La fenêtre de ma chambre donnait sur la place de la mairie et, dimanche, aux aurores, le comité des fêtes de Châtillon s’activait, avec discrétion, autour de la fontaine. Les rues et les viols étaient déserts, la lumière était belle, il me fallait endosser mes oripeaux de petit reporter.
En me brossant les dents je pensais au sous-préfet aux champs d’Alphonse Daudet :
« Le sous-préfet est en tournée. Cocher devant, laquais derrière, la calèche de la sous-préfecture l’emporte majestueusement au concours régional de la Combe-aux-Fées.
Pour cette journée mémorable, M. le sous-préfet a mis son bel habit brodé, son petit claque, sa culotte collante à bandes d’argent et son épée de gala à poignée de nacre...
Sur ses genoux repose une grande serviette en chagrin gaufré qu’il regarde tristement.
M. le sous-préfet regarde tristement sa serviette en chagrin gaufré : il songe au fameux discours qu’il va falloir prononcer tout à l’heure devant les habitants de la Combe-aux-Fées :
— Messieurs et chers administrés...
Mais il a beau tortiller la soie blonde de ses favoris et répéter vingt fois de suite :
— Messieurs et chers administrés... la suite du discours ne vient pas.
La suite du discours ne vient pas... Il fait si chaud dans cette calèche ! »
Ici, le sous-préfet est à Die, je ne l’imagine pas venir, avec son bel habit brodé, sa casquette enguirlandée de feuilles de chêne et de feuilles d'oliviers brodées d'or, couper le ruban tricolore du Festival Arts et Vigne de Châtillon-en-Diois.
Aujourd'hui le costume de préfet et de sous-préfet comprend désormais trois tenues :
- une tenue de cérémonie, constituée d'un veston croisé avec pattes d'épaules brodées et parements de manches brodés amovibles. Le pantalon comporte une bande de soie noire, la casquette est brodée d'or.
- Les membres féminins du corps préfectoral portent une veste avec une jupe et une toque-tricorne de feutre uni bleu marine.
- une tenue de cérémonie d'été (notamment pour les préfets exerçant en Outre-Mer), analogue à la précédente, mais blanche
- une tenue de soirée, habit à pattes d'épaules brodées, gilet blanc et pantalon à bande d'or.
Les parements de manches comportent pour le préfet des dents de cannetille et deux ramages juxtaposées de feuilles de chêne et de feuilles d'olivier (pour les sous-préfets pas de cannetille et une seule guirlande).
Les pattes d'épaules ont deux feuilles de chêne et deux feuilles d'olivier (une seule feuille d'olivier pour les sous-préfets)
La casquette comporte deux guirlandes de feuilles de chêne et de feuilles d'oliviers brodées d'or (une seule guirlande pour les sous-préfets)
L’heure n’est pas aux rêveries, je descends.
La boulangère d’à côté affiche une mine renfrognée, je lui achète un pain au chocolat pour me caler et je pars avec en mains mon petit Leica pour aller m’immiscer dans les méandres des viols voir ICI où je shoote comme un mort de faim.
Je suis en manque de caféine, il est temps d’aller me caler un expresso au café des Alpes, et de lire la presse locale du jour.
Dans un ciel pur comme de l’eau de roche se plaque un soleil dur, je décide de monter jusqu’au cimetière du village.
« Ce qu'il y a de plus beau dans les cimetières, ce sont les mauvaises herbes. » Francis Picabia
Et les mauvaises herbes prospèrent sur les tombes abandonnées. Le contraste entre les tombeaux rutilants et le désastre des stèles avachies, moussues, le fatras rouillé des couronnes et des fleurs artificielles, montre la vanité des uns et l’oubli des autres.
Alors, je rêve qu’on me porte en terre au cimetière Montparnasse, au petit matin comme les comédiens excommuniés, sans fleurs ni couronnes, quelques pelletées de terre, le silence éternel. Aucune plaque, que la petite colline de terre sous laquelle je vais me dissoudre, disparaître. Que les rares amis qui feront avec moi ce dernier voyage aillent boire un verre, dans la joie.
Pour l’heure, en redescendant jusqu’au village, j’ai le sentiment d’être un poulet rôti.
Sur la place tout est en place : que la fête commence !
En musique !
Verre à la main, les gens font patiemment la queue pour licher du jaja du coin. Je n’en suis pas, mon naturisme ne me le permet pas. Je liche une bière artisanale en terrasse, puis je me mets en chasse des gens qui se sont mis sur leur 31.
Ça creuse de shooter !
Direction le café de la mairie car le Jancou a décidé de ne pas cuisiner.
Légère sieste.
Au lever, la place est vide, ils sont tous partis manger je ne sais où ?
L’heure est maintenant à l’Art, je me fais toutes les galeries les unes après les autres, comme je suis charitable je ne piperai mot. Je n’ai rien acheté, c’est dire !
La journée s’étire, j’ai de nouveau une petite faim alors je décide de m’envoyer un petit jaune chez Pierre accompagné de cochonnailles locales fort goûteuses.
Y’a de l’ambiance chez le Pierrot, ça cause fort, ça s’envoie du lourd, ça chante, ce n’est pas tous les jours la fête au village.
Et soudain, le ciel se fâche. Des cordes ! Comme vache qui pisse. Le repli. Suis trempé comme une soupe.
Le ciel s’apaise.
Je ressors.
Croise une mobylette bleue.
Ce soir Pierre a décidé nous nourrir à la fortune du pot. Je fais la connaissance de Céline, discute avec Aurélien Lefort, de mon idée de boui-boui, de tout et de rien… Je culbute le reste de la bouteille de Raphaël Beysang entamée hier au soir.
Clap de fin !
Je prends le frais sur la terrasse…
Au-dessous, au café de la Mairie, un orchestre fait de la musique. C’est encore la fête au village…
J’imagine que le sous-préfet de Die est déjà au lit. Il se nomme Patrick Bouzillard.
Fernandel - Monsieur le sous Prefet aux champs
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