Dès qu’elle descendit de l’estrade Marie fut très entourée. Ce fut le bal des faux-culs. Tous pensaient « elle est givrée ! » et les plus lèche-bottes s’exclamaient :
« Quel panache ! »
« Vous apprenez vite ! »
« Vous allez faire des adeptes ! »
« Quelle classe, bravo ! »
« Excellente prestation, mes félicitations ! »
Les plus âpres se taisaient en se félicitant que dans quelques temps de beaux arpents de vignes seraient à l’encan. Les plus futés la scrutaient sans aménité car il sentait que cette grande duduche, qu’ils avaient sous-estimée, n’était pas allé jusqu’au bout de sa logique et qu’elle leur préparait un coup de Jarnac. La dame permanentée d’un de ces messieurs se permit de faire remarquer au cercle des sceptiques qu’ils n’avaient pas tout à faire tort de se montrer circonspect car, pointant son index sur le carton d’invitation elle lut « la pochette-surprise sur le bateau du retour » Le menu était affiché, les tables numérotées et chaque convive avait reçu un carton sur lequel il était porté.
MENU : Patchwork de tomates anciennes à la mozzarella di Buffala de Caserte
Coucou de Rennes méli-mélo de vieilles patates
Fromages : Boulette d’Avesnes, Maroilles et Salers
Dessert : feuilleté de fraises des bois
VINS : À Ligoter tirage de printemps 2010 Vin de France O de Moor
Vin de Pays de l’Hérault 2010 Catherine Bernard
Champagne Les Rachais brut nature Francis Boulard
Vous décrire le placement aux tables des uns et des autres serait fastidieux et sans intérêt mais Paul de Candolle, à l’instar de ce qui s’était fait pour l’inauguration du chai de Cheval Blanc, avait formé les tables en fonction de la hiérarchie des GCC. Simplement, pour mettre un peu de piment, chacune de ces tables étaient présidées par les amis de la Marie : le grand Éric à la table number one, François des Ligneris à la 2, la baronne G à la 3, Patrick Hoÿm de Marien à la 4, Patrick Baudouin à la 5, Marc Parcé à la 6, Catherine Bernard à la 7, Luc Charlier à la 8... et ainsi de suite. La grande surprise de la soirée fut que Marie n’était à aucune table car, micro à la main, elle assurait l’ambiance en allant de table en table. Lorsqu’à l’approche du dessert Catherine Ringer et ses musiciens montèrent sur l’estrade l’ambiance était chaude bouillante et même que certains, d’ordinaire coincés de chez coincés, oubliant les menaces à venir se laissèrent aller à frapper dans leurs mains et quelques couples improbables se formèrent pour danser des rocks endiablés. La bienséance m’interdit de les mentionner.