« Pourquoi viens-tu si tard ? »
Je n’ai plus que mes yeux pour dire, te dire. Les mots me fuient. Que dire d’ailleurs face cet arpent de vie qui nous sépare à jamais. S’y adosser, capter ta lumière, m’en infuser. Quel grand bonheur ! Chance ultime de l’avoir croisé, de t’avoir croisé. De la douceur, rien que de la douceur, mon vieux cœur s’embrase toujours avec la même vigueur mais s’apaise dans l’océan de tes yeux. Dans la yourte de mon imaginaire tu vas et tu viens, je suis comblé. Ton prénom sonne comme une promesse, c'est mon secret, il sera bien gardé.
Je commence ma journée de vendredi par la lecture d’une Lettre d’amour à la France, pays que j’aime plus que jamais
J’ai toujours su que je t’aimais, d’un amour profond, sincère, presque ridicule tant je peux paraître fleur bleue en t’évoquant. Mais en entendant cette Marseillaise chantée par le peuple anglais à Wembley, j’ai compris que je brûlais d’amour pour toi, ma France, mon pays, ma patrie.
Tu m’évoques tant mon village natal perché sur une colline, où il fait toujours beau, où mes copains ont toujours dix ans et font du vélo avec insouciance sur des rues mal goudronnées, où mes ancêtres reposent, non loin de cette école communale où les dernières craies bruissent sur les ultimes tableaux en ardoise. Ma France, tu es cette Beauce d’où vient ma grand-mère, tu es cette campagne que mon grand-père traversait pour la rejoindre. Tu es cette lumière que mes arrières grands-parents ont certainement vu reluire à l’horizon, fuyant la Pologne, pendant la guerre.
Ma France, j’aime ton caractère, ta liberté, ton histoire, ta culture millénaire. Tu es ce pays d’humbles ouvriers dont je suis issu, un peuple fier, digne, qui a rêvé de communisme ; comme je suis descendant de travailleurs de la terre. Un mélange de gueulards et de taiseux, à ton image ma France : frondeuse et parfois frileuse.
Je m’enivre de tes parfums, des aubépines qui s’épanouissent parfois sauvagement le long d’un mur, de tes églises aux bancs qui grincent, de tes cafés où le monde se fait et se défait autour d’un ballon de blanc. J’ai toujours estimé que tu avais tout donné aux miens avec tes écoles, ton sens de la solidarité. Les droits, les devoirs, la santé. On vit quand même bien, en France. Et de Villon à Molière, en pensant par Hugo, Sartre, Debussy, Proust, Manet, Poussin, Lully, Rimbaud, ta richesse se révèle incommensurable, et ce sont ces milliers de génie qui à chaque catastrophe ressuscitent pour mieux redire à la face du monde combien tu es immortelle et jamais fatiguée de te relever.
Du Louvre aux sables de Cabourg, des terribles forêts de Verdun jusqu’aux ocres rochers de Provence, tu es un livre de poésie ouvert aux regards du monde. Être français, c’est avant tout aimer le Beau. Parce que tu as voulu être Athènes, Rome et Jérusalem, tu es devenue un peu des trois. Harmonieuse, glorieuse et lumineuse. A la fois jardin et palais, temple de la Raison et réceptacle du Sentiment. Tu es un pays devenu bijou.
lire l'intégralité en cliquant sur le titre.
Vous dites souvent que la visibilité actuelle de l’islam fait peur à l’identité française…
… et qu’elle est aussi nuisible à la spiritualité musulmane. Il faut en finir avec la bédouinisation de l’islam. Phagocyté par le wahhabisme saoudien, le salafisme consiste à bédouiniser l’islam avec des moyens technologiques particulièrement développés. C’est un retour à l’histoire pré-islamique mais certainement pas un retour à l’état de l’Islam. Cette visibilité identitariste n’a rien à voir avec un enracinement mystique ou spirituel, mais répond à une logique de minorités qui veulent se préserver en s’attachant aux écorces au lieu de s’attacher à l’esprit de la religion.
Que voulez-vous dire par écorce ?
Tout ce qui participe à l’islam folklorique de la visibilité à outrance. Le propre de la religion, c’est la discrétion, la modestie, le travail intérieur et non l’exhibition. Il faut changer complètement de paradigme. Notre "communauté" est très jeune, j’entends essentiellement formée par des jeunes gens issus de culture et de religion musulmane, qui vivent dans une certaine frustration : sociale, scolaire, etc. Ils compensent ce complexe d’infériorité par un complexe de défiance. C’est le propre de l’adolescence. Je me démarque par rapport à la famille. Je ne reconnais pas l’autorité, même religieuse. Je provoque. Je suis victime, donc j’existe. Et je greffe un discours religieux sur des pratiques qui ne devraient pas avoir beaucoup d’importance, comme le fameux foulard islamique. J’attends de voir ce qu’il y aura après le foulard, peut-être les cravates islamiques ? Les chaussures islamiques ? C’est n’importe quoi. Car enfin, que dit le Coran ? Au centre, il y a la pudeur. La pudeur fait partie de la foi. Mais le Prophète n’est pas venu sur terre pour donner des cours de couture. Les vêtements n’ont rien à voir avec la religion. Un voile n’est pas une kippa. Il n’y a pas d’objets cultuels dans l’islam. Il n’y a pas de symboles, pas de slogan. C’est une hérésie que d’introduire dans le culte les vêtements. Une fois encore, on mélange le principe éthique avec sa traduction vestimentaire. Dieu n’est pas un tailleur, ce n’est pas un styliste de mode. En vérité, on se cache pour mieux se montrer. Alors certes, l’apparence est conforme à la lettre du texte, mais l’intention n’est pas bonne. Ce qui est condamnable, c’est l’habit de l’orgueil, de l’arrogance et de l’ostentation.
La France en guerre ! Peut-être. Mais contre qui ou contre quoi ? Daech n’envoie pas des Syriens commettre des attentats en France pour dissuader le gouvernement français de le bombarder. Daech puise dans un réservoir de jeunes Français radicalisés qui, quoi qu’il arrive au Moyen-Orient, sont déjà entrés en dissidence et cherchent une cause, un label, un grand récit pour y apposer la signature sanglante de leur révolte personnelle. L’écrasement de Daech ne changera rien à cette révolte.
Le ralliement de ces jeunes à Daech est opportuniste : hier, ils étaient avec Al-Qaida, avant-hier (1995), ils se faisaient sous-traitants du GIA algérien ou pratiquaient, de la Bosnie à l’Afghanistan en passant par la Tchétchénie, leur petit nomadisme du djihad individuel (comme le « gang de Roubaix »). Et demain, ils se battront sous une autre bannière, à moins que la mort en action, l’âge ou la désillusion ne vident leurs rangs comme ce fut le cas de l’ultragauche des années 1970.
Quand Abou Hamza, un ancien rebelle syrien, a rejoint les rangs de Daech, il pensait adhérer à l’utopie islamiste qui attire les djihadistes du monde entier. Au lieu de ça, il eut comme supérieur un émir irakien et reçut ses ordres de mystérieux Irakiens. L’année dernière, après avoir contredit d’autres chefs lors d’une réunion, Abou Hamza a été arrêté sur l’ordre d’un Irakien masqué, présent dans la salle, qui avait écouté silencieusement en prenant des notes tout au long de la séance.
Abou Hamza n’a jamais découvert l’identité de ces Irakiens dissimulés sous des noms de code ou dont le nom n’avait tout simplement pas été révélé. En revanche, il sait que tous ces hommes étaient d’anciens officiers ayant servi sous le régime de Saddam Hussein, y compris l’homme masqué, un ancien agent des services de renseignements irakiens, qui travaille désormais pour les obscurs services de sécurité de Daech.