L’annonce faite par Gotti – je sais, c’est facile – « Vins naturels : il est grand temps que la bulle éclate »link me fait me gondoler grave car de bulle j’en’ avions point vue sauf du côté des prix des GCC de Bordeaux. Mais bon, passons, c’est de saison de casser du sucre – pas celui de betterave ajouté aux moûts de nos grandes appellations – sur les vins nus. « De circonvolutions en justifications, la mode des vins naturels démontre chaque jour que ce concept n’est qu’un rideau de fumée. » Mais alors pourquoi vous z’inquiéter Laurent Gotti, la fumée, même de sarments bourguignons, ça chatouille un peu le nez, ça gratouille un chouïa la gorge, mais ça se dissipe au premier coup de vent et, comme la mode c’est du vent, l’ordre éternel des champs règnera vite à nouveau. Si tout ça ce ne sont que des conneries je ne vois pourquoi vous vous mettez en rogne pour une poignée de minables confettis. Mais, comme le disait le défunt cardinal Marty, avec son timbre rocailleux du Rouergue, autant d’opprobre pour quelques vins « ça m’interroge ».
Pour sûr que les bouteilles ne poussent sur les pieds de vigne – y’a qu’un consultant qui puisse proférer une telle ânerie en se croyant drôle – mais il n’empêche que ce sont des cons dans mon genre qui les achètent. Alors, pourquoi tant de remous dans votre belle bassine bourguignonne qui, comme chacun le sait, ne fait que du bon, de toute façon ce sont les acheteurs qui trancheront. Là, je sens venir une rafale de bobos, de petits cons et connes qui n’y connaissent rien, pour contrer ma bonne humeur. Ben oui, le client a toujours raison me disait mon paysan de grand-père. Si tout ça ne fait que du vinaigre, Laurent Gotti, nul besoin de vous échiner à percer avec votre plume acérée des baudruches, en plus vous pourriez vous blesser, puisque par nature les baudruches se dégonflent toutes seules. (figuré) (péjoratif) Personne qui n’a que les apparences des mérites qu’on lui prête et qui se dégonfle aisément.
Bien évidemment, loin de moi l’idée de contester votre droit, puisque vous êtes journaliste, de trouver les naturistes « obscènes » – je plaisante bien sûr car moi je ne suis qu’un modeste chroniqueur qui ne comprends pas grand-chose – mais pourquoi traiter avec autant de hauteur un vigneron de la qualité de Jean-Louis Denoix ? Est-ce parce qu’il n’est que Languedocien et qu’il a, au domaine de l’Aigle, acclimaté du Chardonnay et élevé des vins qui valaient bien ceux de chez vous monsieur Gotti. Sa lettre, que j’ai publiée, a le mérite d’ouvrir le débat ce que vous, je le constate, n’appréciez pas. Serait-ce le monopole de la Bourgogne : là je pousse trop loin le bouchon de l’ironie monsieur Gotti. Quand à votre professionnel émérite, il n’a qu’à changer de fournisseur au lieu de verser des larmes de crocodile. Je puis vous assurer, pour fréquenter les dégustations, ça ne manque pas les vignerons. Mais quand on veut tuer son chien on dit qu’il a la rage. Franchement, tout ça pour ça, pour une poignée de gus et de filles « cultivant une certaine marginalité », ça n’est pas sérieux, c’est disproportionné, genre marteau-pilon pour écraser une mouche. Vous allez m'objecter que les naturistes occupent tout l’espace médiatique. C'est un peu vrai sans doute car la gente blogueuse, et maintenant journalistiqu,e les adule, à quelques exceptions notables cependant. Je comprends que ça vous agace mais, que voulez-vous dans l'univers compassé, un peu chiant, tristouillard des grands amateurs, ils apportent un peu de fraîcheur, je n'ose écrire de naturalilité de peur de me faire enguirlander. Qu’ils soient parfois chiants, même de mauvaise foi aussi, je vous le concède mais pourquoi ne les laissez-vous pas barboter dans leur petite bassine ? Pourquoi vous dérange-t-il autant ? J’ai du mal à comprendre cet excès d’indignité.
Depuis que je bourlingue dans les plis de nos beaux terroirs, pas que viticoles bien sûr, et ça fait un sérieux bail, sans bien sûr posséder de quelconques compétences en quoi que ce soit, j’ai appris à écouter, à entendre, à ne pas me laisser emporter par la passion ou me caler dans les positions en béton des « sachants ». Je doute. Pour autant je ne saute pas comme un cabri face aux minorités agissantes « nature, nature, nature… », je n’adule pas les déviances, mais je me dis que les réactions surdimensionnées de ceux qui se disent porte-parole de la majorité, dites silencieuse, traduisent souvent un malaise, un abcès de fixation et, les abcès, monsieur Gotti il vaut mieux les percer au plus tôt. Voilà un beau sujet de débat en votre belle Bourgogne monsieur Gotti… J’ai le souvenir d’être allé l’an dernier à l’invitation du BIVB assister à un colloque sur les « Les vins à forte personnalité : une première en Bourgogne qui ouvre des perspectives intéressantes. »link et force a été pour moi de constater que les rennes du carrosse étaient tenues fermes par ceux qui savent maintenir le chariot sur le bon chemin.
Ceci écrit, Laurent Gotti, ne prenez pas ça à mal. Si je suis taquin c’est pour la bonne cause : l’extension du domaine du vin et, comme celle-ci prend de multiples chemins pourquoi diable jeter l’anathème sur des gars et des filles qui empruntent un tout petit routin, des chemins de traverse loin des larges voies habituelles. Ça dérange qui au juste ? Le consommateur ? Absolument pas ! Cela jette-t-il un discrédit sur votre belle région, sur les « vrais » et « bons » vignerons ? Je ne le pense pas. D’ailleurs, pour la plupart, ils font du Vin de France et, ce n’est pas un débat sémantique sur la naturalité qui permettra de trier entre le bon grain et l’ivraie. C’est si Français de se chamailler pour rien ou pas grand-chose. Laissez donc faire, si ces vins que vous vouez aux gémonies ne sont que des imposteurs ils feront long feu.
Après cet écrit Laurent Gotti peut-être me traiterez-vous de gobe-mouches ?
« Le gobe-mouches avale tout, fruits, textes et commentaires. Il rend tout cela en idées, si l’on peut ainsi dire ; et comme je puis savoir, en ouvrant l’estomac d’un oiseau, quelles choses comestibles il a rencontrées, ainsi le discours du gobe-mouches montre des débris encore discernables des vérités qu’il a rencontrées en son vol de gobe-mouches, bec ouvert, sans choix. Je dis vérités, car tout est vrai, oui, même l’écrit d’un fou, car il est vrai qu’il l’a écrit ; et les sottises elles-mêmes forment une part de l’opinion, qui est considérable. »
Alain, Propos.
C'est François Desperriers qui va être content