Hier, lorsque j’ai quitté à vélo mon XIVe ce qui m’a de suite frappé c’est le silence, un silence léger à peine troublé par le passage de rares autos, la ville semblait se recueillir. Tout au long de mon trajet vers la Place de la Nation ce n’était que marcheurs sur les trottoirs, longue cohorte convergeant vers les points de ralliement. Pour la première fois depuis que je vis à Paris, avec ma flèche d’argent j’ai enjambé la Seine en empruntant le pont Charles de Gaulle. Sans encombre j’ai gagné la Place de la Nation, tout le monde faisait attention à tout le monde, aucune bousculade, du respect mutuel. Et toujours cette forme de légèreté silencieuse flottant au-dessus de cette foule assemblée.
De partout ce n’était que flux humain, toujours paisible et tranquille, parfois crépitait une salve d’applaudissements. Impressionné. Impressionnant. Je remontais l’avenue Philippe Auguste noire de monde. Au carrefour un cordon de gendarmes dérivait, avec courtoisie et pédagogie, vers le boulevard de Charonne, le cortège qui avançait en rang serré. Et puis, là, face à la bouche de métro je tombais nez à nez avec la petite bande des belles du Lapin Blanc, emmitouflée car une petite bise tranchante balayait l’avenue. Nous n’avions ni pancarte, ni insignes, mais nous étions la marche et nous marchions.
Nous en étions de cet immense élan, nous femmes et hommes de bonne volonté, cohorte d’anonymes.
Mais pourquoi fallait-il en être, ici à Paris et ailleurs, en France et dans beaucoup de pays, me direz-vous ?
Pour une raison très simple : témoigner de ce qui nous rassemble : notre commune humanité. Celle à qui les lâches assassins ont déclaré une guerre impitoyable.
Notre côte à côte chaleureux de dimanche a été la preuve de sa richesse et de sa puissance à cette commune humanité et elle nous a donné le courage nécessaire pour défendre la liberté, nos libertés…
Et après !
Que feront-nous demain ?
Je ne sais, mais ce que je sais c’est que ça dépendra aussi de nous, de notre capacité à vivre ensemble dans une forme de respect exigeant et sans concession. La compréhension ne signifie pas faiblesse, nous sommes dans un État de Droit qui est le seul garant des libertés. Que celles et ceux qui s’en affranchissent sachent qu’ils devront s’y soumettre. Intransigeance nécessaire et salutaire pour rompre avec le repli communautaire.
Ma seule photo du jour illustre cette courte chronique : un drapeau qui avait flotté à une fenêtre lors de la Libération de Paris.
Il y eut aussi un selfie de notre petite bande mais là je ne publie pas car vous seriez jaloux