L’un de mes fidèles lecteurs, Michel Clerc, homme du vin, m’a fait parvenir lors de sa parution un n° de la revue Historail n° 27, d’octobre 2013, consacre un important dossier (45 pages) aux rapports du rail et du vin, rédigé pour l’essentiel par Georges Ribeill.
Mon temps de lecture n’étant pas extensible, ce gros et beau dossier a fait des va-et-vient entre le bas et le haut de ma pile de lecture. Mais, comme avec moi, il ne faut jamais désespéré, je m’y suis enfin plongé.
Au programme :
- Développement des chemins de fer et commerce des vins : d’étroits liens
- Révolution ferroviaire et ouverture du marché national aux vins du Midi
- Le PLM s’engage dans la lutte contre le phylloxéra
- Des vignes pour clôtures ferroviaires… Une utopie « ferroviticole » ?
- 1907 : le rail au service des grandes manifestations des vignerons du Midi
- Rail et trafic viticole entre Saint-Chinian et Béziers : un commerce très actif (par Philippe Marassé)
- Bercy, capitale du « vin de Paris »
- Bordeaux, Sète : deux situations contrastées.
En bonus, la publication en avant-première des résultats de l’enquête que Alain Crosnier, ancien officier des CRS, a consacré à l’embuscade tragique de Montredon-des-Corbières (ligne de Toulouse à Narbonne) du 4 mars 1976. Ce jour-là, les viticulteurs en colère bloquent et incendient partiellement un train de marchandises. L’affrontement avec les CRS se solde par deux morts et une trentaine de blessés par balles et chevrotines.
En chapeau de ce Vin&chemin de fer « un spécialiste de l’histoire de la viticulture » résume d’une formule saisissante ce que « l’ère du rail au XIXe siècle » a eu pour conséquence pour les vins populaires, les vins de consommation courante : l’avènement d’un « marché commun national », la première forme de la fameuse ouverture du marché, la seconde étant la mise en place de l’OCM vin et la dernière la fameuse globalisation…
« L’extension progressive du réseau a contribué tant à l’extension des vignobles du Midi qu’à la popularisation du vin de table, à Paris notamment. Pour le meilleur et le pire aussi : complice en somme de la surproduction des vins du Languedoc qui remplissaient chais et wagons-foudres, le chemin de fer s’est trouvé l’auxiliaire, voire l’otage des grandes manifestations des vignerons en 1907 comme en 1976. »
Georges Ribeill écrit :
« Le transport rapide du vin a permis la conquête du marché parisien, et dès le début des années 1860, s’ouvre pour le vignoble français une incroyable période de prospérité, conjuguant la croissance simultanée des superficies et des rendements.
À coups de tarifs spéciaux, de lignes raccourcies reliant les centres viticoles du Midi à la capitale, les compagnies concurrentes, Midi, PO et PLM, ont cherché à capter une grande part de ces trafics rémunérateurs.
Si le phylloxéra va venir ravager les vignobles français et freiner cet élan, c’est encore en impliquant le PLM, le réseau le plus concerné par les chutes conséquentes de trafic, cette compagnie va se mobiliser, à la pointe de l’invention et de la distribution de traitements antiphylloxériques !
L’impact géographique de la crise est toutefois fort varié : plus tardivement touchés, face à une demande toujours accrue, l’Aude se lance dans la viticulture intensive, optant pour des cépages à haut rendement, tandis que le Roussillon conforte plutôt sa production de vins de qualité, la vocation importatrice du port de Sète, qui reçoit des vins d’Espagne puis d’Algérie, s’affirmant définitivement »
Chroniques à suivre…
NB. Sur le sujet du trafic ferroviaire des vins, des compléments peuvent être trouvés dans la Revue d’histoire des chemins de fer, qui avait publié les travaux de la commission « Histoire commerciale des chemins de fer » de l’AHICF, active au début des années 1990, dans son numéro 9 link. On trouve aussi des éléments dans « Les chemins de fer d’intérêt local de l’Hérault dans le Biterrois de 1850 à 1950 », par Raoul Balso, publié dans le numéro 24-25 link consacré à l’histoire des chemins de fer secondaires. Voir également la Revue d’histoire des chemins de fer hors-série 1 link (« Aspects de la politique commerciale de la Compagnie de chemin de fer du Médoc (1864-1911) », par J.-F. Massicot).