« Qu’importe le flacon pourvu qu’on est l’ivresse… » la sagesse populaire me va très bien au teint d’autant plus, qu’en nos temps de gaspillage, le verre est perdu. Perdu, ce mot me hante : « C’est une femme perdue… » disait-on, en ma Vendée pieuse, d’une femme qui faisait le commerce de ses charmes. Même le pain était perdu alors qu’à la messe on distribuait du pain béni et les chiens aussi étaient perdus mais, sans colliers, si bien qu’en 1955 Jean Delannoy en fit un film, tiré du bouquin de Cesbron, avec Jean Gabin.
Mais putain va-t-il nous parler de vin !
Je ne sais car, né en 48, je ne connaissais comme boisson en 50 que le lait des vaches de mon pépé Louis et quand vint – pas mal la transition – la virée de la cinquantaine, en 98, j’avais professionnellement perdu de vue le vin lorsqu’il me retomba soudain dessus via un vin que je qualifiai alors de vin de vieux, c’était l’apéro favori des Français : 800 000hl vendus dans les années 50 – bien sûr qui se souvient de Monsieur Bartissol qui, sûr Europe n°1, hantait les villes et les villages pour que le papy Mougeot ou la mère Denis lui tendissent les précieuses capsules, plus personne sauf quelques vieux – lorsque j’acceptai en plein mois d’août une mission catalane pour aller me pencher sur le grabat du Rivesaltes ce qui était, somme toute, très naturel.
Je sais, j’énerve, mais je n’en ai cure – c’est mon côté élevé aux grains des très chers frères de Saint Louis Grignon de Montfort – car rien ne sert de courir il faut partir à point et surtout ménager sa monture.
Faut dire que les Vins Doux Naturel, s’ils avaient pu jacter, ou gribouiller sur les murs du Castillet de Perpinyà ils auraient écrit en grenat : « le Pastis m’a tué… » et ils auraient pu ajouter « et le Porto m’a mis KO… » Du côté de Thuir, le Byrrh, qu’a jamais été un VDN, était tombé dans l’escarcelle du roi du pastaga sans créer beaucoup d’émoi dans les chaumières catalanes.
Mais putain va-t-il nous parler de vin !
Mais je ne fais que ça les gars et les filles sauf à croire que les Vins Doux Naturels ne fussent pas tout à fait des vins parce qu’ils se sont fait foutre en l’air par le Pastis 51 – merde je ne suis pas passé loin – ça se discute c’est du 50/50 : bingo j’en ai placé deux.
Donc, puisqu’il nous faut par contrat léonin nous taper une question de centilitrage – vaste programme aurait souligné le Général – que les sources sûres m’affirment que les quilles se baladent entre 0,2 et 18 litres, avec des patronymes tels chopines, magnum, jéroboam, réhoboam, mathusalem, salmanazar, balthazar, nabuchodonosor, melchior, sans passer par la case 0,50 soit 50 cl et que seul les 75 cl ont droit au titre solennel de bouteille. Bien sûr j’ai omis la fillette et la mignonette mais le mystère des 50 cl reste entier.
Sauf que les flacons de 50 cl ont toujours existés dans le rayon des spiritueux où, horreur, malheur, les VDN furent classés et pas très bien exposés. Pire encore pour les défenseurs acharnés de la tradition bouchonnière ces flacons, que je n’ose nommer, étaient affublés d’un bouchage à vis.
Résumons-nous : la bouteille c’est 75cl donc la ½ bouteille c’est donc 37,5 cl, alors où est passé le litre ? Dans les oubliettes du jaja populaire avec la bouteille syndicale six étoiles. Elle aussi innommée elle jette la 50 cl dans un no man’s land innommé et c’est donc une apatride. Que faire pour la sortir de ce piètre statut ?
La baptiser si vous êtes des adeptes de la fille aînée de l’Eglise ou lui trouver un nom pour ceux des autres confessions et les athées.
La chasse aux noms est donc ouverte : ce pourrait être pour la 50 une minette, mais les féministes pourraient s’en offusquer, ou si l’on souhaite rester dans le masculin, qui est l’apanage des grands contenants , je risquerais : un taulier… car il a un côté de demi-sel versus Bernard Blier* Enfin, je suggère, pour allier le féminin et le masculin, pour le ou la 50 : en couple, ça fait tendance et ça plaira au parrain de ce Cinquantième Vendredi du Vin qui est si attentionné pour favoriser la tendresse des têtes à têtes amoureux.
J’arrête de décoconner pour aborder l’essentiel, ce qui justifie l’existence d’un contenant c’est-à-dire ce qu’on y met dedans.
Pour ce faire retour en Roussillon, dans le 66 quoi qui produit 90% des VDN, où la classification peut se résumer ainsi : 1 grand lac et deux petites bassines : soit le Rivesaltes et le Muscat de Rivesaltes et ceux du haut : le Maury et ceux du bas : le Banyuls.
Foin des chiffres, j’ai trop usé le fond de ma culotte sur eux pour m’en préoccuper. Ce qui m’intéresse en ce beau matin de ce Vendredi du Vin, qui est sur son 51, pour fêter sa 50ième édition au travers d’un flacon qui fait son numéro, c’est de vous dégoter le truc qui décoiffe, la boutanche de derrière les fagots, celle que madame Michu ne peut pas acheter à Casino.
J’en connais qui pour dénicher la fameuse quille 50 se sont démenés, ont fait le trottoir, sué sang et eau, tenté de soudoyer leur caviste, écumé les chais, cassé leur tirelire, passé des nuits blanches… alors que le Taulier, les pieds en éventail, dans un insolente « coolitude » s’est contenté de fouiner dans ses souvenirs, d’y ôter les boules de naphtaline qui trainaient, pour sortir le flacon que seuls les happy few peuvent se procurer dans le cellier de Luc Charlier.
Le nom est lâché, comme le disait le regretté Lino Ventura, c’est un Maury produit sur les terres ancestrales et inviolées de Bernard Rouby.
C’est la cuvée JOLO un Maury Grenat en 50cl pourvu d’un bouchage à vis.
L’étiquette est culte. J'espère que vous reconnaîtrez l'homme du bain.
La cuvée Jolo fut dégustée à la chaussette et fort appréciée par le Grand Jury des Naturistes de Paris ICI link
Voilà, même si d’un premier abord j’ai trouvé le thème chiant, chemin faisant j’ai pris goût à mes conneries et, au prix de quelques rétablissements périlleux, je suis parvenu à retomber à pieds joints sur le sujet de notre vénéré alter-président.
Fermez le ban !