Chez moi, à la Mothe-Achard, où la foire mensuelle aux bestiaux attirait des acheteurs qui venaient de fort loin, un dicton affirmait « ça durera autant que les foires de Mothe »... les wagons à bestiaux partant de la gare de la Mothe-Achard vers La Villette... tout ça c’est fini et la Halle de la Villette, œuvre grandiose du au génie de nos ingénieurs du GR, accueille maintenant des expositions sur les bestiaux...
Mon imaginaire a donc été nourri de ce commerce au cul des vaches, âpre, sans concession, la loi de l’offre et de la demande pure et dure, le déséquilibre parfait entre une poignée d’acheteurs bien informés de l’état du marché et la myriade d’éleveurs jamais sortis de leur métairie. Bref, le marchand de vaches, le maquignon, jouissait d’une réputation sulfureuse mais il faisait parti du paysage.
Mais les foires de Mothe c’était aussi « les marchands de vin » qui participaient, avant, pendant et après, au cérémonial de la vente : le tope là précédant la poignée de gros biftons tirés d’un portefeuille aussi ventru qu’un beauf de Cabu. Bien sûr il y avait les bistrots officiels, avec pignon sur rue, où les marchands de bestiaux se rencognaient les jours où ils voulaient faire mariner le péquenot, mais sur toutes les voies menant au foirail une multitude de « marchands de vin » qui régalaient moyennant finances les gosiers asséchés ou déjà bien imbibés. Les archives locales en dénombraient de 70 à 80 pour un patelin d’un millier d’habitants...
Bref, même si vu mes origines ma crédibilité auprès des « sanitairement correct » atteint plus encore les abimes, vous comprenez maintenant pourquoi pour passer au crible cette nouvelle engeance que sont les foires aux vins j’ai demandé l’avis d’Yves le « marchand de vin ». Ce garçon, observateur engagé certes ( il achète du vin en bouteille pour que d’autres le boivent dans des verres – au goulot ça ne se fait plus beaucoup –) mais bien meilleur jaugeur qu’un gougnafier dans mon genre pour vous guider dans la profonde forêt de Sherwood de la foire aux vins d’un parisien qui fait des virées dans son Monoprix près de chez lui.
Comme les foires aux vins sont « atrocement » bordelaises Yves le marchand de vins commence par le Grand Sud et c’est du ROUGE !
1 - LANGUEDOC H&B ISSU DE L’AGRICULTURE BIOLOGIQUE 2007 5,90 €
Hecht & Bannier, le petit duo qui monte qui monte… Deux amoureux du vin qui ont tout compris de ce fabuleux eldorado que reste le Languedoc Roussillon. Le modernisme de l’étiquette est le juste reflet du vin, net, précis, « classe ». Déjà une bouteille étonnamment accessible en soi, qui a d’ailleurs dignement arrosé le mariage d’un très bon ami, ce qui vaut tous les Jurys.
2- COTEAUX DU LANGUEDOC LES CHEMINS DE CARABOTE 2005 8,90 €
Journaliste de formation, Jean-Yves Chaperon est vigneron par vocation et ne laisse rien au hasard dans la création de ce petit domaine situé sur le terroir d’Aniane, un nom qui parlera aux amateurs… Toutefois, si le monsieur est aussi précis que discret, son vin, dès le premier millésime, se fait remarquer et parle fort comme un sudiste, avec une palette d’épices complexe qui nous met le nez dans le souk…
3 - SAINT CHINIAN DOMAINE RIMBERT LE MAS AU SCHISTE 2006 8,90 €
Jean-Marie Rimbert est un sacré personnage, et son terroir de Berlou compte parmi les plus beaux du Languedoc. On retrouve évidemment du caractère truculent du vigneron et de la beauté sauvage de ces paysages dans la bouteille : méditerranéen en diable, relevé, épicé et frais, on suce le caillou et on en redemande !
4 - COLLIOURE DOMAINE MADELOC CUVEE SERAL 2006 12,90 €
Il faut se figurer une vue imprenable sur les Pyrénées et la Méditerranée avec des coteaux vertigineux d’une roche brillante où s’accrochent vaillamment des ceps tortueux… Le tout avec les senteurs du maquis, les saveurs de la cuisine catalanes. Une alchimie de caractère, de fraîcheur et de générosité.
5 - COTES DU ROUSSILLON VILLAGES CLOT DE L’OUM SAINT BART VIEILLES VIGNES 2006 14,90 €
Le Clot de l’Oum c’est encore une belle histoire, un couple passionné et attachant amoureux du vin, sur un terroir exceptionnel, dont le premier vin, « La Compagnie des Papillons », est déjà un joli vin amplement débattu sur la blogosphère notamment. Par rapport à la Compagnie, on monte d’un cran avec cette cuvée basée sur les très vieux Carignan de la Chapelle Saint Barthélemy, perchée sur une colline de gneiss à 600 mètres d’altitude. Tendu, puissant, minéral : ce vin a du souffle et une longue vie devant lui.
6 - BANDOL 2007 CHATEAU VANNIERES 18,90 €
Presque toujours sur le podium de cette appellation, le Château Vannières n’a pas manqué le rendez-vous du grand millésime (car si 2007 est compliqué chez les bordelais et les bourguignons, il navigue entre l’excellent et le grandiose dans le Sud !). D’où les parfums d’épices, d’eucalyptus, de fruits noirs confits… Normal qu’il sente aussi la poudre à canon (et le jus de viande ?) : c’est explosif. A dégoupiller dans 10 ans, pas moins.
Ensuite notre Yves marchand de vin qu'a pas sa langue dans sa poche remonte la vallée du Rhône toujours en ROUGE
7 - COTES DU RHONE DOMAINE DU GRAND CLOS 2008 2,90 €
Superbe fruit, encore du bel ouvrage de Dauvergne & Ranvier, un rapport qualité prix toujours aussi imparable, et quelle leçon pour tous les contempteurs du millésime 2008 en vallée du Rhône !
8 - VISAN LE DEVES OLIVIER CUILLERAS LA GUINTAUDRY 2007 4,90 €
Olive, thym, laurier, de la fraîcheur dans son côté méditerranéen, mais ça renarde un peu aussi, une forme de violence provoquée par la « réduction » : pour ceux qui n’ont pas peur de la bête et savent la dompter carafe à la main.
9 - COTES DU RHONE DOMAINE DES CARABINIERS 2007 5,50 €
Ça envoie du lourd !!! Profondeur, fougue, arômes de fruits noirs avec des accents sauvages, un caractère hors normes, à servir sur les mets relevés, plats en sauce, ou à garder quelques années. Un courageux vigneron Bio, Christian Leperchois, suivi par le duo œnophile / œnologue Dauvergne & Ranvier, et voilà le travail !
10 - CAIRANNE PERRIN PEYRE BLANCHE 2007 8,50 €
Typiquement gourmand, un ravissement pour les gourmets ! Encore une réussite de l’exemplaire famille Perrin. L’archétype de ce que les Côtes du Rhône de ce secteur peuvent donner de mieux en générosité de fruit, en finesse et en souplesse. Un défi à la modération !
11- GIGONDAS DAUVERGNE ET RANVIER VIN RARE 2007 10,90 €
Dans cette AOC, va falloir se lever tôt pour trouver un meilleur rapport prix plaisir ! On n’en attendait pas moins de ce duo à vrai dire, qui maîtrise d’autant mieux le Gigondas avec des approvisionnements sur les terroirs les plus frais de l’appellation, ce qui permet cette netteté de fruit sur une structure tannique imposante, avec une pointe de minéralité.
12 - CROZES HERMITAGE DOMAINE DES ENTREFAUX 2007 11,90 €
Très Syrah, bonbon à la violette, vif, avec de l’allonge, sapide, pour les amoureux du vin qui aiment soigner leur soif avec du rouge, et aussi pour ceux qui ont moins soif, vu que la bestiole tient l’aération d’une manière étonnante (testé sur plus d’une semaine avec succès !)
13 - VACQUEYRAS MONTIRIUS LES GARRIGUES 2007 12,40 €
A ce niveau là (régularité de la cuvée, unanimité dithyrambique de tous ceux qui l’ont dégusté, descente accélérée du gourmand, et rayonnement humain des vignerons) ce n’est plus un coup de cœur, c’est l’amour fou !
14 - COTES DU RHONE COUDOULET DE BEAUCASTEL 2003 13,50 €
Le petit frère du cru le plus fameux de Châteauneuf-du-Pape tient son rang et se confirme en 2003 comme une des meilleures affaires de toute la vallée du Rhône. Que de parfums, de puissance et de délicatesse mêlés… La famille Perrin avait bien fait d’en mettre quelques bouteilles de côté !
Puis notre Yves, Y comme Yvresse, continue sa remontée par le Beaujolais et la Bourgogne ROUGE toujours :
15 - GEORGES DUBOEUF :
MORGON SELECTION 2007 5,70 €
MOULIN A VENT LE CLOS DES MARECHAUX 2005 8,90 €
Papy fait de la résistance ? A l’instar du Beaujolais qu’il connaît mieux que personne et qui lui doit tellement, Georges Duboeuf a une image parfois très loin de sa vérité, lui qui est un sincère passionné, et qui continue à mettre son talent finalement encore méconnu au service du terroir. La preuve par ces deux cuvées : le Morgon facile, éclatant de fruits frais (cerise, prune), à la gouleyance joyeuse ; tout contre le Moulin à Vent puissant, presque animal, tendu, tannique, aux notes de moka et de cade, qui pinote avec virilité.
16 - SANTENAY CLOS DU CHATEAU DE LA CREE 2005 13,50 €
Quelle chance d’avoir ce Clos, du niveau d’un premier cru, par un domaine aussi moderniste techniquement que classique dans ses bouteilles, dans un millésime aussi exceptionnel ! Boisé chic, matière fine et voluptueuse, un Pinot Noir dans toute sa sensualité !
17 - GEVREY CHAMBERTIN « Les Champs Rémy » LA CLOSERIE DES ALISIERS 2007 18,50 €
Y avait de quoi élever de beaux jus en 2007 ! Stéphane Brocard, jeune négociant éleveur issu du chablisien, sait y faire en matière de pureté et de minéralité, jusque dans ce Pinot Noir d’école : à la fois fleuri, cerise et viandé, tout y est. Beaucoup d’élégance.
18 - LADOIX 1ER CRU LES CORVEES DOMAINE CHEVALIER 2005 23,90 €
Laissons la parole à un expert incontestable de la Bourgogne : « Robe pourpre noir, saveur de fruits bien mûrs, texture onctueuse, belle longueur, grand avenir, Ladoix exemplaire » (Michel Bettane)
19 - MOREY ST DENIS 1ER CRU CLOS DES ORMES DOMAINE LIGNIER 2003 29 €
Dès la robe on sent que le vin a su garder de la jeunesse et ne fait pas partie des cuvées qui ont donné à 2003 en Bourgogne la réputation d’un millésime à forte mortalité infantile. Le nez emporte l’adhésion et fait effectivement preuve d’une ouverture assez précoce : un bouquet floral intense de Pinot fin. En bouche, la rose le dispute au pruneau, et on a du mal à le recracher. Vous au moins, vous n’aurez pas à vous donner cette peine.
20 - NUITS ST GEORGES 1ER CRU AUX PERDRIX DOMAINE DES PERDRIX 2000 29,90 €
Arômes évolués et évolutif de marc de café et de lard grillé, c’est à point, c’est prestigieux, et c’est outrageusement pas cher compte tenu de ces qualités : une aubaine pour les amateurs.
Arrivé au chiffre Vingt je dis à ce cher Yves mon marchand de vins et si, pour la minute, nous en restions-là pour que nos buveurs amateurs s’ils veulent continuer de se balader au long du fil paresseux de la Loire, descendre à Bordeaux et faire un petit détour dans le Sud-Ouest, va falloir nous le demander. Qui plus est, en prime, mon éminent « marchand de vins » vous fera bénéficier de sa science des BLANCS... Donc ça ne tient qu’à vous ; à vos claviers ; commentez ! Demandez ! Vous aurez tout ce vous voudrez : gratos, pas les vins, les mots...
A suivre peut-être...