André Malraux, notre premier Ministre de la Culture, nous a légué les maisons de la culture qui, depuis 1991, sont aussi dénommées Centre d’animation Culturelle... Majuscule ou minuscule je n’ironiserai pas trop sur cet enfermement de la culture en des maisons ou des Centres, ce serait de ma part céder à la facilité même si les maisons semblaient plutôt dédiées aux chevelus alors que les Centres penchaient fortement du côté des dames permanentées. Toutefois, en parodiant la célèbre boutade de Paul Claudel à propos de la Tolérance, pour bien souligner le côté réducteur de ces lieux je m’exclamerais : « La culture ? Il y a des maisons pour ça ! »
Afin d’étayer mes réticences face à une conception étroite d’un Centre Culturel du Vin, à Paris ou ailleurs, et surtout montrer que je ne suis pas hostile aux lieux culturels de quelque nature qu’ils fussent, je mettrai en avant l’immense succès, qui ne se dément pas, du Centre Georges Pompidou. Pourtant Dieu sait cette « raffinerie bigarrée » en plein cœur de Paris, sur le plateau Beaubourg, a fait s’étrangler les bien-pensants de la Culture ! Le trait de génie de ses concepteurs c’est d’en avoir fait, par la magie d’un geste architectural pas si gratuit que ses détracteurs l’affirmaient, un réel lieu de vie culturelle, multiforme, ouvert, grouillant, chamarré mêlant des populations d’origine diverses.
Puisque j’en suis à la parodie je reprendrai à mon compte le jugement sans appel de mon voisin vendéen Georges Clémenceau « La culture du vin est une chose trop sérieuse pour être laissée aux gens du vin... » Que nous aimons notre entre soi de gens du même monde ! Dieu que beaucoup de nos festivités sont d’un triste à faire fuir même les bonnets de nuit ! J’exagère bien sûr mais, avec le bénéfice de mon âge, sans faire du jeunisme, j’affirme tranquillement « de grâce n’imposons pas notre vision un peu surannée aux générations futures... » Avant de décréter qu’il faut un Centre Culturel du Vin à Paris posons-nous la question de savoir si ça correspond à un besoin, à une attente et, si nous souhaitons créer une demande, sortons des sentiers battus. Innovons ! Ma proposition, sans doute jugée farfelue par le monde très sérieux du vin, d’une City Winerie dans l’ex-Trou des Halles, relevait d’une forme de provocation pour bien montrer, qu’au-delà des outrances de nos amis New-Yorkais, l’intérêt d’un tel lieu serait qu’il mêlât, outre vin et gastronomie ce qui est dans l’ordre des choses, mais surtout qu’il y greffât aussi la musique.
Pour autant il ne s’agit pas de s’agenouiller devant les modes et les tendances des nouvelles générations mais de leur faire une place pour qu’ils aient envie de pousser la porte de ce type d’institution sans être déjà des convaincus. Ce lieu, si tant est qu’il puisse voir le jour, doit se projeter dans le futur, ne pas se contenter d’être une forme de conservatoire de la culture du vin. Bien évidemment, comme à Beaubourg, le projet pourrait accueillir une grande bibliothèque publique, un lieu d’exposition permanente, des ateliers de dégustation, des masters class, des expositions temporaires. Je rappelle la très belle exposition au Centre National d'Art et de Culture Georges Pompidou sur le thème «Châteaux Bordeaux» qui se déroula du 16 novembre 1988 au 20 février 1989. (Voir chroniques http://www.berthomeau.com/article-34694357.html et http://www.berthomeau.com/article-34694464.html ) La liste des possibles est ouverte, tout est possible sauf qu’il ne reste plus qu’à trouver les sous pour financer le projet et que ça c’est une autre histoire bien française qui risque de s’enliser dans les sables des féodalités vinicoles de notre vieux pays.
Allez, cher François, toi qui adore lever des montagnes, attaque-toi à ce sommet, par la face Nord ou la face Sud, et je serai à tes côtés avec mon enthousiasme que le temps n’arrive pas à éroder. Pour terminer de la musique : pour François La Callas et pour d'autres le déjanté Tom Waits et la délicieuse Scarlett Johansson...