Marie avait la pépie, Abraham lui tendit un jéroboam de champagne que venait de lui passer le capitaine des Pompiers. L’orchestre entamait « Ce soir je mets le feu ! » Ayant étanché sa grande soif et reçu un bisou dans le cou, Marie entamait elle la dernière ligne droite de la nécrologie des Saint-Drézéry. « Le premier frappé fut Pierre-Henri. Foudroyé ! Philémon, qui se réjouissait dans son for intérieur de cette disparition, pour de bonnes et de mauvaises raisons, ne put réprimer son absence d’affliction. « Ce garçon, comme tous les invertis, avait une petite nature. Que voulez-vous mes chers sœurs c’est la vie ! » mais lorsqu’il vit Marie-Adélaïde tourner de l’œil la panique le saisit. Il héla Olga qui s’empiffrait des restes du gueuleton. L’ex-maîtresse du dernier président de la RDA, le souriant Ulrich, ne fit pas plus de trois pas, elle s’effondra. La conjonction de l’e-coli, de la listéria et autres saloperies les fit passer un à un de vie à trépas. Ce fut le maître de chai, avant d’aller soutirer, qui les retrouva. Il appela le curé de Saint-Émilion qui, conduit par François Des Ligneris, arriva dans l’heure pour procéder à une extrême-onction rétroactive. François fit office de chauffeur mais aussi d’enfant de chœur. Sitôt finie la cérémonie, et après s’être envoyé un bon millésime du château débouché par le maître de chai ils téléphonèrent à Me de Candolle pour qu’il rapatrie Marie. La nouvelle se répandit telle une traînée de poudre et, par l’odeur alléché de beaux hectares de GCC, les prédateurs divers et variés prirent position. La seule question qui revenait en boucle était « Mais qui est donc cette Marie dernière Saint-Drézéry en vie ? » Des bruits, des rumeurs, une théorie du complot de l’ex-Stasi, l’hypothèse d’un contrat, montèrent ce qui contraignit le Procureur de la République de Bordeaux à mettre les pandores de Saint-Émilion sur l’affaire. La médecine légale révéla vite l’étendue du désastre sanitaire et les journalistes ameutés en furent pour leurs frais... » Abraham avant de regagner sa caserne posait Marie chez elle. Lénine était furax d’une entrée si matinale, il feula et Tintin au Congo jura que c’était le dernier que les boches n’auraient pas.