Ce matin je ne sais si vous allez me suivre dans les méandres de mon esprit d’escalier mais comme « point n'est besoin d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer. » je vous livre le fond de ma pensée. En notre beau pays françois il est inscrit dans notre ADN national qu’il est fort probable qu’un beau jour le petit peuple vous portât au pinacle pour dès le lendemain réclamer que l’on vous écartelât en place de Grève ou bien encore, en une volte radicale, que les Tout Puissants un beau matin réclamassent votre tête alors qu’avec le même élan souverain dès lendemain au soir ils la couronnassent de lauriers.
Il m’apparaît que tel est le destin de 2 hommes qui se situent aux antipodes de notre échiquier du vin : Marcel Richaud de Cairanne et Georges Duboeuf de Romanèche-Thorins. Le premier, précurseur d’un retour à des pratiques précautionneuses, fut longtemps moqué par ses pairs avant de se retrouver aujourd’hui inscrit sur les tablettes des meilleures maisons ; le second, père du Beaujolais-Nouveau, encensé, révéré, cité en exemple par le Gotha de notre France vineuse comme le porte-drapeau d’une France conquérante et sûre d’elle-même, se voit depuis quelques années vilipendé, caillaissé, stigmatisé comme étant l’auteur de tous les maux du Grand Corps Malade...
Sans rappeler trop lourdement des temps difficiles de notre Histoire où le peuple de Paris qui se pressait sur le parvis de Notre-Dame pour saluer avec chaleur le vieux Maréchal « protecteur » d’une France à genoux acclamait avec la même ardeur quelques mois après le Général libérateur d’une France humiliée mais à nouveau debout, il serait quand même de salubrité publique de se pencher sur notre propension nationale à la versatilité ou mieux encore, n’en déplaise à Michel Onfray, à nous étendre sur le divan du père Sigmund pour nous soumettre, tel des Woody Allen ou autre Fabrice Luchini, à une bonne et longue analyse. Le Divan donc pour nous permettre de mieux vivre avec nos multiples contradictions !
À ce stade de ma chronique je peux tout à fait comprendre que vous fussiez dubitatif, même un peu inquiet de ma santé mentale, que vous vous interrogiez sur l’état de mes connexions neuronales, que vous vous inquiétiez de mon devenir. Et pourtant, même si j’ai sûrement un grain – mais après tout avoir quelques aspérités donne prise à la discussion – je ne suis pas encore totalement barjot. En effet, je reste persuadé après avoir observé nos 10 dernières années de postures, de faux-débats, d’anathèmes, d’érections de chapelles, de bals des faux-culs, de réformes enlisées, de rapports enterrés, qu’il nous suffirait de bien peu de choses pour sortir de nos névroses, pour nous assumer tels que nous sommes, ni plus, ni moins.
Après ce ¼ heure freudien, lacanien ou jungien, je vous dois l’explication de l’origine de cette chronique qui plonge ses racines, telle une vieille vigne, au plus profond de mon sens aigu de l’observation (pour les chevilles qui enflent je m’administre des bains d’eau salé au sel de Guérande IGP). Mon titre étrange ne relève pas de la vile tromperie pratiquée par les adeptes du marketing qui vous fabriquent des Barons de je ne sais pas quoi pour vous vendre du jaja qu’a pas plus de quartiers de noblesse que moi.
Tout est parti de mon Franprix qui vient de se refaire une beauté (à noter que le rayon vin y a perdu au moins 2 tailles ce n’est pas encore la peau de chagrin mais ça vient). J’y passe de temps en temps y acheter deux ou trois bricoles. Là je me dis : « y’a t’y encore du Bojolo Nouvo ? » Je cherche ! Peau de zibi pas plus de Bojolo Nouvo que de poils sur le ciboulot du père Coffe. Dire que je suis content de ce désert serait mentir mais comme je m’apprêtais à sortir je tombe nez à nez avec Georges Duboeuf, pardon sur un Mâcon-Villages Nouveau de Georges Duboeuf. Avouez que y’a de quoi être un peu stupéfait de voir débarquer ainsi ce nouveau « Nouveau » tout blanc que bien sûr j’acquière : 6,95€.
L’affaire aurait pu en rester là si le lendemain trainant mes guêtres chez Lavinia je ne m’étais pas mis dans la tête de vérifier si y’avait encore un rayon Beaujolais dans ce temple chic et choc. Pendant un temps j’ai cru que non. J’ai tourné un petit moment avant de découvrir niché au bout de la Bourgogne quelques casiers de crus du Beaujolais, dont bien sûr Le Morgon de Marcel Lapierre. Allez, je suis généreux : 6 références dont un Bojolo Nouvo de chez Foillard. Aucune mise en avant, queue de chique et eau de boudin j’en étais un peu chagrin lorsque je suis tombé sur Marcel Richaud, pardon sur un lot de bouteilles mis en exergue au bon endroit. Celles-ci étaient dotées d’étiquettes à fort contenu philosophique : Elle pensait : « Si la vie n’était ce qu’elle est, elle pourrait être ce qu’elle n’est pas ». Le vin la rendait philosophe, qui m’intriguèrent. Je consultai le cul de l’une d’entre elles et je découvris le Côtes du Rhône Nouveau de Marcel Richaud. Bien évidemment j’achète : 8,70€.
Voilà donc le pied de cuve de mon histoire de divan : Marcel&Georges ou le vin français en analyse. Je ne sais ce que vous en tirerez mais moi, avant de les déguster, je puis vous assurer que Georges et Marcel même si tout semble les opposer, sont bien deux acteurs très représentatifs de notre vin français et que, avant d’instruire dans chacun des 2 camps opposés, leur procès, l’heure me semble venue de s’intéresser à la réalité. Ne m’étant pas moi-même soumis à une quelconque analyse je ne puis ce matin aller pousser plus loin mes investigations. S’il y a parmi vous des candidats : j’offre le divan...