Les éditions ACTES SUD viennent de me faire parvenir un très bel ouvrage « Le Monastère de Solan » Une aventure agroécologique de Thierry Delahaye. Les sœurs de l’abbaye orthodoxe de Solan je les ai découvertes voici plus de deux ans, alors que deux d’entre elles vendaient leur vin, au parc de Floral de Vincennes au salon Marjolaine. J’ai écrit une chronique sur l’un de leur vin mais je ne la retrouve plus dans mon capharnaüm. Peu importe car ce qui compte c’est que depuis 1992 elles ont entrepris, sur les terres d’un ancien domaine, de reconstituer les sols, de gérer le circuit de l’eau, de réaménager la forêt, de mettre en œuvre de nouvelles pratiques culturales. Ce livre retrace cette aventure « agroécologique » sur cette mosaïque de parcelles où alternent les terres cultivées et les zones sauvages, vignes et forêts, jardin potager et vergers. « Ainsi, préserver, voire enrichir la biodiversité du domaine permet d’obtenir des produits de qualité (vin, fruits, légumes...) mais témoigne aussi et avant tout d’une exigence de respect de la vie. De même, parvenir à une autosuffisance alimentaire et énergétique relève d’une préoccupation d’ordre vivrier, mais reflète aussi une option fondamentale de sobriété et de rejet d’une logique productiviste. »
« Pierre Rabhi avait conseillé aux sœurs de valoriser l’existant : « Allez à la rencontre de votre terre ! »Seule la vigne était susceptible de fournir un revenu monétaire. Le vin resterait donc le moteur de l’activité économique du domaine. Les diverses études, réunions et consultations des années 199_-2000 ont débouché sur la nécessité d’aménager le terrain et de professionnaliser la vinification et le commercialisation. En 1999, une grande étape est franchie, non sans péripéties : la totalité de la récolte est vinifiée au monastère. À partir de 2001, un programme de plantation est conduit, pour ramener la superficie viticole à huit hectares, après l’arrachage de trois hectares eb 1995. Et entre 2003 et 2005, un patient labeur de revivification de vieilles vignes est réalisé, par le drainage des parcelles, le brossage des ceps et la lutte contre les maladies. « Tout cela pour faire un vin qui soit en cohérence avec notre terre... Ce sera comme en Bourgogne, un vin de terroir. » Les 20 pages du chapitre : Du Vignoble au chai sont très intéressantes mais je ne vais pas tenter d’en faire un condensé car ce serait faire injure à la plume de l’auteur. Pour vous donner un aperçu j’ai choisi de vous reproduire un extrait de la partie concernant : La conduite de la vigne.
« Le vignoble est donc cultivé en agriculture biologique depuis 1992, sans herbicides ni pesticides de synthèse. Au début les sœurs ont tenté la biodynamie. Selon cette méthode, la plante est capable de réagir aux interactions avec son environnement et de réguler sa croissance en constituant un système équilibré. Quand l’écosystème est en déséquilibre, l’intervention humaine vise à sa dynamisation en suivant des règles assez contraignantes (dosages, calendrier, cycles lunaires et planétaires, préparats...). « Un jeune conseiller fut embauché, qui venait une fois par semaine faire le tour des terres et nous dire ce qu’il fallait entreprendre. Dynamisations, bouse de corne, 500 et 501, jours fruits ou feuilles, nous voilà propulsées dans un monde totalement nouveau. Le petit-fils des anciens propriétaires suivait les instructions, un peu étonné de nos méthodes, et parfois, il faut le dire, rechignant aux contraintes horaires imposées par le calendrier biodynamique. En 1993, 80% de la récolte fut ravagés par le mildiou, et nous comprîmes à nos dépens ce que veut dire le mot « urgence » quand il s’agit de traitement antifongique de prévention... Le vignoble était alors en reconversion et le raisin continuait à partir vers la cave coopérative du village, avec les difficultés économiques que l’on peut imaginer. En 1995, notre jeune conseiller partit vers d’autres horizons, et la rencontre providentielle d’un biodynamiste à la retraite nous fit bénéficier de sa longue expérience dans ce mode de culture. Toutefois, peu à peu, nous en vînmes à remettre en question le choix strict de la biodynamie. Les contraintes humaines et économiques qui en découlaient étaient au-dessus de nos possibilités et la philosophie sous-jacente n’était pas non plus la nôtre. Par souci de simplicité, nous en restâmes à la certification en agriculture biologique. »
Bien évidemment le projet des sœurs de Solan ne se limite pas à la vigne et au vin, si vous êtes intéressés par leur aventure faites l’acquisition de ce beau livre 29€. « Nous n’étions pas venues faire de l’agriculture mais fonder un monastère... » quand elles sont arrivées du Vercors en juillet 1992 « les bâtiments n’étaient pas habitables, il fallait refaire les toits, transformer l’écurie, la bergerie, les granges en pièces d’habitation, installer le chauffage et l’assainissement » mais elles avaient avec leurs paquets, leurs deux camions de déménagement, « leur bonne humeur et leur confiance en Dieu. » Si vous êtes intéressés par leurs produits 3 possibilités :
- y aller Monastère de Solan 30330 La Bastide d’Engras (le domaine est situé sur la D144 entre Saint-Laurent-la-Vernède et Cavillargues)
Le monastère et le cellier sont ouverts du mardi au dimanche, de 11 heures à 17 heures.
- aller sur le site internet www.monastèredesolan
- les retrouver sur des salons locaux ou régionaux tels Marjolaine à Paris ou le salon Primevère à Lyon par exemple.
« Au matin nous nous lèverons pour aller dans les vignobles. Nous verrons si la vigne bourgeonne, si les fleurs annoncent les fruits, si les grenadiers sont en fleurs... »
Cantiques des Cantiques VII, 12