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21 septembre 2015 1 21 /09 /septembre /2015 08:00
En dévers et contre tout (19) « Pour entamer la conversation avec nos voisins de table, nous leur offrîmes du vin », une belle leçon de politique…
En dévers et contre tout (19) « Pour entamer la conversation avec nos voisins de table, nous leur offrîmes du vin », une belle leçon de politique…

Il est de bon ton, dans les sphères dirigeantes, de se référer au peuple. Mais que savent-ils, nos politiques, nos élites, de ce peuple ? L’écoutent-ils ? Sont-ils, ou se mettent-ils en position de l’écouter ? Le veulent-ils d’ailleurs ? L’entre soi est la règle, les entourages veillent, filtrent, les communicants tirent des plans, les déplacements ne sont souvent que des mises en scène pour faire des images. Le contact direct n’existe plus. Seuls les solliciteurs, les courtisans et les militants approchent d’un peu près nos « huiles ».

 

Dans son roman La princesse de Mantoue, Marie Ferranti, cite in extenso une lettre de celle-ci, Barbara de Brandebourg, à Maria son amie, où elle lui raconte l’escapade nocturne dans Mantoue, incognito, d’elle et de son époux Louis de Gonzague, seulement accompagnés de Francesco Rialoto, le capitaine des gardes de Louis et de Teresa sa cameriera.

 

« … le cœur battant, nous nous engouffrâmes dans cette pièce bruyante, enfumée, empuantie par la crasse.

 

Cette auberge est ouverte toute la nuit à tous les songe-creux de Mantoue, les mercenaires, mal montés, mal vêtus, les femmes jeunes et vieilles, dont certaines ont leurs enfants qui dorment sur les tables ou à leurs pieds, à même le sol. L’air est si corrompu que les yeux et la gorge me piquaient. Il fallut s’accoutumer à cette puanteur et à l’odeur âcre de la suie […]

 

Attablés, la princesse de Mantoue, au grand étonnement de son époux, jure.

 

« J’ai noté que ces mots me venaient parfois naturellement. Et bien ! crois-moi, ils apaisent la colère plus commodément que ceux que nous employons d’ordinaire. »

 

« À notre table, tout le monde était mêlé : jeunes et vieux, hommes et femmes. Au bout d’un quart d’heure, nous n’en étions plus étonnés. Trois grands gaillards me faisaient face et deux filles très jeunes qui étaient très gaies et, je crois, un peu ivres.

 

On nous apporta à boire et à manger : du ragoût de mouton et une soupe, le tout accompagné d’un mauvais vin. Nous bûmes et mangeâmes avec grand plaisir car cette longue course que nous avions faite nous avait ouvert l’appétit.

 

Pour entamer la conversation avec nos voisins de table, nous leur offrîmes du vin […]

 

« … La conversation s’engagea aussitôt et ne tarda pas à s’enflammer […]

 

La Princesse s’enhardit « … à mots couverts, mais fort compréhensibles, je ne privai pas de médire de Louis. Imagine son étonnement. Il manqua de s’étouffer. Un gros garçon, fort en gueule, intervint.

 

Et tous vidèrent leur sac sans retenue « … les jardins du château… sont à l’abandon. Et les rues n’en parlons pas. Elles empestent. Le soir c’est un vrai coupe-gorge. […] On peut le dire, on est toutes les nuits dehors. Il n’y a que les voleurs qui veillent, ça, on peut le dire, les soldats, ils dorment ! »

 

« Nous en restâmes bouche bée et laissâmes la conversation suivre son cours, acquiesçant de temps à autre, sans plus parler de rien. Le vin échauffait les esprits […]

 

« Que retira Louis de Gonzague de tout ceci ? Sans doute pas grand-chose du discours des deux ivrognes que Barbara rapporte avec une belle vivacité, mais une leçon politique, certainement. Barbara l’a compris, qui écrit : « Ce qui fit la plus forte impression sur Louis fut la liberté de parole de ces petites gens, comparé aux grimaces des seigneurs de la cour. Il y vit la nécessité de changer. Ce qu’il fit. »

 

« Plus d’un siècle plus tard, Mantoue était renommée pour être, selon Montaigne, qui la visita en 1580, « une des villes les plus propres et les plus policées d’Italie »

 

Lire RAPPELLE-TOI BARBARA par Angèle Paoli

 

« Ce récit de Marie Ferranti s’ouvre sur un portrait. Le portrait de Barbara de Brandebourg, princesse de Mantoue. Un portrait réalisé en 1470 par le peintre Mantegna pour la « Camera depicta » (Chambre des époux), et qui n’est pas vraiment du goût de la princesse, alors âgée de cinquante ans. Un portrait sans concession qui révèle à Barbara tout ce que le peintre a saisi d’elle. Toutes les facettes d’un visage « aux yeux las et jaunes, étirés vers les tempes comme ceux des chats », et d’une âme dure. Implacable parfois. »

 

C'est un roman où l'maginaire de Marie Ferranti tisse une toile dont les personnages ont été peints dans le milieu du XVe siècle italien. Tout cela est un jeu, à vous de lire La Princesse de Mantoue pour en découvrir les règles. Je suis sûr que vous vous y laisserai prendre. Bonne lecture.

En dévers et contre tout (19) « Pour entamer la conversation avec nos voisins de table, nous leur offrîmes du vin », une belle leçon de politique…
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