Jeudi le soleil nous est tombé dessus, non pas comme la vérole sur le bas-clergé mais tel les feux de l’amour sur des corps attendant désespérément de quitter leur teinte blanc d’aspirine.
Les qui étaient restés à Paris se sont rués sur nos rares prairies, nos quais, pour s’offrir au dieu soleil. Et quand ça fait chaud ça fait soif !
Morne plaine pour les petits canons de vins nus, c’est le règne de la boutanche de notre petite GD proliférante et de la bière bien sûr.
Mais le lendemain du jeudi de l’Ascension c’était pont et « Tel est pris qui croyait prendre » je débarquais dans le quartier proche du bassin de la Villette pour l’arrosage des plants sous serre de l’association Veni Verdi par une amie.
Tâche accomplie par mon amie il faisait soif.
Les vertes prairies des Buttes-Chaumont nous tendaient les bras.
Mais allions-nous trouver un rosé bien frais pour étancher notre soif, à mi-pente, face à un soleil apaisé dans un ciel au bleu tendre ?
Comme la honte ne se boit pas je ne vous le dirai pas même si Émilie me charrie avec ma manie de vanner ce qui n’est qu’un prénom devenue une vieille marque.
Ce fut donc un Bandol Domaine de l’Olivette 2014 à 13€60à la bonne température. Le caviste nous la déboucha et l’enveloppa. Nous trouvâmes des «verres» au Franprix d’à côté.
Le moment était rare et je le savourais à sa juste valeur mais je rêvais désespérément à mon rosé chéri de Saint-Drézéry.
Oui, juré, craché, c’était décidé : j’allais installer une glaciaire sur le porte-bagages de mon fidèle destrier pour avoir en permanence au frais mon rosé favori.
Mais qu’est-ce donc que ce breuvage rare, quasi introuvable dans mon village de Paris ?
Un rosé dans un flacon austère, loin des fanfreluches légères des rosés pâles, chez la Catherine on ne fait dans les chichis on fait du vin.
Et demain ce Rosé de table, introuvable sauf chez un privilégié comme moi, sera vinifié dans un chai qui ferait blêmir un des nombreux néo-châtelains bordelais.
Pour l’occasion, Catherine, qui a un sens inné de la communication, pose devant son chai en ne manquant en affichant la couleur.
Voilà puisque je n’ai pas de secrets pour vous, que vous savez tout sur tout, le Rosé de Table de Catherine Bernard sise à Saint-Drézéry c’est ceci :
« Un vin rosé de pur Carignan par Smith Michel
D’abord une surprise toute visuelle : à en juger par son flacon de verre plutôt foncé, je m’attends à un rosé soutenu, de ceux qui vont manifestement à l’encontre de la mode venue de Provence et des tables chicos du golfe de Saint-Tropez où une autre fille, Régine Sumeire, dès les années 80, lançait son « Pétale de rose » aujourd’hui copié du nord au Midi.
« Mais voilà que dans le verre, le vin n’est point foncé. Il est aussi pâle que la carapace d’une crevette de Rosas mariée à une langoustine de printemps pêchée bien au large du port du Guilvinec. C’est un Vin de France millésimé 2012 issu d’un pressurage direct et doté d’un nez inattendu jouant sur la finesse. Très vineux en bouche au point que dans le noir on pourrait le prendre pour un rouge, il se propage avec tendresse et persistance offrant au passage quelques belles notes de coing, de grenade et de groseille. Pour moi, c’est un apéritif idéal à servir pas trop frappé sur de mini tartines de tapenades bien fournies en thym, mais c’est aussi un vin de poisson que l’on ouvrira sur une daurade toute nue cuite quelques minutes au four en fonction de son poids, poisson sur lequel, une fois dans l’assiette, on verserait quelques larmichettes d’une huile « picholinesque » à souhait, sans oublier quelques éclats de gros sel. »