Je ne sais plus trop bien quand je baguenaudais je ne sais trop où lorsqu’une affiche a attiré mon regard.
The Voice 4 pour moi c’est du mandarin vu que ça fait un bail que je ne regarde plus la TV. Mais curieux j’ai cherché sur le Woueb et j’ai su que c’était un bouzin, genre radio-crochet revisité, importé des USA, et animé par Nikos Aliagas et un jury avec Florent Pagny, Zazie, Jenifer, Karine Ferri...
« Battista Acquaviva a marqué les téléspectateurs de "The Voice" saison 4. Encensée autant que critiquée, la chanteuse originaire de Corse a convaincu les quatre coachs lors de la première audition à l'aveugle. Grâce à sa voix hors normes sur le "Paume de David", elle a fait se retourner MIKA, Zazie, Florent Pagny et Jenifer. Solidarité oblige, c'est cette dernière qui a accueilli Battista dans son équipe. Eliminant Rany Boechat lors d'une battle émouvante sur "Hijo de la Luna" de Mecano, elle a gagné son ticket pour la demi-finale grâce à ses interprétations aériennes de "Greensleeves", "A Whiter Shade of Pale" de Procol Harum ou encore "S'il suffisait d'aimer" de Céline Dion. Mais malheureusement, Battista a quitté l'aventure samedi soir. »
Moi ça fait un bail que je l’ai découverte Battista : très précisément le 10 mars 2011 lors d’une dégustation d’UVA Corse
« Maintenant permettez-moi de vous présenter Battista Acquaviva, fille du frère de Pierre Acquaviva du Domaine d’Alzipratu qui nous a régalé a capela d’un chant d’amour Culomba. Elle est née à Bastia, a étudié « pendant dix ans le violon classique et baroque sous la direction d’un professeur particulier. Parallèlement, elle étudie le chant avec son père Nando Acquaviva, qui l’initie à l’écoute des intervalles spécifiques de la pratique du chant traditionnel corse, à la performance et au placement de voix correspondant. » Élève de l'école de musique de Pigna Scola di cantu. Sa tessiture est soprano, mezzo et colorature. Battista a choisi pour thème de sa thèse de doctorat la « mystique féminine et mythes de la femme dans le XIXème littéraire D'H.de Balzac » au sein de l'école doctorale de Julia Kristeva, sous la direction de José-Luis Diaz. »
Le 18 octobre 2012, je récidivais :
« Le plus bel accord avec les vins corses se nomme Battista Acquaviva : le rossignol de Corsica »
Après cette audition je vous propose de lire 2 des 11 pages que Robert V. Camuto consacre à Pierre Acquaviva « Le sang d’un frère » dans son livre « Un Américain dans les vignes » chez Michel Lafon.
« Après avoir été déjeuné Chez Michel à Calenzana au soir du vendredi saint, de retour à l’hôtel à Calvi y trouve un message urgent attend Camuto qui fait finement remarquer que ça le choque « car il n’est pratiquement jamais personne dans ce pays pour estimer qu’il y a urgence. » Le billet demande de rappeler Pierre Acquaviva du domaine d’Alzipratu. Camuto appelle le numéro griffonné sur le bout de papier et apprend que ce n’est pas Pierre qui a appelé mais son père Maurice. Celui-ci a 72 ans « maigre, trapu, avec une touffe de cheveux clairs et bouclés, des yeux verts, un regard vif Mais, contrairement à son fils, il parlait le français avec un fort accent corse, outre une autre différence frappante : quand je lui tendis la main, il la saisit de sa main gauche, et la prit maladroitement. Je regardai sa main droite. De sa manche, sortait une prothèse verte, en plastique, de la main et de l’avant-bras. » Camuto lui propose de venir à 18 heures à son hôtel sur le port. Arrivé en avance, Maurice Acquaviva, pour parler sans être dérangé, entraîne Camuto dans un appartement appartenant à des cousins. « Ignorant mes protestations, il commença par la façon dont les français avait conquis la <corse indépendante, plus de deux cents ns auparavant, puis passa plus d’une heure à me décrire les mauvais traitements que les Français leur avaient fait subir, des guerres du XVIIIe aux taxes du XXe sur les vins corses en passant par la gestion étatique du ferry reliant le continent.
Ce système de ferry, qui met Marseille à une demi-journée de la Corse, a pour effet d’augmenter le coût des exportations de vins en direction du continent et de rendre ridiculement cher le transport depuis la France du matériel nécessaire pour la mise en bouteille.
- Pour nous, dit-il, acheter la bouteille, l’étiquette, le bouchon et la capsule, ça coûte 6 francs.
Comme la plupart des personnes d’un certain âge vivant en France, il se destinait à parler « en francs » pour le restant de ces jours.
- Mais ici, au supermarché, ils vendent du bordeaux à 6 francs. C’est la même bouteille, la même étiquette, tout. La seule différence, c’est le vin qu’il y a dedans ! Comment est-ce possible ?
Il continua :
- Ils ont le monopole. Ils ont fait en sorte que nous restions pauvres et à genoux.
Il cracha.
- Les Français, les colons, ils…
Sa voix se brisait. Il avait soudain les yeux rouges. Il dressa son pouce sous le menton, et appuya jusqu’à ce que l’extrémité du pouce devienne blanche.
Il batailla ensuite pour parvenir à caler sur ses genoux, avec sa prothèse en plastique, son paquet de cigarettes. Il en sortit une avec sa bonne main, la glissa entre les doigts de sa prothèse et lui présenta un briquet. La cigarette allumée, il l’ôta de la prothèse avec sa main gauche et commença à fumer.
- Chirac n’a rien à dire aux États-Unis, lâcha-t-il en se lançant dans une comparaison entre les présidents français et américain – Entre Chirac et un George W. Bush que l’Europe vouait aux gémonies. Chirac a fait en Corse dix fois pire que Bush en Irak.
Il apparut que Maurice était un séparatiste – ou, pour employer son langage, un « résistant ». Lui, il agissait publiquement, dit-il. Dans l’ombre opéraient les clandestins du FLNC qui accomplissaient des missions contre l’État français et contre les profiteurs étrangers (c’est-à-dire les non-Corses).
- Je ne les connais pas et, si je les connaissais, je ne le dirais pas, mais nous pensons la même chose.
Pierre m’avait parlé de la mort de son frère aîné, Jean Battiste, qui avait dirigé la cave vinicole avant lui. Cependant, j’ignorais les circonstances de son décès.
- Jean Battiste faisait parti des clandestins, reprit Maurice. Il posait des bombes.
Il suspendit sa respiration. Je tournai les yeux vers les rideaux de dentelle et remarquai que le lumière méditerranéenne, à l’approche du soir, tournait à l’orange.
Ainsi, quand il ne supervisait pas le domaine familial ou les opérations de vinification, le fils aîné de Maurice plastiquait des bâtiments administratifs, les maisons des « colons » et le siège des « spéculateurs » qui voulaient « bétonner » la côte avant de s’envoler avec le butin – en s’assurant toujours que les habitations étaient vides.
Un matin de 1987, alors qu’il avait vingt-sept ans, Jean Battiste partit pour une mission « contre une maison ».
- Mais quelqu’un m’attendait, expliqua Maurice. I a été tué par balle. On ne sait pas qui a fait le coup. La police ou le colon qui habitait là. On a demandé une enquête pour savoir comment il a été tué. Ils n’ont jamais rien fait.
Tandis qu’il poursuivait son récit, je fus frappé par cette description de son fils partant faire sauter une maison. Le propos était détaché, comme on aurait dit : « Un matin, il est allé acheter une miche de pain… »
Quand il eut fini, je me sentis épuisé. Des heures avaient passé. Je rassemblai mon courage pour poser à Maurice la question gênante : comment avait-il perdu sa main ? Lors d’une mission, lui aussi, en posant une bombe ?
Il considéra sa prothèse, puis la bougea comme si elle avait pu signifier que les dégâts physiques n’étaient pas si graves. C’était un accident d’enfance, expliqua-t-il. Ça lui était arrivé en jouant avec une grenade de l’armée italienne après l’Occupation. »