Melon au porto, melon au jambon de Parme, lorsque revient la saison du melon sa fraîcheur et sa douceur en font l’une des stars des tables d’été. Pour ne pas me voir accusé d’avoir le melon je me dispenserai de vous faire un speech sur cette plante potagère de la famille des cucurbitacées dont le faux-fruit fait nos délices. Cependant je ne puis m’empêcher d’écrire que le melon d’eau est une courge. Et puis, même si c'est déplaisant, dans les appellations du racisme populaire, un melon c'est, pour les petits Français, comme l’écrivait le marseillais Jean-Claude Izzo :
« [...] Rico les entendait raconter des blagues, et rire. À ce moment, l’un d’eux lança :
- Et tu sais comment ils cueillent les melons, à Marseille ?
- Non, dit une voix.
- Ils secouent les échafaudages. »
Et oui monsieur Zemmour !
Plus sympathique le Melon de Bourgogne qui est un cépage, le melon charentais qui est une variété et non une origine alors que le melon de Cavaillon est souvent un cantaloup. Bref, lisse ou grenu, le melon se consomme en entrée ou en dessert. Reste son achat qui constitue un moment délicat. En effet, un mauvais melon est immangeable.
Alors comment procéder ?
Plusieurs méthodes : la première faire confiance à son marchand de fruits&légumes (méthode applicable à beaucoup de produits de bouche ; la seconde : faire confiance à sa main : un bon melon doit être lourd (signe qu'il est gorgé de sucre : le taux de sucre doit dépasser 10 degrés Brix pour être commercialisé, en-dessous il est classifié comme courge ; la troisième dites méthode parigot tête de veau consiste à sentir le melon ce qui est redoutable car l’odeur type de la maturité qui s’exprime du côté de l’auréole n’est pas toujours un indice d’un bon melon ; la quatrième : compter le nombre de tranches qui doivent être bien marquées par un trait vert bleuté (melon lisse) 10 étant le bon chiffre ; la dernière : scientifique, le taux de sucre garanti (le producteur pique le melon pour en extraire une goutte dont le taux de sucre est vérifié).
Revenons maintenant à mon interrogation initiale : Le melon a-t-il besoin de compagnon ? Ses deux accompagnateurs classiques : le porto et le jambon de Parme ne traitent pas le melon de la même façon. Le premier exige de lui qu’il soit réceptacle pour le recueillir ce qui implique une consommation à la petite cuillère ; le second, lui, pour une consommation aisée, demande au melon d’être tranché et, bien sûr, c’est couteau et fourchette pour le manger. Ceci écrit, sans vous donner ma préférence entre melon nature et melon accompagné je laisse le soin aux grands défenseurs des produits français de contester l’origine du liquide comme du solide pour bien sûr dégainer leurs propositions.
Pour finir, toujours pour hausser le niveau culturel de cette maison, un petit coup de Montaigne : «en réalité, les principales innovations alimentaires du XVIe siècle ne viennent pas d’Amérique, mais de pays méditerranéens, et en particulier d’Italie, qui donne le ton, à l’époque, à toute nouvelle cuisine. L’artichaut et le melon, en particulier sont à la mode.
[...] Quand au melon, dont Montaigne, comme Henri de Navarre, était fort friand, import d’Orient via l’Italie, il fera les délices des élites gourmandes du siècle, et sera l’objet d’un ouvrage savant du doyen de la Faculté de médecine de Lyon, Jacques Pons, Sommaire Traité des melons, contenant la nature et usage d’iceux, avec les commodités et inconvénients en revenant (1586) La table au temps de Montaigne Christian Coulon Arléa.
La controverse est ouverte : melon solitaire ou melon accompagné ?
Et si accompagné, par qui ?
En tranches ou entier (s’entend coupé en 2) ?
Et le vin dans tout ça (hormis le Porto bien sûr) ?