L’appropriation par les Languedociens de la dénomination « Sud de France », pour en faire une marque, dite ombrelle, m’a toujours étonné car dans l’imaginaire de beaucoup le vrai Sud est ailleurs sur les plages de la mythique « Côte d’Azur » on l’on descendait par la célèbre Nationale 7. Et puis, n’étant pas à un paradoxe près, les Français attribuaient au Sud-Ouest un goût de Sud, sans doute pour son « bien manger » et sa douceur de vivre. Ironie de l’histoire le Languedoc-Roussillon va se fondre dans le Midi-Pyrénées, la capitale régionale migrer à Toulouse, et il n’est pas sûr que la marque « Sud de France » couvre ce vaste territoire. Ainsi va la France des clochers !
« Le Sud » dernier grand succès de Nino Ferrer dandy hanté par le soleil noir de la mélancolie qui nous quittait un 13 août de 1998, à deux jours de ses 64 ans.
Il a choisi sa fin et le lieu de sa fin : un champ de blé fraîchement moissonné, un bouquet d'arbres qu'il avait peint. Il a visé le cœur, à quelques kilomètres de là où il vivait le domaine de la Taillade à Saint-Cyprien. Il a laissé une lettre pour les siens. Secret absolu, irréductible à tout, détermination implacable.
L’argent, les femmes, l'amitié de ses pairs, l'admiration d'une génération, Nino connaissait mais, en lui, par-delà « son allure solaire, son rayonnement de grand blond aux yeux clairs, athlétique et fin, délié, par-delà son goût de la séduction et du partage, du rire, de la démesure, un désespoir profond, quelque chose de ténébreux et d'inconsolé. Jamais il ne s’est reconnu : « ce ne sont jamais les chansons qu'il aimait le plus qui marchaient, et le plus souvent les albums les plus élaborés étaient écrasés par un titre qui triomphait en 45 tours. »
« C'est exactement ce qui advint avec Le Sud, si belle composition, si délicate épiphanie d'une vie heureuse et simple. »
« Le Sud va triompher en 1975 et se vendre à plus d'un million d'exemplaires. «Elle fut immédiatement considérée comme un classique», dit Christophe Conte, coauteur avec Joseph Ghosn d'une biographie précise (Éditions No 1, 2005).
« En 1973, lorsque Nino Ferrer la compose, il ne vit pas encore dans le Lot. Mais dans une superbe maison de Rueil-Malmaison, une demeure d'apparence coloniale, La Martinière ! Une maison du Vieux Sud à l'américaine. Ce qui convient parfaitement à ses rêves et à sa formation première. Sa musique, c'est le jazz, qu'il a appris tout seul, alors qu'il étudiait à la Sorbonne l'ethnographie, l'archéologie, la préhistoire… parce qu'il veut devenir… explorateur! »
« Pour enregistrer cette pépite, le chanteur s’est entouré du guitariste irlandais Micky Finn, un vieux complice dans lequel il a trouvé un alter ego, et de Leggs, groupe d’Anglais qui lui a amené dès le début des seventies la culture du rock. « On avait de très bons rapports avec Gilbert Montagné et Nino avait décidé de travailler avec ses musiciens, se rappelle Kinou Ferrari, l’épouse de Nino Ferrer. Mais ce qui a bien fonctionné pour Gilbert n’a pas du tout marché pour Nino. Au bout de quinze jours, les choses ne venaient pas. On a donc rappelé les Leggs et dès lors, tout est allé très vite : en un mois et demi, l’affaire était pliée. »
« Dans une interview d’août 1979, le chanteur indique avoir choisi Blanat, ce "vieux château isolé au bout du monde" parce que "c’est la planète Mars d’où l’on voit très bien ce qui se passe sur terre". "On peut donc l’oublier complètement et se plonger dans la musique", précise-t-il. C’est bien cette aventure qui a mené Nino Ferrer dans le sud de la France. C’est à deux heures de route de Blanat, dans une grande bâtisse du XVIIe siècle situé au lieu-dit La Taillade, qu’il vivra sa retraite à la campagne de la fin des années 70 jusqu’à son suicide, le 13 août 1998. »
« Nous avons amené avec nous notre bulle. Nino continuait d’enregistrer ses albums et de créer ici »
Savoir tirer sa révérence à temps, en voilà un vrai défi pour une vie !
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