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7 juillet 2017 5 07 /07 /juillet /2017 06:00
Ingrid Astier fait passer ses truands à Table chez Bruno Verjus pour mieux les cuisiner : haute voltige…

Se mettre à table, dans le jargon poulaga c’est, pour le suspect cuisiné par les flics, avouer, manger le morceau. Cette expression serait tirée d'une pratique policière douteuse, où les suspects étaient privés de repas jusqu'à ce qu'ils passent aux aveux.

 

Les jours où je déjeune chez Table, l’antre de Bruno Verjus, je stationne à l’à pic du bar et très souvent le chef vient un instant me tenir compagnie. Ça fait partie de ma conception de la fonction d’un restaurant : cultiver la convivialité.

 

Lors de mon dernier passage j’étais chargé d’une moisson de livres, dont un polar. Bruno, dans la conversation, me glissa « Tu devrais lire Haute Voltige de mon amie Ingrid Astier ! » Alors, halte à la librairie Gallimard et le pavé tombait dans ma besace 600 pages.

 

 

Sur la péniche l’Eendracht, amarrée à un quai de Seine, on y accède par le cours de la Reine et en surplomb s’étend le Grand Palais. En face, sur l’autre rive, la gauche, la maison sans fenêtres : l’Assemblée Nationale.

 

« Quand elle (Ylana) dépassa le paravent, elle comprit.

 

C’était insensé.

 

Une table était dressée. Non sur  les déprimantes nappes des hôtels guindés. Mais sur des nappes brodées de minuscules cerises doubles. En fait, une table comme elle n’en avait jamais vu. En fait, un buffet. Des mets s’étageaient, sous des cascades de fleurs. Des anémones blanches à cœur violet, mêlées à des renoncules et des succulentes filaient la parfaite entente avec des coupelles d’œufs de saumon transparents comme des perles de verre. Sous les feuilles d’agave, elle repéra du caviar, du foie gras truffé, et des huîtres différentes le unes des autres. Le K (le propriétaire de la péniche) précisa qu’elles venaient de tous les pays. Des corbeilles de pain cultivaient le même goût de la diversité – mêlées à des pommes  de pin, ce qui ne manquait pas d’humour. Le sol était jonché de roses aux teintes carnées. À droite, un palmier qui n’avait pas l’air de se demander ce qu’il foutait à Paris. Ylana se dirigea vers lui pour vérifier s’il était vrai. Oui, il l’était.

 

Ce mirage aussi était vrai.

 

  • Vous avez du beurre aux algues, là, dit-il en montrant des ardoises, et du beurre au sel fumé. Avec les huîtres, c’est délicieux, vous verrez.
  •  

Elle n’en revenait pas.

 

  • Pour le foie gras, si je puis me permettre, je vous conseille de le prendre comme chez Table de la rue de Prague, avec un peu de poivre de Tasmanie, là, et vous le parsemez de grué de cacao qui est… qui est… ici !

[…]

 

Ylana avait envie de tout goûter. Le K l’initia à ce qu’elle ne connaissait pas. Sur la table, des tranche de jambon jabugo rougeoyaient comme du vitrail au soleil, de la poutargue séchée rosissait, et du comté de grande garde était coupé en feuilles légères, à côté d’un saladier de truffes du Périgord. Les fruits n’étaient pas oubliés : des mangues étaient présentées, chair retournée, en quadrillage découpé, pareilles à des hérissons. Des fruits la passion, fendus en deux, offraient leur cœur juteux. Et des cédrats digitata – un agrume qu’on appelait « Main de Bouddha » à cause de ses longs doigts jaunes – donnaient à la table une touche surréaliste. Ils semblaient dérober des truffes chocolatées à la vanille de Huahine.

 

Au milieu de ce faste, Ylana repéra… non ! Elle n’y croyait pas ! Elle repéra des cornichons malossols, à côté du tarama blanc. Elle avait envie de sautiller, d’embrasser la terre entière et même le propriétaire. Ranko, lui, se faisait discret. Rien de son étonnement ne transparaissait.

 

[…]

  • Je manquerais à tous mes devoirs si je ne proposais pas une coupe de champagne à une jolie femme, dit Aleksandar (dit K) en l’invitant à prendre un verre.

 

À côté du bassin, une bouteille de champagne trônait, escortée non de flutes mais de verres à vin. À cause du ballet des esturgeons, elle venait seulement de la repérer.

 

  • Vous devriez apprécier, reprit-il. C’est du Selosse. La cuvée Substance. Anselme Selosse prétend qu’il y a des bulles carrées, je vous laisserai en juger… Je déteste la boire dans des flutes… Vous aimez le champagne, Ylana ?

 

 

Elle se jeta à son cou et ne regretta pas d’avoir résisté à l’appel de la cigarette quand Astrakan s’en était allumé une.

 

  • C’est la plus belle surprise qu’on m’ait faite de ma vie ! Monsieur K, votre bureau est un conte de fées !

 

  • - Je suis comme Astrakan, Ylana, je n’accepte les contes de fées que s’ils sont à ma portée…  Je n’aime pas rêver de loin. Ce monde compte assez de frustrés…
  •  

Encore fallait-il en avoir les moyens. Ou se les donner.

 

[…]

 

Enfin, elle goûta à son verre de champagne. Dans ses yeux, la volupté irradiait.

 

  • Alors ? s’enquit Aleksandar.

 

  • Alors… c’est tellement incroyable que je crois que je ne boirai plus d’autre champagne de ma vie ! Les bulles sont tellement fines…

 

  • Et presque salines, ajouta le K. C’est d’une grande vivacité. Comme si son énergie ne demandait qu’à être libéré.
  •  

[…]

 

Aleksandar toucha l’épaule d’Ylana et elle frissonna.

 

  • La prochaine fois, je vous fais goûter un Boërl et Kroff 2002 vinifié par Drappier. Rarissime. Un champagne de longue garde.

 

  • Les yeux fermés ! répondit-elle.

 

  • … Bon principe pour goûter, dit-il. Sous de Gaulle et Pompidou, le Boërl et Kroff était le champagne de l’Élysée, vous savez.

 

 

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3 juillet 2017 1 03 /07 /juillet /2017 06:00
À Marseille Mélenchon ne changera pas l’eau en vin mais donnera des banquets couchés où l’on écopera des coupes du nectar divin…

Le Jean-Luc il est partout chez lui, « Je suis légitime partout, spécialement ici : il ne faut pas oublier que la première fois que j'ai mis le pied sur la terre de France, c'était ici. », après une déculottée contre la chèvre de Montretout, au Nord, le voilà qu’il mit cap au Sud pour se faire adouber par les insoumis de Marseille. À bientôt 66 ans, pour enfin réussir sa vie, notre chef des insoumis se devait de triompher, d’être enfin élu député.

 

Non, je n’ironiserai pas sur Marseille, non je n’évoquerai ni les sardines qui bouchent le port, ni la bouillabaisse pour touristes, ni le cochonnet de la pétanque, ni le Ricard, ni le cœur fendu de monsieur Panisse, ni le Gastounet d’Edmonde Charles-Roux, ni le Jean-Claude Go dingue (phonétique bien sûr)…

 

Pour plaire au Jean-Luc, ouvrier de la 25e heure des vins propres, lui qui autrefois, lorsqu’il était cryptocommuniste dans le giron de Tonton, chantait les louanges du productivisme, j’évoque ici, sur cet espace de liberté, la belle exposition Le banquet de Marseille à Rome, plaisirs et jeux de pouvoir, au Musée d’Archéologie méditerranéenne de la cité Phocéenne.

 

 

Sans sombrer dans la galéjade notre guide des insoumis qui ne se marre pas tous les jours, c’est la marque de fabrique des rejetons de Trotsky : ils tirent la gueule ! Ne me dites pas que je suis mauvaise langue, pour les avoir pratiqués tout au long de mon long parcours ils ne transpirent pas la franche gaieté, celle du peuple dont ils se réclament. Ce sont des austères.

 

Allez Jean-Luc sourit tu vas être filmé au cours d’un banquet couché !

 

« Buvons donc, amis, c’est aussi mon sentiment. Le vin, en arrosant les esprits, endort les chagrins, comme la mandragore assoupit les hommes : quant à la joie, il éveille comme l’huile la flamme. »

 

Xénophon, Le Banquet

 

« Croyez-moi en effet, il n’est pas de meilleure vie que lorsque la gaieté règne dans tout le peuple, que les convives dans la salle écoutent le chanteur, assis en rang, les tables devant eux chargées de viandes et de pain, et l’échanson dans le cratère puisant le vin et en versant dans chaque coupe : voilà ce qui me semble être la chose la plus belle. »

 

Homère, L’Odyssée, IX

 

« Bois avec moi, sois jeune,

aime et couronne-toi avec moi.

Avec moi, délire si je délire,

sois sobre si je suis sobre. »

 

Athénée de Naucratis, le Banquet des sages livre XV

 

« Socrate s’assit, et quand lui et les autres convives eurent achevé de souper, on fit des libations, on chanta un hymne en l’honneur du dieu ; et, après toutes les cérémonies ordinaires, on parla de boire. »

 

Platon, Le Banquet

 

Le Banquet Couché

 

 

« Les origines de la position couchée au banquet, et notamment les premières représentations connues du motif, sont à rechercher du côté de l’Orient ancien, vraisemblablement dans le monde syro-araméen et/ou iranien.

 

Cela correspond manifestement à un changement important des habitudes dans le courant du VIIe siècle avant J.-C. ; la Syrie semble avoir joué un rôle majeur dans la diffusion de cette nouvelle coutume, tant vers l’est que vers l’ouest, et en particulier vers Chypre. Cette pratique arrive en Grèce et en Étrurie au tournant des VIIe et VIe siècles avant J.-C., comme l’atteste l’abondante iconographie des vases grecs, et va progressivement se généraliser comme un instrument de pouvoir politico-social. Les banqueteurs sont allongés sur des couches, les klinaï, et appuyés sur le coude gauche ; devant eux sont dressées des tables basses où sont disposés la vaisselle et les mets.

 

Cette posture se justifie par la nécessité de garder la main droite libre pour se servir.

 

Le banquet couché a donc une origine orientale ; il apparaît surtout, à l’origine, comme un privilège réservé aux rois et aux princes. Sa diffusion dans le monde grec semble s’imposer, certes graduellement, mais assez rapidement, et sa signification est multiple : la place des convives – tous des hommes adultes – est régie par des règles précises qui tiennent compte de l’âge, de la charge et d’autres privilèges significatifs. Femmes et enfants sont normalement exclus du banquet, à l’exception des esclaves,  des hétaïres ou des musiciennes.

 

La fonction sociale du banquet est déterminante puisqu’elle sépare les convives, privilégiés, de ceux qui n’y participent pas, établit la notion de communauté autour du vin consommé, et représente le point culminant de l’existence masculine. »

 

Stéphane Abellon

 

Dionysos, le maître du vin

 

« La figure emblématique de Dionysos, complexe et incontournable, ne saurait être négligée ou occultée dans cette exposition : il occupe une place privilégiée dans le banquet, puisque c’est lui qui donna le vin aux hommes, il est aujourd’hui encore un dieu familier, symbolisant les délices et les égarements liés à la consommation du vin, mais également un dieu civilisateur.

 

En effet, s’il a donné la vigne aux hommes, il est aussi celui qui leur a appris le savoir-boire, notamment en mélangeant l’eau au vin afin d’en tempérer les effets. C’est dans ce cadre du symposion que l’on respecte cet usage : Dionysos est ainsi le dispensateur de la convivialité et de l’exaltation produite par le jus du raisin fermenté, « riche en joies » et délices des mortels.

 

« Lorsqu’on fait un repas à Rome dans le temple d’Hercule (celui qui triomphe, sous les auspices requis, faisant les frais du souper), les mets que l’on sert sont vraiment analogues à la voracité d’Hercule. On y verse largement du vin miellé ; le manger consiste en grands pains, en viandes fumées cuites au bouillon, et beaucoup de viandes rôties des victimes qu’on vient d’immoler. »

 

Posidonius, cité par Athénée de Naucratis, Le Banquet des sages, livre IV

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2 juillet 2017 7 02 /07 /juillet /2017 06:00
« J’ai survécu à pire que vous. Vous n’êtes que des SS aux petits pieds » Simone Veil à Jean-Marie Le Pen

Souvenir d’une belle amie infirmière au CHU de Nantes qui, le lundi soir, pleurait en rentrant du travail : combien de jeunes femmes avaient encore mis leur vie en danger avec des faiseuses d’anges ou des aiguilles à tricoter ?

 

Je ne trouvais pas les mots pour la consoler, je l’écoutais en me jurant que je me battrais auprès des femmes pour que : plus jamais ça !

 

Des aiguilles à tricoter à la loi sur l’IVG  lire ICI 

 

Le 26 novembre 1974, Simone Veil montait à la tribune de l'Assemblée nationale pour prononcer un discours historique afin de défendre sa loi légalisant l'avortement. Elle dû faire face à des adversaires déchaînés, des réactions d'une rare violence.

 

Ils avaient face à eux une femme courageuse, pugnace, intransigeante, florilège :

 

« La peur ne se fuit pas, elle se surmonte. »

 

« L’amour ne se crie pas, il se prouve. »

 

« Les erreurs ne se regrettent pas, elles s’assument »

 

 

Tous les adversaires du projet sur l'interruption de grossesse se sont mobilisés, il y a plusieurs mois, en vue de cette bataille, les yeux fixés sur la ligne bleue de la foi, de l'humanisme ou d'une certaine idée de la France. Ils ont leurs champions : l'ancien garde des Sceaux, Jean Foyer, qui peut chanter toute la messe en grégorien, le frénétique Pierre Bas, qui gifla Mitterrand un jour où il s'était cru outragé, le pharmacien vendéen Paul Gaillaud, le docteur Feit, gynécologue lyonnais de grand renom et député giscardien du Jura. Et encore Gabriel Kaspereit, et surtout le plus prestigieux et le plus torturé, Michel Debré.

 

Tous membres de la majorité présidentielle. Profitant de l’absence des partisans de la libéralisation de l'avortement, le camp des « anti » s'était installé en maître à la commission parlementaire et avait élu, comme rapporteur du projet, l'un des siens - le plus obscur peut-être : Alexandre Bolo, député de Loire-Atlantique qui exerce dans le civil la profession de représentant. Et, en quelques jours, la loi Veil, à laquelle le président de la République tenait tant, s'était trouvée en lambeaux.

 

Les autres, tous les autres députés, les tièdes, les hésitants, les tourmentés, étaient restés silencieux, emmurés dans leur drame de conscience. Dès le dépôt à l'Assemblée du projet de loi, ils avaient reçu un vilain tract à croix gammée, démontrant que la France reprenait à son compte la politique de sélection raciale de Hitler.

 

L'avaient-ils lu ?

 

En quelques semaines, ils avaient été submergés de lettres, de télégrammes, de coups de téléphone, de menaces. Il fallait avoir la tête vraiment solide. Le député de Quimper, Marc Becam, un jeune catholique militant, gaulliste progressiste, disait : « Je reçois, en moyenne, un appel pathétique par jour. C'est vraiment pour moi le vote le plus difficile que j'aie jamais eu à accomplir. Mon chemin est pourtant tracé : c'est celui de l'Eglise. Si je me prononce pour la loi, je crains d'ouvrir une digue - le barrage de Fréjus, comme disait de Gaulle. Mais si je repousse le projet, je me joins aux Pharisiens qui chaque jour acceptent mille avortements clandestins et dorment en paix. »

 

Un autre gaulliste, le « commando » Vivien, interrogeait chaque matin sa femme et ses deux filles, dans l'espoir vain d'entendre l'argument décisif. Quant aux élus du Centre démocrate, survivants de la démocratie chrétienne, ils n'assistaient pas aux travaux de la commission et l'on prétendait méchamment qu'ils se cachaient. Un secrétaire d'Etat, croisant un élu, lui avouait : « Au gouvernement, nous avons de terribles problèmes. Mais du moins nous n'aurons pas à voter sur ce   texte. Et, si j'ose dire, c'est une sacrée chance ! »

 

Devant une assemblée qui compte 9 femmes pour 481 hommes, la ministre s'exprime d'une voix calme, un peu tendue: « Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur les 300000 avortements qui chaque année mutilent les femmes dans ce pays, bafouent nos lois et humilient ou traumatisent celles qui y ont recours »

 

« Aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l'avortement. Il suffit de les écouter. C'est toujours un drame », assure-t-elle tout en soulignant que « l'avortement doit rester l'exception, l'ultime recours pour des situations sans issue ».

 

Son discours d'une heure est chaleureusement applaudi par la gauche. La droite se tait, pour l'instant. Dans les tribunes du public, à l'inverse de l'hémicycle, ce sont les femmes qui dominent, venues en masse écouter la ministre.

 

Suivent alors plus de 25 heures de débats durant lesquelles Simone Veil affronte insultes et propos de « soudards », racontera-t-elle, pendant qu'à l'extérieur, des militants anti-avortement égrènent leurs chapelets. Trois jours et deux nuits de combat contre les tenants de sa propre majorité.

 

Hélène Missoffe, l’une des rares femmes de l’hémicycle, est la première à prendre la parole après la ministre Veil : «Se fermer les yeux, faire comme si le problème n’existait pas, est à la fois lâche, bête et stupide.»

 

Michel Debré, ancien Premier ministre du général de Gaulle, voit dans ce texte « une monstrueuse erreur historique ». Les députés de droite René Feït et Emmanuel Hamel diffusent dans l'hémicycle, à tour de rôle, les battements d'un cœur de fœtus de quelques semaines. Le premier affirme que si le projet était adopté « il ferait chaque année deux fois plus de victimes que la bombe d'Hiroshima ». Jean Foyer, ancien Garde des Sceaux du général de Gaulle, lance: « Le temps n'est pas loin où nous connaîtrons en France ces avortoirs, ces abattoirs où s'entassent des cadavres de petits hommes ».

 

Le pire reste à venir: Hector Rolland reproche à Simone Veil, rescapée des camps de la mort, « le choix d'un génocide ». Jean-Marie Daillet évoque les embryons « jetés au four crématoire ». Jacques Médecin parle de « barbarie organisée et couverte par la loi comme elle le fut par les nazis ».

 

5 avril 1971, l’appel des 343 « salopes »

 

La bataille pour le droit à l’avortement commence bien avant l’arrivée de Simone Veil au gouvernement. La question divise la société. Le 5 avril 1971, 343 femmes réclament le droit à l’avortement dans le Nouvel Observateur. «Un million de femmes se font avorter chaque année en France… Je déclare que je suis l’une d’elles», écrivent Simone de Beauvoir, Delphine Seyrig, Catherine Deneuve, Françoise Sagan, Jeanne Moreau… et d’autres que Charlie Hebdo rebaptisera les «343 salopes». Le manifeste accélère le combat pour les droits des femmes, dans la rue mais aussi devant la justice.

 

Octobre 1972, le procès de Bobigny

 

Marie-Claire, 17 ans, est jugée pour avoir avorté à la suite d’un viol. La mobilisation est forte. Défendue par Gisèle Halimi, la jeune fille sera finalement acquittée. Sa mère sera, en revanche, condamnée à 500 francs d’amende pour complicité d’avortement et la personne ayant pratiqué l’interruption de grossesse, à un an de prison avec sursis.

 

« Simone Veil a imposé l'évidence dans un monde politique profondément archaïque »

 

Simone Veil est morte ce vendredi 30 juin 2017. Ministre de la Santé, elle a défendu la dépénalisation de l'avortement au moment où les mouvements féministes avaient fait de la vie privée des femmes un enjeu politique inévitable. C'est avant tout face à l'archaïsme des députés français que se sera battue l'ancienne ministre, explique l'historienne Michèle Riot-Sarcey.

 

ICI 

« J’ai survécu à pire que vous. Vous n’êtes que des SS aux petits pieds » Simone Veil à Jean-Marie Le Pen
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1 juillet 2017 6 01 /07 /juillet /2017 06:00
« L’eau est une offense » Joseph Kessel... L’Alcool face à l’Ego

Juillet, mon mois, le 7e de l’année, bascule, territoire de mon identité, j’y entre pour ne rien y faire, vagabonder, tirer des bords, rader, me poser au bord de bars, laisser-aller, échappée belle, je ne suis pas pressé j’ai tiré l’essentiel de ma vie.

 

Ce sera donc, ici, un journal au jour le jour :

 

1ier juillet

 

1929, Joseph Kessel entre dans un restaurant où il rejoint des notables un peu guindés. Il est déjà célèbre : « L’Equipage ». Juif et Russe et Français et un peu Afghan, né d’occasion en Argentine, aventurier et voyageur, il a déjà traversé le monde : Clara en Argentine, Paris, la guerre, Vladivostok, l’Inde et la Chine. Dans le restaurant guindé, il est vis-à-vis d’une belle amie russe qui boit de l’eau. L’eau est une offense. Dans sa patte, il presse la main et le verre. Il brise le verre et blessa la main. Fille et garçon s’ennuient avec les notables. Ils s’en vont retrouver des Russes pour manger des blinis et du Tzigane… Mais toutes les histoires que l’on raconte sur Kessel ne sont que des légendes.

 

Kessel est une force, un appétit, un cœur… Une espèce de héros des temps biblique qui, quoi qu’on en dise, ne sera révolu dans aucune société.

 

Joseph Kessel ne comprend pas ou prétend ne rien comprendre aux luttes sociales, au communisme ou au socialisme, à ce mouvement des foules qui est le ressort de l’humanité Il n’y prête attention que dans un vaste appétit de générosité. Pourtant il n’est pas affligé par le monde moderne comme un Saint-Exupéry. Il sait que l’héroïsme peut-être un des aspects les plus contestables de l’homme. Il a vu des hommes par milliers. Il les approche un à un comme un frère. Mais il ne s’écarte pas pour saisir la forêt, l’espèce.

 

Joseph Kessel n’est pas un partisan. Il a un faible pour les mauvais garçons, les inadaptés, ceux qui restent en marge d’une société qu’il ne prétend pas changer lui-même, mais dont les règles et les faux cols lui font hausser les épaules.

 

Au physique, c’est un tronc de cône à l’envers dont les épaules et le torse puissant portent une crinière et des yeux qui sont un paysage. Il a un de ces visages burinés qui font éclater l’étrange lucarne du petit écran.

 

Emmanuel d’Astier de la Vigerie 1966

« L’eau est une offense » Joseph Kessel... L’Alcool face à l’Ego

L’Alcool face à l’Ego

 

Le problème majeur de l’alcoolique, c’est qu’il se ment. C’est là la première étape de cette spirale infernale qu’est l’alcoolisme : le déni. Oui, on boit, plus que les autres et plus que de raison, mais cela n’a pas d’importance car l’on est différent de ceux qui sont tombés dans la gnôle. On est plus puissant qu’eux, plus brillant, au final on est simplement plus. Dans cette logique, l’alcool rempli une place étrange, à la fois désinhibant social et tyran, nous montrant soit sublimé, soit telle une épave. Les alcooliques anonymes nomment ces deux aspects de l’alcool, l’alcool festif ou l’alcool tyran. Or, ce que montre très bien le livre de Joseph Kessel, par les témoignages qu’il recueille c’est que l’élément conduisant à basculer d’un état à l’autre est généralement l’ego de l’individu. Il s’agit du dialogue que tient l’alcoolique avec lui-même et qui se construit autour de sa fierté. Ainsi, voici ce que déclare Robert N, patron de presse au Herald Tribune, à Kessel afin d’expliquer comment il est tombé dans l’alcool :

 

« J’étais encore très fier de moi, quand à l’Université je me suis mis à boire, à mon tour. Mais je n’étais pas un simple artisan de compagne, moi. J’étais un intellectuel. Je savais me contrôler, me diriger (…) Toujours plus d’alcool, toujours plus haut. Il n’avait personne d’aussi intelligent, doué, hardi, irrésistible que moi. Si quelque incident regrettable survenait, dans le domaine social ou professionnel, cela ne pouvait être le fait que des autres. On ne me comprenait pas. »

 

 

Récits alcoolisés

 

ICI

 

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24 juin 2017 6 24 /06 /juin /2017 06:00
Jean-Michel Gravier - BENJAMIN BALTIMORE/ÉCRITURE

Jean-Michel Gravier - BENJAMIN BALTIMORE/ÉCRITURE

Se lever tôt présente bien des avantages, en ce moment ça me permet de profiter de la fraîcheur du matin, tout particulièrement d’écouter à la radio des gens que l’on n’entend pas autrement ou d’écouter des chansons qui ne passent aux heures de grande audience.

 

C’est ainsi que j’ai pu découvrir le livre de Lisa Vignoli Parlez-moi de lui chez Stock, où elle extrait de l’oubli un garçon que j’ai connu lors d’une soirée à Grenoble, en 1974, Jean-Michel Gravier, « qui n’était personne… il était tout »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mardi j’ai aussi découvert une superbe interprétation de l’Aigle Noir de Barbara par Juliette Armanet.

 

C’est l’une des 13 “femmes qui chantent” Barbara dans l’album “Elles & Barbara” sorti le 9 juin.

 

  1. La solitude – Zazie
  2. Nantes – Jeanne Cherhal
  3. Göttingen – Julie Fuchs
  4. Si la photo est bonne – Dani
  5. Le soleil noir – Angélique Kidjo
  6. Dis, quand reviendras-tu ? – Nolwenn Leroy
  7. Mon enfance – Louane
  8. Marienbad – Daphné
  9. Gueule de nuit – Olivia Ruiz
  10. Cet enfant-là – Virginie Ledoyen
  11. L'aigle noir – Juliette Armanet
  12. Parce que je t’aime – Élodie Frégé
  13. C’est trop tard – Melody Gardo

 

Jamais dans l'imitation stérile, mais dans la ferveur heureuse des retrouvailles, chacune à sa façon, chacune à sa manière, avec grâce et gourmandise, “Elles” célèbrent Barbara. »

 

« Un album comme une célébration de celle dont la poésie et la justesse des mots touchent en plein cœur aujourd’hui encore, 20 ans après sa disparition.

 

Ses chansons sont d'hier, de toujours et à jamais. Elle disait «ma vie de femme, c'est peut-être la vie des femmes. Ma vérité se trouve bizarrement être la leur ».

 

Elle chantait : « Dis, quand reviendras-tu ? Dis, au moins le sais-tu ? »

 

Avec ce disque, avec ces femmes d'aujourd’hui qui la saluent, Barbara est revenue »

 

Comme un trait d’union entre Barbara et Jean-Michel Gravier : j’en profite pour citer un passage du livre de Lisa Vignoli :

 

« Est-ce qu’il faut tant souffrir pour réussir ? Pour sortir ça de soi ? Il n’y arrivera jamais alors. Oui, sa famille a été déracinée, déplacée, déménagée, ce que vous voudrez. Comme s’ils étaient les seuls pieds noirs après 1962 ! Que fait-on, dans une vie, de parents aimant, d’un frère complice et d’une sœur maternante, d’un appartement bourgeois dont chaque recoin croit en nous ? Son public ? Il a le sien depuis toujours.

 

Depuis Bobino, en septembre 1965, où elle a entamé sa tournée et touché le succès Barbara ne s’est pas remise de l’amour qu’elle reçoit. Elle en a fait un morceau qu’elle a chanté pour la première fois dans les semaines qui ont précédé sa venue à Grenoble.

 

Ce fut un soir en septembre

Vous étiez venus m’attendre,

Ici même, vous en souvenez-vous ?

À vous regarder sourire,

À vous aimer, sans rien dire…

 

Alors, dans cette selle, au milieu des briquets qui, d’émotion, ne trouvent plus leur rythme, i la regarde et il se dit qu’un jour il sera là, derrière le rideau. Prêt à l’interviewer. Elle, transie de succès, ui, la voix plus chevrotante encore. Un relais. Un admirateur utile. Ce serait peut-être comme ça qu’il se ferait connaître. Un vecteur, un passeur.

 

« Grenoble 1966 » ? Elle le reconnaîtrait. Il lui dirait qu’elle fait partie des femmes qui l’ont arraché à cette vie qui aurait pu être simplement heureuse, s’il n’avait pas décidé de l’extraire de l’ordinaire. »

 

Jean-Michel Gravier, avec Anouk Aimée.

Jean-Michel Gravier, avec Anouk Aimée.

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20 juin 2017 2 20 /06 /juin /2017 06:35
«Il paraît que la crise rend les riches plus riches et les pauvres plus pauvres. Je ne vois pas en quoi c'est une crise. Depuis que je suis petit, c'est comme ça» Coluche

Hier, j’ai hésité avant d’écrire, au petit matin, ma chronique du lundi. Allais-je parler de lui ?

 

D’Emmanuel Macron ?

 

Non !

 

De Michel Gérard Joseph Colucci, alias Coluche.

 

En effet, le 19 juin 1986 est mort d’un accident de moto (il percute un camion qui a effectué un brusque virage à gauche) à Opio dans les Alpes-Maritimes. Il ne porte pas de casque mais contrairement à ce qui a été dit il roulait à vitesse modérée 60km/h. La thèse de l’assassinat sera soutenu par certains. Coluche est inhumé le mardi 24 juin 1986 à 10 h 30, au cimetière de Montrouge. La cérémonie funéraire est célébrée par l'Abbé Pierre.

 

Putain de mort !

 

Coluche avait 41 ans.

 

Coluche à longtemps habité rue Gazan près du parc Montsouris et ses enfants allaient au collège avec Anne-Cécile ma fille dans le 14e arrondissement puisque j’habitais rue Vergniaud.

 

Dans ma vie je n’ai croisé Coluche physiquement qu’une seule fois : lorsqu’il est venu voir Henri Nallet, alors Ministre de l’Agriculture, pour que celui-ci l’aide à mobiliser les ressources alimentaires stockées afin d’alimenter les Restos du Cœur dont il lança l'idée le 26 septembre 1985 sur Europe 1, en déclarant : « J'ai une petite idée comme ça, si des fois y a des marques qui m'entendent, je ferai un peu de pub tous les jours. Si y a des gens qui sont intéressés pour sponsoriser une cantine gratuite qu'on pourrait commencer par faire à Paris ». Je l’ai écrit sur mon blog, en ajoutant que nous nous étions mobilisés pour l’aider à la fois pour qu’il puisse accéder aux stocks communautaires et pour qu’il puisse structurer son association naissante. Cette conjonction d’un saltimbanque et de bonnes volontés se mobilisant pour qu’il y ai de la nourriture à distribuer a permis aux Restos d’atteindre le but que s’était fixé Coluche.

 

Sur le site jesuismort.com comment il était devenu Coluche :

 

« C’est le 28 octobre 1944, à Paris, que Michel Colucci voit le jour au sein d’une famille originaire du nord de l’Italie. Une mère fleuriste et un père peintre en bâtiment. Malheureusement ce dernier décède en 1947 et laisse son épouse Simone élever seule ses deux enfants avec son maigre salaire. Michel traîne sa jeunesse en banlieue sud où, avec ses copains, il prend goût à la musique. Le garçon fabrique d’ailleurs sa propre guitare au son très approximatif et tellement lourde qu’il ne peut la soulever seul. Les études ne le passionnent pas et ne le mènent guère plus loin que le Certificat d'études primaires qu'il décroche en juin 1958. Il niera même l'avoir obtenu d’un « je ne voulais pas posséder un truc primaire ». Mais les responsabilités frappent à la porte. Michel touche à toutes les professions (14 au total parmi lesquelles télégraphe, photographe, garçon de café, fleuriste ou marchand de légumes).

 

C’est finalement à l’usine qu’il se pose en tant que manutentionnaire après un court passage sous les drapeaux, ponctué par une exclusion pour indiscipline. Lorsqu’il ne travaille pas, il apprend la guitare et le chant du côté de la Contrescarpe et décide un jour de se lancer dans la carrière d’artiste qui le fait rêver. Sur l’Île de la Cité, « Le vieux bistrot » accueille ses premiers accords musicaux. Puis, il est pris dans le cabaret « Chez Bernadette » pour faire la vaisselle et y user ses cordes vocales. En ce lieu naît un patronyme pour l’éternité : Coluche.

 

Un soir, l’acteur Romain Bouteille vient à passer et repart avec ce jeune talent de 23 ans sous le bras. Il l’emmène dans son célèbre « Café de la gare » aménagé par ses soins. S’y escrimeront notamment Patrick Dewaere et Sylvette Herry, alias Miou-Miou. Les spectateurs paient leur entrée selon une loterie qui leur permet de payer de 0 à 30 francs. Deux entractes ont lieu où les comédiens font le service. Le public est conquis. Coluche fonde avec des amis la troupe « Le vrai chic parisien ».

 

En 4 ans, il joue avec succès « Thérèse est triste » et « Ginette Lacaze » avant que Dick Rivers n’impose lui-même cette jeune bande en première partie de son Rock'n Roll Show à l'Olympia. La troupe joue également « Introduction à l'esthétique fondamentale » avant que Coluche ne la quitte. « J’ai eu deux coups de pot dans ma vie : être découvert par Bouteille et être viré par Bouteille » avouait-il quelques mois après. Nous sommes en 1974 et tout le monde se rend compte que le jeune trublion peut faire rire seul. »

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18 juin 2017 7 18 /06 /juin /2017 06:00
Le PS d’Épinay dans le coma, les Républicains à la dernière station de leur chemin de croix, la gauche et la droite ne sont-elles plus qu’extrême ?

Pour ne rien vous cacher l’implosion du PS à la sauce Mitterrand ne me fend pas le cœur et, si obsèques il y a, je m’abstiendrai. Nous faire accroire que Gérard Filoche et Manuel Valls sont de gentils camarades c’est nous prendre pour des veaux.

 

« Mélenchon m’a tué » pourraient s’écrier les derniers grognards, les Dray, Hamon, Aubry et autres frondeurs balayés comme des fétus de paille, jetés tels des kleenex. C’est vrai, le conducator veut rayer de la carte PS et PCF, la vieille union de la gauche qui l’a nourri durant des décennies.

 

Y’a du Guy Mollet dans ce Mélenchon, des mots durs et une pratique molle, comme un goût de Vieux Monde, de recettes éculées ripolinées à la sauce écolo-alterno, de quoi séduire, je le comprends, une génération contestataire de précaires. L’ego du Jean-Luc qui a toujours dépassé la largeur des portes du pouvoir et son entreprise d’insoumis n’est que son dernier faire-valoir de vieux cheval de la politique.

 

Laissons-le là pour ausculter la Droite avec le bien à droite Dominique de Montvalon ancien rédachef du JDD :

 

« À la veille du second tour des législatives, le pur chiraquien François Baroin s’efforce de donner le « la » à des troupes qui n’ont toujours pas compris comment une élection « imperdable » avait été perdue, et à qui la faute. Et qui, du coup, « flottent ». Exercice de haute voltige.

 

1. Il assure qu’Emmanuel Macron aura évidemment sa majorité absolue.

 

2. Mais il affirme qu’une majorité « écrasante » écraserait le débat.

 

3. Il appelle donc les électeurs de droite – les pro-Macron comme les autres – à corriger le tir du 1er tour en votant au second pour des candidats de droite, qu’ils soient de la première ou de la deuxième « famille ».

 

4. Il se déclare « constructif » (adjectif… macroniste s’il en est) mais, dans la foulée, hostile notamment à la hausse de la CSG, il dit qu’il ne votera pas la confiance.

 

5. Il annonce que, son travail terminé au soir du second tour, il retournera à Troyes et au Sénat, et ne se mêlera pas de la bataille Bertrand-Wauquiez qui se profile pour la présidence de ce qui restera des Républicains.

 

6. Il refuse, pour quelques jours encore, de participer au grand déballage inévitable sur les causes du désastre de son camp. Mais lui, le chiraquien, le laïque, l’anti-FN, le « constructif » (radicalement opposé à toute forme d’opposition systématique), il met déjà les choses au point sur un fait pour lui majeur : s’il est venu participer le 5 mars au Trocadéro au meeting de François Fillon, dont le succès doit beaucoup à Sens Commun, c’est uniquement, assure-t-il, parce qu’il pensait que Fillon, ce jour-là, jetterait l’éponge.

 

En revanche, pas un mot dans sa bouche, sur le fait que Nicolas Sarkozy –qui avait fait de Baroin son dauphin- a tout fait pour torpiller ce scénario qui, pour le meilleur ou pour le pire, aurait alors ouvert la voie à un certain Alain Juppé.

 

Il est loin le temps –pourtant pas si lointain !- où François Baroin fixait comme objectif à son camp de gagner les législatives pour… cohabiter ensuite pendant cinq ans (sic) avec Emmanuel Macron.

 

Même aujourd’hui, la droite a-t-elle pris la pleine mesure de ce qui lui est arrivé ? Clairement non.

 

Il y a les responsabilités –énormes- du candidat Fillon. Elles ne se limitent pas, loin s’en faut, aux désastreuses affaires qui l’ont plombé.

 

Il y a le poids d’un projet concocté en cercle restreint, trop intégriste et trop « punitif » pour répondre, au-delà de la primaire, aux complexités et aux attentes de la société française.

 

Il y a eu aussi, de la part de la droite, une surestimation arrogante de ses propres forces et une sous-estimation désarmante de celles de l’adversaire.

 

Par mer déchaînée et horizon bouché, François Baroin aura fait son devoir -sans illusions mais, au fond, avec une certaine classe- sur ce qui va immanquablement se produire au sein de l’ancienne droite dès les législatives finies: un carnage. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les 3 droites

 

René Rémond est à l'origine d'une distinction célèbre entre les «trois droites» françaises : «légitimiste» ou réactionnaire (en référence à la Restauration de Louis XVIII et Charles X), «orléaniste» ou libérale (elle rappelle le règne relativement prospère et débonnaire de Louis-Philippe 1er), «bonapartiste» ou autoritaire (en référence bien sûr au règne fulgurant de Napoléon 1er), dont il suit la trace de la fin de l'Empire au milieu du XXe siècle. Son analyse est au coeur d'un ouvrage majeur : La Droite en France de 1815 à nos jours (1954, Aubier-Montaigne) réédité en 1982 sous le titre : Les droites en France (Aubier-Flammarion).

 

Cette distinction est plus difficile à suivre aujourd'hui, 60 ans après René Rémond, la nouvelle typologie de la droite L'historien Gilles Richard publie une Histoire des droites en France.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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  • Le Front national n'apparaît pas dans la typologie de René Rémond. S'agit-il d'un parti de droite ou d'extrême droite? Quelle est sa place dans l'histoire de la droite?

 

René Rémond avait bien conscience, à la fin de sa vie, que sa tripartition posait problème… Le FN est un parti issu de la famille politique nationaliste, née avec l'épisode boulangiste au moment où la «République des Jules» s'imposait. Pour des raisons que je détaille dans mon livre, cette famille nationaliste a longtemps eu beaucoup de mal à se doter d'un parti qui la représente efficacement. Et son soutien, massif et prolongé, à Vichy l'a profondément fragilisée. Mais elle n'a jamais disparu et le FN, fondé en 1972, a su lui redonner son lustre à partir de 1984. Droite ou extrême droite?

 

Je n'emploie jamais l'expression «extrême droite» parce que cela supposerait qu'il y ait UNE droite (et UNE gauche), avec seulement des nuances à l'intérieur de chacune - du bleu ciel au bleu (M)arine, du rose pâle au rouge vif. Or, pour moi, il y a DES familles politiques se classant à droite ou à gauche selon les époques. Les nationalistes sont sans aucun doute une des familles politiques qui se sont rangées à droite de la ligne de clivage apparue au tournant du XIXe et du XXe siècles. Mais ils ne sont pas plus «extrémistes» que les libéraux sont «modérés». Dit autrement, je ne vois que des nationalistes extrêmement nationalistes, des libéraux extrêmement libéraux, des agrariens extrêmement agrariens, etc.

 

  • Selon vous, l'année 1974 marque un tournant dans l'histoire de la droite. Pourquoi?

 

Sans aucun doute, l'année 1974 a marqué le point de départ de notre présent politique. Pour deux raisons: premièrement, s'est enfin imposée, parmi les familles de droite, la famille (néo)libérale qui, jusque-là, avait toujours dû partager le pouvoir avec d'autres - les radicaux jusqu'à 1940, les gaullistes après la Libération ; deuxièmement, en même temps - mais sans que cela ait au départ le moindre rapport avec l'élection de Valéry Giscard d'Estaing - l'économie française (comme ses voisines) est entrée de plain-pied dans la troisième révolution industrielle (automatisation, multinationalisation, délocalisations et financiarisation) et son corollaire, le chômage de masse qui, en une décennie, a porté un coup fatal au mouvement ouvrier tel qu'il s'était bâti depuis la fin du XIXe siècle et avait imposé la question sociale comme question centrale dans la vie politique.

 

Depuis cette époque, les deux principaux courants qui s'opposent sont les nationalistes et les néo-libéraux. Que révèle cet affrontement?

 

  • L'entrée dans « une nouvelle ère », selon les mots de « VGE » après son élection en mai 1974, a permis aux néolibéraux d'imposer leur projet politique.

 

L'entrée dans «une nouvelle ère», selon les mots de «VGE» après son élection en mai 1974, a permis aux néolibéraux d'imposer leur projet politique, leur vision de la France dans le monde. Pour eux, les principes du capitalisme sont les plus sûrs fondements d'une vie harmonieuse en société. C'est là le cœur de leur doctrine. Et c'est à l'État d'en garantir la pérennité. Ils ont pu enfin agir à leur guise ou presque parce qu'au même moment, leur principal adversaire, les gauches issues du mouvement ouvrier, s'est évaporé. Depuis 1984, quand le PCF s'est retrouvé avec un score électoral d'avant 1936 et que le PS a renoncé officiellement à «changer la vie», le projet néolibéral s'est déployé sans obstacle majeur, à travers la déconstruction de la République sociale telle qu'elle s'était bâtie, par à-coups, entre 1936 et 1982, et parallèlement la construction de «l'Europe» comme grand marché unifié et structure politique supranationale. C'est dans ce double contexte (triomphe des néolibéraux, effondrement du mouvement ouvrier) que le FN a su - non sans difficultés - reconstruire un projet nationaliste adapté au présent et une force capable de le soutenir.

 

  • La victoire de François Fillon à la primaire de la droite est-elle le fruit d'une synthèse réussie entre ces deux tendances?

 

Oui, d'une certaine manière. Elle est aussi la reprise de la stratégie sarkozyste développée entre 2002 (quand il entre Place Beauvau) et 2012, consistant à défendre un projet de société néolibéral tout en tenant un discours «identitaire» pour récupérer une partie des électeurs frontistes, sans faire d'alliance électorale avec le FN. Une stratégie qui a semblé réussir en 2007, face à un adversaire frontiste dépassé, «le Vieux» comme on nomme Jean-Marie le Pen au FN, et faisant campagne sur des nouveaux thèmes difficilement audibles par ses électeurs (cf. le discours de Valmy sur «le creuset français»).

 

Mais un succès sans lendemain, avec un renouveau du Front national dès 2011 quand Marine Le Pen a succédé à son père. François Fillon a fait le choix de s'inscrire dans la même ligne (projet néolibéral et défense de l'identité française) que Nicolas Sarkozy mais d'une façon plus cohérente que lui - en centrant sans détour son discours identitaire sur les valeurs du catholicisme traditionnel - et plus crédible - il s'est présenté comme le candidat anti-«blingbling», pour parler de façon familière. Dans le contexte de mobilisation des milieux catholiques autour de La Manif pour tous et face à un Alain Juppé refusant le discours identitaire sarkozyste, il l'emporta donc.

 

  • Au-delà des affaires, ces difficultés traduisent-elles la séparation de plus en plus nette entre ces deux courants. Peuvent-ils continuer à coexister au sein de LR?

 

J'ai montré dans mon livre, écrit avant les affaires, que la stratégie filloniste n'était pas forcément gagnante, malgré l'excellent score réalisé lors de la primaire. Même sans les affaires, le choix de faire cohabiter deux systèmes de valeurs opposés, deux visions du monde antinomiques n'est pas chose aisée. Et même, sans doute, chose impossible dans la durée, c'est-à-dire au-delà d'une campagne électorale. Le quinquennat de Nicolas Sarkozy l'a en tout cas démontré. C'est tout le problème de LR aujourd'hui. Le parti, l'UMP au départ, a été construit en 2002 par Alain Juppé avec l'objectif de fondre à terme dans la grande famille néolibérale toutes les familles de droite (démocrates-chrétiens, agrariens de CPNT, gaullistes, etc.) à l'exception des nationalistes.

 

Nicolas Sarkozy, par sa stratégie, a complètement infléchi le projet initial en redonnant une place importante au nationalisme au sein même du parti. Mais on le voit, la cohabitation est difficile, voire impossible. Comment concilier «l'ouverture» au monde - «le multiculturalisme» disent ses thuriféraires - qu'implique le néolibéralisme et la défense d'une «l'identité nationale» renvoyant à une époque où la France était un pays partagé à égalité entre ruraux et citadins, majoritairement catholiques, maître d'un immense empire colonial?

 

  • Plus largement, le clivage droite gauche semble s'effacer au profit d'un nouveau clivage: «progressistes contre conservateurs», selon Macron ou «patriotes contre mondialistes», selon Le Pen. Qu'en est-il?
  •  

Le clivage droite(s)-gauche(s) s'efface en effet car la question nationale est devenue, par l'action continue, méthodique, efficace du FN la nouvelle question centrale. Elle met désormais aux prises, en première ligne, deux familles de droite (d'où le désarroi des gauches…), «progressistes contre conservateurs» ou «mondialistes contre patriotes» disent les intéressés, néolibéraux contre nationalistes selon moi. Chacun des deux camps possède un atout-maître. Pour les premiers, c'est l'infini pouvoir de séduction de la société de consommation sur les individus - malgré les ravages qu'elle entraîne. Pour les seconds, c'est la force que leur donne le fait d'avoir récupérer le cœur de l'électorat des gauches, laissé en jachère politique par elles, c'est-à-dire les classes populaires - mais leurs attentes ont-elles beaucoup à voir avec le nationalisme? Entre ces deux ensembles, rien n'est encore joué. L'un ou l'autre peut l'emporter.

 

La suite ICI 

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16 juin 2017 5 16 /06 /juin /2017 06:00
À ceux qui ne lisent pas le Monde : « Le problème est que certains médecins ne veulent pas dire qu’un verre de vin quotidien est bon pour la santé. » Michel Cymes

Soucieux de mon temps, en clair faire taire ceux qui affirment n’avoir jamais le temps, je ne suis pas consommateur de Télé et, et hormis le visionnage de films sur le câble, je suis abstème.

 

Michel Cymes est le plus cathodique des docteurs, présentateur du « Magazine de la santé » sur France 5, son dernier livre Quand ça va, quand ça va pas a provoqué une tempête médiatique qui l’a obligé à fermer son compte Twitter qui croulait sous les trolls. Une pétition mise en ligne sur le site Change.org (c’est très tendance la pétition en ligne et c’est devenu un biseness) par un collectif de parents pointe du doigt l’inégal traitement réservé aux filles et aux garçons dans l’ouvrage. Elle commence ainsi :

 

«Ras la touffe du sexisme et des tabous

 

Le livre consacre deux pages à chaque organe : l’une purement anatomique, et l’autre détaillant les soucis de santé que peuvent rencontrer les enfants (fièvre, nez qui coule, etc.), illustrations à l’appui… et, selon les pétitionnaires, alors que onze généreuses lignes sont consacrées au «zizi», «la zézette ou cocotte, ou minou» (selon les termes de l’auteur), est évacuée en cinq lignes à peine… «Un sous-produit en quelque sorte», estiment les initiateurs de la pétition. «La zézette n’est pas un trou», clament-ils encore, en référence aux illustrations simplistes et incomplètes des organes féminins présentes dans l’ouvrage. Tandis que pénis, testicules, scrotum et autre prépuce sont représentés côté garçons, chez les filles, il n’est question que de la vessie, de l’urètre, et d’un petit trou.

 

Bref, je n’ai jamais posé mes fesses sur mon canapé pour regarder le « Magazine de la santé », ni lu un quelconque ouvrage de Michel Cymes, ce qui m’amène à causer de lui c’est que le médecin Cymes est un amateur et un défenseur du vin. Il a même planté sa propre vigne, chez lui, en Provence, à Entrecasteaux.

 

Laure Gasparotto, journaliste-vigneronne, qui pige dans le Monde, l’a interviewé dans le M Le style du 14.06.2017 et je me retrouve face à un cas de conscience : puis-je vous en faire bénéficier ?

 

Si je me contente de mettre 1 lien ICI  avec l’interview, si vous n’êtes pas abonnés au Monde, c’est comme si je pissais dans un violon, vous ne pourrez la lire.

 

En toute connaissance de cause je défie le copyright en vous la livrant :

 

Que se passe-t-il dans le cerveau quand on boit du vin ?

 

Je ne suis pas un spécialiste de la neurologie viticole ! Mais je pense que le circuit du plaisir se met en marche et que les choses se passent en fonction des habitudes de chacun. La distinction fondamentale est à faire entre plaisir et addiction. A titre personnel, je dois réveiller dans mon cerveau certains neuromédiateurs qui me disent que, finalement, c’est un vrai plaisir. Il arrive aussi que le vin me détende, oui.

 

Il se partage ?

 

Je n’ouvre jamais une bouteille de vin pour moi seul. Elle est toujours à partager. En fait, il y a deux choses. Quand je rentre chez moi et que je propose à ma femme d’ouvrir une bouteille, est-ce une envie de partage ou bien le sentiment que si je commence à ouvrir une bouteille pour moi tout seul, c’est que je ne vais vraiment pas bien ? Un peu des deux, je pense.

 

Il y a un moment pour tout. J’adore faire plaisir à mes amis avec de bonnes bouteilles. J’ai une maison dans le Midi, où j’ai fait installer une cuisine extérieure avec un bar. L’été, la bouteille de rosé bien fraîche est un élément du rituel convivial. Les amis viennent à la maison. Le meilleur moment de la journée est celui où je leur ouvre le rosé et le leur sers alors qu’ils sont assis au bar.

 

Toutes les couleurs de vin se valent-elles en termes de santé ?

 

« Le problème est que certains médecins ne veulent pas dire qu’un verre de vin quotidien est bon pour la santé. »

 

On épingle surtout le vin rouge à cause de ses tanins. Mais le problème du vin et de la santé, c’est qu’il est difficile de faire des études sur l’alcool à cause de l’éthique et de la méthodologie. Du côté du corps médical, ces travaux sont délicats à mettre en place, car on ne peut pas demander aux gens de boire cinq verres par jour afin d’observer le résultat. Or, une étude scientifique ne peut se faire sans essais sur des populations différentes. Il y a bien eu des expérimentations sur des rats… Le résultat est que les études sont souvent réalisées par des professionnels du vin, ce qui pose problème.

 

On sait tout de même que dans les tanins, il y a une molécule antioxydante qui protège. Il ne serait donc pas illogique de penser qu’à des doses raisonnables, le vin puisse diminuer le taux de cholestérol ou augmenter la dilatation des artères. Mais à quelle dose ? Et pour quel type de vin ? Quant au rosé… il n’y a pas eu d’études en particulier.

 

Que pensez-vous du « French ­paradox », selon lequel une consommation de vin régulière et modérée aurait des effets bénéfiques sur la prévention des maladies ­cardio-vasculaires ?

 

Il est très discuté aujourd’hui. Ce n’est pas le fait de prendre un peu de vin tous les jours qui diminue la mortalité. Il y a des pays qui ont des taux de maladies cardio-vasculaires moins élevés que d’autres et dans lesquels on ne consomme pas de vin rouge. En revanche, je trouve ridicule que les médecins refusent de parler de vin ou d’alcool. Si on boit du vin à table, on n’est pas obligé de se bourrer la gueule ! Ce n’est pas comme avec la cigarette. Le problème est que certains médecins ne veulent pas dire qu’un verre de vin quotidien est bon pour la santé par crainte qu’une personne pense qu’elle peut en boire quatre en se disant que ce sera ­encore plus bénéfique. Il faut prendre les gens pour des adultes.

 

Le vin est-il une boisson ou bien un aliment ?

 

Vu le nombre de calories que le vin contient, c’est un aliment. Un aliment sucré qui se boit et qui, paradoxalement, hydrate et déshydrate en même temps. C’est pour cela que le vin peut donner mal à la tête. Pas seulement à cause des sulfites qu’il peut contenir.

 

L’alcool en général contient une hormone antidiurétique, qui nous empêche d’uriner tout ce qu’on boit. Cette hormone intervient pour que le rein réabsorbe l’eau qui passe par lui. Si cette hormone antidiurétique ne fonctionne pas bien, on urine beaucoup. Si vous avez mal à la tête le matin après avoir bu la veille, c’est que vous vous êtes déshydraté le cerveau. Aussi, buvez un verre d’eau après chaque verre de vin : vous n’aurez pas de souci.

 

Vous souvenez-vous de votre premier verre de vin ?

 

Non, mais je me souviens de ma première cuite. C’était au fendant, un vin blanc suisse. Je devais avoir 15 ans. Je me souviens aussi de ma dernière cuite, avec du rhum arrangé, à La Réunion. J’ai fini les bras en croix sur le trottoir ­devant le bar…

 

Mais votre premier verre de bon vin, celui qui vous a marqué ?

 

Oui. J’avais l’habitude d’aller une fois par an dans un restaurant trois étoiles. Un saint-estèphe m’a marqué. Et, une autre fois, un aloxe-corton. D’ailleurs, l’aloxe-corton est devenu mon vin préféré, même si je ne suis pas un grand connaisseur.

 

Avez-vous une cave ?

 

Oui. Elle est pleine de côtes-du-rhône et du Carpe Diem de mon voisin, en Provence. Elle est aussi pleine de très bons vins qui figuraient sur la liste de mon premier mariage. Pour mon second ­mariage, notre liste était constituée… de pieds de vigne. Nos amis ont ainsi financé la vigne que j’ai plantée, il y a deux ans, devant ma maison du Var.

 

Quel cépage ?

 

Mille pieds de syrah. Les gens du coin m’ont recommandé ce cépage. J’apporterai les raisins à la coopérative d’Entrecasteaux, et j’essaierai de comprendre comment se fait le vin. Je vais imprimer mes étiquettes, comme je le fais déjà pour mon huile d’olive. J’apporte mes olives dans un moulin et je récupère 180 litres d’huile, dont je me sers dans l’année. J’en offre en cadeaux, aussi.

 

C’est toute la culture du vin qui vous intéresse ?

 

Oui, et jusqu’au moment du partage avec les amis. Chaque année, ils viendront chez moi pendant les vendanges. Je visite des domaines, aussi. Par exemple, celui d’Alphonse Mellot à Sancerre.

 

Faire un grand vin est-il votre préoccupation ?

 

Non… Mais j’espère que ce sera un bon rouge des côtes-de-provence. Je ne veux pas faire de rosé, car on n’en boit pas l’hiver. Et puis, je vais probablement cultiver en bio. Le vigneron de Carpe Diem, qui est en bio, s’occupera de ma vigne. Je ­deviens écolo !

 

Faites-vous attention au vin que vous buvez ?

 

Face à un grand vin, je m’arrête, je regarde la robe, je le sens. Les premières sensations sont les plus importantes. C’est pour cela, que dans un dîner, je sers toujours les meilleures bouteilles d’abord. Mais je suis peu connaisseur. Un jour, je suis allé avec des amis au restaurant ­Astrance, à Paris. Ils étaient persuadés que j’étais un grand connaisseur parce que j’ai une cave c’est en fait un ami médecin, grand amateur, qui me conseille.

 

Avant ce dîner, je m’étais acoquiné avec le sommelier afin que je puisse reconnaître, pour chaque vin dégusté à l’aveugle, l’appellation, l’année, le producteur. Mes amis étaient impressionnés ! Mais le sommelier m’a eu, à la fin : il m’avait indiqué un mauvais nom de vin…

 

Qu’est-ce qu’un bon vin ?

 

Celui qui sort de l’ordinaire. Quand on veut bien y prêter attention. Je ne demande pas qu’on s’arrête de respirer, mais je marque le moment de l’ouverture d’une bonne bouteille pour ne pas la boire machinalement. Eh ! Attention : là, j’ouvre un super-bordeaux ! Je veux qu’on le déguste.

 

Le vin doit-il être nécessairement bu à table ?

 

Pas forcément. Pour moi, l’apéritif, c’est du vin, souvent rouge. Toujours avec des trucs à grignoter. Mais je ne bois jamais de vin à midi, sinon c’est terrible, je m’endors.

 

Buvez-vous tous les jours ?

 

Non. D’ailleurs, comme je dois être au top niveau poids pour un défi sportif que je me suis lancé, je vais arrêter le vin pendant une semaine, afin de perdre un peu plus d’un kilo.

 

Que pensez-vous de la loi Evin, qui limite la publicité pour le vin ?

 

Je sais que le monde du vin voudrait plus de liberté, mais c’est compliqué en France, parce que l’éducation n’est pas au top en ce qui concerne la consommation. Avant de libérer la publicité pour le vin, il y a un grand travail à faire sur la transmission. Apprendre à apprécier le vin, à prendre le temps de l’apprécier. Mon fils de 20 ans sait l’apprécier. Mes deux autres fils sont encore trop petits. Mais je leur transmets le goût du vin.

 

Vos parents ont-ils fait de même avec vous ?

 

C’était une autre époque. A Paris, on n’avait pas de cave. Mon père m’envoyait chez le caviste, qui remplissait nos bouteilles étoilées consignées d’un vin rouge qui devait faire des trous à l’estomac.

 

Des médecins voudraient que les publicités pour le vin comportent la formule « l’alcool est dangereux pour la santé » plutôt que « l’abus d’alcool est dangereux pour la santé ». Qu’en pensez-vous ?

 

Franchement, ça n’a pas d’importance que ce soit l’une ou l’autre. Personne ne lit ce qui est écrit et répété partout ! Vous croyez que cette phrase peut changer quelque chose pour celui qui est alcoolo-dépendant ? Quelle que soit la tournure de la phrase, elle n’a aucune efficacité.

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15 juin 2017 4 15 /06 /juin /2017 05:25
La viticulture est 1 œuvre d’inscription dans le temps, lorsque l’on boit du vin, on boit le temps qu’il a fait et le temps qui passe…

Catherine Bernard, vigneronne à la Carbonnelle de Saint-Drézéry, et moi sommes devenus complices depuis le jour où, sur la place de la comédie à Montpellier, à la terrasse d’un café, la journaliste qu’elle était alors, m’avait passé plusieurs heures sur le grill de ses questions pertinentes à propos de mon foutu rapport qui avait fait de moi « une star des médias » et le chouchou de la Toile [rire de Catherine...]

 

Complice avec une journaliste allez-vous ironiser, ça n’est pas bien, c'est péché mortel [rire de Catherine] pour que vous en arriviez-là vous avait-elle bien ciré les pompes, encensé, passé les plats comme vous le souhaitiez, contribué à la promotion de votre «œuvre impérissable» ?

 

Que nenni !

 

La Catherine elle avait soigneusement dépiauté le moineau [rire de Catherine] avec compétence, un zeste d’ironie, pointé les insuffisances du texte, posé les bonnes questions, même celles qui ne font pas plaisir. Elle l’avait lu ce fichu rapport, surligné, comme aime le faire NKM, du vrai travail de journaliste.

 

Alors, le jour où la Catherine décida de poser son stylo pour empoigner la pioche et le sécateur je me suis mué, lorsqu’elle a fait appel à son cercle de proches et d’amis, en détenteur de parts de son GFA de la Carbonnelle.

 

Pour les plus curieux d’entre vous, comme j’ai souvent chroniqué sur ma vigneronne préférée vous glissez Catherine Bernard dans le rectangle RECHERCHER en haut à droite du blog et vous pourrez les lire.

 

La première publiée 16 février 2011, L’acidité selon Catherine Bernard, faisait référence à son livre « Dans les vignes » l’histoire de sa nouvelle vie qui, après sa formation au CFPPA pour préparer un BPA viticulture-œnologie, était alors dans ses vignes et dans son chai…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bref, la Catherine avait gardé son goût d’écrire.

 

Et maintenant, chaque année, dans ses vignes, elle pratique, avec le même brio, l’art du discours lors de l’AG annuelle du GFA.

 

Comme je suis un gros fainéant je n’ai assisté qu’une seule fois à l’AG, ce qui me vaut de me faire tirer les oreilles par Catherine, gronder, son dernier message après la dernière AG est clair : 

 

«Jacques, débrouillez vous pour venir un jour avec votre ami Jean-Louis Vallet qui vient lui aussi d'envoyer sa procuration. La maison est ouverte même hors AG. »

Je vous embrasse
 

Catherine

 

Promis juré j'irai, mais en attendant , pour me faire pardonner, je propose à votre lecture son excellent petit speech lors de l’AG du samedi 10 juin dernier :

 

Une très belle réflexion :

 

Il est devenu de bon ton de dire : « le vin se fait à la vigne ».

 

Oui, mais sait-on concrètement à quel point ?

 

Le vin se fait à la vigne, mais surtout, tout procède de la vigne.

 

Je vais essayer de dénombrer ce tout.

 

Les trois décisions que nous allons examiner m’ont été inspirées dans et par les vignes.

 

En 2014 j’ai planté, 33 ares de cinsault, mon troisième plantier en 13 ans, mais le premier à réellement s’inscrire dans un territoire. Ce printemps, qui est leur quatrième printemps, était celui de la formation des souches. Les trois années précédentes étaient celui de l’enracinement. Je les ai donc ébourgeonnés, attachés à leur piquet, piochés. Et c’est en faisant ce travail de patience et d’observation qu’il m’a semblé limpide d’instaurer une cogérance dans le GFA. C’est la première décision que nous allons examiner.

 

Les cinsaults ont quatre printemps, mais en réalité, ils sont les descendants des cinsaults des Combes puisque ce sont les bourgeons de ces vieux cinsaults, les bourgeons issus des plus beaux bois qui ont été greffés sur les porte-greffes. Les cinsaults des Combes sont comme les vieilles gens. Ils ne font plus beaucoup de bois, plus beaucoup de feuilles, plus beaucoup de raisins. Ils s’éteignent doucement comme la flamme d’une bougie, mais leurs bois ont donné de jeunes bois vigoureux, fougueux.

 

Encore que comme dans toutes les familles, il y en ait des chétifs, des impétueux, des dociles, des impétueux indociles, des vigoureux dociles, des chétifs récalcitrants…. Ces jeunes cinsaults, je n’en récolterai pas les fruits dans ma vie de vigneronne, mais ils me survivront, nous survivront, du moins, s’ils sont cultivés dans l’esprit d’Olivier de Serres. La vigne ne nous parle de rien d’autre que de pérennité et de transmission, d’inscription dans le temps. Instaurer une cogérance, c’est distinguer le temporel de l’intemporel. Car pour que l’un et l’autre existent, il faut commencer par les distinguer.

 

Cette dimension philosophique a une traduction pragmatique : les fonctions d’ordonnateur, en l’espèce moi la fermière vigneronne, et celle de payeur, le GFA. Quand je plante, quand je remplace les manquants, j’assure le fonctionnement de l’exploitation (je n’aime pas ce mot, mais il n’y en a pas d’autres pour l’instant), et en même temps je valorise le patrimoine du GFA. C’est pourquoi nous allons examiner l’intégration des frais de plantation dans le GFA. C’est la deuxième décision que Michel va détailler.

 

J’ouvre une parenthèse : cet hiver, je suis allée chercher des bois de terret chez Didier Barral à Faugères. Ils sont en pépinière et je les planterai en janvier. Pour mémoire, la Carbonnelle a été pour la première fois plantée de vignes en 1578. L’acquéreur de cette libre pâture ne lui a pas seulement donné un nom, La Carbonnelle. Il y avait planté du terret. Néanmoins, le terret étant l’un des cépages renégats du Languedoc, il a disparu du territoire de Saint Drézéry. Voilà pourquoi je suis allée les chercher si loin.

 

Toujours travaillant dans les vignes, il a fallu se rendre à l’évidence : elles ont cette année environ 12 jours d’avance. Les vendanges seront donc très probablement précoces. De la même manière que le millésime 2016 s’est avéré pauvre en jus. Ce n’est qu’au printemps, au moment de préparer le Carignan et le Rosé pour la mise en bouteille que j’en ai pris conscience. Au lieu de faire 16 000 bouteilles, je n’en ferai que 12 000 sur cette campagne. Aussi, et si vous en êtes d’accord, je vous proposerai exceptionnellement, en troisième décision, une diminution des allocations. Ne pouvant raisonnablement servir du Carignan et du Rosé, j’ai alloué au GFA une barrique de mourvèdre avec un peu de Carbonnelle. Ils seront en magnum en juillet.

 

La viticulture est une œuvre d’inscription dans le temps. Nous avons tous besoin de nous inscrire dans le temps. C’est ainsi que lorsque l’on boit du vin, on boit le temps qu’il a fait et le temps qui passe.

 

Saint-Drézéry, le 10 juin 2017

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14 juin 2017 3 14 /06 /juin /2017 06:00
Et si nous transformions les abstentionnistes en abstinents ou en abstènes… plus de « cuchi-cuchi » au lit…

Laurent Ruquier l’animateur de ONPC, soit On n’est pas couché, donne les clés de la différence entre un abstentionniste et un abstinent.

 

« L’abstention, c’est l’inverse de l’abstinence puisque l’abstinence, c’est quand on ne s'est jamais fait baiser alors que l’abstention c’est quand on l’a été trop souvent »

 

Une suggestion pour lutter contre l’abstention

 

« La candidate du parti mexicain Accion Nacional, Josefina Vazquez Mota, appelle les femmes à moduler l'accomplissement du devoir conjugal en fonction de l'attitude civique de leur mari.

 

Sa suggestion : un mois sans "cuchi-cuchi" pour l'époux abstentionniste ou un mois avec double "cuchi-cuchi" pour les votants. Les Mexicaines n'ont pas toutes apprécié, surtout au sein de ce parti très conservateur. On attendra le résultat des élections pour de plus amples commentaires.

 

PATRICE GOUY publié le 28/06/2012 Le Point

 

Abstention, abstinence, abstème

 

Le nom abstention, du latin abstentio de la même famille que abstinere = tenir éloigné désigne le fait de ne pas prendre part à quelque chose, notamment un vote, ne pas exercer un droit.

 

Les personnes qui s’abstiennent de voter s’appellent d’ailleurs des abstentionnistes, à ne pas confondre avec ceux qui votent blanc, puisque le vote de ces derniers est pris en compte dans les résultats du scrutin.

 

Autrefois cependant, au XIIe siècle, le mot astention (ancien français) désignait l’abstinence, dans la mesure où la langue souvent issue du latin était très attachée à la vie religieuse.

 

Le nom abstinence, du latin abstinentia n’a de rapport à notre époque avec le nom abstention que, globalement, dans le fait de ne pas effectuer une action… mais comme nous allons le constater, pas vraiment du même style !

 

L’abstinence n’a donc rien à voir avec le vote. Elle fait référence surtout à la chasteté, notion dont les détails varient d’une culture à l’autre, à savoir la retenue sexuelle, tant dans l’imagination (pensées érotiques) que dans la pratique (relations intimes). Elle désigne plus généralement toute privation volontaire (ou imposée) de plaisirs… quels qu’ils soient ! Les principales religions conseillent voire imposent à leurs fidèles des périodes d’abstinence tant sexuelle qu’alimentaire à certaines périodes de l’année, selon les fêtes dictées par leurs textes sacrés (Bible, Torah, Coran…).

 

Le mot abstème vient du latin abstemius (« qui s'abstient de vin », « sobre »). Il est à la fois adjectif et nom commun. Au 16ème siècle « abstème » signifiait : qui ne boit pas de vin ; ce mot passé du droit ecclésiastique s’est étendu à la langue littéraire. Jean-Jacques Rousseau, malgré son penchant pour les « petites buvettes », pensait que l’homme est abstème par nature.

 

Extrait d’Emile de Jean-Jacques Rousseau :

 

« La première fois qu’un sauvage boit du vin, il fait la grimace et le rejette ; et parmi nous, quiconque a vécu jusqu’à vingt ans sans goûter les liqueurs fermentées ne peut plus s’y accoutumer ! Nous serions tous abstèmes, si l’on ne nous eut donné du vin dans nos jeunes ans. »

 

Pour finir un petit poème en prose par Simon DOMINATI le 19.03.10

 

C’est le temps du désamour. Plus de la moitié de l’électorat de ce pays boude, tourne le dos à ceux pour qui il avait des yeux de Chimène. Finis les sourires, les joies, les embrassades et les rassemblements. Ils s’éparpillent moroses, muets, absents mais très présents lors du décompte des voix.

 

Ils n’iront pas dans la chambre commune le jour du scrutin. Ils ont perdu le bonheur de flirter avec l’urne espérant l’avènement du bébé qu’ils avaient imaginé. Ce plaisir à deux qui naît et grandit jusqu’à l’extase dans l’intimité de l’isoloir. Ce face à face, la caresse du bulletin, les baisers déposés aux quatre coins de la liste pour l’ensemencer juste avant de la cacher dans le secret de l’enveloppe bulle. Après cet acte d’amour, bien à l’abri des regards, c’est la pénétration finale en public, ce moment où tout est lâché dans l’urne dans un dernier râle : « A voté ! »

 

L’électeur n’a plus envie de cet acte de procréation. Il n’a plus confiance en son partenaire, l’amour s’est enfui. Le bébé né d’un désamour lui fait peur. Plutôt l’abstinence qu’un bébé malheureux, à la vie chaotique qui le priverait du bonheur d’être parent.

 

Cette plus de moitié de France n’y croit plus. Elle n’aime plus, n’admire plus. Lorsque la confiance est partie et que l’étincelle qui brille dans l’œil s’est éteinte tout se ternit. Toutes ces étoiles qui s’évanouissent en même temps vous privent du brin de folie qui vous amène jusqu’au lit.

 

La France est triste et abstinente. Elle boude ses plaisirs et n’ira pas au rendez-vous derrière le rideau des Maisons Communes.

 

Elle s’isolera dans la nature parmi les fleurs naissantes et la douce chaleur du printemps qui arrive.

 

Vous sentez ce parfum de violettes ? L’amour préfère le champ au chant des Sirènes

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