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27 juin 2006 2 27 /06 /juin /2006 10:00

Depuis que je me suis lancé comme un chien fou - pas un jeune chien vu mon âge, certains auraient plutôt tendance à me qualifier de cheval de retour - dans cette entreprise d'un nouveau type : écrire une chronique chaque jour sur l'internet je ne me suis jamais trouvé confronté au syndrome de la page blanche. Parfois en arrivant devant mon écran je ne sais pas trop ce que je vais traiter, je me lance et, avec plus ou moins de bonheur, je ponds. Mon plus gros problème, je l'avoue, c'est que parfois ma plume me démange, j'ai envie de déborder de ma petite coupe de vin, de laisser aller mon tempérament sur des sujets qui agitent notre beau pays. La raison l'emporte toujours et je me contente de rêver à une tribune libre dans un grand journal du soir...

 

Cette maîtrise de soi, cette capacité à se maintenir dans les limites prescrites, je les ai obtenues en pratiquant deux métiers aux contraintes très strictes : nègre et haut-parleur. Je m'explique. Le nègre est celui qui prête sa plume à un autre sans revendiquer de droits d'auteur : j'ai beaucoup écrit de discours, de tribunes, de bouts de livres, de préfaces, de réponses à des interviews, d'éléments pour prise de parole dans des enceintes diverses : assemblée nationale, sénat, conseil des Ministres de l'UE etcétéri ecétéra... C'est simple, du genre figures imposées en patinage artistique, plus on écrit plus on maîtrise la technique. On n'éprouve aucune frustration d'auteur. On s'amuse parfois en entendant l'impétrant prononcer avec conviction vos phrases de besogneux de la plume. Ma préférence allait aux interviews, j'adorais placer des formules chocs : ainsi j'ai fait dire à un de mes Ministres dans le Midi Libre " je ne serai pas le syndic de faillite de la viticulture du Languedoc... " Titre choc, bonnes reprises et plaisir extrême de l'homme de l'ombre.

 

Le second métier : haut-parleur, c'est-à-dire prononceur de discours pour le compte de son Ministre, est un exercice plus périlleux car, soit on s'en tient à la lecture d'un discours écrit et on fait dans le genre soporifique et chiant, soit on brode sur le texte ou pire, on improvise, au risque de se laisser emporter par la chaleur de l'ambiance et de déraper.  Le secteur agricole, eut égard à l'inflation d'organisations de tout poils, de la diversité des produits, propose au Ministre une foultitude de congrès. Pour ceux du top 10 le Ministre donne de sa personne, souvent pour se faire houspiller, brocarder ou même insulter, mais c'est ainsi, sous l'oeil des grands chefs, qui font d'ordinaire des ronds de jambe dans l'antichambre, la base, ou tout du moins sa représentation, se défoule. Pour les autres pinces-fesses le cabinet s'y colle. Donc j'ai beaucoup discouru. Deux anecdotes pour conclure ce propos sans queue ni tête : mon premier discours et mon discours devant la CGB...

 

Mon premier discours eut pour cadre le Congrès des Planteurs de Tabac à Poitiers. J'arrive en train, un adjoint du DDA, dans une 4L pourrie, me véhicule, il se confond en excuses pour le peu de standing du carrosse, je le rassure en lui disant que c'est normal pour un représentant des SC (1), il rigole. Bref je me retrouve face à 2000 personnes, un écho horrible et un discours écrit, très bien écrit, avec des phrases interminables, des sujets auxquels je ne bite rien. Je dégouline. Je m'accroche et je jure de ne plus jamais me soumettre à une telle épreuve. Les planteurs et leurs épouses sont contents. Par la suite j'ai toujours brodé ou improvisé.

 

Le sommet de cette prise de risque fut mon show au Palais des Congrès de la Porte Maillot devant le Congrès de la Confédération générale des Betteraviers. Le plus beau lobby du monde agricole, là encore 1500 pékins assez remontés contre les va-nu-pieds du pouvoir. Le président improvise. Discours au bazooka. Le mien, écrit par les spécialistes, est un chef d'oeuvre de technicité. La salle fait un triomphe au président. Je monte à la tribune. C'est chaud. Je les sens goguenards. Je me tourne vers le président, je lui tend le discours écrit en lui disant de bien vouloir le publier dans le Betteravier Français car il est riche et j'attaque les mains sur le pupitre une réponse improvisée point par point au président, je rends les coups, je pointe les contradictions, je ne lache rien, j'ironise même, la salle commence à se détendre, le silence est religieux et en final elle m'applaudit. Le Betteravier Français se fendra d'un bel éditorial pour saluer la pugnacité du représentant du Ministre et depuis ce jour je suis toujours invité au Congrès de la CGB.  

 

(1) abréviation très usitée de la coalition au pouvoir après 1981

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26 juin 2006 1 26 /06 /juin /2006 10:02

Samedi en fin de journée j'ai pris le TGV, direction Nantes, changement : je monte dans un TER flambant neuf, climatisé, direction la Mothe-Achard, mon pays, là où je suis né. Petit détail, la SNCF adore compliquer la vie de ses clients, ce beau TER financé par le Conseil Régional ne s'arrête pas à la Mothe-Achard car nous sommes un samedi. Les autres jours oui, pourtant lorsque j'ai repris ce même TER dimanche en fin de journée, à la gare de la Mothe-Achard, j'ai pu constater que celle-ci était fermée et que le défaut de chef de gare ne justifiait pas le non arrêt du samedi à 22H15. Passons, ma nostalgie de l'autorail rouge avec le chef de train beuglant : les Clouzeaux, Ste Flaive des Loups, La Mothe-Achard... c'est l'âge.

La Mothe-Achard, gros bourg commerçant autrefois, est devenu un vaste dortoir pavillonnaire depuis l'implantation de l'entreprise PRB spécialiste des enduits de bâtiments. Ses grosses tours blanches dominent la zône industrielle de la gare. Mais dans le bourg, il n'y a plus de boucher et c'est la commune qui a du racheter la poissonnerie pour y réinstaller un jeune. L'hyper U en périphérie draine les consommateurs en bagnoles. Comme me le fait justement remarquer ma vieille maman : et ceux qui n'en ont pas comment font-ils? Bref, ce bout de Vendée, déjà bien estropié par le remenbrement, ressemble étrangement à un morceau de banlieue en Région Parisienne. Mon frère me dit que l'agriculteur qui a repris son exploitation élève ses animaux aux granulés et a mis les terres en jachère subventionnée. En revanche, le château qui abritait mon Ecole d'agriculture vient d'être transformé en hôtel de luxe, par le groupe Accor me dit-on, et a retrouvé le nom des anciens propriétaires : les de Brantes, la veuve du dernier des de Brantes avait légué ses biens à la Congrégation du Bienheureux Grignon de Montfort pour tenter de réparer la vie dissolue de son défunt époux. Moi, j'y ai soigné ma première grippe - l'infirmerie était au premier étage du château - et c'est à cette occasion que l'abbé Blanchet m'a parlé pour la première fois de l'ENA.

Bref mes amis, tout change pour que rien ne change, et en écoutant s'égrener le temps dans la maison de maman je contemplais les photos de ses petits enfants, de nous ses enfants, mon père avec le frère Fazilleau assis sur l'aiguille de la batteuse et je repensais à cette anecdocte au temps où les estivants traversaient la Mothe-Achard pour aller soit vers les Sables d'Olonne soit vers Saint Gilles s/Vie : c'était en plein cagnard d'août, je baguenaudais dans le bourg, en culottes courtes, une grosse voiture s'arrête pour me demander un renseignement. Le chauffeur me toisant me dit soudain : " toi tu n'es pas d'ici... " Stupéfait, je lui répondais que si mais, lorsqu'il repartait, son affirmation me tourmenta : qu'avais-je donc dans mon apparence physique qui puisse l'avoir amené à cette étrange affirmation ? Comme je suis un obstiné, après examen devant le miroir, je conclus que ce devait être mes cheveux jais bouclés et ma peau mate (le mot bronzé n'était pas encore dans mon vocabulaire) qui avaient à ses yeux fait de moi un étranger.

Alors, bien des années plus tard j'ai griffonné un petit texte que je vous livre " Moi l'enfant d'ici, ce pays marin situé à l'extrémité du Poitou, un peu à l'écart du seuil à travers lequel, au cours des âges, passèrent les grandes invasions, les pélérinages d'Espagne, et s'affrontèrent toujours dans les rivalités de la guerre ou l'émulation de la paix, le Nord et le Midi, je suis brun de peau et j'ai les cheveux frisés : chaque invasion laisse sa marque... " C'est sans doute pour cela que j'ai toujours tenté d'être un trait d'union.

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23 juin 2006 5 23 /06 /juin /2006 09:41

J'ai ouï-dire que pour lutter contre la toute puissance des marques dans les cours d'école le biographe d'Henri IV préconisait la blouse obligatoire : le retour du sarrau ! Après tout, pourquoi pas,  s'il n'y a pas d'autres sujets d'importance à mettre en débat nous pouvons nous remobiliser comme lors du référendum : un face à face très chaud entre les ouiouistes et les nonistes du sarrau. Depuis 5ans dans le monde du vin nous avons joué à ce petit jeu de rien du tout qui débouche sur rien du tout : marques contre AOC, tradition contre modernité, copeaux or not copeaux, complexité contre simplicité, Languedoc contre Bordeaux... Résultat : la purge, les "méchants eurocrates " qui ont une calculette à la place du coeur tirent les conséquences de notre incapacité à vendre le vin produit : proposition d'arrachage massif  du vignoble. Pour les non-initiés, il s'agit d'un arrachage volontaire, iront ceux qui voudront ou qui ne pourront pas faire autrement.

 

photosarrau.JPG

 

Pour en revenir, au sarrau, hier au soir je dînais aux Pipos face à l'Ecole Polytechnique : pour je ne sais quelle raison les Polytechniciens étaient de sortie, en uniforme, alors vive l'uniforme ! En fait, ça ne nous changerait pas beaucoup de ce que nous cotoyons tous les jours. " Dans notre société hypermoderne et "performeuse", la pure spontanéité est devenue rarissime. Tout le monde est plus ou moins factice, joue un rôle avec une gravité sans faille. Du PDG qui enfile chaque jour son costume sombre de tueur en col blanc au bad boy des cités qui arbore ostensiblement sa tenue ultra-codifiée de gangstarap, tout le monde fait l'acteur, endosse une panoplie permettant de s'identifier socialement. Il n'y a pas si longtemps, les métiers avaient un uniforme, dans la rue on pouvait voir passer le charpentier, le maçon, ou le bougnat, cette fierté d'appartenir à une corporation les dispensait d'avoir à jouer un rôle, il leur suffisait d'être, tout simplement. Depuis, les frontières se sont brouillées, et chacun choisit son propre habit de scène au magasin des accessoires, c'est-à-dire chez Armani ou chez Décathlon, ce qui aboutit, non à la diversité, mais au contraire, à une forme de standardisation fondée sur quelques archétypes convenus et débouchant sur l'anonymat pur et simple..." Olivier Bardolle Des ravages du manque de sincérité dans les relations humaines L'Esprit des Péninsules

 

Beau sujet de Baccalauréat pour nos futurs viticulteurs ou mieux petit devoir sur table, du genre dictée de Pivot, pour tout ce que la France compte de grands esprits, plumitifs variés, critiques autoproclamés, qui pensent le vin pour le plus grand profit des petites bêtes étranges que sont les consommateurs, étant entendu que le consommateur de vin, pétri par notre culture nationale du vin, imprégné d'histoire, indifférent à toutes les tendances, surtout si c'est une nana de Birmingham ou un chauffeur routier de l'Ohio, attend avec la même ferveur qu'il attend son feuilleton télé d'être éduqué, formaté, guidé dans le monde merveilleux du vin par tout ce beau monde. Comme le dit Bardolle, à propos des intellectuels parisiens de la "rive gauche", notre vocation consiste à éclairer le monde "en toute simplicité" Qu'on le regrette ou non " les hommes ont la passion des idées simples, le complexe, l'ambigu, le raffiné les inquiètent, la mentalité générale procède d'une psychologie de basse-cour. Tout doit être conforme, convenu, prévisible."

 

Et vous chers lecteurs qu'en pensez-vous ? Bon week-end ! 

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22 juin 2006 4 22 /06 /juin /2006 09:30

C'est BOVE avec un e muet pazin é, je ne mélange pas les torchons avec les serviettes, Emmanuel Bobovnikoff est né le mercredi 20 avril 1898 entre onze heures et demie et midi à la maternité du bd du Port Royal. Il pesait 6 livres et demi. Sa mère Henriette Michels est luxembourgeoise, son père Emmanuel est né à Kiev dans le ghetto juif.  Emmanuel Bove " le plus grand des auteurs français méconnus." Avec l'été, je reprends mon slogan de l'an dernier : " si vous ne souhaitez pas bronzer idiot lisez le blog Berthomeau... "

Mes chroniques prendront donc parfois un parfum littéraire, comme celle de ce matin. Si j'ai découvert Bove c'est grâce à un éditeur bordelais : Le Castor Astral qui a publié une excellente biographie : Emmanuel Bove la vie comme une ombre de Raymond Cousse et Jean-Luc Bitton et réédité certains de ses romans. Si je vous mets en appétit commencez donc par le premier roman de Bove, Mes Amis publié chez Flammarion. Les deux premières phrases sont un extrait sec du style bovien " Quand je m'éveille, ma bouche est ouverte. Mes dents sont grasses : les brosser le soir serait mieux, mais je n'en ai jamais le courage. "

Les amateurs de Bove se recrutent dans un éventail assez large pour preuve cette lettre adressée au surréaliste Philippe Soupault " Cher Monsieur, J'espère que vous ne m'en voudrez pas de l'indiscrétion qui consiste à vous écrire sans vous connaître et qui esr d'autant plus coupable qu'il s'agit de renseignements à vous demander. J'ai été intéressé récemment par la lecture de l'oeuvre d'Emmanuel Bove, qui a aujourd'hui complètement disparu, non seulement de la devanture mais de l'arrière-fond des librairies. J'imagine que vous avez eu l'occasion de le rencontrer, puisque l'essentiel de son oeuvre se situe à une époque où vous animiez les mouvements littéraires contemporains. Ce serait pour moi un grand privilège si vous pouviez me donner quelques renseignements à son endroit. Qui était-il ? Quelle était sa manière d'être ? Quelles traces a-t-il laissées ? J'ai appris que madame Bove vivait encore à l'heure actuelle. Avez-vous eu l'occasion de savoir où on peut la joindre ?  Vous serez surpris de cette curiosité qui n'entre pas dans l'exercice normal de mes fonctions, mais s'il est interdit au ministre des Finances d'avoir un coeur, du moins selon la réputation, il ne lui est pas interdit de s'intéresser à la littérature.  Valéry Giscard d'Estaing en 1972

Le plus beau texte de Bove, pour moi, est la nouvelle Bécon-les-Bruyères dont je possède l'édition originale. Je vous en offre un petit extrait, pour le plaisir " Bécon-les-bruyères existe à peine. La gare qui porte pourtant son nom printanier prévient le voyageur, dès le quai, qu'en sortant à droite il se trouvera côté-Asnières, à gauche côté Courbevoie. Il est donc nécessaire, avant de parler de cette ville, de tirer à soi tout ce qui lui appartient, ainsi que les personnes qui rassemblent les objets qui leur appartiennent avant de les compter. L'enchevêtrement des communes de banlieue empêche d'avoir cette manie. Aucun accident de terrain, aucune de ces rivières qui suivent le bord des départements ne les séparent. Il y a tant de maisons que l'on pense être dans un vallon alors que l'on se trouve sur une colline... "

A votre disposition chers lecteurs pour d'autres précisions ou références sur Emmanuel Bove...

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21 juin 2006 3 21 /06 /juin /2006 09:26

Encore emmitoufflé dans la ouatte du sommeil, ce matin j'entendais le journaliste de France Inter dire que notre Raie Mon national, l'ex-tatanneur des gazons, préparait sa défense " si nos pioupious cramponnés rentraient prématurément d'Allemagne ce serait la faute de l'arbitrage... " Bé voyons, comme dab, nous sommes des victimes, on nous refuse des pénalties indiscutables, des buts qu'un enfant de 5 ans aurait accordé, et ployant sous le fardeau de l'injustice nous ruminerons notre rancoeur si le Togo n'a pas le bon goût de nous offrir un carton. Que nous fussions un peu poussif, peu réaliste, verbeux et un chouiai arrogant sous la houlette d'un entraîneur qui ressemble plus à un adjudant de quartier de la coloniale qu'à un meneur d'hommes pèse très peu dans la très belle balance dont nous nous servons à tout propos pour tenter de justifier l'injustifiable. Le c'est pas de ma faute est notre credo national.

Vous me voyez venir avec mes gros sabots de vendéen crotté : on nage dans le même potage dans notre beau secteur... Yès ! J'en prends pour exemple " la quinzaine folle du CIVB " En lisant le papier de Compadre dans Sud-Ouest j'hallucine. Je ne porte en cela aucun jugement sur le résultat de l'élection. Non je constate simplement depuis des mois et des semaines que le débat de fond n'est jamais abordé. On fait comme si de rien n'était. On rame dans le strict conjoncturel. On se refuse à poser sur la table les questions qui fâchent. On perd du temps et, en l'occurence, le temps est une donnée qui est capitale pour nous permettre de reprendre l'initiative. En octobre 2003, dans Aquitaine Eco supplément de Sud-Ouest je me permettais de dire " ce qui est nouveau pour nous français, c'est que nous allons subir la première crise des vins dits de qualité qui ne trouveront plus preneurs car ils ne correspondront plus aux demandes du marché..."

Si ça vous dit je peux vous faire passer la suite de cette interview. Mon propos n'est pas ce matin de dire " j'avais raison avant tout le monde mais de demander instamment à ceux qui ont des mandats de responsabilité de bien vouloir assumer ces responsabilités tant au plan de leur région, qu'au plan national et communautaire. L'heure n'est plus aux estrades, ni aux discours mais aux travaux pratiques avec les opérateurs. Faute de vouloir et de rechercher des compromis solides, de choisir, nous laisserons la place aux autres compétiteurs, priverons notre pays d'une belle part de richesse et d'emploi, nous pourrons alors exporter les plus beaux fleurons nationaux de la justification, ceux qui clameront au monde qui s'en fichera pas mal que nous sommes les victimes des grands prédateurs mondiaux de la vigne et du vin. Comme j'aimais à le dire à un ami anglais du temps où au rugby nous nous plaignions de l'arbitrage : " la seule façon de faire avec vous c'est de vous battre "Gagner n'est pas un gros mot et perdre, en sport, nullement une catastrophe. En revanche, pour ce qui est de l'économie on ne vend pas des mots d'excuses mais du vin. 

 

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20 juin 2006 2 20 /06 /juin /2006 09:19

Mon premier contact charnel avec la mort je l'ai connu le jour où Pierre Bironneau, un de mes camarades de classe, mourrut, comme ça, sans préavis. Je devais avoir 6 ou 7 ans. Avec la mémé Marie nous montâmes à pied jusqu'à la métairie, au lieu dit Villeneuve, pour lui rendre visite. C'était le soir, dans la grande chambre mal éclairée, dans le grand lit à rouleaux, les mains jointes sur un chapelet, son petit visage livide aux yeux clos, le petit Bironneau muré dans son silence éternel me glaça d'effroi. Le jour de sa mise en terre, étant enfant de choeur, pendant le Dies Irae je fus pris d'un chagrin inestinguible, je pleurai toutes les larmes de mon corps, j'avais peur qu'on me vola ma vie, je trouvai ça trop injuste.

Cette injustice je la ressentis à son apogée lorsque mon père, en pleine moisson, se coucha doucement sur le chaume et, avec son éternel sourire, trouva le repos qui n'avait pas été le lot de sa vie laborieuse. La mort me privait de lui au moment où, à l'aube de ma vie d'homme, j'avais tant besoin de lui. Ce lien rompu trop tôt en imprima un autre, invisible, qui me servit d'armature, structura mon parcours professionnel, fit de moi ce que je pensais qu'il souhaitait que je fusses. Sur mon bureau de la rue de Varenne, sa photo me rappelait à l'ordre : rappelle-toi d'où tu viens mon fils...

René Renou est mort. En cette circonstance, moi qui les aime tant,  je n'aime pas les mots : ils sont trop petits ou trop boursouflés, je leur préfère le silence du recueillement. Alors ce matin je m'incline devant ton courage face à la maladie René, je salue en connaisseur ton anti-conformisme : nous nous sommes tant côtoyés à la tribune, je m'associe à la douleur et à la peine des tiens, je me permets de t'offrir la chanson du bougon enterré dans le cimetière marin de Sète " les copains d'abord " et le premier vers d'une tragédie de Sophocle "C'est une vérité depuis longtemps reconnue des hommes, que nul ne peut savoir, pour aucun mortel, avant l'instant de sa mort, si la vie lui fut douce ou cruelle" Adieu René, avec ceux qui t'aimaient bien nous lèverons nos verres car la vie continue et nous essayerons de faire fructifier ton héritage...

 

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19 juin 2006 1 19 /06 /juin /2006 09:31

Chers collègues (1)

Vous êtes plus à plaindre qu'à blamer. Que l'un ou plusieurs d'entre vous puissent avoir conçu - mot trop riche en l'espèce - un tel sujet, que toute la chaîne hiérarchique l'ait approuvé, montre à l'évidence que la sensibilité et l'intelligence des hommes et du milieu dans lequel vous êtes sensés exercer votre mission d'enseignant vous font cruellement défaut. Comment des transmetteurs de savoir, des éveilleurs d'intelligence peuvent-ils proposer en sujet de baccalauréat technologique, coefficient 4, durée 3H 30, ce torchonnet ni fait, ni à faire ? Le sujet est inintelligent et surtout inintelligible. C'est de la bouillie pour les chats qui mélange le vin, l'alcoolémie, la sécurité routière, la biologie écologie où il faut attendre le point 4 pour voir apparaître une phrase construite et l'ébauche d'une question. Aucun exposé des motifs, aucun cadrage, démerdez-vous les gamins les profs ne savent même plus formuler un sujet.

Sur le fond du sujet, puisque l'inénarable représentant syndical interviewé sur la 2 justifie ce torchonnet par des arguments de mission pédagogique - entre nous je ne suis pas sûr que mon grand-père lui aurait confié la mission de garder les vaches - l'absence totale de mise en perspective du sujet condamne les élèves à un exercice d'instruction à charge du produit. Comme je suis de ceux qui ont toujours assumé les risques liés à l'ingestion abusive d'un produit alcoolisé : les pochtrons et les conducteurs bourrés sont les pires ennemis du vin, je puis me permettre de dire à ces soi-disants pédagogues qu'en stigmatisant le produit ils contribuent à l'affrontement entre les chapelles. Si tant est qu'il faille proposer ce type de sujet au baccalauréat alors il faut prendre en compte l'ensemble des arguments en présence afin que les élèves puissent à la fois exercer leur sens critique et appréhender la complexité des phénomènes de société.

Pour autant, voir sous ce sujet une volonté supplémentaire, en haut lieu, d'éradication d'une grande part de la viticulture méridionale c'est faire trop d'honneur aux auteurs qui sont plus bêtes que méchants. Alors plutôt que de réclamer des sanctions je pense, chers collègues, étant donné l'absence de RESPECT, tant vis à vis de vos élèves, que des hommes et des femmes qui vivent de la vigne et du vin, que vous devriez vous excuser par écrit auprès de ceux que vous avez offensés. Vous fendre d'une lettre, bien écrite, sensible où, au lieu de vous justifier pesamment, vous trouveriez les arguments pour expliquer que vous avez été maladroits, que vous allez vous ouvrir à eux - le contact avec les viticulteurs ne vous polluera pas, votre liberté d'enseignant n'en sera nullement entravée - que vous allez travailler à lever les malentendus, tout simplement que vous vous excusez de cette légèreté blamable avec laquelle vous avez abordé un sujet aussi sensible.

Veuillez agréer, chers collègues, l'expression de mon souvenir de toutes les réunions où vos représentants m'ont donné de sévères leçons sur mon incapacité à comprendre les problèmes de la base, de la France profonde...

Jacques BERTHOMEAU

(1) j'ai enseigné dans ma vie, d'abord pour payer mes études supérieures au CEG de Pouzauges (de la 6ième à la 3ième), puis 4 ans au lycée agricole privé de La Roches/Yon (BTA, Bac D', BTS), puis 2 ans à l'Université de Constantine en coopération (maître-assistant), puis après mon passage au cabinet 3ans comme professeur associé de l'Université de Nantes à mi-temps en DESS...   

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16 juin 2006 5 16 /06 /juin /2006 10:27

De nos jours, prendre le temps d'aller à sa guise, de flaner, de rêver, de s'emplir de silence, de découvrir par soi-même, de s'imprégner de la mugnifiscence d'un lieu, de s'isoler pour se laisser gagner par l'émotion esthétique née du choc d'une oeuvre, se heurte à la muraille des bavards, à la cohorte des visiteurs groupés, accoumussés aurait dit ma grand-mère, troupeau badgé emmené par un guide leur délivrant le prêt à penser du nouveau consommateur culturel, qui est majoritairement un retraité qui tue le temps. On fait l'Alhambra, la Joconde, le Moma au pas de charge, quelques clics avec le numérique pour le moi devant un Carravage dont j'ai oublié le nom, et l'on achète en sortant un petit souvenir made in China  dans l'une des échoppes qui infeste les alentours des hauts lieux de l'histoire...

Certains vont me taxer d'élitisme, de mépris pour le petit peuple, j'assume ces critiques sans la plus petite parcelle de honte. Je dis tout haut ce que beaucoup pensent tout bas et j'en reviens à notre cher produit le vin. En ce moment, ça turbulle dans les têtes des zexpers de tout poils, de toutes tendances, classificateurs patentés, metteurs en catégories juridiques agréés, enfileurs de mots abscons, guides autoproclamés pour le peuple des buveurs ignares, ils ont l'âme de bâtisseurs, de refondateurs, de recycleurs de matériaux existants. Lequel d'entre-eux  plantera le premier le drapeau tricolore sur la nouvelle pyramide des vins érigée suite à la énième réunion de ceux qui savent ? Qui sera le nouveau Capus ? Tous rêvent que la postérité puisse accoler leur patronyme à un beau texte gravé dans le bronze.

Moi je l'avoue, à nouveau sans honte, j'ai une conception aristocratique de l'univers du vin. Je fais mienne la remarque d'un prince italien " Un palais dont on connaît toutes les pièces ne vaut pas d'être habité... " Et chers amis, dans un palais comme celui du Guépard, il y a certes des pièces d'apparat, mais aussi les communs, la cuisine, les mansardes, plein de coins et de recoins sombres, des terrasses, des balcons donnant sur les jardins... Alors de grâce, messieurs les ratiocineurs, lâchez-nous les baskets, cessez de vous croire importants, arrêtez de vouloir nous imposer vos dogmes incompréhensibles, contentez-vous de faire le ménage chez vous sans planquer la poussière sous les tapis ou exporter ce dont vous ne voulez plus dans la maison des domestiques. Tenez vos promesses ! Arrêtez de nous prendre pour des demeurés ! En clair faites votre boulot nous on se contentera de boire ce qu'on aime et c'est déjà pas si mal...  

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15 juin 2006 4 15 /06 /juin /2006 08:00

"Pourra-t-on encore parler d'agriculture et de paysannerie, a fortiori d'agriculture durable, s'il n'y a plus de paysans dans les campagnes, si la technologie a entièrement accaparé les techniques agricoles, si la ruralité n'est plus que le seul souci des citadins "encampagnés" et si la majorité de la production alimentaire, mis à part les greniers de végétaux, se fait directement en ville ? Nous sommes à l'orée de transformations radicales quant à la vision de la campagne comme seul et unique lieu de production alimentaire (...) Ce n'est nullement une utopie; on s'est déjà presque fait à l'idée que campagne, agriculture et agriculteurs se rejoignent dans le paysage jusqu'à s'y dissoudre, et l'on accepte dorénavant que tout soit géré pour et à partir du seul univers urbain. On a depuis longtemps pris l'habitude d'aller s'y ravitailler dès que l'on désire plus d'un oeuf ou d'un litre de lait; oui tout court vers la ville.

Partant de cette évidence, deux chercheurs reconnus de l'IRA néerlandais ont imaginé et réalisé les plans et la maquette d'un concept qui vient clore définitivement l'idée que nous pourrions encore nous faire d'une campagne cultivée à vocation nourricière - projet Deltapark de Jan de Wilt et Hensk Van Osten conçu pour Rotterdam - (...) Il faut imaginer un immense bâtiment d'un kilomètre de long sur quatre cents mètres de large, haut de six étages, qui viendrait remplacer les ceintures de maraîchers, les élevages divers, et court-circuiter les intermédiaires de tout poil ainsi que les circuits de livraison de longue distance, projet qui s'inscrit dans un plan hyper-rationnel d'approvisionnement de la ville. Ce bâtiment contiendrait une batterie de deux cent cinquante mille poules pondeuses, un million de poulets de chair, trois cent mille porcs et quelques dizaine de milliers de saumons élevés au sous-sol en piscine; ainsi que des caves à champignons et à endives. La préoccupation du bien-être des animaux serait évidemment prise en compte dans l'organisation même des poulaillers et porcheries : lumière, espace, vie en famille et promenades journalières sur des terrasses allant dans ce sens. Dans une gigantesque serre aménagée sur les toits pousseraient des laitues, des tomates et des poivrons. Dans les étages intermédiaires prendraient place les unités d'abattage, de fabrication, de conditionnement et de conservation pour les aliments préparés en barquettes et sous blisters afin d'être distribués "frais" dans les hypermarchés de la ville. L'énergie pour faire marcher ce complexe serait directement fournie par la fermentation des excréments d'animaux sous forme de biogaz en complément duquel s'ajouteraient des éoliennes installées à demeure. Les déjections serviraient aussi à faire du compost pour la production des légumes. Le lisier de porc retraité, riche en azote, en phosphate et en potassium, fournissant des fertilisants naturels ainsi qu'une grande partie de l'eau potable de l'exploitation. L'air chaud des porcheries et des poulaillers, ventilé dans les serres, servirait de chauffage d'appoint et fournirait aux plantes l'apport en gaz carbonique nécessaire pour accélérer leur croissance...

Chaque chose est ainsi calculée, utilisée, réutilisée, jusqu'à des élevages d'asticots, de grillons et autres insectes élevés en chambre dans les recoins chauds et humides du bâtiment comme protéines vivantes pour les poules et comme garantie pour la qualité "biologique" des oeufs destinés aux consommateurs voisins. On pourrait en rester au projet, mais ce matin, en ouvrant le journal, la réalité a rattrapé cette demi-fiction. J'ai eu comme une confirmation de ce futur déjà en route : dans le centre de Tokyo, dans ce qui fut autrefois une salle des coffres a commencé la culture hydroponique en sous-sol de tomates et des salades (Monde 13 janvier 2005). Si l'expérience est concluante, des rizières seront installées dès 2006 dans les entrailles du bulding..."

Extrait du livre Le village métamorphosé Révolution dans la France profonde Pascal Dibie Plon

 Désolé une erreur de clic met en ligne ma chronique du 15 juin écrite ce jour car demain Sans Interdit se réunit. Toutes mes excuses...

 

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14 juin 2006 3 14 /06 /juin /2006 09:39

Il était une fois dans notre beau pays deux maisons, une vaste et une belle, je n'ai pas écrit grande pour la première car la seconde se serait sentie offensée : la grandeur et le prestige étant son apanage. A Paris, l'une était sise place de la Madeleine, l'autre sur les Champs Elysées, chacune vivait sa vie en surveillant l'autre avec suspicion, le vin bouché ne pouvait bien évidemment se commettre avec celui de consommation courante. Mais comme les voies des buveurs sont impénétrables, que la France s'enrichissait, s'ouvrait, que nos voisins et nos cousins se mettaient à apprécier notre breuvage national sous le couvert de noms prestigieux, le déclin des gens d'en bas profitait aux gens d'en haut. Alors roule Mimille, plein pôt, la vieille maison est accueillante, elle engrange, découpe, délimite, déguste, l'heure est au blizkrieg et plus rien ne pourra arrêter la résistible ascension...

Tout allait bien dans le meilleur des mondes avant qu'un oiseau de mauvaise augure pointe le doigt sur le Nouveau Monde et dans un poulet drôlement ficelé ôse faire remarquer que dans l'auguste maison il faudrait balayer devant la porte, faire un peu de rangement pour que ces foutus nouveaux buveurs s'y retrouvent. Le problème c'est que la gente masculine, ultra-majoritaire dans toutes les maisons, n'a jamais ou si peu, fait le ménage, repassé sa chemise, la ranger et que c'est toujours aux autres de le faire : épouse, compagne, femme de ménage... Résultat : on veut bien faire le tri mais ce dont on ne veut pas on le dépose sur le palier d'en face et que ces braves gens qui ont ramé, trimé, obscurs et besogneux, se démerdent. Nous, ou une partie d'entre-nous, est dans la mouise, alors on veut garder le beurre, l'argent du beurre et la crémière en sus.

Pour sortir de ce petit jeu c'est tout simple : une seule maison, cohabitation au sens originel où plusieurs familles vivent sous le même toit, pas forcément ensemble, se parlent, se donnent des règles de vie commune, gère la co-propriété, font par le fait même des économies de structures : charges communes, font en sorte que le bien commun : la viticulture française soit en ordre de marche, s'enrichisse, se développe, ravale sa façade : une bonne image extérieure est un plus, améliore les parties communes, rendent les appartements à tous les étages agréables et accueillants. Bien sûr, comme dans toute communauté il y aura des frictions, des mauvais coucheurs, des envieux, des qui voudraient s'étendre, j'en passe... C'est l'intérêt du toit commun, de l'arbitrage obligé, de la recherche de solutions pragmatiques et viables. Ce ne sont pas les commissions théodules qui balaieront devant leurs portes, qui feront du tri sélectif mais, comme ils ont déjà commencé à le faire, nos consommateurs... Moi le premier car je ne bois pas des discours, aussi beaux et lyriques soient-ils, mais du vin qu'il soit d'en haut ou d'en bas...

 

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