Levé tôt ma cure de café commençait. C’était mon lien avec elle, le seul. Dès 10 heures le soleil prenait possession du balcon pour le balayer à 180° de ses ardeurs brutales. Moi aussi, je m’y installais pour lire, me saouler de lecture jusqu’à en avoir mal aux yeux. À mes pieds, à l’ombre de la table, le chat, en dépit de son manteau de fourrure, dormait comme un bienheureux. Dans ma bogue protectrice rien ne pourrait m’atteindre, aucune trace de mon combat intérieur ne transpirerait, du moins je m’efforçais de le penser. Et puis mon regard s’accrochait à son petit plant de tomate qui s’étiolait, bouffé sans doute par la chlorose. Je me levais pour l’arroser. Le devenir de cette petite pousse fragile était entre mes mains. Je doutais, impuissant, et soudain une grande lassitude me figeait. Je me laissais aller à penser qu’un malheur ne vient jamais seul… et, en l’espèce, c’était le cas. N’avoir peu ou pas de prises sur mon devenir me clouait au sol : envie de rien… Pourquoi toujours se battre ? Résister ! Donner le change ! Alors, baisser la garde, laisser tout tomber, fiche le camp. Et puis je m’étais saisi du sécateur et, délicatement, je débarrassais le plant des gîts jaunis. Tient il avait de nouveau belle allure, allait-il survivre, je n’en savais fichtre rien mais je cessais de m’appesantir sur moi-même.
« Un paysan chinois perdit un jour son cheval.
- Quel malheur ! dit son voisin.
- Qu’en savez-vous ? répondit le paysan.
Et en effet, le fils aîné ramena outre le cheval perdu trois chevaux sauvages.
Le voisin dit :
- Quel bonheur !
- Qu’en savez-vous ? répliqua le paysan.
Et en effet, le fils aîné se brisa une jambe en dressant l’un des chevaux sauvages.
Le voisin dit alors :
- Quel malheur !
- Qu’en savez-vous ? rétorqua le paysan.
Et en effet des soldats vinrent dans le village, afin de recruter parmi les jeunes gens et le fils aîné, alité, fut épargné… »
Et Ferré qui chantait :
Que sont mes amis devenus/Que j’avais de si près tenus/ Et tant aimés/Ils ont été trop clairsemés/Je crois le vent les a ôtés/L’amour est morte/Le mal ne sait pas seul venir/Tout ce qui m’était à venir/M’est advenu…
Que du silence… C’est lourd le silence…
Je décidais d’aller déjeuner chez mon ami Jancou.
Au bar, un couple, elle journaliste, lui membre d’un cabinet ministériel, elle questionneuse, lui désabusé à propos de Hollande passant sur Canal :
« On est troisième aux départementales, on a perdu les campagnes et les usines, il n’y a plus que les bobos des centres-ville qui votent pour nous, mais ce n’est pas grave, on fait une émission qui s’adresse uniquement aux bobos des centres-ville, qui plus est un week-end de départ de vacances de printemps… »
Je m’enfile des canons pour ne plus être saisi par la tentation de Venise. Juppé vient de commettre son premier faux-pas, en proposant Virginie Calmels son adjointe à l'économie à la mairie de Bordeaux comme tête de liste aux régionales, une Thatcher à la française, classique et un peu raide. Le petit Sarko, qui flaire toujours les mauvais coups, s’est empressé de donner son feu vert. Certes l'ancienne papesse de la téléréalité, patronne d’Endemol est une guerrière mais elle va devoir quitter l’ombre, prendre des coups, être la candidate Juppé et, si défaite il y a, comme ironise un second couteau de Sarko « La région étant jugée imprenable à la gauche, la défaite de Calmels pourra être mise sur le compte de Juppé ! » Mais c’était sans compter sur la bêtise du roquet de Meaux qui a soulevé lors de la CNI un problème de taille quant à l'éventuelle investiture de la juppéiste: celle-ci ne possèderait pas de carte d'adhérente au parti et l’élégance de Guaino qui lui s’est aussi élevé contre l'investiture de l'ancienne patronne d'Endemol, passée par Canal +, à qui il reproche de «venir de la téléréalité». «On ne va pas se retrouver avec Loana dans les rues», a-t-il lancé. Les couteaux sont dégainés : Gilles Boyer, collaborateur de Juppé, a réagi sur Twitter estimant que «s'ils sont exacts, les propos d'Henri Guaino sont indignes de lui». Riton l’arrogant, dans le même temps, a persisté et signé auprès du Lab, expliquant ne pas vouloir «dans les cantons ruraux, donner l'argument aux adversaires : « c'est elle qui a invité Loana dans la piscine. On choisit un candidat qui n'a pas d'expérience politique, pas de notoriété, adjoint au maire de Bordeaux, du milieu de la téléréalité... ce ne sont pas les meilleurs atouts», a-t-il ainsi regretté, dans une charge à peine voilée à l'adresse d'Alain Juppé.
Mais tout cela ne sont que broutilles, le pompon de l’abjection doit être décerné au Fou du Puy, le Wauquiez qui, a déclaré à l’AFP, à propos de l’odieux meurtre de la petite fille de Calais, en ciblant la Garde des Sceaux, qualifiant sa politique de «folie» : «Tout d’abord, il faut faire la lumière sur cette affaire. Il y a trop de questions sans réponse. Y a-t-il eu une défaillance majeure dans l’exécution de la peine ? Pourquoi quelqu’un qui devait être reconduit à la frontière et expulsé ne l’a pas été ? Nous demandons que l’inspection générale des services judiciaires soit saisie. Il faut savoir et comprendre». Cela pose à l’évidence toute la question de la politique de remise de peine et de réductions automatiques de Mme (Christiane) Taubira», ministre de la Justice. Par sa circulaire, la garde des Sceaux a incité à renforcer ces allégements. Ce prédateur en a-t-il bénéficié ? De toute évidence, la politique du gouvernement est à rebours de nos besoins. Mme Taubira fait du désarmement pénal, les Français attendent du réarmement pénal.»
Et pendant ce temps-là Sarko et les Sarkozystes plastronnent « En acceptant sans sourciller les conditions de la primaire, ils assurent avoir pris le maire de Bordeaux et le député de Paris à leur propre piège. L'avance prise par Sarko est énorme, juge un cadre de l'UMP qui se pose même la question de l'intérêt... du vote interne récemment adopté. »
Pour les futurs Républicains le vote est toujours péché mortel, rien ne vaut une élection par acclamation !
« En choisissant le nom « les Républicains », Nicolas Sarkozy a vu juste. En prétendant dissiper un méchant parfum d’affaires, le voilà qui réveille de vieux relents de scandales. L’anecdote est amusante. Mais cruelle. Karl Marx avait raison : l’Histoire se répète toujours, la première fois en tragédie, la seconde en farce. »