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26 septembre 2021 7 26 /09 /septembre /2021 06:00

 

Quand je suis parti, on ne m’arrête plus, je suis capable de faire Bordeaux-Paris*sans m’arrêter, façon de parler pour souligner qu’après avoir torché des milliers de chroniques sur le vin je suis encore capable d’en pondre  une couvée.

 

Et là, c’est un must, car il s’agit de chroniquer sur un cépage emblématique de la Vendée : le noah !

 

C’est un gars du Girouard ICI passé par la MOTHE-ACHARD, qui m’a expédié ce nectar : Clos de la Limonière 2019.

 

Le Girouard

 

Le Girouard, Sainte Flaive des Loups au nord, Grosbreuil au sud, Nieul-le-Dolent à l’est, la Chapelle-Achard à l’ouest, est à 8 km de La Mothe-Achard, une petite demi-heure à vélo.

 

*Une course incomparable, tombée dans l'oubli

 

Exténuante, Bordeaux-Paris était un épouvantail qui réclamait une préparation spécifique et des choix de programme : n'importe quel coureur risquait de s'y « griller » pour de longues semaines. Elle souffrirait de la concurrence du Giro et de la Vuelta (longtemps courue fin avril-début mai), ainsi que du dédain de Merckx, qui ne s'y est jamais risqué.

 

BORDEAUX-PARIS : ALCELIA participe au retour de cette course cycliste !  🚴‍♂️

 

La particularité de l'épreuve, où s'écrivirent néanmoins quelques pages de la légende, c'est d'abord la distance : près de 600 km, et une quinzaine d'heures d'effort pour le vainqueur. La nuit, propice à tant de choses que le jour ignore, et la fin de parcours effectuée derrière engins motorisés par des coureurs éberlués de fatigue, achevaient d'en faire une course à part. Le stupéfiant exploit d'Anquetil, venu la remporter en 1965, au lendemain même de sa victoire dans le Dauphiné. Herman Van Springel, sept fois vainqueur. En 1974, après s'être trompé de parcours, le Belge arriva premier ayant pourtant parcouru plus de kilomètres que prévu : il fut classé ex aequo avec le Français Delépine.

 

1965 : le doublé incroyable et fou du cycliste Jacques Anquetil

 

 

Revenons au NOAH

 

Pépé Louis avait une vigne sur le haut de la Mothe-Achard, commune qui avait peu de hauts et beaucoup de bas, complanté entièrement en noah. J’ai donc décavaillonné, vendangé, mais pas vinifié vu qu’une fois pressuré le moût vivait sa vie en toute liberté – il serait privé de la dénomination nature vu que pépé souffrait à mort pour lutter contre les fleurettes, et pourtant c’était un vin nu de chez vin nu – et bien sûr bu ce breuvage titrant les meilleures années 8°. Aux battages, les bouteilles de noah désoiffaient les gars des gerbes et du pailler. Ce n’est pas pour rien que j’habitais au Bourg-Pailler.

 

Élève à l’école d’agriculture de la Mothe-Achard du frère Henri Bécot, grand défenseur du noah j’ai taillé et vendangé, mais pas vinifié, les rangs de « Noé » nouveau nom de baptême donné par mon maître-vigneron pour faire échapper à la faux de l’arrachage obligatoire des cépages interdits Clinton, Noah, Jacquez, Herbemont, Othello, Isabelle. Coup de Jarnac des tous puissants viticulteurs du Midi pour étouffer l’autoconsommation de vins locaux. ICI

 

 

C’était au temps où la France était rouge, rouge d’une foultitude de cantons accueillant plus de 10 000 ha de vignes. Ma vieille Vendée en nombre de déclarants : 58 305 sur un total d’1 million 500 mille occupait la 3e place après l’Hérault et l’Aude. Le pépé Louis en était comme le sacristain ou le notaire. En superficie 18 858 ha sur un total d’un million 700 mille ha. En volume 854 000 hl sur 78 Millions d’hl, soit le 19e département viticole français.

 

Il existait donc un vignoble domestique important alimentant une forte autoconsommation et un vignoble productif dominé par les 2 mastodontes : le Languedoc et l’Algérie.

 

Concurrence !

 

Sus aux vignobles familiaux !

 

Haro sur les fameux cépages Clinton, Noah, Jacquez, Herbemont, Othello, Isabelle.

 

La loi va introduire la notion de cépages interdits et rendre leur arrachage obligatoire.

 

Officiellement le gouvernement lutte pour résorber la surproduction : 15 à 20 millions d’hl sur les 93 millions produits. Distiller donc, c’est l’Etat qui paye. Mais aussi, et c’est là où le débat entre le petit peuple des viticulteurs du dimanche et les intérêts des grandes propriétés du Midi « plantées d'aramon, irriguées en permanence, capables de produire plus de 300 hectos à l'hectare » et les « privilèges accordés à l'Algérie : liberté de plantation à très bon marché, taxes pratiquement inexistantes, main d'œuvre peu chère ».

 

Dans les années 30 le « Statut Viticole » s’est efforcé de réduire la production en pénalisant les hauts rendements et en interdisant la plantation de vignes nouvelles. En 1936, pour tenter de réduire l’appareil productif les pouvoirs publics promeuvent l’arrachage volontaire primé et menacent de recourir à l’arrachage obligatoire. L’acte fondateur des droits de plantation est le Décret n°53-977 du 30 septembre 1953 relatif à l'organisation et l'assainissement du marché du vin et à l'orientation de la production viticole Une stricte discipline d'encépagement est créée. La suppression des cépages prohibés est prescrite ; toutefois, pour en encourager la disparition, les producteurs pourront par exception remplacer par anticipation les vignes à disparaître lorsque celles-ci avaient été régulièrement plantées. Dans chaque région, seront par ailleurs définis les cépages dont l'utilisation sera recommandée et efficacement encouragée. A long terme, cette discipline doit entraîner une diminution du potentiel viticole.

 

J’ai planché sur La grande novation de la dernière réforme est que le Règlement (CE) N°479/2008 du Conseil du 29 avril 2008 portant Organisation Commune du Marché vitivinicole prévoit dans son Titre V : Potentiel de Production au chapitre II : un Régime transitoire des droits de plantation. Article 90 : Interdiction transitoire de plantation de vigne. En clair, à partir de 2015 la plantation de la vigne sera libre sauf si... ça c’est une autre histoire sur laquelle ma réserve naturelle et mon obligation de réserve font que je ne vous en dirai pas plus. Pour que vous ne soyez pas trop frustrés je vous offre un florilège des débats  sur la loi du 24 décembre 1934 concernant les hybrides producteurs directs américains et français.

 

 

 

Monsieur Renaud, député de l'opposition attaque: « Vous voulez interdire l'utilisation de certains cépages, vous déclarez la guerre aux hybrides producteurs directs qui pourtant ne jouent dans l'augmentation de la production qu'un rôle insignifiant.

Si vous croyez vraiment à la surproduction, il faut frapper les responsables et eux seulement ».

 

Monsieur Baylet député socialiste s'exprimera dans le même sens. Car, dit-il, « en Algérie, des millions d'ouvriers travaillent de l'aube au crépuscule sous le knout pour un salaire misérable ». Il ne sera pas suivi. 

La majorité de l'époque fait bloc pour défendre les représentants des grands domaines de France et d'Algérie

 

A l'Assemblée Nationale, lors des deux premières séances du 15 Décembre on parlera « d'atteinte à la liberté des petits viticulteurs » Monsieur le député Mauger monte à la tribune pour défendre longuement « les productions familiales injustement touchées ».

 

La conclusion de ces séances restera à Monsieur le député Grandmaison qui déclare :

 

« Je constate sans l'apprécier, que c'est la totalité de la récolte de nos petits producteurs de cépages condamnés qui est touchée soit par l'interdiction soit par la distillation obligatoire. Alors que dans les régions responsables de la surproduction, c'est une très faible partie qui sera atteinte par les mesures préconisées, mesures véritablement iniques ».

 

 

 

La troisième séance du 15 Décembre commence dans le même esprit.

 

Le député Jaubert parle « d'atteinte à la liberté individuelle des petits vignerons ».

 

Le Ministre des Finances, monsieur Germain Martin, déclare après quelques échanges aigre-doux « depuis quand s'est développée la culture du Noah en particulier, car enfin, c'est de lui qu'il s'agit: depuis deux ans »? Bronca dans les rangs de l'opposition, sifflets, prises de paroles.

 

 

Le Ministre rectifie alors comme il peut:« Je parlais de culture, pas des plants qui sont plus anciens je crois »!!!

 

Le climat restera tendu jusqu'à la fin des débats, il n'y aura pas de véritable échange.

 

 

 

Monsieur le sénateur Rouart rapporteur de la Commission de l'Agriculture présente l'article 6 et parle de « cépages primitivement introduits d'Amérique depuis de longues aimées, qui ont des goûts détestables, tel le Noah, d'autres moins mauvais comme l'Othello et le Clinton qui sont tout de même des cépages inférieurs. On a voulu y joindre en même temps tout ce qu'a apporté l'hybridation française qui est une chose admirable » dit-il.

 

 

 

Deux anecdotes pour terminer :

 

 

Pour enrayer la surproduction, Monsieur le député Chouffet a proposé que la ration de vin par soldat passe de 1/2 litre à 1 litre.

 

 

« Je ne pense pas, a-t-il dit, qu'il puisse se trouver quelqu'un ici pour affirmer qu'un litre de vin par jour et par homme soit une ration trop élevée ».

 

 

Le Président du Conseil a renchéri: « Je suis tout à fait d'avis que dans la période où le vin est bon marché on fasse un gros effort pour en assurer la consommation et que la troupe bénéficie de plus fortes rations »

 

.

Sauf que cela ne représentait que 300000 hectolitres volume dérisoire par rapport aux 15 ou 20 millions d'excédents.

 

 

Monsieur le sénateur Rouart s'exprimant au nom de la Commission de l'Agriculture fait référence à la proscription du Gamay sous Louis XV et déclare :

 

 

« Singulière naïveté du pouvoir absolu, croyant dominer les adaptations naturelles.

Si la volonté royale avait été complètement exécutée, nous serions privés d'un des meilleurs vins courants de France. »

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commentaires

E
ROUILLON et son presbytère moyen-oriental, retour de croisade, au GIROUARD renvoie à HILLAIRET, autre illuminé à LA RABATELIÈRE qui, retour de Jérusalem, construisit dans la propriété du petit hobereau local, des monuments à la gloire de la SALETTE (1846) mais cet hommage ne tient pas la route quand Bernadette a ses visions à LOURDES (1858). Mais les monuments de LA RABATELIÈRE sont toujours là !
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P
" Bordeaux - Paris ", incomparable ? Facile mon bon Taulier avec un vélo .<br /> Mais à pied ? Te souviens tu de " Paris - Strasbourg " A PIED !<br /> Un p'tit tour sur wikipédia<br /> Paris Strasbourg à la marche 1926-1937 est une épreuve de marche de fond de plus de 500 km, qui s'effectuait à l'allure de marche rapide sportive ou de marche athlétique. Le départ de la course avait généralement lieu place de la République à Paris à la caserne de la garde Républicaine, et l'arrivée sur la place Kléber de Strasbourg, capitale alsacienne des provinces reconquises. <br /> Elle a été créée en 1926 à l'initiative d'Émile Anthoine, champion athlétique et dirigeant sportif. Cette compétition extrême, unique au monde, consistait à parcourir plus de 500 km en continu, de jour et de nuit sans repos ni étapes obligatoires. Les abandons furent nombreux. En 1926, malgré les 8 jours accordés alors, seule une partie des marcheurs arriveront à Strasbourg. Les premiers vainqueurs l'effectueront en un peu plus de 3 jours.<br /> <br /> L'épreuve mythique eut lieu dans le sens Paris Strasbourg de 1926 à 1937.<br /> <br /> Cette compétition de marche sans étape, était alors sur la distance, dans les années 1920 en tant que course extrême organisée annuellement, la première grande course pédestre de grand fond dûment contrôlée.<br /> <br /> Après une interruption de 11 ans de 1949 à 1951, l'épreuve qui dut faire face à l'hégémonie de l'automobile sur les routes et aux difficultés de régulation de la circulation perdit progressivement de son aura. Elle se transforma avec notamment l'instauration d'étapes de repos obligatoires, et eu lieu de Strasbourg à Paris puis transitoirement à nouveau vers Strasbourg. L'épreuve Paris Colmar à la marche lui succédera en 1981. <br /> Toujours partant ? Façon de parler...
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