Merci à l’ami PAX qui aime tant le petit Todd de m’avoir mis la puce à l’oreille… « Les formules de politesse : Il n'y en a plus qu'une, la plus conne et la plus dénaturée - "Cordialement" ! - Ou est la place du coeur là-dedans ? Quand une lettre de refus catégorique, pleine de morgue et puant le mépris, se termine ainsi (cf. vos courriers reçus des bankster et autres assureurs) »
Réflexion faites, mon petit coup de sang, sans doute inapproprié dans la forme comme l’aurait concédé Bill Clinton ou DSK, à propos de la peu amène communicante de Gérard Bertrand, était justifié.
En effet, ce qui me frappe c’est que, là comme ailleurs, dans la correspondance électronique tout est expédié vite fait, plutôt mal fait, sans la moindre parcelle de cordialité.
Après t’avoir abordé d’un sec Monsieur impersonnel, on te tricote un texte tout à la gloire du client – normal, c’est lui qui paye – puis pour finir on te balance un cordialement aussi creux qu’un verre vide de sens.
Mais mon « bon » monsieur nous n’avons pas de temps à perdre avec vous car vous n’êtes qu’un parmi d’autres dans notre fichier contacts. Estimez-vous heureux d’y être et épargnez-nous votre bla-bla-bla.
Je suis tout prêt à en convenir, même si du côté bla-bla-bla vous ne nous épargnez guère le vôtre qui n’est pas toujours de la meilleure eau, mais sans être imbus de ma personne, j’aime bien qu’on m’aborde par un franc bonjour Jacques Berthomeau, avec ou sans cher, même si c’est le logiciel qui le dit.
Ça brise la glace comme on dit et surtout c’est pour moi l’expression de la plus élémentaire considération, un zeste ou un reste de politesse, et même si je suis vieux jeu – je vieillis mal selon le Gérard – j’y tiens.
Le ridicule, qui ne tue jamais c’est bien connu, se situe aussi chez ceux qui vous invitent à partager le pain et le sel, et le vin de leur client, en pondant un courrier genre prospectus pour la GD…
Et, quand ça commence mal ça finit généralement tout aussi mal et le cordialement que l’on vous jette, faute de mieux, en est la meilleure preuve. J’avoue que l’apposition d’aucune formule de politesse au bas du message, de l’invitation, vaudrait mieux que cette cordialité galvaudée.
C’est affligeant et par bonheur certaines agences de presse, à l’ancienne, établissent des rapports humains avec la petite gente qui fait, ou fait croire, qu’elle fait l’opinion du vin.
Je vous propose de lire une lettre adressée au journaliste Kermit Lynch, par Madame de Lacaussade propriétaire du château de l'Hospital, dans les années 1980 publiée dans son livre « Mes aventures sur les routes du vin »
Cher Monsieur,
Merci de votre lettre. Entendu pour le départ de cartons début octobre. Je suis tout à fait désolée de vous avoir ainsi contrarié au sujet du prix du vin. Je vous avais fait un prix amical pour le 1979, et ne pensais pas que cela deviendrait une habitude !
Si j'ai le plaisir de vous revoir, je vous montrerai les factures de mes fournisseurs et de la main-d’œuvre pour le chai !
Je ne compte pas mon temps, et vous n'ignorez pas que les expéditions pour les USA sont plus longues à préparer, le paiement plus lent aussi.
Mes clients européens n'ont fait aucune difficulté concernant l'augmentation.
Le 1979 était à trente francs ; il ne me reste que vingt-quatre bouteilles et autant de magnums, que je voudrais garder. Il me semble tout à fait normal d'augmenter de trois francs mon prix de vente.
Le 1980 est peut-être médiocre chez les autres, mais pas ici.
J'ai augmenté mon prix lors d'une réunion du CIVB après avis autorisé.
N'oubliez pas que mon vignoble bien modeste, bien petit, est un cru exceptionnel rattaché aux Graves de Léognan. Sur ce territoire, il est impossible de trouver un prix approchant ; certains crus y jouent la politique du rendement et leur qualité ne vaut pas...la mienne.
Comme je ne veux pas ruiner un homme aussi aimable et aussi amoureux du vin que vous, je veux bien vous consentir une nouvelle fois le prix amical de trente francs au lieu de trente-trois francs pour le millésime 1980, en échange de quoi vous voudrez bien me régler plus rapidement.
Recevez, cher Monsieur, mon souvenir le meilleur.
Mme de Lacaussade
Et ce n’était qu’une lettre commerciale.
Bien évidemment je ne demande pas le même traitement tout en soulignant que je ne suis pas un journaliste mais un simple chroniqueur qui ne demande rien, n’exige rien, sauf qu’on arrête de lui balancer des courriels génériques dont il n’a que faire.
Est-ce trop demander ?
Non, je n’ai jamais varié d’un iota sur ce sujet.
Aux riches heures des blogueurs, le soufflé s’est depuis bien dégonflé, j’ai eu droit comme tous les blogueurs au grand jeu de la séduction. Ça ne m’a fait ni chaud, ni froid alors maintenant que tout est rentré dans l’ordre car les blogueurs sont assimilés, ils font partis du troupeau qui est invité à la gamelle et qui doit dire merci pour ce moment, j’ai le droit d’exiger que l’on cesse de me harceler.
En effet, après avoir exploré l’écosystème du petit monde du vin parisien, pour voir comme on dit au poker, j’ai décidé de me retirer du jeu pour vivre ma vie de chroniqueur au fil de mes seuls choix et au rythme de mon porte-monnaie.
Ce retrait n’a rien de hautain, je garde de solides amitiés avec ceux qui font le métier, y compris beaucoup d’attaché(e)s de presse, pas vrai Annie, même la Bernadette, mais comme je l’ai dit et répété à celles et ceux qui m’invitaient : ne me donnez pas à manger mais donnez-moi des idées…
Que je sois devenu un vieil homme indigne je l’ai déjà confessé ICI
« L’amitié libre, y’en a qui ne comprennent pas, ça les dépasse, bien faire et laisser dire, oui je suis un vieux monsieur indigne et j’aime ça. »
« Prenons garde à ce que la vieillesse ne nous attache pas plus de rides à l’esprit qu’au visage » Michel Eyquem de Montaigne.
J’en reste là tout en soulignant que dans mon libelle à madame Pain je n’ai pas écrit un mot de travers à l’égard de Gérard Bertrand ce qui ne l’a pas empêché de me gratifier d’une commisération assez peu élégante.
Mais, comme j’ai l’esprit mal tourné je ne peux m’empêcher de vous gratifier d’une fin de chronique sur le cordial qui était à l’origine une potion stimulant le fonctionnement du cœur, un fortifiant, un réconfortant, un remontant, un tonique.
Puis par extension la désignation d’une boisson alcoolisée « ... l'eau-de-vie. Beau terme, qui indique le réveil que ces gouttes de feu suscitent en l'être réjoui. Car la vraie, la pure eau-de-vie n'est pas un poison, mais un stimulant et un cordial. » Joseph de Pesquidoux, Chez nous, 1921.
Enfin, cordial et cordialement s'associe parfois à des termes péjoratifs, ou du moins exprimant un sentiment négatif (haine, ennui, etc.), mais sans changer de sens et s'employer par antiphrase, comme l'affirment de nombreux dictionnaires.
« Risée des gens au pouvoir, dont l'infortuné brigue l'amitié bien qu'ils ne lui dispensent, à son insu, qu'un cordial mépris » (Bernanos, Imposture, 1927, p. 389).
Je n’irai pas jusque-là bien que parfois ça me démange….