« Le ministre de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche, a annoncé le 18 mai qu’il autorise la reprise de cette expérimentation saccagée en 2009. Dans le respect des principes qu’il s’est fixé -parcimonie, précaution et dialogue- l’INRA va donc relancer cet essai, complémentaire aux autres voies de recherche non OGM de lutte contre la maladie du court-noué.»
La direction de l'INRA précise :
«Face aux difficultés pour lutter contre cette maladie mortelle pour la vigne et sans traitement efficace, le centre Inra de Colmar a conçu un essai scientifique visant à comprendre, à l’aide d’un porte-greffe transgénique résistant au court-noué, les mécanismes de protection de la vigne contre ce virus. Cet essai a été conçu et préparé en dialoguant avec un comité local de suivi composé d’élus et de représentants du monde viticole, syndical et associatif (consommateurs, défenseurs de l’environnement).
Autorisée en 2005 pour une période de 5 ans, cette expérimentation avait été saccagée par un individu isolé en septembre 2009, compromettant la production attendue de résultats scientifiques alors qu’elle avait permis un éclairage nouveau sur la variabilité et le fonctionnement dudit virus.
L’INRA a donc demandé en mars 2010 l’autorisation de reprendre cet essai et obtenu du Haut Conseil aux Biotechnologies un avis favorable, suivi d’une consultation publique à l’issue de laquelle le ministre en charge de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche a autorisé cet essai pour une période de 4 années, afin que les nouvelles connaissances attendues de cette expérimentation sur la maladie du court-noué puissent être produites.
L’institut entend reprendre dès le début du mois de juin la conduite de l’essai en maintenant toutes les mesures nécessaires pour éviter la dissémination (cf. infra), ainsi que le dialogue actif avec les parties prenantes sur les objectifs, les modalités et les résultats de cet essai. De plus, la nouvelle autorisation prévoit une surveillance de la parcelle pendant les dix années suivant la fin de l'expérimentation, avec un rapport intermédiaire annuel.
D’autres voies de recherche sont également explorées, conformément aux engagements souscrits avec le comité local de suivi. En effet, outre les porte-greffes OGM, les chercheurs testent la résistance de porte-greffes non-OGM au virus du court-noué. Et depuis novembre 2009, un essai de lutte biologique visant à utiliser les propriétés «nématicides» de certaines plantes comme la tagète (Tagetes minuta) a également été mis en place, en collaboration avec des viticulteurs.
L’ensemble des travaux menés vise à concevoir des moyens de lutte permettant aux viticulteurs de faire face à cette maladie, en évitant l’utilisation de produits de traitement reconnus comme hautement toxiques.»
Dans notre pays démocratique envisager un réel débat citoyen, comme l’avait tenté en son temps le gouvernement Jospin, sur l’opportunité de l’introduction de cultures OGM relèverait d’une problématique proche d’un dialogue entre les catholiques et les protestants au lendemain de la Saint Barthélémy. Les deux camps sont irréductibles : l’OGM est un marqueur idéologique qui résiste à toute approche sereine. Paradoxalement, le meilleur moyen d’aborder une lecture apaisée de ce dossier me semble consister en sa délocalisation vers la Chine qui se dit toujours Populaire même si elle vit sous les rets d’un capitalisme pur et dur et d’un Parti Unique qui garde une poigne de fer.
La Chine, occupe la 5ième place des Pays producteurs d’OGM avec ses 3,7 millions d’ha de coton, tomates, peupliers, papaye, poivron, derrière l’Inde 8,4 millions d’ha de coton, l’Argentine 21,3 millions d’ha de soja, maïs, coton, le Brésil 21,4 millions d’ha de soja, maïs, coton et bien sûr les USA 64 millions d’ha de soja, maïs, coton, colza, courge, papaye, luzerne, betterave sucrière. Le 1ier européen est l’Espagne 14ième avec 0,1 million d’ha de maïs. La nouveauté en Chine c’est que les autorités viennent d’autoriser le commerce de céréales alimentaires transgéniques.
Que lit-on cité par le très officiel journal Guoji Xianqu Daobao :
« La Chine va se transformer en un champs d’expérimentation pour les céréales transgéniques étrangère », « un cauchemar national ». Sur la Toile les forums de discussion ont même lancé des pétitions « contre les céréales transgéniques » Normal me rétorquera-t-on : mondialisation des peurs. Je veux bien mais lorsque je lis que Zheng Fentgtian Dr adjt de l’Institut du développement de l’agriculture et du monde rural s’inquiète que la Chine, 1ier pays producteur et consommateur de riz, soit prête à accepter la culture à but commercial de riz transgénique « alors qu’on est encore loin d’être parvenu à un consensus mondial, nous nous lançons inconsidérément dans la culture à grande échelle... » et que Jiang Gaoming chercheur à l’Institut de Botanique de l’Académie des Sciences de Chine, s’inquiète des effets sur l’homme de la toxine Bt (Bacillus thuringienis) fabriquée par le gène pour empoisonner les insectes prédateurs « on peut se demander si, sur le long terme, l’ingestion de ce riz n’aura pas des conséquences néfastes pour l’homme ».
Inquiétudes mais aussi toujours selon le même Jiang Gaoming 3 points sur lesquels pèsent de lourdes incertitudes :
- les réactions en chaîne qu’ils peuvent provoquer au sein des organismes vivants,
- les risques qu’ils font peser sur la chaîne alimentaire,
- la difficulté à les éliminer en cas de pollution, de multiplication et de prolifération incontrôlée. « Dans ce contexte, prendre l’initiative de modifier génétiquement l’aliment de base de 1,3 milliard d’êtres humains apparaît extrêmement risqué. Nous n’aurons aucun moyen de gérer la situation en cas de problème ».
Toujours dans le camp des opposants Fang Lifeng de Greenpace Chine – oui ils sont en Chine aussi – souligne que si le coton OGM résiste bien au charançon dans la province de Jiangsu on assiste à une invasion d’autres insectes phytophages : punaise rouge, mouche blanche, araignée rouge et puceron qui exigent des doses de pesticides supérieures à celles d’avant.
Et pour clore le chapitre Zhang Hongliang professeur à l’Université centrale des nationalités affirme « Si la tentative de recourir aux OGM échoue, c’est la population chinoise qui paiera les pots cassés. Mais si cet essai est concluant, l’agriculture chinoise, et même toute notre économie, tombera alors entre les mains des USA et des autres pays occidentaux. »
Moi qui ne suit que juriste, pas un scientifique en capacité de donner un avis sur l’innocuité ou les risques que nous feraient courir les OGM, un point me semble capital : « la propriété intellectuelle des OGM » Comme le souligne Fang Lifeng « Lorsque ces biotechnologies brevetées à l’étranger sont utilisées à des fins scientifiques, cela ne pose pas de problème, mais, dès lors qu’il y a commercialisation, d’énormes sommes risquent d’être réclamées. Cela constitue une véritable bombe à retardement pour la souveraineté céréalière de notre pays ». Confier le devenir du patrimoine génétique de l’humanité à Monsanto ou DuPont de Nemours est d’une extrême gravité. Sur ce point, avant même toute décision, des solutions juridiques ouvertes et claires doivent être adoptées au plan mondial.
Dernier point sensible : l’indépendance des experts, en Chine comme ailleurs. Dans ce pays la liste des membres du Conseil sur la biosécurité du ministère de l’Agriculture est secrète. D’après Zheng Fentgtian les 2/3 des membres seraient des scientifiques spécialistes des OGM. « parmi eux, beaucoup ont déposé des demandes de brevets. Le conseil compte peu de défenseurs de l’environnement et de la sécurité alimentaire. »
Tout ça pour dire que même dans un pays bouclé, le débat existe et qu’il est relayé par un grand organe de la presse officielle.
Intéressant non !
Et nous, et nous, et nous : pour en savoir plus :
http://www.inra.fr/la_science_et_vous/dossiers_scientifiques/ogm/
questions_de_recherche/porte_greffe_transgenique_de_vigne