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28 octobre 2007 7 28 /10 /octobre /2007 00:03


En dépit des encouragements de ce sourire affiché mon grand type bien sapé plein de trous, avec sa gueule de vieux gamin défraîchi et sa brosse filasse, commençait à peiner, besognait et, même s'il s'échinait, avec une réelle conviction, à me tartiner du service de la France, petit à petit je constatais que ses mots glissaient dans le caniveau. Ce fumet de cul de basse fosse revigorait mes deux voisins qui, pendant tout le temps où l'homme de cabinet s'envolait, s'enivrait de ses belles paroles, souffraient en silence. Je percevais leur impatience contenue à la lègère vibration du bout de leurs groles à semelle de crêpe. A la dérobée je constatais qu'ils se déridaient. Leur tarin appréciait. Moi, je campais sur mes divagations. Elles me menaient à une intime conviction : monsieur le directeur du cabinet du Ministre de l'Intérieur aimait les hommes ; une fiotte dans le langage de la grande maison. Comblé, je brodais. Ce cher homme, doté d'une sainte et fidèle femme, bordé par une ribambelle de chiarres blonds, qui devait aller à la messe le dimanche, consommer la sainte Eucharistie, déjeuner chez ses beaux-parents dans le VIIeme, un soir, dans les gogues du buffet de la gare de l'Est, pantalons sur les chevilles, ses belles mains aux ongles manucurés aggrippées à la toison d'un gamin, se ferait surprendre par les limiers de mes deux voisins. Juste le temps de quelques clichés versés à son dossier, assurance tous risques pour les piliers de la grande maison, antidote radical pour réfréner les soudaines ardeurs droitdel'hommesques des politiques face aux bavures des braves fonctionnaires de police exaspérés par les provocations de ces jeunes cons de bourgeois qui jouent à la révolution avant d'aller dormir chez papa maman.L'expression, couvrir une bavure, m'a toujours fait penser à une grosse merde baveuse qu'on camouflerait en la planquant sous un tapis, ça fait tache mais aux yeux du bon peuple c'est plus supportable qu'une flaque de merde molle ou un tas d'étrons malodorants. Plongé dans ces hautes pensées je me disais que le temps était venu de faire chier ce beau monde.

En m'étirant de tout mon long je baillais à me décrocher la mâchoire. Le jeune déjà vieux cala aussi sec, clapet entrouvert, mains en suspend, regard stupéfait. Durant un bref instant je crus que les deux pandores endimanchés allaient me sauter dessus, me menotter, me bourrer les côtes à coup de godasses. Le directeur de cabinet pris une pose christique, bras ouverts, comme s'il voulait prévenir le baston. J'en profitais pour opérer un rétablissement et me caler tout au fond du fauteuil, en position offensive. Mes interlocuteurs sentaient que l'orage se levait ; ils optaient pour la défense passive. Pas question de les décevoir, je déclenchais les hostilités : " Messieurs, et tout particulièrement vous, monsieur le directeur du cabinet, je me permets de vous rappeler ce que vous savez déjà à la lecture de mon dossier, que je n'ai pas embrassé la carrière de flic par goût du service public mais parce que je souhaitais patauger dans la fange pour m'éviter de penser. Mon voeu a été exhaussé au-delà de toutes mes espérances. C'est ce qui me vaut d'être ici ce matin. Alors, de grâce, cessez de me la jouer sur le mode défense de la République en danger. Vos enluminures me laissent de marbre. Vous me gonflez. Votre baratin je n'en rien à traire. Graziani m'a déjà servi votre ragoût faisandé. Je sature. Si je suis ici c'est pour que vous puissiez juger le bétail sur pied. Si le cheptel vous convient foutez le tampon rouge sur la carcasse et je me trisse hors de ce bureau où je fais tache. Si ce n'est pas le cas, rayez-moi des cadres ! Oubliez-moi ! J'irai planter mes choux ailleurs..." Je m'étais redressé. Le directeur des RG toussota, celui de la DST fit craquer les jointures de ses doigts, le plein de trous affichait la face du ravi de la crèche. 

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