Avec les premiers frimas, la soupe s’impose, même si pour moi la soupe le soir est un plat qui se consomme toute l’année.
Comme j’ai mauvais esprit, et que j’ai bien connu le temps de Pierre Poujade, qui tombait la veste, parfois même la chemise (aucune allusion à celle du DRH d’Air France déchirée dans le cadre du renouveau de la lutte des classes) je ne peux m’empêcher de capter dans l’air du temps, les accents populistes chers à ce trublion qui connut son heure de gloire dans les années 50 et qui nous a laissé des produits dérivés, les termes de poujadisme ou poujadiste, qui sont devenus des qualificatifs péjoratifs, désignant des formes jugées démagogiques de corporatisme pour prendre progressivement un sens proche de celui de « populisme ».
« Le 12 janvier 1956, aux cris de «Sortez les sortants», 52 députés poujadistes font leur entrée à l'Assemblée. Deux ans plus tard, la V° République «sortira» tout le monde… » écrit Pierre Branca.
Pierre Poujade, papetier-libraire de trente-trois ans, conseiller municipal de Saint-Céré Lot qui, avant d'entrer dans la Résistance, en 1943, a abandonné ses études d'architecte pour militer au Parti Populaire Français de Jacques Doriot, l'un des meilleurs tribuns de sa génération, du Parti communiste jusque dans les rangs de la collaboration.
« De Doriot, Poujade a gardé le style d'imprécateur, parlant volontiers en chemise, sans cravate - une curiosité, à l'époque ! -, les deux mains agrippées à la tribune. Mais aussi un mépris sans fond pour le système parlementaire.
Avec l'accent rocailleux de son Lot natal, il dénonce de meetings en meetings l'exploitation des «petits» et des «bonnes gens» par les «soupiers» de l'«État vampire», la mise en coupe réglée de la «maison France» par des «éminences apatrides» qu'il faut «pendre haut et court».
Il soutiendra François Mitterrand en 1981 et 1988. Et Jacques Chirac en 1995. Non sans avoir milité, jusqu'à sa mort, en 2003, pour un biocarburant alternatif à base de topinambours.
Ce dimanche je ne vais pas vous parler des «soupiers», ceux qui vont à la soupe, accèdent au pouvoir en reniant leurs origines ou leurs idées politiques, profitent des avantages du pouvoir, mais de la soupe tout court.
Pas celle aux topinambours, chers à la cuisine végétarienne des chefs étoilés, que le Poujade voulait transformer en pétrole vert, mais d’une soupe rare et roborative : la soupe de sarrasin de Bertrand Larcher.
« Pour obtenir du sarrasin soufflé, faites tremper des graines de sarrasin dans de l’eau pendant la nuit. Le lendemain, égouttez-les, étalez-les sur une plaque à pâtisserie, et faites-les sécher pendant 3 heures au four à 100°C) »
Pour faire cette soupe commencez par émincer finement le blanc de poireau et faites-les tremper 30 mn dans l’eau froide puis vous les égouttez bien pour les faire suer 3 mn avec le beurre et la poitrine fumée dans une casserole à feu moyen.
Puis ajoutez le bouillon de volaille et portez à ébullition. Laissez ensuite réduire sur feu doux.
Faites ensuite griller vos graines de sarrasin soufflé dans une poêle sans matière grasse jusqu’à ce qu’elles changent légèrement de couleur et expriment leur parfum. Versez-les dans la casserole et laissez cuire 15 mn sur feu doux.
Ensuite mixez pour obtenir une consistance lisse.
Ajoutez lait et crème, salez et poivrez sans excès.