Dimanche dernier même si ce ne fut pas le tsunami annoncé par les sondages, ça ressemblait tout de même à un raz-de-marée bleu. Mon regard s’est alors porté sur la vague rose de 1981, aboutissement de la stratégie de François Mitterrand pour constater, sans regrets, son faire-part de décès.
Mitterrand avait mis 26 ans, Macron tout juste une petite année pour faire imploser le PS d’Epinay.
Au tout début de juillet 1981, le second tour des législatives ayant eu lieu le 21 juin 1981, à la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale par le président de la République François Mitterrand le 22 mai 1981, 333 députés de la Majorité Présidentielle (PS, PCF, MRG, Divers gauche) sur un total de 491 sièges, concédant 158 députés à la Droite (RPR, UDF et divers droite).
Un vrai raz de marée rose : 266 députés PS, la majorité absolue, le RPR de Chirac n’avait que 85 sièges. La première alternance de gauche sous la Ve République et le 2e gouvernement Mauroy accueillait 4 Ministres communistes. Un véritable séisme pour l pays même si les chars russes s’étaient abstenus d’envahir la Place de la Concorde.
Votre serviteur, juché sur son destrier hollandais Grand Batavus, se pointait dès le matin au guichet du porche qui dessert l’Hôtel de Lassay, le 128 rue de l’Université, pour prendre ses fonctions de conseiller technique du Président de l’Assemblée Nationale, fraîchement élu le 02/07/1981.
Les gardes du Palais étonnés de me voir perché sur un destrier m’indiquèrent courtoisement que je devais en descendre car le règlement de l’Assemblée ne prévoyait pas de circuler vélocypédiquement sur l’allée impeccablement gravillonnée qui menait à l’Hôtel de Lassay. Ce fut donc à pied que je me rendis jusqu’au pied de l’escalier. Là, un problème se posa : où allais-je garer mon fier destrier ? Était-ce prévu par le règlement de l’Assemblée ? Ignorant que j’étais je le montai sur sa béquille un peu à l’écart.
Je montai les marches quatre à quatre, à la Chaban (l’ex-locataire de l’Hôtel de Lassay), un huissier à chaîne jovial m’ouvrit la porte, un basque au nom imprononçable (par la suite je sus que tous les huissiers de la Présidence étaient basques), il s’enquit poliment de mon pedigree avant de me confier à l’un de ses collègues qui m’accompagna dans l’escalier jusqu’à l’antichambre du bureau du Président.
La suite n’a pas beaucoup d’importance sauf que dès le lendemain, muni d’un papier signé du chef de cabinet, Georges Morin, je pus chevaucher mon fier destrier sur l’allée menant à l’Hôtel de Lassay. Cette première entaille au sacro-saint règlement me valut la reconnaissance éternelle d’un jeune administrateur de l’AN qui pratiquait comme moi le vélo.
L’ambiance était lourde dans les couloirs comme dans l’hémicycle, les battus tiraient la gueule, nous étions illégitimes. À la buvette c’était un peu moins chaud, avec l’ami Guy Carcassonne, en mangeant des macarons, nous établissions de nouveaux ponts. Et puis le cabinet du Président avait de la gueule avec le sémillant Frédéric Saint-Geours, le très élégant Gérard de Senneville, le conspirateur Pierre Denizet et le très disert Jean-Jacques Mauriat qui deviendra le beau-père de ma chère fille. À propos de filles, y’en avait quand même 2 avec nous.
Comme je suis très conservateur j’ai décidé ce matin de vous offrir en legs
Le Tableau Figuratif de l’assemblée Nationale pour la septième Législature – Elections des 14 et 21 juin 1981 indiquant avec le plus d’exactitude possible la place qu’occupe habituellement chacun de ses Membres
D’après une gravure de la Bibliothèque Nationale.
Le tableau était à la cave, la vitre recouvrant la gravure s’est cassée les couleurs sont quelque peu passée : le rose a viré au pâle, les communistes sont jaune, les RPR sont vert foncé et les UDF vert pâle, ils sont mélangés dans les travées.
Ce tableau me fut offert à mon départ lorsque je rejoignis le cabinet de Michel Rocard tout frais nommé Ministre de l’Agriculture.
Je ne sais si la tradition du Tableau Figuratif se perpétue, si quelqu’un le sait il serait aimable à lui de me le dire.
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