Le paradoxe des vins nature est que leur niveau de son médiatique est inversement proportionnel à leur poids dans la masse des vins produits sur notre petite planète.
Ça énerve beaucoup de monde surtout les grands chefs de tribu.
Ça permet à certains, dont le prolifique Pr Tiron, d’aligner 1 paquet d’affirmations non-fondées au cm2, du style « l’étonnant paradoxe qui fait du vin « nature » un des pires ennemis de la Nature »
« Non, c'est bien en cave que se pose le problème, et il ne concerne que les vins "nature", pas les vins bio qui, comme la plupart des autres vins, supportent des montées jusqu'à vingt, vingt-cinq degrés**** sans trop perdre de leurs qualités. Selon tous les spécialistes du genre, ces vins non stabilisés, éminemment fragiles, doivent impérativement être conservés à une température inférieure à 14°C (si l'on s'en tient au chiffre mis en avant par feu Marcel Lapierre) sous peine de partir en vrille.
Et c'est là que le bât blesse. Garder nos vins à 14°C, cela implique une multiplication des armoires de stockage réfrigérées mais aussi de système de conditionnement d'air de plus en plus massifs dans les chais, les restaurants et les boutiques. Tout cela est évidemment terriblement énergivore et donc terriblement polluant. Et aboutit donc à cet étonnant paradoxe qui fait du vin « nature » un des pires ennemis de la Nature. Cela doit-il nous empêcher d'en boire? Je ne crois pas, il y a d'autres « gisements d'économie », mais il est intéressant de mesurer de la conséquence de chacune de nos décisions quotidiennes. »
Un élève de CM2 nul en arithmétique démonterait, chiffres en main, le soi-disant paradoxe avec la même facilité qu’il le ferait avec ses Lego.
Toujours la paille et la poutre… quand on veut tuer son chien on dit qu’il a la rage…
Laissons-là ces broutilles sans grand intérêt sauf pour l’intéressé.
La petite musique, qui monte qui monte, de la petite bande des vignerons des vins nus irrite les oreilles de ceux qui sont assis sur le couvercle de la cuve. Ça les emmerde car ça mets à mal le verrouillage de la dégustation des aveugles. Ça les exaspère comme un grain de sable dans leur godasse. Ils gigotent, se tortillent en tous sens, tempêtent et pourtant les communicants de leurs zinzins interprofessionnels, en mal de recherche de notoriété, ce pourquoi ils sont payés, lorgnent, louchent, lorgnent vers ces déviants.
Isabelle Perraud, du domaine cotes de la molière, qui n’a pas sa langue dans sa poche et qui dégaine sur les réseaux sociaux plus vite que Lucky Luke, nous conte son aventure qui confirme mon analyse initiale. ICI et ICI
« Il y a quelques semaines, nous avions été contacté par l’agence de com de l’Inter Beaujolais pour nous demander si nous serions d’accord afin qu’ils tournent un film chez nous au moment des vendanges pour, selon leur propre mots, remonter l’image du beaujolais… (Me demandez pas ce que c’est que L’inter Beaujolais, je n’y ai jamais rien compris. Y a les vignerons d’un côté et le négoce de l’autre mais les uns ne peuvent pas se passer des autres qui disent que c’est la faute des uns et les autres qui disent que c’est la faute des autres… Qui est responsable de quoi et avec qui? Ma foi, je n’en sais rien).
Revenons à nos moutons :
Mon étonnement fût étonnamment grand ???
Et mon incompréhension totale.
En fait je me demandais s’ils savaient bien à qui ils s’adressaient?
Ils s’étaient sans doute trompés de numéro de téléphone?
Non.
C’était nous. Les Perraud. Nous, qui voyons nos vins refuser aux agréments tous les ans (oui, TOUS)
Ce n’est pas l’Inter Beaujolais qui donne les agréments. Evidemment.
Mais si je parle de la non-conformité de mes vins, c’est parce que je ne comprends pas pourquoi on veut mettre en avant un vigneron qui a des vins non conformes à l’appellation pour remonter l’image du beaujolais?
Et que si cette conformité ou non n’a pas tant d’importance que ça… pourquoi existe-t-elle?
C’est sûr qu’aujourd’hui, vaut mieux être, comme nous, parmi la minorité qui perturbe que parmi la majorité qui souffre.
Parce qu’en Beaujolais, la majorité souffre.
Les vins « naturels », c’est vrai, c’est un concept vivant, une manière de le dire et de le vivre.
Dire qu’on n’est pas d’accord.
Avec nos vins.
Je défends le Beaujolais, tout le Beaujolais, tous les jours, avec passion et conviction.»
Comme Isabelle, dans la difficulté je me suis mobilisé pour le Beaujolais dès 2010 Opération Beaujolais «Grand Corps Malade» : constitution d’une «Task Force»
Dès cette époque Isabelle me déclarait avec sa conviction et sa fougue habituelle :
« On est fort en beaujolais: on continue à parler de nous, même quand la crise est au plus fort, quand on dit que plus personne ne veut acheter du beaujolais! Ça fait presque 20 ans que la crise est arrivée dans notre région. On n'a pas voulu la voir faisant une confiance aveugle aux négociants et étant persuadé que le consommateur ne pourrait pas se passer de boire de Beaujolais... Et ça m'énerve aussi un peu quand j'entends les vignerons des crus qui accusent le Nouveau d'être la cause de leur malheur. Ils n'avaient qu'à se bouger un peu...réagir quand le beaujolais avaient encore la cote...au lieu de ça on déclassait des beaujolais villages ou des crus en Nouveau! Et oui, parce qu'en beaujolais, les rendements autorisés étaient supérieurs... » Et de conclure : « Arrêtons de compter sur les autres pour s'en sortir? Il faut que chacun se sente enfin responsable de sa cave et de son vin et prenne le courage de mettre son nom sur la bouteille et d'aller le vendre. Arrêtons de se justifier d'être en beaujolais. Soyons fier de notre région, de nos vins. Jamais je n'ai à m'excuser d'être en beaujolais : c'est à prendre ou à laisser! On y trouve des vins magnifiques de fruit, de fraîcheur et de caractère. Vive le beaujolais! »
Étonnant non !
Là se situe le vrai paradoxe : comment peut-on mettre en avant dans un petit film, les vignes bio des Perraud, travaillées et enherbées. « Parce que ça passe mieux à l’écran. Faut de l’herbe, mais pas trop. Mais y en faut un peu. C’est mieux pour l’image. » note malicieusement Isabelle et rejeter de l’appellation les vins qu’ils ont fait avec leurs beaux raisins sains ?
C’est un peu comme si les communicants de notre grosse Éducation Nationale mettaient en avant des élèves qui ne suivraient pas les chemins balisés par les programmes scolaires, la pédagogie normée, qui auraient de bons résultats mais n’en seraient pas pour autant récompensés par le diplôme officiel.
Étonnant non !
Je comprends et je partage la juste colère d’Isabelle face à une telle hypocrisie.
Alors Isabelle et Bruno, comme beaucoup d’autres vignerons, tenir bon, faire front, résister, certes c’est difficile, mais la satisfaction du travail bien fait, reconnu et apprécié par les seuls qui comptent : les consommateurs de vos vins qui ne suivent pas les autoroutes ordinaires, mais les charmants chemins de traverse, est une puissante motivation.
L’initiative d’Inter Beaujolais est un premier aveu de faiblesse, le front se lézarde, le bloc monolithique s’effrite, le jour va venir où les ouvriers de la 25e heure vont voler au secours du succès et là, je le crains, d’autres ennuis seront au rendez-vous.
Mais n’anticipons pas nous sommes aujourd’hui le jour de la libération du fameux du Beaujolais Nouveau : le 3e jeudi du mois de novembre, alors foin des dégustateurs niveleurs, héritiers de ceux qui ont précipités le Beaujolais dans l’ornière, tous à nos tire-bouchons !
L’an dernier au Lapin Blanc c’était le beaujolo nouveau du petit Téo que nous débouchions : Isabelle à un beau cœur c’est aussi pour ça que nous l’aimons autant que son vin…
Place à la fête des grands cœurs !
« Déguster, c’est comparer, c’est donc à la base connaître.
Pour connaître, il faut multiplier ses investigations en observant, en notant ses impressions. Mais il faut aussi savoir que nos sens sont imparfaits, et que pour les rendre fidèles, la volonté, l’attention sont indispensables. Les temps aidant, car l’expérience est longue, la dégustation réfléchie procure au dégustateur, s’il porte en lui l’amour du Beau, du Vrai et du Vin, la joie profonde de pénétrer dans ce domaine où la nature se plait à concentrer son Génie »
Jules Chauvet