet que dans une bouteille de GCC ? Enfin, si ce n’est pas trop abuser de votre tête bien faite de mathématicien, pourriez-vous expliquer une bonne fois à ceux qui confondent vente de bouteilles avec exportation de millions de cols, ce qu’est la loi des grands nombres et ses conséquences sur l’activité économique d’un secteur ?

 Voilà, tout est dit.

Ma philosophie reste celle de mes origines à l’image du frère Henri Bécot, mon professeur d’histoire et de viticulture qui se préoccupait bien plus du bonheur des vignerons occasionnels qu’étaient les laboureurs vendéens que des mondanités du vin http://www.berthomeau.com/article-34022380.html

Pour le présent, je m’en tiens à ce que dit mieux que moi François de Ligneris : «Sur la carte routière du vin, il y aura des autoroutes et des départementales. Pourvu que je puisse toujours rouler sur les chemins de traverse, les autoroutes ne me dérangent absolument pas.» http://www.berthomeau.com/article-34516165.html.   

Fini le temps où je dégainais sans sommation mon Uzzi pour arroser illico tous ceux qui brocardaient Cap 2010. Dorénavant, depuis mon exil doré, en compagnie de mes vaches, de mes cochons, de mes couvées, je laisserai la main à tous ceux qui, semblables à ces sportifs en salle fainsant du jogging sur des tapis roulants en devisant avec leurs voisins des sujets de l’air du temps, nous confortent dans notre goût immodéré pour le sur-place.

Au temps où je tenais la plume d’Henri Nallet, je luis avais fait dire, suite aux accords de Dublin, dans une interview au Midi-Libre : « je ne serai pas le syndic de faillite de la viticulture méridionale... » ça avait un très beau titre, de belles reprises dans les médias et, cerise sur le gâteau, l’Histoire lui a donné raison. Je forme des vœux pour que les promoteurs d’une « viticulture chic » digne de notre génie français relèvent le même défi.

Cependant je préviens que si les susdits, en se référant à ma vision d’une viticulture diversifiée, et non une fantasmée, me versent dans la catégorie des stipendiés du « vin industriel » alors je tire à vue, sans sommation, avec des mots assassins bien sûr. Mes 1400 chroniques au compteur, la barre des 400 000 visiteurs passée vendredi dernier, tous les combats que je mène sur mon petit espace de liberté devraient, du moins je l’espère, les inciter à ne pas en arriver à une telle extrémité. Que je me lançasse des fleurs afin de m’éviter que l’on me couvrît d’opprobre est de bonne guerre, si tant est qu’il existât des guerres bonnes. Les nôtres, qu’elles fussent en dentelles ou en sabots, sont stériles : « de quoi vivrons-nous demain si nous laissons filer les métiers les plus humbles ? » Allez-donc, cher confrère et cher collègue, faire un tour du côté d’Embres&Castelmaure, c’est tout au bout d’une départementale dans le fin fond des Corbières... Pour sûr que vous aurez « la chance de boire du bon vin »

Bon, il est temps que je mette un POINT final à ma missive. Pour ceux d’entre vous qui souhaiteraient mettre des visages sur mes propos alambiqués je leur conseille de se rendre à la page 134 du POINT Spécial Vins.  

En conclusion, permettez-moi de vous livrer la chute de l’histoire du pou et de Noé, que conte Andréa Camilleri dans l’un de ses derniers bijoux. « Et savez-vous, braves gens, pourquoi Dieu le Père avait oublié d’avertir les poux ? Parce que les poux, c’est comme les peineux, même Dieu oublie qu’ils existent. » Ceci écrit, le couple de poux l’avait appris quand même et se retrouva sur la tête de Noé... Que voulez-vous, c’est ainsi, les peineux ça s’accroche partout, reste plus que la Marie Rose pour s’en débarrasser, mais je ne vais repasser les plats sur le feuilleton du rosé...

Au fait, certains vont me faire remarquer : « qu’est-ce que ça change que je me sois exilé ? » Tout, et rien, ce doit-être sans aucun doute le syndrome insulaire, comme le besoin de faire la nique aux juges aux élégances qui, du haut de leur Olympe, ignorent les métiers de viticulteurs et de négociants dans leur énumération des métiers d’avenir... Ce sont pourtant les deux extrémités de la chaîne... Les premiers sont forts nombreux, les seconds exportent des Airbus A320...

Bien à vous.

Un exilé en peau de lapin.

 

PS. Je signale que j’ai beaucoup d’amitié pour l’un et une réelle admiration pour l’érudition et l’éclectisme de l’autre, pour preuve j’achète ses livres, mais « sans la liberté de blâmer il n’y a pas d’éloge flatteur... »



 

Pour ceux que ça intéresse en Wine News N°61 Yves mon« marchand de vins » n’est pas en cale sèche, il entend vous faire accéder à la suite de votre approvisionnement en carburant. Nous continuons sur les ROUGES de ses coups de cœurs de la Foire aux Vins de Monoprix. Comme ça va sans dire mais c’est mieux en le disant la maison Monoprix ne me fait aucune réduction quand je passe à la caisse rue Daviel. Je suis un client, indépendant...

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