En France nous n’avons toujours pas de pétrole mais nous avons l’insigne chance de posséder des experts en résistance, des bâtisseurs d’exception, des héritiers de la ligne Maginot. Le dénommé Amalric est de ceux-là. Dans la Journée Vinicole du 9 décembre il lève l’étendard de la révolte contre « une politique de cépage galvaudé ». Pour être honnête j’ignorais qu’il existât en notre beau pays une politique de cépage. Des vins, dit de cépages, ça oui, que notre belle logique administrativo-politique avait territorialisés en réservant cette mention à la catégorie juridique des vins de pays. Tout ça, bien sûr, dans un pur souci qualitatif. En 2001, une poignée d’hurluberlus, dans un PQ, dit « Cap 2010 », proposèrent que les fameux VQPRD regroupassent, les AOC bien sûr, et les vins de Régions Déterminées (une part des AOC régionales et des vins de pays) et que les autres vins, en un « espace de liberté », puissent s’assembler sous la bannière « France » : vins des cépages de France. La suite vous la connaissez, les féodaux n’en voulurent pas. Le mérite de cette proposition c’est qu’elle permettait, n’en déplaise à Robert, Amalric bien sûr, c’est qu’elle permettait l’émergence d’une réelle politique des cépages en France, en alliant territorialité (La France) et la liberté d’élaboration et d’assemblage de vins dit de cépages pour des segments de marché mal couverts par notre système. Je concède au courroux de ce cher homme que la nouvelle OCM est bien plus permissive. En effet, aussi bien les IGP, qui indiquent le lieu d’élaboration du produit et non la provenance du raisin, que les vins sans IG, ouvrent la porte à la concurrence. Pour autant faut-il, comme les Alsaciens pour le Riesling ou le Gewurztraminer, demander des exceptions ?
C’est quoi un cépage ? C’est un cépage, donc une information consommateur et non un signe de qualité. N’en déplaise à mes amis alsaciens, les deux cépages susmentionnés ne garantissent en rien à l’acheteur d’acquérir un produit de qualité. N’est-ce pas un peu hypocrite que de se cacher derrière une phraséologie « qualitative » alors que notre manque de rigueur, aussi bien dans certaines AOC – qui dans la pure doctrine de l’INAO, ne devaient faire aucune mention de leurs cépages, hormis bien sûr les alsaciens et quelques autres – que dans certains de vins de pays, nous a conduit aux résultats que l’on sait. Nous avons ainsi, sans gran effet sur la qualité réelle, dévalorisé la catégorie des vins de table en les dépouillant de tout, des apatrides sans âge, alors que nos concurrents, eux, la réhabilitaient. Le sieur Amalric, dans son inconscient languedocien, assimile vin de table et bistrouille. Croit-il vraiment qu’un mauvais Chardonnay sans IG à deux balles dévalorisera le Chardonnay Grand Ardèche de Latour ou qu’un Chardonnay insipide coiffé d’une belle appellation tiendra la route face à un Chardonnay sans IG défendant une marque mondiale ? La réponse est bien sûr, non. S’accrocher à de telles baudruches et affirmer « que dans l’inconscient collectif des consommateurs de tous les pays, la logique pyramidale qualitative française et européenne du triptyque vins de tables (sans IG), vins de pays et vins de cépage (IGP), et AOC (AOP) est suffisamment ancrée pour qu’on ne la perturbe pas, par des vins de table requalifiés, qui viendront disqualifier leurs voisins d’en-dessus » c’est proférer du n’importe quoi et surtout condamner une grande part de notre vignoble généraliste à la disparition. Dans les années 70-80 ce même discours appliqué au négoce embouteilleur, SVF et Castel, qui certes se bataillaient sur les premiers prix, mais aussi se voyaient concurrencé par les groupements de producteurs du Languedoc, nous a fait passer à côté de la croissance des nouveaux marchés parce que nous avions le nez enfoui dans notre marigot national et ses pratiques soi-disant pures et dures qui savent s'arranger avec le ciel. Nous avons besoin de grands opérateurs et donc d’une capacité à leur donner des marges de manœuvres, ce qui ne signifie pas faire n'importe quoi.
Le couplet d’Amalric sur les subprimes – j’ai l’outrecuidance de trouver les miens bien plus pertinents – pour dénoncer l’ultralibéralisme de la Commission me paraît outré et surtout il permet de faire oublier que, si nous en sommes arrivés là, c’est que notre système très encadré et soi-disant autorégulé a surtout permis de protéger des productions, soient excédentaires, soient invendables. Nous qui nous targuions de ne jamais avoir à distiller nos excédents d’AOC avons donné aux eurocrates des arguments en or. J’ai interpelé Marianne Fisher-Boël alors qu’il en était encore temps, le 8 août 2007, http://www.berthomeau.com/article-7012042.html . Où étiez-vous Amalric Robert ? Aux abonnés absents ou peut-être vous souveniez-vous de votre silence ou de votre hostilité lorsque les propositions de « Cap 2010 » se faisaient tailler en pièces ? Hurler aux loups après la bataille ça fait certes du bien aux bronches mais c’est inopérant. Oui, comme vous l’écrivez « gérer c’est prévoir et anticiper », mais, sans vouloir mettre le doigt là où ça fait mal, comme le disait Mac Arthur : « Trop tard ! » La seule bataille qui vaille, celle qu’il faut mener, c’est celle de donner à notre grand vignoble généraliste des perspectives. Faire accroire, qu’en se barricadant derrières des exceptions, des règlements horizontaux, de fausses régulations, on « sauvera » la part volumique de notre viticulture c’est semer l’illusion. Entre les discours des « dérégulateurs fous » et ceux des « règlementateurs obsessionnels » il y a un espace contractuel, qu’à leur manière et en fonction de leur histoire les champenois ont jusqu’ici assez bien géré. Les 10 dernières années ont amplement montré que le conglomérat des « conservateurs » de tous bords, ceux qui s’abritent, se planquent derrière la base, se parent de beaux discours en défense, tempêtent selon l’air du temps contre l’étatisme ou le libéralisme, produisent le pire : l’immobilisme. Alors, " Tout sauf Robert !" comme dirait Lucchini...
Si ça vous intéresse lire à la rubrique PAGES N°38 (en haut à droite du blog) "The Last Glass" Dr. Olivier Ameisen a witness who bothers ... Traduction de Google : qui c'est qui a dit que le blog était un passe-temps d'ado ? Non c'est un vrai média d'avenir pour qui sait occuper cet espace de liberté pour diffuser ses idées. Les gens du vin, vont-ils, comme d'habitude laisser passer le train ? Même avec la trève des confiseurs les affaires continues sur Vin&Cie l'espace de liberté ou Wine & Co., the area of freedom Je me tiens à la disposition de ceux qui veulent se bouger. Bonnes fêtes et à bientôt sur nos lignes...