Guiseppe Conte arrive à Saint-Nazaire de sa Ligurie natale, où il est né en 1945.
« À l’époque, le voyage en train de Vintimille à Nantes était long comme la queue d’une comète. De nuit, on traversait l’univers. De nuit, on traversait l’univers. La France, d’est en ouest et du sud au nord. Je suis parti au coucher du soleil, j’ai vu venir la nuit, dans la nuit filer toutes les lumières froides des gares, toutes les ombres des villes que j’ai connues seulement en rêve en ce temps-là, Toulouse, Bordeaux, se lever l’aube le lendemain, enfin, à midi passé, j’étais à Nantes. De la Méditerranée toute bleue et dorée, j’étais arrivé dans l’estuaire de la Loire, entre brouillards et marées. »
Giuseppe Conte débarqua donc à Saint-Nazaire lorsque « l’après-midi tirait à sa fin ». Il avait hâte de se retrouver dans le nouveau gîte où il allait passer « les deux prochains mois de son existence. » Mais pour ceux qui l’accueillent, qui lui prodiguent « leur euphorie et leur amitié, tels de vieux amis. Pas question d’aller à la maison. » Pour commencer ils le conduisent « dans une cave à vin ouverte depuis peu ». Guiseppe jure qu’il n’est « pas un homme qui fréquente les musées. Dès que j’entre dans une ville étrangère, c’est généralement une place, une promenade au bord de la mer, une cathédrale ou une mosquée, un palais célèbre qui me sert de point d’orientation. » Mais cette fois-là, contre toutes mes habitudes, mon premier point d’orientation à été un endroit où l’on goûte le vin. »
Alors, il se souvient bien de sa gêne, lui « modeste buveur, au milieu de gens qui arrivaient parfois à faire quarante dégustations de vins différents. ». Dépaysé, fatigué par le poids du voyage, avec ses bagages en mains, Giuseppe va se faire « contaminer » par la compagnie de « buveurs inconnus, presque extasiés devant leurs verres dans la cave. »
Le vin va l’attirer lui le « modeste buveur » car il va enfin comprendre que « le vin est bien plus que quelque chose qu’on boit, c’est une chose sur laquelle on peut raisonner, travailler, innover, écrire, débattre, faire de la recherche : un fait culturel, autrement dit, un segment capital de nos traditions anciennes et sacrées. » et de citer le vers de Baudelaire : Un soir, l’âme du vin chantait dans les bouteilles… « Le vin est la réalité matérielle la plus haute qu’un terroir, avec ses collines, ses arbres, ses pluies, ses coteaux ensoleillés, son herbe, ses cours d’eau, puisse exprimer. Le vin est la réalité symbolique la plus proche de l’homme, la plus à portée de main et à même de réchauffer son âme. »
« Inévitablement, le premier vin de Loire que j’ai goûté, c’est le Muscadet. Ça été le coup de foudre, d’abord pour son nom : quand on le prononce en italien, il a un son aventureux de bois, de muscs, d’écumes et de brouillards, il fait penser, à moi, en tout cas, à un mousse et à son spadassin.
Vin ultrasec et nerveux, neutre, marin, j’ai appris à le boire avec les langoustines. L faut préciser que venant d’Italie, où les langoustes et les langoustines étaient et sont encore des synonymes un peu vulgaires de luxe étalés, j’ai été agréablement surpris de découvrir qu’en Bretagne, même le restaurant le plus simple peut vous glisser sous le nez une assiette débordante de langoustines à un prix tout à fait abordable, dans une atmosphère chaude et populaire. Comme elles sont belles ces assiettes !, pinces et carapaces se confondaient en un monticule rose pâle qui prenait à mes yeux l’aspect d’une inflorescence sous-marine. Et à côté, le verre de Muscadet, avec son coloris, pâle, sobre, pourtant tout frais de jeunesse. Son acidité ne m’a jamais donné des brûlures d’estomac. C’est une acidité qui a un goût d’algues et de ressac. De salin, le vent et de marée haute. Pour moi, un Muscadet mis en bouteille à Saint-Fiacre est encore aujourd’hui, après toutes ces années, un vin qui apporte la joie et donne des ailes à l’imagination. Il alterne sur la table avec u Crémant de Loire, sans prétention mais parfait, avec son équilibre évoquant le goût du fruit sec et la vivacité du fleuve qui coule. »
Extrait de De l'autre côté du vin éditions meet 15 euros.link
Giuseppe Conte est « Diplômé en Lettres de l'Università Statale de Milan, avec une thèse sur l'esthétique, Giuseppe collabore à diverses revues littéraires. Assistant à l'université, il enseigne l'Esthétique à Milan et la Littérature italienne à Turin, mais abandonne l'enseignement au profit de l'écriture. En 1972, paraît un essai 'La Metafora barocca' suivi de 'Terre del mito' (1991, 'Terre des mythes', 1994). Conte, considéré comme une des voix les plus originales de la nouvelle génération de poètes italiens et passionné de mythologie, est l'inspirateur du Mitomodernismo, courant inauguré en 1995 à Milan qui œuvre à la réintroduction du mythe dans la littérature et l'art contemporains. »
« À la fois poète, essayiste et romancier, il a reçu le prix Hemingway en 2002. Son dernier roman L’homme qui voulait tuer Shelley a paru chez Phébus en 2008. Giuseppe Conte est aussi le traducteur de William Blake, P.B. Shelley ou Walt Whitman. Dans la collection Les Bilingues : Le manuscrit de Saint-Nazaire (meet, 1989) et sa pièce de théâtre Le roi Arthur et le sans-logis (meet, 1995). Il a également publié à la meet : Le projet littéraire et sa traduction, collectif, meet 1996 Les jours du nuage, revue meet n°1 Trieste / Buenos Aires, meet 1997, De Saumur à Angers, Loire & Ocean, meet 2006, Milan / 65 recueil meeting Avoir vingt ans en édition bilingue. Il a longtemps vécu à Nice et vit aujourd’hui à San Remo. »
Comme prévu pour remercier Giuseppe Conte : un domaine celui d’Aurore et de Véronique Günther-Chéreau, au Château du Coing à Saint-Fiacre-sur-Maine, 45 hectares de vignes du domaine. « Un bon moment déjà que Günther-Chéreau mère s'applique avec méthode (et une bonne dose de courage!) à démontrer que le muscadet est bien plus qu'un roturier sans noblesse. C'est sa fille Aurore, diplôme d'œnologie en poche, qui assure désormais, avec le millésime 2011, les destinées de la maison à Saint-Fiacre et un vin »
« Ce Muscadet Sèvre et Maine sur lie, provient d’un château typique du Val de Loire, édifié sous Louis XIII sur la commune de Saint Fiacre sur Maine.
Le melon de Bourgogne évolue sur un sol argilo-schisteux de gneiss à deux micats et de grenat. Après la récolte et la presse des raisins, le vin est vinifié sur lie.
Après la fermentation alcoolique sur lie, le vin repose sur sa lie tout l’hiver jusqu’à sa mise en bouteille fin mars. Jamais soutiré, il permet la conservation d’une faible quantité de gaz carbonique qui lui donnera un léger perlant. Recherché pour son côté jeune, vif et sec, il présente une belle robe dorée. Son nez s’ouvre sur des arômes d’agrumes et de fleurs blanches. La bouche est douce et fruitée. Il s’accommodera à merveille avec des viandes blanches ou des crustacés. » L’avis du vin.