Il est des jours où je me dis : tu leur prends vraiment trop le chou à tes fidèles lecteurs, trop de mots Berthomeau, soit zen et tais-toi ! Alors en ces temps où le suffixe -itude s’accole à tort et à travers, feu Maurice Druon ne déclarait-il pas à propos de la « bravitude » chère à la « madone du PC », Poitou-Charentes pour les non-initiés, « Cette « bravitude » n’a donc rien qui doive nous surprendre. Elle nous conduit à la « nullitude » je ne tomberai ni dans l’ « excusitude » elle aussi très en vogue ces temps-ci, ni dans la « bienvitude » qui friserait la « mochitude » linguistique. La période est à l’incertitude mais, pour autant, ne tombons pas dans une certaine forme d’ingratitude en jetant le bébé avec l’eau du bain. Amarrons-nous, autant que faire ce peu, « au bon côté de la vie » et, en ce 1ier Mai, où l’on célèbre le Travail, par une journée de repos quasi universelle, soyons les premiers à célébrer « la méridienne attitude ».
Qu’est-ce donc « la méridienne attitude » ?
En Anjou, dans l’Anjou cher à Patrick de la Chaudefonds sur Layon, c’est « le repos de midi, la sieste après le repas et avant la reprise du travail « à chaque fois qu’il faisait mérienne, c’était la même chose… […] il rêvait » Étienne Pérochon, Nène voir ma chronique de samedi dernier La dictée du samedi et ses questions. http://www.berthomeau.com/article-28765134.html . Dans le Vendômois c’est la mérienne et dans ma Vendée profonde : la mariénée sans doute parce que dans l’Aunis tout proche mérienner se dit « des brebis qui, à midi, se serrent toutes ensemble, la tête de l’une sous le ventre de l’autre, pour sommeiller, un peu à couvert du soleil » (in les mots du passé de Marcel Larchiver).
Dans son opus « L’art difficile de ne presque rien faire » chez Denoël, Denis Grozdanovitch, qui vit entre Paris et la Nièvre, écrit à propos de la sieste méridienne : « Le moment préféré de mes journées d’été demeure celui où, après le repas de midi, je m’achemine tranquillement jusqu’à notre ponton au bord de la rivière, sous le grand marronnier où j’ai installé mon hamac. Je m’y installe alors confortablement, un gros livre de philosophie (de préférence bien abstrus) à la main, et la lecture distraite d’une dizaine de ligne suffit amplement, en général, à me faire glisser dans ce que j’appellerais un sommeil de surface – très différent en cela de la profonde et souvent angoissante plongée nocturne – au cours duquel ma conscience, engourdie par une sorte d’agréable hypnose, continue d’enregistrer avec une sourde volupté le bruissement de la brise dans les feuillages, les dialogues entrecroisés et compliqués des oiseaux , le doux ronronnement du nid de guêpes dans l’aulne voisin et même le subtil friselis du courant le long des berges.
Je goûte alors – plaisir de la vraie vacance – au luxe suprême du demi-sommeil et de la demi-conscience qui sont les meilleures voies pour rejoindre ce fameux « cours des choses » si cher aux taoïstes de l’ancienne Chine, lesquels aimaient précisément à répéter que pour bien vivre il valait mieux ne vivre qu’à demi.
L’auteur donne ensuite la définition par le Littré du mot « dormition » qui est un terme ecclésiastique, mais comme il a trait au 15 août vous attendrez sauf à ce que notre « madone du PC » lance la « dormitude » Si vous ne vous êtes déjà pas endormi dès la 10ième ligne de cette chronique, sachez que mon Pépé Louis « faisait ses pâques » mais ne portait pas son éthique paysanne et vigneronne à la boutonnière mais qui ne connaissait rien d’autre que le travail, aux beaux jours, s’offrait tous les jours sa petite mariénée à l’ombre du pailler. Enfin, pour préparer votre mérienne je vous propose d’accompagner votre déjeuner d’Effusion, un vin d’Anjou d’un grand taoïste : Patrick Beaudouin. Pour la beauté de votre mérienne je l’ai photographié devant : « Une BOIRE à Saint-Rémy-La Varenne en Anjou »in Loire Sauvage de Louis-Marie Préau et Philippe Huet éditions Hesse.