J’en conviens aisément l’expression « parle à mon cul ma tête est malade... » ne fait guère dans le raffinement mais je la trouve très appropriée à l’opération hyper médiatisée de Greenpeace des nus dans les vignes pour, dixit cette ONG, elle-même fort médiatique, sensibiliser avant le sommet de Copenhague sur le climat les décideurs du monde sur l’urgence qu’il y a d’agir concrètement. L’opération était assortie, dit-on sur un site qui fait du buiseness vert http://www.treehugger.com/ d’une lettre adressée, aux chefs d’Etat, notamment Barack Obama et Angela Merkel rédigée en ces termes : « Nous ne vous demandons pas de vous déshabiller à Copenhague, mais nous attendons de vous que vous signiez un accord juste, ambitieux et encadré pour préserver le futur de la planète ». J’adore ce notamment qui est encore une perfidie albionne vis-à-vis de notre Président.
Ceux qui me connaissent savent que je suis tout sauf un pudibond. Que des mecs et des nanas, vignerons ou non, posassent à poils dans des vignes en Bourgogne moi ça ne me choque pas, bien au contraire je trouve l'idée originale et fort plaisante. Que l’opération, par la grâce d’un photographe star Spencer Tunick, dont le nu en des lieux improbables est le fonds de commerce, nous donne à voir des photos bien léchées rien de plus normal dans nos sociétés où le cul fait vendre. La pub dénude, surtout les femmes, pour un oui ou pour un non. Les grands news magasines l’ont compris depuis fort longtemps en proposant des photos alléchantes de femmes dénudées à leurs lecteurs sur des sujets dit de société. Par exemple Sharon Stone très photo shopisée pour illustrer le nouveau printemps des femmes de 50 ans. Tout le monde s’y met depuis que les gros bras du Stade Français se sont dépoilés sur un calendrier. Même les paysans Le nu : la nouvelle arme de la minorité paysanne... http://www.berthomeau.com/article-12941425.html C’était en 2007 dans la patrie de la Bécassine du Poitou-Charentes. Dernière en date à se livrer à l’exercice la bien en chair Marianne James, ex-juré de la Nouvelle Star sur M6.
Donc le nu paye toujours. Ce qui m’effare ce n’est pas la prolifération du nu, son exploitation, mais la ruée des grands médias sur l’opération des nus dans les vignes. Normal me direz-vous elle était fabriquée pour cela. D’accord mais, pour autant, cette surexposition va-t-elle avoir une influence sur les décisions prises à Copenhague ? L’opinion publique soudain sensibilisée par cette vision de corps nus dans les vignes, effarée par le risque que les terroirs ne «survivent» pas au réchauffement, va-t-elle faire pression sur ses dirigeants ? La réponse est clairement non. Ce ne sont que des images, rien que des images, qui défilent sur les écrans, coincées entre un forcené qui dézingue quelques voisins et la météo. « Chic il fera encore beau demain pour notre week-end ! » Réchauffement climatique mon cul, ils vont prendre leur petite auto tous ensemble pour se ruer sur l’autoroute de l’Ouest ou pour aller chez Carrefour qui positive de nouveau. D’ailleurs, sans vouloir jouer les ramenards : quelle a été l’emprunte carbone des 730 pékins qui se sont déplacés dans les vignes ? J’espère qu’ils y sont venus à pied ou à vélo pour se dépoiler...
En définitive, le seul bénéfice important que je vois à cette opération c’est qu’elle va faire monter d’un cran l’ire de ce très gros con de Claude Allègre – y’a des jours où je me dis qu’il doit avoir décroché ses diplômes dans une pochette-surprise – Je lui suggère pour protester contre « cet imbécile de Hulot » dixit l’ex-copain de Jospin, lui qui voulait dégraisser le Mammouth, de poser en homme des cavernes (fine allusion à la situation que les Verts nous préparent selon lui) en fin de journée sur la Place de la Concorde au beau milieu des bagnoles à la queue leu leu, en plus ça lui ferait du bien aux bronches de respirer le bon air de Paris. Toutefois, certains raccourcis simplistes telle cette question choc lue dans le Nouvel Obs : «faudra-t-il, par exemple, pour préserver la qualité des vins de Bourgogne, remplacer le Pinot noir précoce particulièrement sensible aux conditions climatiques, par la syrah, plus endurante, de la vallée du Rhône.» ne peuvent qu'apporter de l'eau à son moulin.
Je plaisante à peine puisque maintenant la forme prend toujours le dessus sur le fond. Il faut frapper les esprits par des images chocs me dit-on. Je doute que ce soit l’esprit que l’on frappe, les images sont là pour déclencher l’émotion, une forme d’empathie passagère vite chassée par une autre compassion qui ne se traduit que très rarement par le passage à l’acte citoyen. Dans le récent conflit du lait les animateurs du mouvement l’ont très bien compris en organisant sous l’œil fasciné des caméras des journées blanches : celle de la baie du Mont St Michel était un modèle du genre. Pour autant, le grand public a-t-il vraiment pris conscience des enjeux de la production laitière ? Je n’en suis pas certain, lire ou relire : « Mes voisins veulent voir des vaches dans le pré et des vignerons dans la vigne... » http://www.berthomeau.com/article-36874600.html
Pour terminer cette chronique sur une note d’humour je reprends ma casquette de Secrétaire-Perpétuel de l’Amicale du Bien Vivre, dites des Bons Vivants, pour vous poser une question angoissée : devrons-nous un jour nous résoudre à poser nus dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale pour que nos très chers élus prennent enfin conscience du caractère vital de notre combat contre le refroidissement des relations entre les hommes ? Comme de bien entendu je donne l'exemple et si vous me plébiscitez demain je montre le bas...