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3 février 2008 7 03 /02 /février /2008 00:05
Pour Bourrassaud les emmerdements des autres c’était son pain béni, il adorait rendre service. Les miens, plus que d’autres, relevait, bien évidemment, de la priorité des priorités. À propos de mes relations avec Sylvie je fis dans une sobriété qu’apprécia à sa juste valeur mon supérieur. Il se contenta d’un commentaire tout aussi concis « c’est Marie-Jo qui serait contente de savoir ça… » qui m’enlevait la dernière trace de culpabilité à son égard. J’opinais bêtement en embrayant sur la raison de ma visite. Bourrassaud, en m’écoutant, passait sa grosse paluche velue sur ses cheveux en brosse et, lorsque j’évoquai le mystérieux château, ses petits yeux se mirent à pétiller et un sourire gourmand s’accrochait à sa bouche lippue. Quand je m’interrompis, il se laissait aller dans son fauteuil tout en rangeant sa queue de chemise dans son pantalon. « T’as le cul bordé de nouilles mon grand. Si c’était pas mal venu dans ma bouche, j’oserais ajouter que t’as un pot de cocu. Allez, je t’embarque. Nous allons faire un petit tour du côté de la Chapelle-en-Serval. Je t’expliquerai le tout en chemin. Bourrassaud appuyait sur l’interphone interne : « Dubigeon, ramène ton gros cul et ton outillage de service, nous allons prendre un bol d’air en forêt… » Lorsque nous passâmes devant le comptoir de Marie-Louise, celle-ci, son cul pointu posé de guingois sur l’espèce de haut tabouret qui lui servait de siège, le chignon de guingois, semblait avoir du mal à récupérer de sa séance matinale avec le commissaire. Je ne pus m’empêcher, en m’asseyant dans le fond de la 404 aux côtés de Bourrassaud, d’ironiser : « c’était ouragan sur le Caine se matin… » Celui-ci s’esclaffait en me tapant sur les cuisses : « y’a des jours comme ça mon garçon où j’ai des envies de cosaque. Avec Marie-Jo on fait une sacré paire, elle doit te vider les gonades comme une vraie butineuse la salope… » Dans le rétroviseur, Dubigeon, en mettant le contact, nous observait comme si nous étions des extra-terrestres.
 
Bourrassaud chassait. Son collègue de Senlis, un vieux copain de promotion, chasseur lui-aussi, l’avait fait inviter par le garde à une chasse privée en forêt du château du Mont-Royal. Elle regorgeait de cervidés car le propriétaire chassait ailleurs avec ses gros clients et, afin d’alléger la charge de ces bouffeurs d’arbustes que sont les cerfs et leur harde, le garde organisait des ponctions quand bon lui semblait. Ce qui avait mis la puce à l’oreille de Bourrassaud c’est que le lot de fusils rassemblés pour l’occasion se composait exclusivement de représentants de la Grande Maison. Discrétion fut le maître-mot de son pote Mignon de Senlis. Bourrassaud, fit l’âne pour avoir du foin auprès de l’un des participants, une grande gueule, bellâtre, équipé comme un chasseur de safari mais capable de rater un grand cerf à vingt mètres, qui à la fin du repas de chasse arrosé de grands crus pissait à ses côtés dans des toilettes d’un luxe tapageur. « On est chez un émir… » lui dit-il en tenant bien en ligne son sexe. L’autre s’esclaffait en se tournant vers lui, arrosant au passage le marbre du dallage, « c’est plutôt leurs bakchichs pépère qui nous valent de pisser dans de l’albâtre. Vendre des kalachnikovs et des missiles sol-air ça vaut mieux pour se faire des couilles en or que de faire la chasse aux loulous du milieu. Putain, moi je suis prêt à bouffer ma carte tricolore pour goûter aux beaux petits culs qu’il se tape le vieux bonze… » Sans avoir besoin du bagage déductif de Maigret ou du commissaire Bourrel, Bourrassaud n’avait eu aucune peine à mettre un nom sur le marchand d’armes. Nous avions rejoint la Nationale 17 à Gonesse puis après avoir traversés Louvres et Survilliers, nous plongions dans une sorte de long couloir, bordé à gauche par un massif forestier, qui nous amenait à la Chapelle-en-Serval.          
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commentaires

D
interressant comme article, je reviendrai...
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